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Legendary Bonds de Clafoutis



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» Auteur : Clafoutis - Voir le profil
» Créé le 10/03/2016 à 15:57
» Dernière mise à jour le 10/03/2016 à 15:57

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Cinquième mensonge : Contre le gardien.

 
 
 Sofian lui-même restait éberlué devant sa nouvelle puissance. Si on lui avait dit un jour qu'il creuserait à mains nues des trous dans les parois rocheuses d'une prison souterraine, il y aurait très peu de chance qu'il ne l'aurait cru. Pourtant, c'était bien ce qui était en train de se passer.

Derrière lui, Steeve Manyula lui donnait des directives, diablement précises. Depuis dix minutes, Sofian avait l'impression de creuser toujours la même roche, alors que Steeve semblait savoir exactement où il se trouvait et guidait son compagnon à travers cette océan terrestre comme s'il était chez lui.

Steeve avait tout d'un professionnel ; il ne payait pas bonne mine et avait tendance à l’insouciance certes, cependant, il était un Sbire d'élite, un soldat. Ses cinq – voire six ou sept – sens étaient exacerbés, rien qu'en frappant la roche et en étudiant l'écho, il parvenait à se situer très précisément dans la prison et à en déduire la sortie du couloir. Chose qui était la fois terriblement impressionnante et incompréhensible pour Sofian.

La première phase de leur plan d'évasion était simple : sortir du 5ème niveau. Le plus accessible. Steeve et Sofian auraient bien voulu « creuser » jusqu'au premier niveau et sortir ni vu ni connu, or, entre les niveaux se trouvait se fichu alliage d'acier indestructible. De ce fait, la seule manière de passer d'un des niveaux à l'autre était d'emprunter gentiment les escaliers prévus à cette effet.

Il y avait bien un ascenseur, mais – selon Steeve – il fallait une garde magnétique pour l'activer, carte que seul les hauts gradés de la prison possédaient. Et le duo n'avait clairement pas le temps de faire du porte à porte quémander le précieux passe !

Sofian devait dont simplement creuser, sous la direction de Steeve, jusqu'au point le plus proche des escaliers menant au quatrième.

Soudain, Steeve saisit l'épaule de son camarade, le sommant d'arrêter. Justement à ce point, ils y étaient. Pour l'instant, tout était calme, mais ça n'allait assurément pas durer. Dès qu'ils sortiraient du « mur », l'enfer commencera.

Steeve hocha doucement la tête, après un moment d'hésitation, Sofian fit de même. Il concentra l'énergie de son lien et frappa puissamment la paroi rocheuse, créant un gouffre jusqu'à un long couloir d'acier gris.

Heureusement, Steeve ne s'était pas trompé, un beau escalier aux marches très accueillantes était en vu. Sans hésiter plus d'une seconde, le duo s'engouffra à l’intérieur.
Malheureusement, l'architecture était déjà utilisée par un sympathique quatuor de gardes qui s'apprêtait certainement à commencer une ronde.

Steeve réagit dans la seconde, et malgré ses articulations endolories dues à une séquestration prolongée, parvint à neutraliser trois des gardes en trois gestes d'une agilité féerique. Or, le quatrième militaire parvint à prendre la fuite, et immédiatement après, de multiples alarmes assourdissantes envahirent la prison, sans oublier ces fichue loupiotes au plafond à la lumière rouge-vif à vous crever la rétine qui les aveuglaient plus ou moins intensément.

— Bon, c'était prévisible, non ?

Cependant, Steeve restait d'un calme extrême – alors que Sofian n'était pas loin se souiller les dessous.

— Je crois que c'est clair maintenant, continua t-il de sourire, il n'y a plus de temps à perdre !

Sur ses sages paroles, le prisonnier vétéran prit Sofian par le bras et ils commencèrent leur longue ascension.


 ***

Lorsque le tumulte des sirènes explosa, Zmrc eut comme qui dirait la peur de sa vie. Avait-il déjà été repéré ? Jean-Kevin avait-il donc eu raison en le traitant d'inconscient ? Avait-il trop voulu jouer au héros ? Sa dernière heure avait-elle sonnée ? L'adolescent resta pétrifié une bonne dizaine de secondes avant de réaliser que l'afflux de gardes ne se dirigeait pas vers lui, mais complètement à l'opposé.

Ce qui était vraisemblablement une bonne nouvelle, en théorie ; une alarme ne sonnait pas sans raison. Il devait se passer quelque chose ici en ce moment même, quelque chose qui requérait la présence expresse de toutes les forces en présence. Zmrc espérait franchement et naïvement que cela n'allait pas compromettre son infiltration.

Pour l'instant, le courageux héros en herbe se cachait derrière un pot de fleur, dans un coin plus ou moin éloigné de l'agitation. Il était peut-être invisible, mais pas intangible. Si un garde venait à le bousculer par inadvertance, il risquerait d'avoir de gros gros ennuis...

Il avait vraiment joué les durs devant Jean-Kevin ; il avait surtout agi dans le feu de l'action. Cependant, maintenant qu'il était dans la gueule du loup, Zmrc se demandait comment il avait bien pu s'embarquer lui-même dans toute cette histoire sans préparation ultérieure.

Il voulait réellement aider Sofian, c'était clair. Or, le vouloir ne suffisait pas, il fallait d'abord le trouver. Sauf que la prison semblait énorme, et en plus composé de plusieurs étages souterrains – selon le joli plan accroché au mur. Cela lui prendrait des années avant de trouver la bonne cellule !

— Dépêche-toi ! hurla puissamment un garde jusqu'à en faire sursauter Zrmc. Nous aurons besoin de toutes nos forces contre lui !
— C'est vraiment celui de ce matin qui s'est échappé ? répliqua le partenaire du soldat. Celui avec le Lien ? Je pensais qu'ils l'avaient bourré de drogues !
— Pas assez visiblement ! Allez, grouille, quelque chose me dit que celui qui le maîtrisera aurait une sacrée belle prime...
— Mouais, j'espère qu'elle a intérêt à être vraiment belle cette prime, en plus j'ai entendu dire qu'il était avec l'un des Sbires les plus meurtriers des Protecteurs... je savais que ce n'était pas une bonne idée de garder ses monstres en vie...

