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Une radio, un pendentif et une tablette de chocolat. de TheMizuHanta



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» Auteur : TheMizuHanta - Voir le profil
» Créé le 22/10/2016 à 17:25
» Dernière mise à jour le 22/10/2016 à 17:25

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Chapitre 30 : Un pas après l'autre.
Route 211 : 14h34

- C’est bon, on peut s’arrêter pour l’instant… Repos !

Rode avait posé son sac par terre, tout en lâchant un léger soupir de soulagement. Anna s’assit sur une pierre plate et attendait patiemment les prochaines directives. Quant à moi… Je ne savais pas vraiment ce qui m’attendait.

Nous avions quitté Vestigion hier, en fin de matinée. On y est resté pendant deux semaines dans cette ville à cause de la durée de mes soins. J’ai eu un peu de mal à retrouver l’usage de mes membres, mais une fois que j’arrivais à marcher, la rééducation allait plus vite. Je jetais un coup d’œil à mon flanc, il était paré d’une longue cicatrice qui faisait tout le long de mon corps. On m’avait dit que ça ne partira probablement jamais, je devrais donc me traîner un mauvais souvenir durant toute ma vie. J'espère que ça ne me fera pas mal, j’en avais déjà assez chié comme ça.

Je regardais autour de moi, nous étions au pied du Mont Couronné. Nous avions dû monter une pente plutôt raide pendant tout l’après-midi, c’était rapidement épuisant. Le sol rocailleux n’aidait pas, et demandait d’avoir les yeux rivés sur le sol, pour éviter les cailloux pointus ou encore les endroits pas stables du tout. On a campé à côté d’un rebord, où l’on pouvait voir la vieille ville d’un peu plus haut, c’était un bel endroit quand le crépuscule teint les immeubles d’un doux orangé, à ce qu’il paraît. Ce sera par contre plus difficile de trouver du bois, et le feu ne durera pas très longtemps, juste assez pour cuire un peu de viande rouge et des légumes. La nuit d’hier était fraîche, malgré le fait que nous étions maintenant à la deuxième semaine d’août. Ça faisait du bien de dormir dans autre chose qu’une chambre aseptisée, j’en pouvais plus de l’odeur du désinfectant. Ma place se trouvait à l’extérieur, j’ai toujours été comme ça, depuis ma naissance. Je menais une vie paisible dans ma meute, et j’en étais content.

- Maintenant que l’on est un peu éloigné de tout, on a pouvoir parler de trucs un peu plus sérieux.

Je tournais la tête vers mon nouveau dresseur, perdu dans mes pensées. Il avait parlé en me fixant avec un regard affirmé. J’allais donc devoir répondre à des questions… Ou je ne sais pas quoi, il est plutôt étrange comme mec. Il a une manie de tout regarder avec attention, même la liste des ingrédients qu’il y a dans ses conserves. Quand on marche dans la rue, ses yeux examinent tout ce qui se trouve dans son champ de vision, que ce soit des passants, les voitures ou même les sacs plastiques qui volent au gré du vent. Il allume à chaque quart d’heure sa radio, sur les fréquences d'émissions de news en continu. Il notait chaque information dans un petit carnet noir, qu’il gardait dans la poche intérieure de sa veste. Il faisait surtout attention aux nouvelles concernant des criminels, c’était vachement perturbant. Rode s’avança lentement vers moi, s’accroupit pour se mettre à ma hauteur et me demanda calmement :

- Va falloir parler de tes conditions de remboursement, tu te souviens de ça, n’est-ce pas ?

Et comment ? Ce mec a décidé d’utiliser son matos médical sur moi, alors qu’il n’avait aucune raison de le faire. Le pire, c’est que ce dernier coûtait ultra cher, et il s’était mis en tête que je devais le rembourser en combattant pour lui. Je ne pouvais plus m’en aller comme bon me semblait, puisqu’il me trouverait sans problème avec Anna, qui pouvait lire dans les pensées. Je n’avais donc pas le choix, et devais essayer d’amasser au plus vite 12 000 Pokédollars avant de pouvoir m’en aller. Ça me prendra plusieurs mois au moins… Enfin si j’arrive à gagner mes combats.

