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La Société des Douze de Denser



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» Auteur : Denser - Voir le profil
» Créé le 11/06/2007 à 14:30
» Dernière mise à jour le 15/06/2007 à 01:37

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C’est ainsi que mon amour fût consumé
Le long couloir aux murs nus et sombres était plongé dans un silence quasi sépulcral depuis que la majorité des dresseurs participants à la ligue Indigo avaient déserté les arènes. Il y régnait maintenant une odeur rance de transpiration qui ne disparaîtrait qu'avec le soin tout particulier des agents de maintenance.

Un Stephen rajeunit de plus de dix ans – avec cheveux courts en brosse et habits de cérémonie noir et or – était prostré contre le mur, assis à même le sol, ses genoux remontés contre sa poitrine, sa tête prise entre ses mains. Il venait de subir la plus grosse défaite de sa jeune carrière de dresseur. Vaincu par son meilleur ami Yann en final, au prix d'un long combat qui dura près de six heures. Abattu, Stephen s'était effondré de fatigue, le visage dans la poussière, tandis que son ami et adversaire était porté en vainqueur et acclamé par la foule. Lui n'était plus rien, il avait perdu. Le deuxième, celui que personne ne remarque, celui que l'on oubli avec le temps.
Près d'une heure plus tard, Stephen s'était difficilement réveillé dans l'infirmerie, il était seul. On l'avait traîné jusque là puis abandonné comme un malpropre. Dans sa douleur, le dresseur d'habitude si fier avait quitté la petite pièce aseptisée pour errer dans les couloirs. Il n'y avait pas âme qui vive, tous les participants s'étaient réunis dans la salle du banquet, à l'autre bout du complexe. On fêtait la victoire de Yann. En tant que finaliste et meilleur ami du vainqueur, Stephen savait que son devoir, même en tant que perdant, était d'être aux côtés de Yann. Mais la douleur et la déception étaient trop fortes, il ne trouva plus la force d'avancer, et s'écroula contre le mur dans ce couloir solitaire.

Ce match, il aurait voulu le gagner avant tout pour se prouver à lui-même, ainsi qu'à sa famille et à tous les gens qu'ils côtoyaient, que Stephen Walsh n'était pas un nul, et qu'il était capable de remporter l'antique Ligue Indigo, qui révéla de nombreuses légendes vivantes. Mais voilà, il n'avait pas gagné, et il se sentait encore plus minable que le pire des dresseurs pokémon. Malgré tout le talent dont il avait fait usage, Stephen ne se voyait même plus combattre un seul adversaire tant le déshonneur pesait sur lui.

Mais alors que tout commençait à se brouiller dans sa tête, une formidable explosion retentit dans le lointain, assez puissante pour faire trembler le plafond du couloir. Stephen se redressa d'un coup, alarmé. Que pouvait-il bien se passer au-dehors ? Sans attendre une seconde, oubliant la défaite, le jeune dresseur accourut dehors en prenant divers couloirs, passant diverses portes et grimpant quelques escaliers. Alors qu'il poussait la porte de sortie avec violence, une odeur de fumée âcre et mordante lui parvint aux narines. Derrière le sommet des gradins du stade dans lequel il se trouvait, un tourbillon de fumée aussi sombre que le présage qu'elle annonçait s'élevait haut dans les airs. De là où il était, Stephen put entendre quelques hurlements, montant dans l'air tels les cris de fantômes oubliés. Dans l'immédiat, la seule chose qui l'occupait était de rejoindre au plus vite le lieu de l'accident, le lieu de la fête...

Il courrait comme un dératé, glissant dans les gravillons, trébuchant sur les marches. Il dut traverser nombre de salles et nombre de stades avant de se retrouver entre deux grands bâtiments blancs. Bien qu'il ne voyait toujours pas l'origine du feu, l'odeur piquante de la fumée lui arracha une larme ou deux, tandis que les cris et les crépitements assourdissants des flammes s'intensifiaient à mesure qu'il avançait. Il était en sueur, et seul importait la raison de tout ceci. Il avait attrapé une crampe à la jambe droite, et dans sa précipitation un point de côté qui l'obligea à se tordre en deux. Mais rien à faire, il ne couperait pas la douleur de cette manière. Qu'importe, il parcouru les derniers mètres en claudiquant, pour se retrouver devant le spectacle le plus grandiose qu'il n'eut jamais vu. Cela dépassait de loin le match de la finale qu'il avait perdu quelques heures auparavant.

