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Whisky, cigares et bon goût. Ou pas.
de Drayker

                   



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[Ecriture] Pourquoi Mulan, Star Wars et l'Odyssée racontent la même chose (et pourquoi ça marche)
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Bonsoir à tous ! (Je crois que je viens de franchir un pas dans les titres putaclic.)

Vu que le précédent article a bien plu, j’ai décidé de rempiler avec un sujet qui m’a pas mal fait cogiter : la construction d’une histoire. A l'heure de la sortie du nouvel épisode de l'une des sagas les plus populaires de tous les temps, et à l'heure de la guerre ouverte que les fans ont déclarée à Disney, je me suis dis que ça pourrait être intéressant de se pencher là-dessus.

Vous avez lu le titre (j’espère), vous avez donc une petite idée de quoi on va parler ici : de scénario (et d'Histoire un peu, aussi). Et plus particulièrement : comment construire une histoire qui fonctionne ?

Mais avant de pouvoir répondre à cette question, il faut bien poser le problème. Bah oui. Parce que pour savoir comment construire une histoire qui marche, il faut déjà savoir ce qui fait qu’une histoire marche, ce qu’elle doit contenir pour satisfaire le lecteur. On va donc devoir s’attaquer à une autre problématique en premier lieu :

Pourquoi est-ce qu’on se raconte des histoires ?


Si j’étais un lycéen en panne d’inspi pour l’intro de sa dissertation, j’aurai probablement écrit un truc du genre :

Depuis la nuit du temps, l’Homme s’est toujours raconté des histoires.

… Bon, pour le coup, ça aurait effectivement été à-propos. Mais je ne suis pas un lycéen en panne d’inspi, alors je vais vous faire faire un petit détour. Parce que quand on y réfléchit, c’est plutôt étrange, non ? Pourquoi est-ce qu’on se raconte des histoires ? Pourquoi est-ce qu’on perd du temps à s’intéresser à des aventures fictives ?

Vous et moi, on va mourir un jour. Si si. C’est vrai. Même que c’est plutôt contraignant, vous en conviendrez. Pourquoi ? Et bien notamment parce que ça nous donne un temps assez limité pour apprendre.

Bah oui. Dans la vie, il n’y a pas mille moyens d’apprendre : il faut vivre, il faut expérimenter les situations pour en retirer des enseignements. Sauf que nos existences sont bien courtes, et que si l’on veut apprendre un maximum de choses, on a tout intérêt à se bouger les fesses.

C’est là qu’interviennent les histoires. C’est quoi, une histoire ? C’est un truc avec un début, un milieu et une fin.

Voilà c’est tout, j’espère que cet article vous aura été utile !

… En vrai, j’étais plutôt sérieux. Toute histoire se compose de trois actes : le héros dans sa vie ordinaire (le début), puis PAF, une merde lui tombe sur le coin du nez et le voilà embarqué dans des péripéties (le milieu). A l’issue de ses tribulations, le héros résout le problème, ou en tout cas s’extirpe de la situation (la fin).

En trois actes, le héros est donc confronté au problème et en ressort avec un enseignement. Et nous, bien au chaud dans notre canapé, nous vivons cette aventure avec lui (si tant est qu’on peut s’identifier à lui). Et donc par procuration, on apprend de ce qui est arrivé au héros, en même temps que ce dernier apprend de ses péripéties.

C’est là tout l’intérêt des histoires : nous faire vivre en accéléré ce qu’on n’a pas le temps d’expérimenter dans notre vie bien courte. Nous apprendre quelque chose sans nous faire bouger de notre fauteuil. C’est pour ça que les civilisations antiques ont mis au point toute une mythologie. C’est pour ça que les parents racontent des contes à leurs enfants. L’histoire est la base de l’apprentissage, et les sociétés humaines ont besoin de la fiction, pour vivre par procuration ce que ses individus ne peuvent pas expérimenter d’eux-mêmes.