Parce qu’il fallait être objectif, mes capacités à me défendre et attaquer ne voulaient pas bien haut. Je ne suis pas très rapide, ne connais pas de capacités assez puissantes, et je ne suis pas vraiment du genre à écouter mon dresseur. Pour les deux premiers points, mon espèce devait jouer sur mes compétences, mais pour le dernier, il fallait dire que j’ai un caractère bien trempé. Ça n’allait pas être facile du tout. Mais le sourire de ce mec me disait qu’il avait une idée derrière la tête. Je le regardais d’un air septique, on ne jouait clairement pas dans la même catégorie. J’ai pu regarder le combat qu’il avait mené en arène à l’aide d’une télévision, et il fallait avouer qu’il avait des capacités stratégiques bien développées. Anna était quant à elle super forte, je paraissais bien ridicule à côté d’elle. En jetant un coup d’œil vers cette dernière, je ne vis pas le jeune homme lever sa main droite et me l'aplatir violemment sur le crâne, j’allais presque m’écraser la tête contre le sol, et il gardait ses doigts entre mes oreilles. Qu’est-ce qu’il avait à se comporter comme ça ? Il se lança immédiatement, histoire que je comprenne ce qu’il me veut avant que je ne lui morde la main.

- Tout Pokémon a ses propres caractéristiques. Certains ont un corps de pierre résistants aux attaques physiques, d’autres ont des ailes pour voler haut, ou d’autres encore peuvent s’enfouir sous la terre pour prendre en embuscade ses proies ou ennemis. Pour ce qui est des Évolis, c’est une autre histoire. Ils ont souvent été utilisés comme bêtes domestiques, grâce à leur jolie petite bouille et leur fourrure soyeuse. Ils n’ont jamais été vraiment pensés pour le combat. De toute façon, qui aurait peur d’une jolie boule de poil ? Ils n’ont pas une bien grande mâchoire, des petites pattes et les griffes ne sont pas assez développées pour trancher la chair. En clair, la nature ne t’a pas vraiment gâté. Mais si je ne m’occupais que de grandes espèces en dressage, ça n’aurait aucun intérêt. Et l’atout principal que l’on peut tirer de votre morphologie, c’est le crâne. L’os qui recouvre le cerveau est particulièrement épais et robuste, ils ne sont que rarement sonnés par un coup à la tempe. Les attaques contondantes, ou en fonçant dans le tas, sont donc celles qui marche le mieux, mais avec l’aide de quelques autres méthodes, on peut obtenir des résultats bien plus convaincants.

Il accompagna ses dernières paroles en plongeant sa main dans la poche de sa veste. Il la sortit avec une petite plaquette de pilules entre les doigts. Il jeta un œil sur la partie plate et m’annonça que c’était des Capsules Techniques. Ces comprimés, aussi appelés CT, étaient des drogues qui agissent sur l’organisme en moins d’une minute après l’ingestion. Ils permettent d’imiter les propriétés de l’attaque que nous sommes censés apprendre, si jamais le Pokémon est capable de l’utiliser. Ce système permet d’assimiler plus vite que la normale les différentes facettes de la capacité. Une semaine d’entraînement peut être fait en cinq heures avec ces médicaments. Le problème, c’est que ces gélules coûtent cher, et les prix flambent dès qu’une attaque devient à la mode, ou qu’elle a un pouvoir destructeur. Il n’arrêtait pas d’acheter des dizaines de produits rien que pour moi, ça en devenait suspect. Il devait comprendre que je n’avais pas envie de rester avec eux. Une fois que j’aurais remboursé ma dette, je tracerais ma route tout seul, je n’ai besoin de personne.