L'hôtel, et la grande salle de réception du rez-de-chaussée étaient en feu. Une partie du bâtiment s'était effondrée, et les flammes insidieuses léchaient la brique en cherchant le moyen de grandir, encore et encore. Le tout se découpait sur un fond de nuit, dont la lune, qui brillait pourtant d'un vif éclat, était masquée par la colonne de fumée montante. Pour donner à la scène des airs de fin du monde, des invités de la fête qui étaient soit dehors au moment de l'explosion – s'il s'agissait bien d'une explosion – soit qui réussirent à sortir à temps erraient autour du bâtiment, certains avec des habits noirs et le regard hagard, d'autres plus présentable mais tout aussi perdu. Seuls deux ou trois dresseurs semblaient essayer quelques tours avec leurs pokémon. Un gars costaud, type armoire à glace et je cogne après je cause, dont le costume de soirée gris était recouvert de cendre tentait de se frayer un chemin au travers des flammes à l'aide d'un Maraiste qui enchaînait inlassablement les mêmes Hydrocanon.

Dans la foulée, Stephen – évitant de trop porter son attention sur les autres – se précipita vers le dresseur et d'un coup lui intima l'ordre d'arrêter ses conneries. Le gars le regarda avec des yeux affolés et voilé par le chagrin.

« Pourquoi arrêter ? Ma femme est encore dedans ! »

Il hurlait, mais Stephen ne se démonta pas.

« Justement ! Vous allez faire effondrer tout l'hôtel avec vos Hydrocanon, utilisez plutôt un Pistolet à O ! »

Le dresseur se rendit tout de suite compte que le gringalet avait raison, au même moment où se gringalet se rappelait d'une chose capitale : Yann ! Il devait être encore à l'intérieur. Sans attendre, Stephen agrippa une pokéball, mais avant même de faire appel à son pokémon, il se tétanisa. Du bout des lèvres, il murmura : « Li... Lise... » Lise, celle qu'il aimait, son amour, son petit cœur, son rayon de soleil. La merveilleuse Lise...

La chaleur du brasier le tira de ses pensées, et il prit tout à coup conscience que son meilleur ami et sa petite copine se trouvaient à l'intérieur de cet enfer. Machinalement, il essuya la sueur qui dégringolait de son front à l'aide de ses manches. La chaleur commençait à lui faire tourner la tête, il fallait à tout prix qu'il dépasse sa peur du feu, qu'il traverse le mur de flamme et quoi qu'il en coûte, il fallait qu'il sauve les deux seules personnes au monde en qui il tenait tant.

« Non ! Milobellus, on va entrer ! »

La pokéball qui s'ouvrit à la hâte laissa apparaître un pokémon qui, même dans le chaos ambiant qui régnait, était d'une beauté incomparable. Son regard de braise laissait transparaître une rage de vaincre et une grande confiance en soi, tandis que ses écailles étaient assez lisses et soignées pour que les flammes s'y reflètent. Aussitôt qu'il apparût, le pokémon aquatique compris l'urgence, et voyant la panique qui régnait chez son dresseur, il s'engagea dans le bâtiment en feu, arrosant tout sur son passage à l'aide de fins jets d'eau. Stephen, soulagé de ne pas avoir à donné d'ordres aussi simples dans un moment pareil s'engouffra à la suite de son pokémon, et au moment de passer le pas, il sentit l'enfer se refermer derrière lui. A ses côtés le dresseur et son Maraiste, le visage triste et barbouillé de sueur, de cendres et de larmes. Il marmonnait quelque chose comme « retrouver ma femme, petit, ma femme » mais Stephen n'y prêtait aucune attention, puisque la seule chose qui obsédait son esprit était Yann et Lise.