Evidemment, plus on s’identifie au héros, plus on retirera de choses de cette histoire et plus elle sera enrichissante pour nous. Mais la construction d’un héros, ça sera le sujet d’un autre article !

Si toutes les histoires ont le même but, celui d’être didactique, alors peut-être qu’elles ont aussi des structures similaires, non ?

Eh bah c’est précisément ce que s’est dit un type du nom de Joseph Campbell, un universitaire plutôt balèze qui, sans le faire exprès, a révolutionné le monde du storytelling.

Le Monomythe de Joseph Campbell


Campbell, c’est un gars malin. Comme vous et moi, il avait bien compris pourquoi les gens se racontaient des histoires fictives. Alors il a commencé à se demander s’il n’y avait pas une méthode de storytelling, un point commun entre toutes ces histoires qu’on se raconte depuis toujours.

Et comme Campbell faut pas le faire chier, il a compilé des centaines d’histoires et de mythes de tous horizons pour vérifier tout ça. Il a étudié les contes de toutes les époques et de tous les continents, il les a disséqués, et il en dégagé un socle commun, une thèse qu’il a appelée le Monomythe et qu’il a décrite dans son bouquin Le Héros aux mille visages.

Basiquement, le Monomythe de Campbell, c’est ça :

Un héros vit dans un monde ordinaire, jusqu’à ce qu’un événement impromptu l’incite à partir à l’aventure. Après une période d’hésitation, il finit par être convaincu, et guidé par son mentor, s’embarque dans un périple où il rencontrera moult amis et ennemis, affrontera mille épreuves avant d’atteindre le test ultime, où, au bord de l’abysse, il triomphera finalement, avant de ressortir changé à tout jamais avec l’objet de sa quête. S’ensuit alors un retour dans son monde quotidien, qu’il pourra métamorphoser grâce au fruit de son épopée.

Non, ça ne vous dit rien ? Ok, on la refait.

Luke Skywalker vit tranquillement sur Tatooine comme le paysan qu’il est, jusqu’au jour où deux droïdes arrivent et lui parlent de l’appel à l’aide de la princesse Leïa. Il rencontre Obi-Wan Kenobi, qui lui parle des Jedi et des Sith et l’incite à partir. Mais Luke refuse, ne voulant pas abandonner sa tante et son oncle. Hélas, quand ceux-ci sont tués par l’Empire, il ne peut revenir en arrière. Il s’embarque alors dans une épopée spatiale au cours de laquelle il rencontrera Han Solo & Chewbacca, ainsi que les troupes de l’Empire dirigées par Dark Vador. Lors de l’ultime épreuve, Luke puise dans ses ressources et dans les enseignements d’Obi-Wan pour détruire l’Etoile Noire. L’épopée achevée, il est couronné de succès par les rebelles qui lui remettent une médaille et l’honorent. La galaxie est maintenant libérée de la menace de l’Etoile Noire.

Harry Potter mène une existence morne sous la houlette de son oncle et sa tante. Le jour de son onzième anniversaire, des lettres arrivent et lui révèlent qu’il est un sorcier, et qu’il est attendu à l’école de Poudlard pour entamer sa formation et découvrir le fabuleux monde magique dont il a toujours ignoré l’existence. Mais son oncle refuse, et essayera de fuir les lettres jusqu’à ce qu’un géant nommé Hagrid ne les rattrape et force l’oncle à laisser Harry partir. Ce dernier s’embarque alors dans une aventure magique où, aidés de ses amis Ron et Hermione, il découvrira Poudlard et les sombres secrets qui se tapissent dans ses entrailles. A la suite d’une série d’épreuves, il triomphera de Voldemort et permettra la mise en sécurité de la pierre philosophale, ce qui lui vaudra les remerciements de Dumbledore et fera gagner la maison de Gryffindor in extremis.

Frodon Sacquet vit tranquillement dans la Comté quand il entre en possession de l’Anneau Unique. Neo mène son existence de paisible New Yorkais jusqu’à ce qu’un homme du nom de Morpheus l’appelle et le sorte de la Matrice. Simba est promis à un grand avenir et doit succéder à son père, qui se fait tuer par Scar. Refusant tout d’abord sa destinée en préférant lambiner avec Timon et Pumba, Simba finit par accepter ses responsabilités et fait face à Scar.