Les deux gardes continuèrent leur course, s'éloignant trop pour que Zmrc pût en écouter plus. Cette discutions avait piqué l'intérêt de l'espion en herbe. Alors comme ça, quelqu'un tentait de s'échapper ? Quelqu'un qui était « arrivé » ce matin qui plus est... serait-ce possible que... ? Cela semblait fou, mais c'était sa seule piste pour l'instant, son seul espoir.


***


Une fourmilière. Sofian avait la curieuse et affreuse impression de se trouver dans une monstrueuse fourmilière infernale. Les étroits couloirs se multipliait à un point dément ; des hommes armés pleuvaient de partout, accompagnée de féroce Pokémon.

Pour le plus grand bonheur de Sofian, l'étroitesse des lieux empêchaient les gardes d'utiliser leurs armes à feu
– de peur de viser l'un des leurs. Cependant, ils n'hésitaient pas à sauter joyeusement sur les fugitifs, couteau de guerre en main, pendant que leur Pokémon – principalement divers bestioles doués de crocs et griffes, se jetaient eux aussi dans la bagarre.

Steeve Manyula se démontrait d'une efficacité démoniaque. Il esquivait chaque assaut et frappait toujours juste. Il ne touchait qu'une seule fois ses adversaires. Cela suffisait amplement à les neutraliser. Sofian ne savait pas vraiment si Steeve les assommait ou les tuait, en tout cas ils ne bougeaient plus.

Mais surtout, le brun avait autre chose à penser qu'à l'état de santé de ses adversaires. Comme par exemple la sienne, de santé. Comme Steeve, lui aussi était la cible de myriade d'ennemis. Bon point cependant, aucun Pokémon ne l'attaquait, bien que Sofian ne comprenait pas vraiment pourquoi. Peut-être que les Pokémon étaient impressionnés par son aura ? … nan, même-lui il n'y croyait pas.

Mais même sans la tonne de bestioles quadrupèdes sur lui, Sofian avait beaucoup de mal à se défendre. Alors certes, ses membres étaient d'acier ; ce qui était au passage très pratique pour encaisser les coups de couteaux. En revanche, Sofian n'était d'ordinaire qu'un simple lycéen, il connaissait rien à l'art de la guerre ! Et cela se voyait surtout dans ses mouvements ; hésitant, pataud, peu efficient. A l'opposé, les gardes qu'il affrontait étaient surentraînés.

Heureusement, comme le disait Steeve, l'objectif n'était pas de vaincre tout le monde, mais bien de s'enfuir. Alors, Sofian adopta une posture tout autre, il se courba légèrement vers l'avant, concentrant son lien dans sa tête qui devint d'acier, avant de foncer comme un forcené droit devant lui. L'effet fut radical. Un boule de bowling géante n'aurait pas fait mieux, et la légende raconte que tous les pauvres gardes qu'il envoya valser reçurent plus tard l'oscar de la meilleure interprétation de quille.

— Sofian !

Sauf qu'en agissant ainsi, il avait complètement bifurqué dans un mauvais couloir. Déconcentré, Steeve tenta de le rattraper mais avant même qu'il ne pût faire un pas, un perfide couteau lui transperça la jambe.

— … !!

Supportant la douleur, Steeve prit appui sur le sol d'une main et balaya puissamment ses adversaires d'un large coup de pied circulaire. Le geste le faisait horriblement souffrir, mais il n'avait que faire de la douleur dans ce genre de situation. Il était un Sbire d'élite, les blessures avaient été et étaient son quotidien.

Au moins, son action brusque lui avait permis de se débarrasser des gardes qui le parasitait pendant une seconde, le temps suffisant pour courir vers Sofian et le rediriger vers la bonne direction. Il aurait été plus prudent de s'enfuir seul, mais Steeve n'était pas un type qui abandonnait ses alliés. D'ailleurs, c'était ainsi qu'il s'était fait capturé, en protégeant l'un de ses camarades... le pauvre, il devait s'en vouloir maintenant. Steeve avait hâte de sortir pour pouvoir s'excuser.

Néanmoins, la technique « boule de bowling » de Sofian donna des idées au Sbire d'élite. C'était pour ainsi dire vachement pratique ! Quand il courrait sans regarder, Sofian était un véritable Tauros, et grâce à ses membres et sa tête d'acier, il ne craignait pas de se prendre un coup de lame surprise. Le seul hic restait la mobilité, pas simple de tourner à une telle vitesse, et manque de pot, la prison était remplie de couloir en tout genre.

Alors, Steeve décida de contourner le problème, simplement en montant sur le dos du brun. C'était fort embarrassant et dégradant pour Sofian, mais il n'avait pas vraiment le choix de de refuser.

— A droite !

Utilisant toutes ses forces, Steeve dévia la course de « sa monture » en lui contorsionnant les épaules dans la bonne direction. Bon, il arrivait quelque fois que le virage soit impossible et que le duo se crashât dans le mur, mais qu'importe. Le mur prenait bien plus de dommages qu'eux.

Les gardes étaient complètement dépassés, tant par la vitesse que par la force d'Acier de Sofian. En dernier recours, ils dégainèrent leur pistolet, sans succès ; les balles ricochaient bêtement sur le corps de Sofian. Certains fragments d'aciers revinrent même vers leur propriétaire, leur offrant ainsi une place de choix dans les Darwin Awards.

Bientôt, le second escalier fut en vue ; plus que trois étages avant la sortie ! Steeve espérait que les choses ne s’éternisassent pas, c'était qu'il commençait réellement à perdre une quantité non-négligeable de sang. Ce fichu couteau ne l'avait pas raté, il avait sans doute touché un truc qu'il n'aurait jamais du toucher...