Ces dernières pensées me faisaient automatiquement tourner les yeux vers Anna, qui se sentait un peu attristée. Elle devait avoir envie de me voir rester avec eux. Mais j’ai d’autres choses à faire, c’est comme ça. Elle me dit via la pensée que tout allait bien, qu’elle comprenait ce que je ressentais. Elle se leva et se tourna vers le vide, à regarder le paysage. Rode se mit à secouer la plaquette pour me faire comprendre que je devais diriger mon attention vers lui. Il me fixa d’un air septique, comme si j’avais vidé une conserve durant la nuit. Puis me rassura concernant l’argent investit dans ces Capsules Techniques.

- T’as un vrai problème avec l’argent toi… Je t’ai déjà dit que je ne vais facturer que les soins que je t’ai donné sur la route avant Vestigion. Et puis tu ne vas apprendre que la capacité Reflet pour l’instant, ça te sera utile et je pense que l’on va devoir s’entendre un peu mieux avant de se mettre à apprendre des compétences offensives. Ne le prend pas mal, mais il va falloir que tu apprennes à mettre ta tête de ronchon de côté quand on va travailler. Déjà que ce n’est pas agréable, mais en plus si tu n’écoutes pas mes directives, on ne s’en sortira pas…

Je ne pouvais qu'acquiescer, il avait rapidement cerné mes traits de caractère. Il devait être du genre calculateur, en plus de posséder une manie de tout observer sous toutes les coutures. Ce mec était tout simplement bizarre, mais droit dans ses bottes. Il savait où aller, et comment y arriver. Son caractère, ses connaissances, ses capacités, tout faisait de lui un meneur, quelqu’un en qui on pouvait faire confiance. Quelqu’un qui serait prêt à tout pour ceux qu’il a décidé de protéger.

Mais qu’est-ce que je raconte ? Je viens à peine de le rencontrer ! Il ne m’a adressé que quelques fois la parole à l’hôpital, et il ne me laissait même pas le choix pour quoi que ce soit. Anna était une créature avec un esprit sain, mais extrêmement naïf, et mon intuition me poussait à croire qu’il en était l’exact opposé. Tout ceci ne me disait rien qui vaille, il faudra que je redouble de prudence, il était probablement capable de tout.

Il remit la plaquette de médicaments dans sa poche, se mit à regarder sa montre puis inspira un grand coup. Lorsqu’il posa ses yeux une nouvelle fois sur moi, son regard était étrange. J’avais en face de moi une personne que je ne connaissais pas. Cette impression était sans fondements, et je ne pouvais expliquer le pourquoi du comment. Ce mec était étrange, c’est tout ce que je pouvais en déduire pour le moment. Il s’agenouilla pour vérifier de plus prêt mes anciennes blessures, toucher mes pattes et appuyer légèrement sur quelques muscles. Il m’observa sous toutes mes coutures, et je ne bougeais pas d’un poil. Il finit par se relever avec un sourire et m’annonça fièrement :

- Bonne nouvelle, tu es en pleine forme ! Je pensais que notre petit trajet révélerait des probables séquelles si ta convalescence ne s’était pas bien passée, mais on dirait qu’ils ont bien fait leur boulot ! On va s’arrêter sur ce plateau pour la journée, et on campera ici. On retire les cailloux et on commence tout de suite ton entraînement. Lorsque le soleil se couchera, tu connaîtras la capacité Reflet. Est-ce que c’est bien clair ?

J’hochais la tête presque immédiatement pour acquiescer. Je n’avais de toute façon pas le choix. Il fallait que j’apprenne de nouvelles capacités qui pourraient faire la différence en combat, et on dirait que l’on ne bougera pas d’ici tant que je n’aurais pas appris cette attaque. De plus, on dispose d’un nombre limité de capsules techniques. Si je n’arrivais pas à maîtriser mon objectif, je ne ferais que stagner. Il fallait que j’aille de l’avant, je n’avais pas d’autres choix.