Ça y est, vous avez saisi ?

Ouais mais tu triches, tu as pris des exemples ultra mainstream et hollywoodiens…


Pas faux. Ça, c'est la faute à Vogler, mais j'y reviens dans un instant.

Les travaux de Campbell n’ont pas fait l’unanimité à leur sortie, loin de là. Campbell lui-même avouait volontiers que certains mythes ne suivaient pas exactement le même ordre d’étapes, ou que certains contes n’utilisaient qu’une partie du cercle. Les parties ne sont pas non plus toujours de la même taille.

A vrai dire, le Monomythe peut très bien ressembler à ça :

L’important, et ça s’est vérifié, c’est que toutes les histoires racontent une parte ou la totalité du cycle, et ce depuis que l’Homme a commencé à raconter des histoires. De Luke Skywalker à Ulysse, d’Eragon à Conan le Barbare, de Saint-Georges qui s’élance pour sauver sa dulcinée au simple paysan chinois qui traverse la rivière pour aller affronter le seigneur du village d’en face…

Cette structure est gravée dans l’inconscient des individus, et elle comble les lecteurs, parce qu’elle engage le spectateur, elle fait appel à des archétypes inconscients en mettant en scène un individu a priori lambda qui est tiré de son monde ordinaire pour faire face à un problème extraordinaire. Et ça, ça parle aux gens, ça leur permet d’apprendre. Ça tape directement dans l’inconscient collectif, et c’est ce qui rend cette méthode si puissante.

Alors c’est ça ton propos ? Il suffit de respecter cette structure pour écrire une histoire efficace ?


Quel est le point commun entre Aladdin (1992), Le Roi lion (1994), Un beau jour (1996), Hercule (1997), À l'épreuve du feu (1997), Volcano (1997), Mulan (1998), La Ligne rouge (1998), Anna et le Roi (1998), Fight Club (1999), Fantasia (2000), Je suis une légende (2007), The Wrestler (2007), Hancock (2008), Une histoire de famille (2008), 10 000 (2008), Karaté Kid (2010), The Fighter (2011) et Men in Black 3 (2012) ?

Ce sont tous des films qui ont marché, et à moins d’être un parfait ignare, vous devez en connaître une bonne partie.

Ce sont aussi tous des films sur lesquels est intervenu un bonhomme du nom de Christopher Vogler.

Vogler, c’était un lecteur chez Disney à l’époque où ils recevaient des milliards de scripts et de propositions d’histoires de BD. Autant dire qu’il était noyé sous les brouillons d’histoires que lui envoyaient des auteurs désireux d’être publiés par Disney.

Chris Vogler, il avait lu Campbell. Et il avait bien aimé. Alors pour aller plus vite dans la sélection des scripts qu’on lui soumettait, il s’est fait un petit fascicule basé sur le Monomythe, une aide destinée à lui permettre (à lui et ses collègues) d’identifier rapidement quelles histoires ne respectaient pas les critères de Disney : les histoires efficaces, au déroulé consistant, au message limpide et au propos intelligible.

Quelques mois plus tard, il s’est rendu compte que tout Hollywood avait adopté son fascicule.

Depuis, le bonhomme a continué à creuser sa théorie, il en a fait un livre, il a théorisé le voyage du héros et les archétypes (encore plus loin que Campbell), et il donne actuellement des masterclass et des conférences sur la méthode qu’il promeut depuis des années, méthode dont l’industrie américaine maîtrise les rouages depuis belle lurette. Et je vous mets au défi d’oser me dire que l’histoire des films cités plus haut est mal foutue. Ils ont sûrement bien d’autres défauts, mais le scénario n’y est pas.