Malheureusement, les espoirs de Steeve furent vite réduit à néant. Puisqu'au troisième étage les attendaient tout un régiment de Magmar, prêt à faire feu. Littéralement.

— Zut, fit simplement Steeve.


***

Prudemment, très prudemment. Zmrc s'évertuait à se faufiler parmi les hommes armées tous en faisant bien attention à ne pas se faire repérer. Heureusement pour lui, son « pouvoir » d'invisibilité fonctionnait parfaitement et personne ne semblait se douter de quoi que ce soit.

Heureusement car sinon, il serait rapidement dans la mouise. Déjà, à chaque étage, un bataillon était postés pour prendre les fuyards en embuscade. Jamais Zmrc n'avait vu autant d'armes en une journée, c'était tout simplement démentiel. Un seul homme se trimballait au minimum avec des couteaux, une mitraillette, des grenades et un lance-flamme dans le dos ; au minimum ! Sans oublier bien sûr la multitude de féroces Pokémon qui semblaient rêver de pouvoir planter leur crocs dans de la chair fraîche.

A côté de cela, Zmrc faisait bien pâle figure avec ses petits bras. Son seul avantage résidant dans son « invisibilité » et il comptait bien le garder le plus longtemps possible.

Les gardes avaient néanmoins leur utilité. Grâce à leur mouvement constant, Zmrc parvenait à se repérer plutôt facilement dans l'immense dédale qu'était cette prison ; ils se dirigeaient tous au même point, indubitablement l'endroit où se trouvait les fuyards. Et franchement, Zmrc se disait qu'il devrait les remercier par la suite, car vu le nombre de bifurcations, d'impasses, de salles, il aurait bien vite fait de se perdre, le pauvre.

Au bout de quelques minutes de marche intense, il arriva finalement à destination. Un amas impressionnant de garde et de Magmar entourait deux hommes. Sofian était l'un d'entre-eux. Le cerveaux de Zmrc rentra soudain en ébullition. Que faire ?! Les Magmar s’apprêtaient à cracher leur flamme infernale. Zmrc n'avait jamais été un rapide, mais il comprenait aisément qu'un corps humain n'était pas fait pour supporter des jets de flammes.

L'espace d'un instant, Zmrc songea à faire appelle à son propre Pokémon, son fidèle Couaneton. Mais même s'il accordait une confiance sans limite à son Méphistophélès, il doutait que le petit caneton pût vraiment faire quelque chose dans ce genre de situation.

Or, les Pokémon Feu n'eurent pas la politesse d'attendre qu'il finît d'arpenter son labyrinthe de réflexion. Comme un seul diable, les Magmar éructèrent en même dans un Lance-Flamme magmatique. Même Zmrc ne sût ce qu'il se passa dans sa tête à ce moment là. C'était une histoire de secondes, voire moins. La mort, arpentant le feu de l'enfer, traçant immanquablement son chemin vers Sofian et son acolyte.

Zmrc sauta, tout simplement. Doué d'une vitesse qu'il ne soupçonnait même pas, il bondit, jeta par sécurité sa Pokéball au loin, et s'interposa entre Sofian et son destin ; un cri de souffrance déchira le couloir. Un long cri. Zmrc ne craignait pas la mort, car il en était immunisé. Il ne savait pas pourquoi, ni comment, mais chacune de ses blessures se fermaient les une après les autres, jusqu'à disparaître comme si elles n'avaient jamais existé.

Cependant, même si la blessure disparaissait, ce n'était pas le cas de la douleur. Jamais au grand jamais il n'avait connu pareil supplice. Il pouvait sentir sa chair bouillir, sa peau se décoller, son sang cuire ; or, la mort ne venait pas le délivrer, Zmrc était piégé dans une boucle infinie de vie. Son corps se reconstituait sous les flammes, vierge de toutes cicatrices, avant de subir une nouvelle fois la fureur des flammes.

Enfin, les Magmar cessèrent le feu, sous les ordres de leur dresseur, dépassée par le reversement inattendu de la situation.

En face, se trouvait un jeune homme, serrant terriblement les dents jusqu'au sang, dans le fol espoir d'étouffer son martyr. Il était recouvert de flammes que ne voulaient s'éteindre ; chacun était témoin du miracle. Un homme entourée de flammes, debout malgré tout, une fureur divine hurlant dans ses yeux.

— Q-Qu'est-ce...

Sofian et Steeve en restèrent bouché-bée. Eux qui croyaient leur dernière heure ayant sonné, ils n'imaginaient pas une seconde recevoir l'aide de la providence dans un endroit pareil.

— … Sofian...

Soudain, l'être flambant se retourna faiblement, fixant le brun, prononçant son nom. Sofian tressaillit. Tout d'abord d’appréhension, jusqu'à ce qu'il reconnut certains traits chez son sauveur. Des traits familiers, et troublants.

— … ! Z...Zeme... euh... c'est toi ?

Sofian aurait bien voulu prononcer le nom de son miraculeux sauveur, mais bien qu'il s'en souvenait, il ne parvenait malheureusement pas à la prononcer. Zmrc lui adressa un faible sourire.

— … salut...
— FEU !

Cependant, les gardes n'étaient pas spécialement intéressés par ces retrouvailles inespérées. De leur point de vue, un nouvel ennemi dangereux venait de faire son apparition, et il était urgent de s'en débarrasser.
Une nouvelle fois, le déluge infernal s'abattit sur Zmrc ; l'odeur de chair brûlée devenait insoutenable.

— C'est quoi ce type ? ne put s'empêcher de souffler Steeve. On dirait qu'il se régénère sans cesse !
— Il faut l'aider ! paniqua Sofian devant le martyr de son ami.

L'heure n'était pas à l'admiration. Certes, quelque chose d'absolument irréaliste se passait juste devant eux, mais chaque chose en son temps. Sofian observa fébrilement les alentours, comme un petit animal apeuré. Les ennemis étaient nombreux et lourdement armée. Steeve était blessé. Zmrc brûlait. Et lui... il n'était que lui.