On se mit immédiatement à déplacer les morceaux de roche qui nous gênerait durant notre entraînement. Anna ne tarda pas à nous aider, sans dire un mot. Il ne fallut pas plus d’une dizaine de minutes pour déblayer le terrain. Il n’y avait pas grand-chose à enlever et puis les deux étaient beaucoup plus efficaces que moi à bouger tous ces débris, l’avantage de se tenir sur ses deux pattes… Une fois que le premier travail était fait, Rode se dirigea vers sa Lucario, qui s’était remise à sa place, à contempler le vide. Une fois qu’il était à ses côtés, il s’accroupit et commença à lui adresser quelques mots. Je ne pouvais pas les entendre, déjà parce que ça ne me concernait pas, mais mon nouveau dresseur m’avait demandé de me tenir à l’écart, que ce qu’il devait faire était important. J’avais remarqué que depuis quelques temps, elle était plutôt lunatique. Elle avait toujours le regard perdu sur quelque chose, on devait toujours la rappeler à l’ordre quand on devait lui parler. Elle ne ressemblait plus à celle qui souriait quoi qu’il arrive, même quand la situation ne le permettait pas. C’était la seule qui se mettait à rire pendant que nous essayions de sortir de cette grotte maudite. Il y avait clairement quelque chose qui n’allait pas, et j’ai l’impression que tout ceci a commencé depuis qu’elle a remporté la victoire dans ce combat d’arène il y a deux semaines. Quelque chose ne tournait pas rond.

Mais je ne pouvais pas m’en faire plus longtemps pour elle, car son dresseur se releva et me rejoignit, l’air neutre. Il sortit en cours de route sa plaquette de capsules et en sortit une au moment où il arriva à ma hauteur. Il posa un genou au sol et me tendit sa main ouverte avec la pilule sous mes yeux. Il m’annonça ensuite d’un ton sérieux :

- Bon… On peut maintenant commencer l’entraînement. Je te préviens, on n’arrêtera pas tant que tu ne m’as pas donné l’impression que l’on a avancé, ou que l’on ait utilisé la moitié de nos comprimés. Ça pourrait durer toute la journée, voire même la nuit. Maintenant que tu es prévenu, on commence dès que tu m’avaleras cette CT.

Après avoir hésité un long moment, je finis par me décider à ouvrir la gueule. Il me plaça la gélule sur le bout de la langue, et me tendit ensuite le thermos remplit d’eau, pour que le passage du médicament passe plus vite. Une fois que le tout était dans mon estomac, je ne pouvais plus qu’attendre. Cette minute me semblait être une éternité, à attendre que le produit fasse effet. Je me souvenais d’une session d’entraînement que Marc, l’un de mes derniers dresseurs, passait avec son Elektek. Il lui avait donné le même genre de pilule, et les premiers essais n’étaient pas franchement convaincants, il avait même l’air de souffrir. Je ne me souvenais plus de quel genre d’attaque il s’agissait, mais ça avait l’air d’avoir des effets secondaires bien violents. Bon… S’il ne s’agit que de l’attaque Reflet, je devrais pouvoir dormir sans trop de problèmes.

Tout à coup, je sentais quelque chose d’étrange en moi. J’avais l’impression que mes boyaux se tordaient entre eux, mes pattes tremblaient. Je manquais de m’écraser au sol sous la douleur, mais quelque chose me forçait à me tenir debout. J’essayais d’hurler, mais quelque chose bloquait mes cordes vocales. Alors que j’essayais de trouver quelque chose qui pouvait me tirer de cette douleur insupportable, Rode s’était accroupit, et me fixait d’un air curieux. C’est tout ce que tu trouves à faire ? Tu vois pas que je suis en train de souffrir le martyr ? Je sais pas moi, donne-moi de l’eau ! Demande de l’aide à Anna pour me comprendre ! Fais quelque chose merde ! Arrête de me regarder comme si j’étais une putain de plante ! Aide-moi !