D'ailleurs, il s'était attendu à retrouver un bâtiment en proie à la destruction, mais au contraire du brasier qui régnait à l'entrée, l'intérieur de l'hôtel, bien que rougeoyant de chaleur, était accessible et le haut plafond condensait avec facilité la fumée sous son corps de béton. L'accueil était encore intact, mais il n'y avait pas âme qui vive dans l'immense hall d'entrée.

Et ainsi, sans même prendre garde au danger qui l'attendait ni même à l'homme qui l'accompagnait, Stephen entraîna son Milobellus – qui restait prêt à cracher le moindre jet d'eau s'il était nécessaire de le faire pour sauver son dresseur – vers la grande salle, là où devait se trouver Yann et Lise. Pendant une fraction de seconde, il imagina même le pire. Mais derrière lui le dresseur baragouinait encore des choses incompréhensibles, entrecoupées par quelques : « Il faut retrouver ma femme ! »

Stephen, sans répondre, s'engouffra dans un couloir. L'homme, hagard, ne le suivit pas et resta là, dans le hall d'entrée, à attendre que le feu le dévore, pleurant une femme qu'il ne pourra jamais tenter de sauver.

« Faîtes qu'il ne le soit rien arrivé, par pitié, faîtes qu'ils soient en vie ! »

Milobellus serpentait sur le sol, solennel, concentré sur sa mission. Stephen le suivait de près, d'un pas pressé et alerte. Bientôt, des cris se firent entendre alors que quelques flammes isolées s'attaquaient au fin fond du couloir que le jeune dresseur venait de traverser. Mais rien d'autres ne venait troubler ses idées : trouver Yann et Lise, puis s'assurer qu'il ne leur était rien arrivé. La porte était là, en face de lui, son Milobellus l'avait déjà atteinte. Stephen retint sa respiration, mais alors qu'il apposait sa main sur le poignée en métal plaqué d'or véritable, le son grossier d'une voix rauque et impériale se fît entendre :

« Ne la touchez pas ! »

Stephen resta paralysé, il s'agissait de la voix de Yann qui venait de s'élevait de l'autre côté de la porte. Mais tandis qu'il se demandait pour quelle raison son ami venait de dire cela, un pan du plafond s'effondra à l'autre bout du couloir. Tout était réellement en train de s'écrouler, et il n'y avait toujours pas trace d'une aide quelconque. A ses côtés son pokémon restait stoïque et prêt à agir. Stephen, oubliant momentanément les paroles de Yann, tourna la poignée et ouvrit la porte à la volée, prêt à porter secours aux possibles blessés.

Mais ce fût comme si le temps s'arrêtait. Alors que la porte claquait contre le mur, une puissance inconnue surgit de nulle part le propulsa en arrière, puis comme un aimant l'attira vers l'entrée de la salle, et l'aspira tel un vulgaire insecte aussi soudainement que violemment. Stephen n'eut pas le temps de comprendre, son dos heurta le sol dur, puis avant de pénétrer à l'intérieur de cette « chose » qui voulait l'avaler, il sentit comme une résistance autour de son corps, une sensation qu'il n'aurait su décrire. Il fût ensuite jeté en plein milieu de la salle avec son Milobellus, devant des dresseurs muets de surprise, tandis qu'un homme tout de noir vêtu – pantalon large et imperméable – portant sur la tête un béret de marin sombre, le regardait avec un air mauvais de franche méchanceté.

« Stephen ? fit la voix de Yann, interloquée.
- Voyez-vous cela, un invité supplémentaire. Très bien, on dirait qu'il possède quelques pokémon, ainsi qu'un magnifique Milobellus. »

L'inconnu parti d'un grand rire désagréable tandis que Stephen se redressait sur ses deux coudes, son dos était douloureux après la chute rapide et violente qu'il venait de faire. En jetant de rapides coups d'oeils autour de lui, il pu se rendre compte de quelques détails affolants : la quasi-totalité des participants à la Ligue Indigo étaient présent, dans cette immense pièce richement décorée mais dont les tables et autre mobilier avaient été renversé. Ces mêmes dresseurs regardaient Stephen comme s'il s'agissait d'un fantôme. Ils semblaient avoir peur de bien autre chose que le feu... un feu qui d'ailleurs n'avait plus le monopole dans la salle. Tout autour de celle-ci se dressait un mur semi opaque d'une couleur rosée, caractéristique des boucliers créés par certains pokémon.