Cependant, il était le seul à pouvoir faire quelque chose. Nelly aurait pu faire quelque chose, elle, si elle était là. Et grâce à son Lien, il devait aussi être capable d'en faire autant !

Serrant les dents, Sofian concentra le maximum de puissance qu'il le pouvait, rien que dans sa jambe droite. Absolument tout, dans la limite la plus absolue. Désormais, il ne sentait que sa jambe qui se recouvrait d'une couche d'acier de plus en plus imposante. Il frappa le sol. Les vibrations firent chanceler la moindre de ses fibres.

Tout le troisième niveau de la prison trembla terriblement, sous le point d'impact, de vives et énormes fissures éruptèrent, le plafond faillit s'écrouler, tous les Magmar s'écroulèrent.

— W-Woow, siffla Steeve. Rien a faire, les Liens m’impressionneront toujours...
— J-Je ne suis pas sûr moi-même d'avoir compris ce que j'ai fait, avoua Sofian encore un peu sur le choc.

Le brun secoua la tête, recouvrant ses sens. Il couru brusquement vers Zmrc, faisant presque tomber Steeve qui était toujours sur son dos.

— T-Tu va bien ?!
— …ha...haha, ricana Zmrc, j'ai un peu de mal à le croire mais... ouais...

Tout le monde avait du mal à le croire en fait. En à peine quelques secondes, le corps de l'adolescent était redevenu aussi pur qu'au premier jour. Il restait bien quelques traces de cramoisis ici et là, et encore, elles s'éclaircissaient à vue d’œil.

— N-N'ai crainte, continua Zmrc. Le prince des ténèbres est venu te sauver !
— … tout va bien alors, le suivit Sofian.
— Euh les mecs, se fit remarquer Steeve. Je ne veux pas casser l'ambiance, mais on ne devrait pas profiter de la confusion pour s'enfuir ?

Sofian et Zmrc acquiescèrent. Zmrc alla récupérer la Pokéball de son Couaneton. Il avait bien fait d'avoir la présence d'esprit de l'avoir jeter avant d'avoir sauter, le feu des Magmar ne pardonnait pas, tout ce qui était sur lui avait tout simplement brûler dans le moindre de ses atomes.

Ce dernier point inquiétait légèrement Zrmc. Son pouvoir d'invisibilité reposait sur son manque de présence. Pour une raison qu'il ignorait encore, l'adolescent avait si peu de présence qu'il passait totalement inaperçu. C'était pour cela qu'il portait un masque en permanence, pour se faire remarquer. Par extension, tout moyen qui comblait son manque de présence effaçait son « invisibilité ». Et il était difficile de ne pas remarquer un adolescent désormais complètement nu qui venait de faire une véritable plongeon dans un volcan.

Autrement dit, Zmrc ne pouvait plus compter sur son pouvoir pour passer inaperçu.


***

Le trio arriva plus ou moins facilement au deuxième niveau de la prison. Grâce à Sofian et son mode « Tauros », ce dernier était inarrêtable. Cependant, Steeve était anxieux. Le deuxième niveau était le fief de Torideps, le directeur de la prison. Et qu'on se le dise, si les Précurseurs l'avaient choisi pour diriger un lieu aussi important, ce n'était pas pour rien.

Ces craintes furent rapidement confirmer. Le deuxième niveau, contrairement aux autres, était principalement constitué d'une immense salle centrale où le plafond culminait à plus de huit mètres de haut. Le terrain idéal pour un combat en bonne et due forme. Un peu moins pour s'enfuir en catimini.

Si le plafond était aussi haut, ce n'était pas une coquetterie. Au centre du niveau, Torideps les attendait fermement, les bras croisés. Le directeur imposait par sa seule présence, impérialement robuste, du haut de ses deux mètres trente, on dirait un forteresse infranchissable. Mais plus que tout, ce fut la « chose » à ses côtés qui impressionna le plus Sofian.

Le brun avait quelques connaissances en Pokémonologie, et il reconnaissait sans mal un Bastiodon. Sauf que dans les livres, la bestiole culminait à un mètre trente, voire deux pour les plus imposants. Or, cette « chose » touchait presque le plafond, qui était quand même à huit mètre. Évidement, la largeur de la bête faisait aussi chanceler, prenant à elle seule presque le quart du niveau entier.

— Q-Qu... d-d...m...

Visiblement, Sofian voulait dire quelque chose. Mais en était incapable. Cette « chose » était peut-être un Bastiodon, mais pour lui, c'était plus la matérialisation même du concept de « désespoir ». Steeve restait imperturbable, peu de chose était capable de lu faire perdre son petit sourire et son air affable. Et Zmrc, il ne s'était jamais senti impuissant ; et il commençait à avoir un peu froid sans ses vêtements.

— Je vous félicite d'être arrivé aussi loin, tonna puissamment Torideps d'une fois caverneuse. Cependant, votre périple se termine ici.

Les présentations n'étaient pas le fort de Torideps. Il n'avait jamais été un homme de parole. Il n'avait qu'une hâte, se débarrasser de ses nuisibles et de retourner à la paperasse l'attendant dans son bureau.

Ce fut donc sans plus de procès que l'énorme Bastiodon poussa un atroce Hurlement, si intense qu'il projeta à lui seul le trio contre le mur comme s'ils étaient de la simple poussière.

— Ce ne sera pas facile les mecs ! sourit Steeve malgré tout.
— Sans blague ?! geignit Sofian.
— Ce n'était pas une blague, commenta innocemment Zmrc, ce n'était pas drôle !

Sofian souffla, blasé. Avant de paniquer terriblement :

— Euh... c'est moi où il CHARGE ?!

Effectivement, le Bastiodon chargeait. A chacun de ses pas, la prison tremblait sous son poids incommensurable. Nul doute qu'une confrontation avec cette brute ne faisait pas du bien à l'espérance de vie.

— … Je propose qu'on se disperse ! lança nonchalamment Steeve.