Mes muscles se raidirent, ma mâchoire se serra. Alors que je pensais que mon heure arrivait déjà, je sentais tout à coup mon corps s’alléger. J’avais l’impression que ma structure osseuse avait elle aussi changée, comme si mes épaules s’étaient élargies, que ma cage thoracique s’était ouverte. Mes pattes avaient une meilleure prise au sol. Je m’étais légèrement abaissé d’ailleurs, le duvet de mon buste balayait la poussière. J’avais froid, ma température corporelle avait baissé, malgré le fait que nous étions encore sous le soleil d’été, en pleine après-midi. Ma respiration était bien plus claire, mes sens s’étaient affûtés. Mon esprit était vif, j’avais l’impression d’être une nouvelle personne. Je n’osais pas bouger, je regardais autour de moi, pour essayer de comprendre ce qu’il se passait. Rode continuait de me fixer, avec le même regard. Je restais ainsi immobile, sans savoir ce que je devais faire. Mon dresseur finit par me lancer, avec une pointe d’impatience dans la voix :

- On dirait que la CT a commencé à faire effet… Par contre je voudrais pas te brusquer, mais si tu ne commences pas à essayer tes nouvelles compétences, ce sera une gélule partie dans le vent. Je te fais pas payer ces médocs, mais on n’a pas un stock illimité. Donc faudrait que tu te bouges.

Je ne savais pas pourquoi, mais j’avais l’impression que si lui obéissais, je ne ferais que le regretter. Pourquoi ça ? Je dirais l’instinct. De toute façon, je n’ai aucun argument valable à lui donner. Et puis il n’arriverait pas à me comprendre, on est donc bien dans la panade.

- Bon… On dirait bien que tu recommences à faire la tête de mule… Si tu n’arrives pas à bouger tout seul, alors je vais devoir te donner un coup de main.

Il accompagna ses paroles d’un geste qui retranscrivait parfaitement ses dires. Il leva lentement le bras droit, avec la main ouverte. Il replia doucement les deux derniers doigts, les autres restaient tendus et collés entre eux.

- Je vais te donner une bonne torgnole dans la gueule. Ça risque de faire plutôt mal, même si tu es sensé avoir un crâne en béton. Mais si je te préviens, c’est que tu devrais être capable de l’esquiver, tout ce que tu as à faire, c’est de bouger. Attention, je vais me lancer…

Attends deux secondes, il ne va quand même pas faire ça ? Il n’est pas sérieux ? Et bah si ! Il commençait déjà à lancer un compte à rebours, comme si ça allait être un joyeux évènement ! Il avait annoncé son attaque le plus calmement possible, il fallait que je bouge. Il avait armé son tir, son décompte se terminait. Je le voyais commencer à descendre sa main, elle allait m’arriver droit dans la gueule. Mais alors que je pensais me la prendre dans moins d’une seconde, je remarquais que son geste devenait de plus en plus lent. Plus sa main avançait, et plus elle peinait à se rapprocher de mon crâne. Était-ce un effet secondaire de la CT ? Je n’en savais rien, mais cette attaque avait beau être lente, elle me semblait plus dangereuse que n’importe quelle autre. Il fallait que je l’esquive, à tout prix, quoi qu’il arrive. Je n’avais pas besoin d’armer mon saut, mes muscles étaient déjà bandés. Tout ce que j’avais à faire, c’était choisir une direction, avant que la main me tombe sur la gueule. Tant qu’à faire, autant s’éloigner de ce timbré le plus possible… C’est parti !

Un battement de cil. Un clignement de l’œil. Un millième de seconde. C’est l’exemple le plus concret que je peux sortir afin de donner une idée. Il m’a fallu qu’un seul instant pour faire un bond d’un mètre, afin de m’éloigner de lui. Une fraction de centième de seconde pour sauter, atterrir, m’arrêter, et me repositionner afin d’attendre la prochaine salve. Une fois que tout ceci s’était fini, tout était partit. Je pouvais voir tout ce qu’il se passait autour de moi, les bourdonnements s’en étaient allés, et le temps avait l’air d’avoir repris son cours. Mais la première chose que je remarquais au milieu de tout ça, c’était moi.