« On en était où ? demanda l'homme en noir, qui se désintéressa totalement de Stephen. Ah ! Oui, j'allais ouvrir la gorge de cette charmante jeune fille si vous refusiez encore une fois de plus de me donner tous vos pokémon. Alors, qu'en pensez-vous ? »

A ses paroles, Stephen prêta une plus grande attention à cet homme, ainsi qu'à tous ceux qui se tenaient derrière lui, portant les mêmes habits, et affichant le même regard glacial et à la fois mesquin. C'est alors qu'il aperçut qui était la charmante jeune fille :

« Lise ! Mais qu'est-ce que vous lui faîtes ? Lâchez-là espèce de gros porc ! »

Les mots étaient sorti inconsciemment de sa bouche, et eurent l'effet d'un coup de feu. Tous les dresseurs présents le regardaient, ébahis, tandis que Stephen s'était relevé d'un bond, les poings serrés, le visage rouge de colère. Il émanait de lui une aura de puissance, une aura de violence qui faillit faire lâcher son couteau à l'homme. Ce dernier se reprit très vite, et affichant un sourire carnassier, il s'adressa à l'opportun :

« Qu'est-ce qu'il y a petit, tu la connais ? Tu ne veux pas que je lui fasse du mal c'est ça ? »

Mais tout en parlant l'homme laissait courir la lame froide, promesse d'une mort lente et douloureuse, sur la joue de Lise, dont les larmes coulaient par intermittence, sur sa peau claire et douce que Stephen aimait tant embrasser. Cela le rendit fou de rage, et bien qu'il ne comprenne pas ce qui se passait, il pointa du doigt en avant, et d'une voix forte et chargée de haine, il ordonna à son pokémon :

« Milos ! Laser Glace ! »

Puisant son énergie dans la même agressivité que son dresseur, Milobellus prépara une attaque d'une finesse rare et d'une précision fantastique. Le jet d'azur brillant frôla la joue de Lise et vint frapper l'inconnu au plexus. Il grogna, tandis que son souffle était coupé et qu'une couche de glace se formait sur son torse. Projeté en arrière, il lâcha son couteau qui tomba sur le sol carrelé de la salle qui, il y a peu, était bercée d'une ambiance légère et festive.

C'est à ce moment qu'un Yann remonté à bloc attrapa une pokéball à sa ceinture et laissa échapper un pokémon prêt à ratatiner les hommes de mains qui avaient eut la même idée qu'eux.

« Mackogneur, on va leur montrer ce qu'il en coûte de s'en prendre au champion de la ligue ! » et après un petit coup d'œil vers son ex adversaire et ami « ainsi qu'au finaliste en titre ! Stephen ! Comme au bon vieux temps ! »

L'interpellé jeta un regard soucieux vers Yann. « Comme au bon vieux temps ». Avant que Yann ne soit champion ? Stephen ne comprenait pas le sens de cette phrase. Cela voulait-il dire que ce temps là était terminé ? Que le duo de choc était dissous ? Qu'à cela ne tienne, il sera là une dernière fois pour battre ses minables abrutis venus interrompre une fête si somptueuse pour voler quelques pokémon, des abrutis qui n'auraient pas du s'attaquer à Lise. Cette dernière s'était dépêchée de se mettre à l'abri derrière Yann, bien que Stephen la sentait à deux doigts de se lancer à l'attaque. D'ailleurs, ce dernier avait retrouvé ses couleurs, laissant la colère de côté et ne gardant que la hargne et l'envie de vaincre, de venger Lise. Il jeta alors un coup d'œil à son ami et hocha la tête, un sourire entendu affiché sur le visage.

« Comme au bon vieux temps ! » Puis il se retourna vers la dizaine d'hommes en noirs qui venait d'avancer, pokéball en main, laissant sans protection les trois Mr. Mime qui maintenaient le bouclier, empêchant de laisser s'effondrer la coupole en feu.