Le message fut bien reçu. Et tous firent leur possible pour atteindre les côtés de la pièce. Vu son gabarit, ce truc ne devait être capable que d'aller en ligne droite. Enfin, Sofian l'espérait très très fort.

Mine de rien, le Bastiodon était assez rapide et Steeve fut forcer de faire appel à toute ses forces pour accélérer, attraper Sofian et Zmrc, et les mettre hors de danger, juste avant que le monstre préhistorique ne déforme dangereusement les parois de la prison en les percutant.

— Perte de temps, statua Torideps. J'espérais en finir avec cette attaque.
— Pas de chance mon pote ! le nargua Steeve.
— T-Tu crois vraiment que c'est une bonne idée de le provoquer ? geignit Zmrc.

Steeve ricana faiblement. Non, bien sûr que ça ne l'était pas. Surtout que son précédent effort physique n'avait pas fait plaisir à la blessure à sa jambe meurtrie, qui colorait un peu trop le sol son goût. Il n'était pas au mieux de sa forme, il en avait bien peur. Et ses années d'incarcération couplée à une alimentation très rudimentaire n'aidaient pas non plus.

Et surtout, il n'avait pas d'armes, ni Pokémon. Comment passer une forteresse vivante avec ses poings et ses pieds comme seul atout ?

— Barrage, souffla Torideps.

Le Bastiodon hurla de nouveau, et cette fois-ci, le plafond s'écroula stratégiquement autour du trio de fuyards, les entourant d'immenses blocs d'acier et de roche. Et la chose chargea de nouveau.

— Une bonne technique, admit Steeve. Nous empêcher de nous enfuir avant de lancer un assaut fatal. Simple et efficace.
— C'est cool tout ça, se crispa Sofian. Mais une idée de comment on s'en sort ?!
— Pas la moindre !
— Ce serait bien si on pouvait stopper sa course..., se mit à rêver Zmrc.
— Mmh, réfléchit Steeve. Si l'on ne peut pas éviter une attaque, il suffit de l'annuler. Pas idiot comme raisonnement.
— Génial, geignit Sofian. Et une idée de comment on stoppe une montagne vivante ?
— Pas la moindre ! s'exclama Steeve en faisait un clin d’œil enthousiasme.
— Tu crois vraiment que c'est le moment de faire des clins d’œil ?!

Le Bastiodon rentra en contact avec son barrage et le traversa comme du beurre. Plus que quelques mètres avant l'impact fatale.

A la vue la gargantuesque montagne d'acier, Zmrc poussa un cri. Alors oui il était invincible, mais l'idée de se faire écraser comme une crêpe ne le réjouissait pas vraiment.

Et le second miracle arriva. Le Bastiodon freina brusquement à quelques centimètres du groupe. Ses deux énormes yeux ambrées fixait l'adolescent nu avec un nuage de crainte.

Torideps fronça les sourcils, surpris par le retournement de situation et fixa lui aussi Zmrc. Alors c'était lui, l'adolescent dont on lui avait parler, celui qui avait survécu aux flammes des Magmar. Un être étrange qu'il n'avait jamais vu avant. Comment avait-il pu infiltrer sa fière prison sans se faire remarquer ? Torideps comptait bien le découvrir.

— O-On est encore en vie ? lâcha Sofian sans vraiment y croire.
— Je pense, confirma Steeve en penchant légèrement la tête.
— … gnn... !

Subitement, Zmrc se tînt la tête, prit d'une intense migraine. Il avait l'impression qu'une tempête déferlait dans son cerveau, il ne contrôlait plus ses membres, ses sens, ses mouvements. Il partait en roue libre.

Comme le vent, Zmrc fila à quelques millimètres du visage du Bastiodon. Il était comme possédé, les yeux vide et dépourvues de toutes volontés. Il plaça la paume de sa main droite devant lui, et brusquement, le Bastiodon, dans toute sa masse, fut brutalement propulsé en arrière. Sofian et Steeve en restèrent bouche-bée.

Mais Zmrc ne s'arrêta pas là, il leva cette fois-ci sa main gauche, et le Bastiodon – qui venait de s'écraser contre la parois – fut irrésistiblement attiré vers l'adolescent, sans que le monstre ne put rien y faire. Et de sa main droite, il le renvoya contre le mur comme s'il jetait un vulgaire caillou.

— … des pouvoirs surhumains et une invulnérabilité totale, maugréa impassiblement Torideps. Cyrus ? Non, ce n'est pas lui... il existerait donc un autre Héritier d'Avalon ?

L'imposant directeur soupira lourdement. Encore un contre-temps. Et pendant qu'il s'amusait ici, personne ne remplissait les centaines de papiers urgents l'attendant dans son bureau ! Torideps plongea la main dans sa veste rocailleuse et en sortit une petite seringue.

Il n'aimait pas vraiment utiliser ce genre de subterfuge, mais il n'avait pas vraiment le choix dans ce monde de fous. La seringue contenait une drogue concoctée par Acène Windie, une substance incroyable capable d'augmenter drastiquement les compétences humaines. Torideps ne savait pas précisément ce qu'il y avait là dedans ni comment cela fonctionnait, et honnêtement, il n'avait pas envie de le savoir. Enfin, Acène avait été suffisamment sympathique pour fournir au directeur de la prison une certaine dose de ce produit miraculeux, en cas d'urgence.

Torideps s'injecta la drogue. Sa mission première, celle de garder la prison, primait sur tout. Il pouvait sentir ses limites physiques se briser, en plus d'un sentiment de dégoût intense. Non, décidément, il n'aimait pas utiliser ce truc.

Armée de sa nouvelle force, Torideps se lança dans la bataille, à la rescousse de son Bastiodon géant. Son cerveau de bureaucrate avait rapidement analyser la situation. Son adversaire semblait possédait l'étrange capacité de repousser ou attirer n'importe quoi, indépendamment de sa masse. Ce pouvoir venait sans doute de ses mains, vu qu'il les levaient à chaque fois.

La solution se dégageait d'elle-même, il suffisait simplement de neutraliser rapidement l'élément perturbateur, en évitant de se frotter à ses mains.