Je m’écroulais sur le côté, mes pattes ne pouvaient plus me soutenir. Je suffoquais sous mon propre poids, j’avais triplé de masse. J’essayais de remplir mes poumons d’airs à grands coups, mais ils me demandaient de plus en plus d’oxygène. J’étais exténué, j’avais utilisé toutes mes forces lors de ce court instant. Je jetais un coup d’œil vers Rode, qui avait sa main baissée, comme s’il s’était figé après avoir donné son coup dans le vide. Mais il me fixait du regard, et ses yeux verts me glaçaient le sang. Il avait pris maintenant un air amusé, fier. Comme s’il était prêt à m’annoncer tout content « Je te l’avais bien dit ». Allons bon, j’ai autre chose à foutre que de me faire sermonner… Il se releva, se dirigea vers moi et se mit à lire un petit papier plié 45 fois, comme si c’était une notice. Il commença ensuite à énumérer une liste, comme s’il voulait me faire la leçon :

- Modification légère de l’ossature, allègement artificiel de la masse du sujet, contraction des pattes antérieures et postérieures… Ces trois effets te permettent un déplacement rapide, expliqua-t-il en levant la tête de son livret, afin d’éviter l’attaque que ton adversaire pourrait te porter. Ensuite, affût des sens grâce à une poussée d’adrénaline, dans l’optique d’analyser chaque possibilité pour esquiver et contrer en temps réel. Enfin, ton corps fait baisser drastiquement la température interne, afin qu’elle se couple à l’humidité ambiante pour créer un reflet. Cette dernière caractéristique sera difficile à reproduire sans ces médocs… Faut dire qu’elles sont vachement efficaces, j’ai bien fait de suivre les conseils de monsieur Nikolaï là-dessus !

Alors c’est donc tout ça réunit qui fait la puissance de l’attaque reflet ? Je commence à comprendre pourquoi très peu de dresseurs font apprendre cette attaque à leur Pokémon. Elle est impossible à faire apprendre naturellement pour une créature de sang chaud, pour ce qui est de réguler sa température corporelle. Elle consomme en plus énormément d’énergie, sans compter la dose d’adrénaline qui agit maintenant comme un anesthésiant.

- Par contre, avant de reprendre une nouvelle pilule, il va falloir faire travailler ta condition physique. Pour un premier essai, c’est assez impressionnant, j’ai eu l’impression de te toucher, sans que ma main me le confirme. J’ai dû frapper ton image rémanente. Par contre, elle n’est restée qu’un très bref instant, et là ça pose problème. Il faut que tu sois capable de garder cette image sans consistance pendant au moins cinq secondes. Pour garder un reflet sur la durée, il faut que tu fasses des aller-retours sans arrêt, et tu devras améliorer ta vitesse si tu veux augmenter le nombre de fausses cibles. Mais si tu es déjà à la limite de l’évanouissement pour un seul déplacement, c’est qu’il faut améliorer ta condition physique.

Pas besoin d’un prix Nobel pour comprendre ça, mon séjour à l’hôpital m’a ramené à une condition physique déplorable. Je me demande s’il s’attendait déjà à un résultat comme celui-là. En tout cas, j’étais actuellement hors d’état de me battre, j’arrivais à peine à faire trembler mes pattes. Je me demandais si j’allais me réveiller demain avec des courbatures. Une fois qu’il était arrivé à ma hauteur, Rode posa un genou au sol et me tendit le thermos pour me rafraîchir le visage et me faire boire un peu. Rien qu’un peu d’eau fraîche au travers de ma gorge me faisait le plus grand bien, c’était vraiment agréable. J’avais déjà regagné un peu d’énergie, c’est toujours bon à prendre. Il m’annonça ensuite, après avoir attendu quelques minutes que je reprenne ma respiration :

- Tu ne reprendras pas de CT aujourd’hui, et je pense qu’il faudra attendre encore au moins une semaine. On va attendre encore un quart d’heure, puis on va se mettre à travailler l’endurance. Et cette fois ci, t’as intérêt à faire ce que je te demande, est ce que c’est bien compris ?