« Je vois, ils ont attaqué le bâtiment, puis ils ont mis le feu, fait irruption dans la salle et pour les couper du monde ils ont placés des boucliers de Mr. Mime. C'est pour ça que j'ai atterrit dans cette salle, le bouclier est fait pour absorber tous les possesseurs de pokéball ainsi que les pokémon. C'est une très belle astuce messieurs les voleurs... mais il aurait mieux valut pour vous que je reste en dehors de tout ça... »

« Allez, avancez si vous l'osez ! cria Yann à l'intention de ses adversaires, indécis sur la marche à suivre depuis que celui qui semblait être le chef était tombé.
- Tu... tu vas voir sale gosse ! Cacturne à toi !
- Il est pour moi ! informa Yann avec un sourire en coin, l'adrénaline affluant dans son corps à l'annonce d'un combat.
- Pas si vite sale gamin, tu vas voir mon Tartard ! Vociféra un autre homme. Mais au moment où il ordonnait à son pokémon d'attaquer, Milobellus lui barra la route.
- Ce n'est pas très fair play d'attaquer à deux contre un, vous ne pensez pas ? Je serais ton adversaire ! Milos, attaque laser glace ! »

Et les deux combats débutèrent sous les yeux de spectateurs ébahis.

Milobellus loupa évidemment son attaque trop téléphonée, et le Tartard semblait bien vif et prêt à en découdre. Il se jeta sur son adversaire, le poing brillant. Mais le pokémon aquatique était souple et en se tortillant sur le côté il réussit à esquiver le Dynamopoing.
De son côté, Mackogneur avait bloqué le poing droit de Cacturne dans une de ses quatre puissantes mains, tandis que de l'autre il s'apprêtait à lui asséner un puissant Poing-karaté. Mais alors que l'avantage penchait sérieusement du côté des deux jeunes dresseurs, tous les autres hommes en noirs présents envoyèrent leurs pokémon, en quelques secondes il y en avait plus d'une dizaine, tandis que déjà leur chef se relevait, l'air un peu sonné. Il se retourna vers Yann et Stephen, le regard mauvais.

« Vous allez me le payer... » dit-il d'une voix éraillée par le précédent coup. Il sortit alors une pokéball de laquelle jaillit un énorme et répugnant Grotadmorv. « Nous allons vous anéantir et prendre les pokéball sur vos corps morts ! Grotadmorv, Détritus ! »

Et au même moment ce fût le chaos général. Les autres dresseurs présent reprirent leurs esprits, l'envie de venger cette humiliation fît naître en eux une rage de vaincre, et ce fût une dizaine de pokémon qui apparurent. Même Lise envoya son Meganium au combat. Il n'y avait plus de contraintes restrictives : pas de couteau sous la gorge, pas d'effet de surprise.

Stephen esquiva habilement un coup de poing rageur lancé par un Tygnon, et Milobellus lui gela le visage d'une attaque Laser glace. Il tentait désespérément de retrouver Lise, de la rejoindre, de la toucher, de la prendre dans ses bras et de la serrer, de lui dire que tout allait bien se finir et qu'ils allaient foutre une sale raclée à ses ploucs. Mais impossible de la retrouver dans le chaos ambiant. Au centre de la salle, Yann mettait KO sans douceur un pauvre Kangourex qui aura du mal à s'en remettre, Mackogneur lui broyant le crâne entre deux de ses poings rageurs. Juste à ses côtés, un Arbok mordait à pleine dent le cou d'un Arcanin qui gémissait. Stephen repoussa un dresseur qui allait le faire tomber, puis il réussit à éviter in extremis les mâchoires mortelles d'un Steelix qui, venant tout juste d'apparaître du côté des malfaiteurs, traversait la salle en quelques secondes, mordant, bousculant et écrasant tout ce qui se trouvait sur son passage. Et déjà l'un des Mr. Mime s'écroula à la suite d'une bousculade avec un Hariyama, ce qui eut pour effet de rendre le bouclier moins puissant, tandis que derrière celui-ci les flammes fragilisaient la voûte. Stephen prit alors conscience qu'un drame allait arriver si personne ne mettait fin à ce carnage sans nom. Si encore l'un des M. Mime venait à être mit hors course, le plafond leur tomberait sur le coin de la figure.