Cette stratégie en tête, Torideps bifurqua au dernier moment et infligea un coup de pied retourné tonitruant à Zmrc, rompant l'emprise que ce dernier avait sur le Bastiodon. L'adolescent alla se fracasser contre le mur, cependant, il ne lui fallut pas longtemps pour revenir sur pied, fixant Torideps comme une bête sauvage.

Le directeur de prison soupira pour la millième fois. Pourquoi ce combat durait autant de temps ? Il avait encore tant de formulaires bien plus importants à remplir.

Cependant, ce qui devait être fait devait être fait. Torideps fonça vers son adversaire, et s'engagea avec lui dans une véritable lutte acharnée. Il faisait tout pour ne pas toucher les étranges mains de l'adolescent bien sûr, ce qui n'était pas bien difficile en l'état. Zmrc agissait entièrement à l'instinct, sans aucun réflexion en amont, ce qui le rendait extrêmement prévisible pour la machine intellectuelle qu'était Torideps.

— I-Il se débrouille vachement bien ton ami ! s'exclama Steeve.
— J-J'en suis le premier surpris ! bafouilla Sofian.
— Il a un Lien lui aussi ?
— Euh... pas que je sache...

Cependant, le duo se rendit vite compte que les questions devront attendre. Car maintenant que Zmrc était occupé avec Torideps, le Bastiodon géant n'avait plus rien pour barrer sa route. Tout naturellement, il se retourna vers Steeve et Sofian.

— … tu penses que je pourrais le distraire en faisant des claquettes ? geignit Steeve.
— … j'admire comment tu peux être aussi insouciant dans une telle situation ! avoua Sofian.
— Hahaha..., ne fait pas attention à moi, c'est le désespoir qui parle !

Oui, le désespoir. Sofian aussi le ressentait, genre très clairement. Il avait eu un éclair d'espérance en voyant Zmrc faire ses tours de passe-passe – certes mystérieux, mais diablement spectaculaires – tout à l'heure mais la réalité l'avait vite rattrapé.

— Mais toi tu ne peux pas faire un truc ? souleva soudain Steeve. T'as le Lien de Cobaltium, un Pokémon Acier de légende ! Tu ne vas quand même pas perdre contre un simple Pokémon Acier commun !
— Va dire ça au Pokémon « commun » de sais-pas-combien de mètre de haut ! protesta Sofian.

Mais là où Steeve avait raison, c'était que si aucun d'eux ne faisait quelque chose, il ne fallait pas être madame Irma pour deviner leur destin. Or, Steeve était blessé et ne disposait que de ses poings. Sofian lui, était encore plus ou moins valide et possédait un Lien le rendant surhumain. Si quelqu'un devait faire quelque chose, c'était bien lui.

— … bon, admettons, souffla le brun. Mais si ça foire, ce n'est pas de ma faute, ok ?
— Courage, amigo ! l'encouragea Steeve à sa manière.
— … mouais...

Sofian soupira, de peur, d'irritation, de résignation... de plein de choses en fait. C'était ridicule. Lui, vraiment, le faible Sofian, contre un titan d'Acier de plusieurs centaines de tonne ?!

Sofian était déjà allé au plus loin qu'il le pouvait avec son Lien. Malheureusement, il semblerait que la maîtrise de ce truc ne se faisait pas instinctivement du premier coup. Il fallait du travail et du temps. Chose que Sofian n'avait pas.

Mais il n'avait pas non plus le luxe de se plaindre. Sofian réitéra son mode « bowling », le même avec lequel il avait envoyé valser quantité de gardes un peu plus tôt. Si ça marchait avec des humains, ça devait aussi marcher avec des monstres titanesques, … non ?

Sofian eut rapidement la réponse. Et il se sentit très bête d'avoir imaginer une seule seconde d'avoir une petite chance. Le brun à la Tête de Fer se cogna stupidement contre le crâne sur la créature d'Acier.

— Aïeuh ! lâcha t-il bêtement. Ça fait maleuh !

Le Bastiodon sembla pouffer légèrement, fixant le brun de ses deux énormes yeux ambrés.

— Euh... t-tu ne vas pas me faire de mal, hein ? sourit maladroitement Sofian. O-On est des copains d'Acier ! O-On peut s'entendre, hein ? ...hahaha...

Le titan d'Acier ne sembla pas d'accord, et d'une simple Charge, envoya son « copain d'Acier » s'encastrer dans le mur. Heureusement, le Lien de Sofian lui conférait une résistance suffisante pour supporter un tel choc.

— Et voilà, geignit Sofian, me voilà à jouer le remake de Passe-muraille...
— Je te donnerais l'Oscar direct si on était pas autant dans la mouise, ricana Steeve. Je dois t'avouer que je suis un peu à court d'option là !

Un Bastiodon gigantesque, un Torideps aux capacités surhumaines, et en plus, des gardes se tenaient en retrait, protégeant les sorties. En résumé, ce n'était pas la joie.

— Booon, soupira le Sbire d'élite, et quand on est à court d'option, il faut laisser parler son imagination !

Un sourire inquiétant illumina un moment son visage. Tout d'un coup, malgré sa jambe en sang, Steeve prit un puissant appui sur le sol et se servit des rochers tombés précédemment pour prendre de plus en plus de hauteur, jusqu'à carrément atterrir sur le dos du Bastiodon. Steeve avait carrément l'impression d'être sûr une île miniature.

— Alors, alors, alors...., répéta t-il. Où se cache ton point faible, mon petit ?

Les Pokémon Roche avaient un corps très solide mais ils avaient souvent des petites fêlures dans leur corps, des failles sensibles de leur anatomie.

— …. oh ?

Et Bastiodon ne faisait pas exception. Pile au milieu du dos, aux extrémités d'une énorme protubérance Acier, il y avait comme un creux.

— Sofian ! hurla Steeve. Tu peux venir ici ?!