Pour répondre à la question de cette rubrique, non, il ne suffit pas de respecter cette méthode pour écrire une bonne histoire. C’est ce que dit Alexandre Astier, fan inconditionnel de Vogler. Pour lui, écrire, c’est comme jouer du violon : quand tu veux jouer du violon, on t’apprend le solfège et on t’enseigne à jouer. Mais à la sortie du Conservatoire, il y aura des très mauvais violonistes, des violonistes moyens, et des génies. Tous ceux-là connaissent la méthode pour jouer du violon, mais ça ne fait pas d’eux de grands musiciens pour autant.

Pour écrire une histoire efficace, il ne suffit pas de respecter la méthode Campbell. En revanche, il faut respecter la méthode Campbell si on veut écrire une histoire efficace. (nuance !)

Donc on doit tous écrire la même chose ? Bonjour l’originalité.


Apprendre une méthode n’a jamais bridé l’imaginaire, au contraire. La méthode de Vogler et Campbell est là pour apprendre à écrire de manière propre et cadrée, elle ne tue en rien la créativité. Je vous renvoie à l’analogie du violon du paragraphe précédent. Un mauvais auteur qui écrit Campbell écrira une mauvaise histoire, mais au moins, une histoire propre. Un bon auteur qui n’écrit pas selon Campbell risque de se perdre en chemin, de s’embrouiller et de diluer son propos par manque de structure. Un bon auteur qui écrit selon Campbell, lui, aura tous les outils pour déployer son potentiel comme il le mérite. Le Conservatoire est là pour enseigner les méthodes, mais c'est le talent personnel de chacun qui fera le reste du chemin.

Beaucoup de bonnes histoires datent d’avant Campbell. Ce qui est étonnant, c’est qu’instinctivement, leurs auteurs ont adopté une méthode qui se rapprochait de celle décrite par notre bon vieil universitaire. Le Seigneur des Anneaux, le Commissaire Maigret… Tout y est, et pourtant leurs auteurs n’avaient pas connaissance de la théorie du Monomythe. Comme quoi c'est bien intégré à l'inconscient collectif.

Mais Drayker, c’est pas toi qui parlait de subversion des clichés et de prévisibilité dans ton précédent article ? T’as changé d’avis ?


Merci d’avoir posé cette question, cher intertitre qui n’a pas du tout été écrit par moi !

J’ai dit que Campbell permettait d’écrire propre, qu’il fournissait une structure puissante qui tape dans l’inconscient collectif. Par conséquent, comme tout procédé narratif qui fonctionne, il court le risque d’être suremployé et de devenir un cliché.

Effectivement, respecter la structure vous rend plus prévisible dans votre histoire, et le lecteur averti qui connaît Vogler & Campbell saura anticiper les événements.

Sauf si vous jouez avec ! Comme expliqué dans mon précédent article, le meilleur moyen de surprendre les lecteurs, c’est de retourner leurs attentes contre eux. Et si le mentor se retournait contre le héros ? Et si l’épreuve ultime résultait en une défaite ? Si le héros, après avoir obtenu le fruit de sa quête, refusait de retourner dans le monde ordinaire ? Tout ça, Campbell l’autorise. Comme dit plus haut, de nombreuses histoires ne respectent pas exactement la structure qu’il a théorisée. Et de toute manière, lui et Vogler laissent énormément de liberté à toutes sortes d’adaptations.

Mais pour faire ça avec le Monomythe, encore faut-il connaître le Monomythe. Une fois que l’on maîtrise les méthodes, bien sûr, il est toujours possible de les modifier, de les adapter et de les tordre.

Et ce sera bien évidemment le sujet du prochain article, où je m’attarderai sur les pivots d’un récit campbellien et les moyens de les détourner. On parlera de héros, d’antihéros, de trickster, de personnage protéiforme… Bref, que de réjouissances en perspective !

En attendant, j’espère que cet article vous a plu, et comme toujours, les commentaires restent ouverts pour tous ceux qui ne sont pas d’accord avec ce que j’ai écrit ici !
Article ajouté le Jeudi 21 Décembre 2017 à 18h08 | |

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