C'est alors que le jeune homme, suant, tremblant, mais néanmoins concentré sur l'action, trouva Yann en train de se battre contre un autre Mackogneur. Stephen, qui ne voulait pas détourner l'attention de son ami au risque qu'il se fasse battre, décida de reporter son attention sur Lise, mais pas âme qui vive. Elle avait disparût dans la masse grouillante et bruyante des combats.

« Ah, mince, mais qu'est-ce qui se passe à la fin, c'est quoi cette soirée de folie ! C'est n'importe quoi, c'est qui ces guignols d'abord ? Ils débarquent de n'importe où... et puis ils sont prêt à tuer des gens... »

« Stephen ! » L'interpellé se retourna, l'air un peu perdu, mais heureusement pour lui le Cerfrousse passa en trombe un mètre au-dessus de sa tête. Celui qui venait de l'interpeller n'était autre que Yann, qui avait finit par terrasser son adversaire. Mais pas le temps de tergiverser, son ami le pris par la manche et l'attira dans un coin un peu plus calme, bien qu'un jet d'eau vint s'écraser un peu plus loin contre le mur. Yann parla rapidement :
« Il faut à tout prix empêcher la disparition du bouclier !
- Je sais, si un seul M. Mime lâche maintenant, tout s'écroule !
- Il faut arrêter tout ça ! Ce serait suicidaire de continuer !
- Ouais ! Au fait, tu n'aurais pas vu Lise ? »

Yann secoua la tête, mais aussitôt fait, il revint aux problèmes plus essentiels.

« Nos adversaires ne sont plus les autres crétins en noirs, mais tous les dresseurs ! Si l'un d'entre eux s'approche trop de l'un des deux M. Mime ce sera la catastrophe ! » Stephen hocha la tête, mais Lise hantait ses pensées. Lise était là, quelque part. Mais où ? « Il faut absolument empêcher cela ! On prend chacun un pokémon ! » et en lui tapant l'épaule amicalement, Yann s'éloigna, suivit de son puissant et imposant pokémon combat multi bras pour rejoindre le M. Mime qu'il allait protéger.

Mais Stephen n'avait pas écouté un traître mot de ce que son ami venait de dire. Il n'avait qu'un seul ordre qui clignotait en rouge dans son crâne : retrouver Lise ! Et ainsi, au lieu d'aller protéger le pokémon psy qui luttait pour maintenir la barrière protectrice en place, il se fraya un chemin parmi les combats, esquivant des coups, des corps qui retombaient en provenance de l'on ne sait où, et en laissant Milobellus se charger des possibles adversaires qu'il battait à l'aide de ses fatals jet d'eau et ses très précis tir de glace.

Et puis le temps fût comme suspendu, tel un ralenti qui s'installe dans l'esprit pour que les malheurs présent puissent avoir le temps de s'inscrire au marqueur indélébile au plus profond de l'âme. Le M. Mime sans protection reçut une décharge électrique qui le paralysa. Il fléchit, reçut un coup de poing à l'arrière du crâne et plongea en avant, sa tête heurtant la barrière. Au même moment, le deuxième M. Mime pour qui maintenir le bouclier en place était trop pesant et impossible s'affala de tout son long près d'un Yann qui ne comprenait que trop bien ce qui venait d'arriver. C'est ainsi que la barrière disparût, dernière protection pour tous les gens présent, et que le plafond fragile fût frappé d'un puissant hydrocanon lancé durant la bataille. Il n'en fallut pas plus pour qu'il commence à s'effondrer, tandis qu'un Stephen hagard qui ne trouvait pas sa Lise se mit à paniquer. Ses appels résonnèrent au milieu du brouhaha et de la panique générale qui suivit les premières chutes de roches, les premières flammes s'attaquant au mobilier. Il y eu de grandes explosions, et un pan de mur entier s'effondra, fermant à jamais la porte par laquelle Stephen avait fait irruption – ou plutôt par laquelle il avait été aspiré. Des blocs se détachaient du plafond et venaient s'écraser aux pieds des personnes présentes. Les hommes en noirs qui étaient encore lucides utilisèrent leurs pokémon pour faire s'effondrer un nouveau pan de mur. Celui-ci, en disparaissant, ouvrit une brèche sur le dehors, sur la nuit. Mais au travers de l'épaisse fumée qui commençait à emplir les poumons, les étoiles et la lune étaient invisibles.