Ce dernier plissa les yeux, pas très certain. Il observa un long moment le Bastiodon, qui se dandinait furieusement dans tous les sens pour se débarrasser de son intrus.

— Grouille-toi ! Godzilla est pas très coopératif !
— … argh, geignit Sofian. Fichue situation d'urgence, même pas une place pour la raison !

A contrecœur, Sofian imita maladroitement Steeve en sautant maladroitement de rocher en rocher. Il faillit trébucher plusieurs fois, sauf que apparemment le Lien de Cobaltium ne lui donnait pas que de la puissance, mais accroissait également ses sens et réflexes.

— Pffiouu, soupira Sofian une fois à destination. Dis-moi ça bouge beaucoup ici !
— Ouais, ça ferait une sacrée attraction pour sûr ! Mais trêve de plaisanterie, tu vois les petits creux sur son dos là ? Tu peux taper dessus le plus fort possible ?
— J'ai pas vraiment le choix...

Concentrant son lien dans ses poings, Sofian cogna brutalement les endroits que pointaient son nouvel ami. L'effet fut immédiat et le Bastiodon poussa un tonitruant et douloureux Hurlement ; il rentra dans un état de telle fureur que Sofian et Steeve furent éjectés sans pitié.

Mais le mal était déjà fait, Sofian avait certainement touché des points très sensibles. Le monstre d'Acier se rua aléatoirement à travers toute la pièce.

— Hé bien, souffla Steeve en se relevant. Il fait le grand gaillard, mais il sacrément douillet !

Le déchaînement du Bastiodon était incontrôlé, et dans sa colère, le monstre d'Acier ne remarqua même pas qu'il fonçait droit … vers son maître, bien trop concentré contre sur sa lutte dantesque contre Zmrc pour le voir.

Le choc fut rude, autant pour Torideps et son adversaire. Les deux combattants furent brutalement expulser aux deux extrémités de la salle, inconscients.

— C'est notre moment ! cria Steeve. Torideps et son Pokémon sont hors de combat, fuyons !
— Et pour Zem... euh... lui ?! s'inquiéta Sofian en désignant Zmrc.
— Prends-le avec toi, et on s'arrache !

Inutile de le lui dire deux fois. Sofian se précipita vers son ami, le plaça fermement sur son dos et fonça vers la sortie. Les gardes tentèrent de l'arrêter mais difficile de stopper un forcené au corps renforcé par de l'acier.



***


La vue de la lumière du soleil fut une véritable libération pour Sofian. Après tant de gris et de rochers, un peu de nature colorée lui faisait le plus grand bien. Cependant, certaines personnes n'avaient pas dans l'idée de laisser le pauvre brun profiter des petits plaisirs de la vie. Des personnes armées de lance-flamme et de fusils d'assaut.

— La toute dernière étape ! s'enthousiasma Steeve sans pour autant s'arrêter de courir.
— S'enfuir avec un hélicoptère, c'est ça ?
— Yep ! Y en a plein là, disposé en rang comme de bons petits soldats. Mais je sais pas en piloter, malheureusement !
— Moi non plus..., geignit Sofian.
— Bah c'est sûrement instinctif comme système, relativisa Steeve. J'ai fait de la trottinette quand j'étais plus jeune, ça doit être à peu près pareil !

Sofian avait dû mal à voir le rapport mais se retint de faire tout commentaire, l'optimiste presque naïf de Steeve était la seule chose positive dans cette situation. En y repensant, son caractère contrastait énormément avec l'air constamment ronchon de sa sœur, Ilyana Manyula.

— V-Vous êtes là !

Brusquement, un être à la posture naturellement hautaine fit son apparition, à la grande surprise de Sofian, qui ne le connaissait que trop bien.

— J-Jean-Kévin ?! Mais qu'est-ce que tu fiches ici ?!
— J'étais avec machin-au-nom-imprononçable lorsque tu t'es fait kidnappé, expliqua rapidement Jean-Kéin, alors on est venu te sauver... machin est parti s'infiltrer et moi je suis rester là et puis tous les gardes sont partis à l'intérieur et donc moi...
— Oui, oui ! serra Sofian des dents. Excuse-moi de te couper mais le coin n'est pas très adapté aux retrouvailles...

Et comme pour lui répondre, plusieurs tirs particulièrement brutaux retentirent derrière eux.

— Hiii ! paniqua Sofian. C-Ce n'était pas des petits coups de pistolets ça !
— Ils ont sortie les gros calibres, ricana Steeve. On doit sacrément leur faire peur. Par contre, pas sûr que ton corps d'Acier puisse y résister, à ça ! Si je puis me permettre, nous aussi il faut que l'on tire... notre révérence !
— Moins de plaisanteries, plus de fuite ! geignit Sofian. Jean-Kevin ! T'étais un mec noble non ? Tu sais conduire un hélicoptère ?

Jean-Kevin écarquilla les yeux, surpris.

— Euh... j-je n'en sais trop rien ! M-Mais je devrais être capable de me débrouiller, j'ai fait de la trottinette quand j'étais plus jeune !
— … y a vraiment un rapport entre la trottinette et l'hélicoptère ?! commença très sérieusement à se demander Sofian.

Une nouvelle salve de tirs convainquit Sofian de s'intéresser à cette énigme plus tard. Le trio nouvellement formée reprit sa route vers l'hélicoptère le plus proche. La porte était évidemment fermée, mais Sofian avait sûr lui son passe-partout universel, un bon coup de poing d'acier.

Jean-Kevin était extrêmement surpris par la tournure des événements. Il se demandait vaguement qui était ce type mal rasé qui accompagnait Sofian, pourquoi Zmrc était nu et inconscient et surtout, comment est-ce que Sofian pouvait enfoncer des portes à mains nues !

Cependant, même lui pouvait comprendre que la situation était bien trop urgente pour s'intéresser à ces petits détails. Sans attendre plus longtemps, Jean-Kevin Gabaïto s'installa au poste de pilotage à côté de Steeve Manyula.