Route 211 : 19h27

- C’est pas encore ça… Bon, on va en rester là pour aujourd’hui, je vais préparer à manger. Mais saches qu’on va reprendre l’entraînement dès demain matin !

C’est vraiment sérieux ? Depuis quand est-ce que ce timbré se trimballe des bracelets avec des poids à l’intérieur ? Non seulement j’arrivais à peine à mettre une patte devant l’autre, mais il me lançait occasionnellement des cailloux qu’il ramassait sur le bord du chemin. Une fois que j’arrivais à éviter la plupart de ses projectiles, il me demandait de le suivre pour faire une course dans la petite forêt qui se trouvait à côté de notre campement. Son parcours était truffé d’embûches et de détritus par terre. Il n’avait pas de problèmes à les enjamber, mais c’est tout de suite plus compliqué quand on ne mesure qu’une quarantaine de centimètres et que des poids aux pattes me permettent de ne sauter que des petits bonds ridicules.

Si je revenais au campement à ses côtés, il me rajoutait une barrette de plomb à chaque patte, puis on recommençait le processus. On a dû visiter la forêt environ six ou sept fois, et pour l’instant, il ne m’a rajouté qu’un morceau de plomb. Chaque bracelet peut en contenir dix au total, et je n’arrive pas à en supporter seulement deux… Comment est-ce que je suis sensé faire ? Une fois qu’il m’avait retiré ces chaînes, je rampais jusqu’aux côtés d’Anna, qui s’était assise près du feu que notre dresseur avait allumé pendant l’entraînement. Elle me remarqua rapidement, et me demanda avec un peu d’appréhension dans la voix :

« - Est-ce que tout va bien ? Tu as besoin de quelque chose ? »
- Non merci… Juste besoin… De récupérer… Ça fait plaisir de voir que quelqu’un ait l’air de se soucier de ma santé.
« - L’entraînement avait l’air bien difficile alors. » remarqua-t-elle avec un petit sourire amusé et rassuré.
- Tu m’ôtes les mots de la bouche… C’est quoi cette idée de timbré ? Ça n’a pas de sens…
« - Ne t’inquiètes pas, Rode sait parfaitement ce qu’il fait. C’est compliqué au départ, mais tu sentiras vite la différence. »
- Parce qu’il t’a déjà fait faire ça ? C’est un vrai tortionnaire…
« - C’est le début qui prend du temps, au bout d’un moment, on n’y fait presque plus attention. »
- Comment ça… ? Attends un peu…

Je relevais la tête, intrigué, et regardais au niveau de ses poignets et chevilles… Elle portait elle aussi ces bracelets à la con. Et ils avaient l’air bien plus larges et lourds que les miens. Est-ce qu’elle les portait toute la journée ? C’était sérieux ?

« - Bah oui, répondit-elle d’un ton presque évident, tu ne l’avais pas remarqué ? »
- Je savais pas que c’était des putains de brassards avec des tubes de plomb dedans !
« - Ce n’est pas trop difficile, et puis il me les retire quand je dois combattre contre les Pokémon d’un dresseur. »
- Encore heureux ! Euh… Et contre les autres… ?
« - Comment ça ? »
- Ceux qu’on croise sur la route, les sauvages…
« - Pas besoin, je me débrouille assez bien pour les garder. »
- Et sinon… Tu as combien de poids dans chaque bracelet ?
« - Je ne sais pas, attends un peu. »