Stephen errait au milieu de tout ça, ne se rendant même pas compte que des morceaux de pierre gros comme sa tête s'écrasaient sur son passage, à quelques centimètres de lui. Des dresseurs le bousculaient pour sortir à l'air libre, les criminels enfuient depuis longtemps si ce n'était les quelques corps éparses et inconscients. Il y avait aussi quelques dresseurs, mais personne ne leur prêtait attention dans leur fuite irréfrénable. Yann, au passage, eut tout de même la bonté d'attraper un corps inerte, tandis que son pokémon attrapait sans distinction un dresseur et trois hommes en noir. Et dans un coin, derrière un énorme morceau du plafond détaché qui s'était abattu sur le sol avec fracas, Stephen se retrouva face à un spectacle d'enfer, un spectacle qui s'imprima pour toujours dans ses rétines. Jamais il n'oublierais cela, jusqu'à sa mort ses images reviendront le hanter, jour après jour. L'homme en imperméable avait retrouvé son couteau, mais aussi sa victime. L'étranglant d'une main, il apposait son couteau sur la joue de Lise, tout en lui susurrant des mots que Stephen devina vulgaires au creux de l'oreille et en lui léchant le lobe de temps en temps, d'un air salace et dégoûtant qui donna au jeune homme envie de vomir. Lise, les yeux mi-clos, pleurait en silence. Devant elle se tenait un Cornèbre, son Cornèbre, qui regardait sa dresseuse avec un air de défis, prêt à sauter sur l'homme pour lui picorer les yeux.

Stephen resta paralysé devant tout ça, alors que les flammes se propageaient rapidement, et que le plafond continuait son lent et mortel effondrement. Il serra alors des poings.

« Lâche-là !
- Stephen ?
- Ah, tu es là gamin. Tu veux que je la lâche ? Je vais plutôt la tuer en prenant mon temps, et je ne suis pas déçut que tu sois là pour voir ça ! C'est à cause de toi tout ça !
- Fermez-là ! Ce n'est pas sa faute ! »

La rage qui émanait de Lise redonna à Stephen l'envie de se battre pour elle, de tuer pour elle.

« C'est de la votre ! Si vous n'étiez pas là... »

Il y eut une explosion soudaine et inattendue, des flammes montées de l'enfer pour brûler les corps inconscient, pour incinérer implacablement les vivants. Le plafond s'effondra, le sol se fissura, le feu assassin se répandant de tous les côtés. Stephen n'eut pas le temps de crier, ni le temps de faire quoi que ce soit, qu'un énorme morceau de béton provenant du plafond, auquel était attaché des armatures en fer, s'effondra sur l'homme... ainsi que sur celle qu'il aimait.

Une nouvelle explosion, un hurlement de douleur, Stephen ne pouvait croire ce qu'il venait de voir. Il se jeta en avant, les larmes aux yeux, les poings et la mâchoire serrés comme jamais, il se jeta auprès de celle qu'il aimait, et il atterrit devant un corps aux jambes écrasées, au visage à demi calciné. Celle pour qui il était prêt à mourir n'était plus.

Puis tout se mêla dans les ténèbres lorsqu'un morceau de métal lui écrasa l'arrière du crâne.

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Une larme salée et amer coula lentement, presque avec respect, le long de la joue du Stephen adulte et meurtris. Là, assis sur son canapé face à son meilleur ami, il se laissa aller à pleurer pour la première fois depuis la mort de celle qu'il aimait, un amour qui fût ainsi détruit et consumé par un bien triste et incompréhensible destin.