Elle détacha rapidement l’ornement fait de tissus et de métal de sa main gauche et le déplia. Il y avait en fait deux rangées de poids, pour doubler le poids du machin, évidement. Elle passa sa paume sur chacun d’entre eux, en murmurant son décompte à chaque itération. Une fois qu’elle avait fini, elle le renfila et m’annonça calmement et presque fièrement :

« - J’en ai seize à chaque membre. »
- Et tu trouves ça normal ?! J’avance à peine avec deux barrettes !
« - Je te l’ai déjà dit, c’est une question de temps. Moi aussi j’ai eu beaucoup de mal au début, j’ai stagné longtemps à trois si je me souviens bien. »
- C’est quand même impressionnant… En même temps, après ce que t’as fait à Vestigion, faut au moins ça pour avoir ton niveau.
« - J’ai beaucoup travaillé pour en arriver là. Et puis je ne suis pas toute seule, Rode supervise tout à la perfection. »
- Il me dérange un peu d’ailleurs… Toujours à faire attention à tout… Quelque chose me dit qu’il nous cache quelque chose.
« - Je ne pense pas, il veut juste bien faire. »
- Bah tiens, si tu peux lire dans les pensées des gens, tu pourrais voir ce qu’il nous prépare.
« - Non, je ne le ferais pas. »
- Et pourquoi ça ?
« - Parce que c’est son esprit, je n’ai aucun droit d’y fouiller dedans. »

Elle m’avait répondu d’un ton sec et strict, même son visage s’était légèrement crispé. J’avais fait une boulette, c’était vraiment con de ma part.

- Désolé, j’y avais pas pensé sur le coup…
« - Ce n’est pas grave, je ne t’en veux pas. De toute façon, c’est dur de se faire une opinion sur quelque chose comme ça. »
- C’est vrai…

J’étais maintenant presque gêné sur le coup, je ne savais plus trop quoi dire. Tout ce qu’on pouvait faire, c’était attendre que la bouffe soit prête. Les secondes avaient l’air de passer aussi lentement que des minutes. Anna fixait le ciel, pour admirer les oiseaux tourner en rond, cherchant leur dîner pour la soirée. Je ne sais pas comment, mais cette discussion avait suffit à la faire sortir de sa morosité. Elle abordait maintenant un sourire joyeux.

- Tiens, c’est la première fois que je te vois sourire comme ça.
« - Ah bon ? Je ne l’avais pas remarqué. »
- Quelque chose te tracasse ?
« - Oh… Trois fois rien, tu n’as pas à t’en faire. »

Sur le coup, je venais de me rendre compte. C’est vrai ça, je n’avais pas à m’en faire, je n’en avais aucune raison. Aucune raison de me soucier d’eux, en tout cas tout ce qui les concerne de près ou de loin. Après tout, je n’étais qu’un associé de Rode pour un remboursement. J’étais étonné de voir à quel point je m’étais vite intégré dans l’équipe. Enfin équipe… Ils ne sont que deux, mais bon, ils ont l’air de faire avec. En tout cas, je me dis que le voyage ne serait pas insurmontable avec ceux-là. On verra bien comment ça se déroulera. Mais j’ai l’impression que la semaine qui allait suivre sera dure à avaler, si j’arrive à suivre la cadence. L’avenir semble déjà jonché d’embûches, mais on s’y habitue vite, quand on a la volonté de rester en vie.

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Notes de l'auteur : Vous êtes arrivé au bout du dernier chapitre disponible ! Bon... Dit comme ça, c'est pas spécialement une bonne nouvelle... Mais je suis là rien que pour vous ! Si vous voulez être mis au courant pour chaque nouveau chapitre sortit, dites le moi en mp ! Je garderais votre pseudo dans une liste et vous serez prévenus par message privé à chaque mise à jour de cette fanfic, ou si j'en sort une nouvelle, ou même pour des informations importantes. Bonne continuation et encore merci à toi pour être toujours là pour lire mes chapitres, même si les temps sont durs !