— Alors euh..., hésita Jean-Kevin. Je suppose qu'il faut déjà tout allumer, non ?
— Ouais, j'crois, réfléchit Steeve.
— Eh oh les mecs, geignit Sofian, c'est trop tard pour hésiter là !
— Il a raison, paniqua Jean-Kevin, on appuie sur tout les boutons, ça fonctionnera sûrement !
— Comme dans un jeu vidéo ! s'enthousiasma Steeve.
— … sauf qu'ici, on a un Life-over au lieu d'un Gameover, maugréa Sofian.

Jean-Kevin et Steeve s'activèrent comme ils le pouvaient, activant tous les interrupteurs passant dans leur champs de visions, avant de tirer d'un commun accord un gros levier ressemblant beaucoup au manche de pilotage que l'on voyait dans les films.

Miraculeusement, l'hélice de l'engin se mit à tourner, tout d'abord doucement et puis accéléra jusqu'à devenir invisible. Et l'hélicoptère décolla, bruyamment, très brusquement, après avoir frôlé dangereusement plusieurs arbres et hélicoptères à l'arrêt avant de se trouver à bonne hauteur.

— O-On a réussi ! exulta Jean-Kevin en tendant sa main à Steeve.
— Super partenaire qui vient de nulle part ! exulta avec lui ce dernier.
— Ne lâchez pas le volant !! geignit un Sofian livide.
— Mmh, c'est plus un manche non ?, commenta Jean-Kevin.
— Ce n'est pas ce que l'on appelle un « pas collectif » dans la jargon plutôt ? réfléchit Steeve.
— On s'en fiche de comment ça s'appelle, paniqua Sofian, reprenez-le !! On s'écrase là !

Les deux pilotes improvisés – mais néanmoins titulaire de l'agrégation de trottinette – accédèrent à la demande du brun, à son grand soulagement. Mais même en se faisant, la conduite de l'hélicoptère restait très approximatif ; un pilote ivre n'aurait pas pu faire pire, même s'il le voulait.

L'engin volant serpentait très dangereusement, ne faisait aucune ligne droite, tournant sur lui-même de temps en temps.

— Les mecs, faites un effort ! trépigna Sofian.
— Je voudrais bien t'y voir ! protesta Jean-Kevin.
— J'aurais bien voulu, mais je n'ai pas fait de trottinette quand j'étais plus jeune moi !!

Et pour couronner les tous, d'autres hélicoptères – bien mieux pilotés – se mirent à décoller les uns après les autres. Des missiles fusèrent.

— I-Ils nous canardent ! hurla Jean-Kevin
— Je dirais plutôt qu'il nous prenne pour cible, réfléchit Steeve.
— Moins de chipotages, plus d'actions ! geignit Sofian avant de s'exclamer. Un instant ! Si eux ils sont armés, notre hélico aussi, non ?!
— On a déjà du mal à rester en altitude, grinça Jean-Kevin. Tu ne vas pas en plus nous demander de jouer les John McClane !
— Ah ? Toi aussi tu regardes ça ? s'intéressa Steeve. Il est super cool ce type !
— J-Je dois avouer qu'il a un certain panache..., admit Jean-Kevin.
— Les mecs.... ! commença légèrement à s'énerver Sofian.

Heureusement, la conduite imprévisible, aléatoire, et totalement amateur de Jean-Kevin et Steeve avait un effet positif : aucun des missiles envoyés ne touchaient leur cible. Leur hélicoptère esquivait tout dans une démarche pouvant faire pâlir de jalousie un Spinda saoul.

Cependant, ils ne devaient ce miracle qu'à la pure chance et vu le nombre croissant de prédateurs volants derrière eux, il était évident que la roue allait rapidement tourner.

— Je commence à croire que l'hélicoptère n'était pas une bonne idée, lança soudain Steeve.
— C'est un peu trop tard pour s'en rendre compte..., grommela Sofian.
— Rien n'est jamais trop tard ! l'assura le Sbire. Puisque l'hélico est devenu trop dangereux, il faut le quitter !
— … tu veux sauter ? paniqua Jean-Kevin.
— Pourquoi pas ? C'est un engin militaire, il doit sûrement avoir des parachutes au cas où !
— Même si jamais on réussi à sortir de là, soupira Sofian, on sera des cibles faciles ensuite, à flotter bêtement dans les airs !
— Mmh...

Steeve se plongea un moment dans ces réflexions, avant de claquer des doigts.

— Dans ce cas, je reste ici !
— Pardon ?! s'exclamèrent Jean-Kevin et Sofian.
— Je commence un peu à comprendre comment ce truc fonctionne, avec le manche, les pédales tout ça. C'est vraiment pas bien loin de la trottinette !
— … arrête avec cette trottinette..., geignit Sofian.
— Bref, reprit Steeve. Ce que je veux dire, c'est que pendant que vous deux vous sautez, je vais faire diversion ! J'en ai pas l'air, mais je répète que je suis un Sbire d'élite ! Les situations dangereuses, ça me connaît et je suis toujours vivant ! Je sauterai à mon tour plus tard, lorsque les choses seront un peu plus cool !

Sofian continuait de penser que c'était de la folie, cependant, la situation dans laquelle il se trouvait était de la folie pure. Et agir follement dans une situation folle était cohérent, donc...

— … d'accord, admit le brun. Mais t'as intérêt à t'en sortir !
— Oh ? sourit Steeve. Si chais pas mignon le petit qui s'inquiète pour moi ! T'inquiète pas mon loulou, tonton a connu pire ! Allez zou ! Trouvez les parachutes, mettez-les et prenez votre envol mes enfants !

Jean-Kevin et Sofian soupirèrent face à l'attitude désinvolte de cet étrange personnage, mais s'exécutèrent tout de même. Effectivement, Steeve avait raison, il y avait bel et bien des parachutes au fond du cockpit.

Après de bonnes minutes de luttes acharnés, Sofian et Jean-Kevin comprirent enfin comment les enfiler. Sofian s'occupa ensuite d'équiper Zmrc, bien qu'il était inconscient, ce n'était pas une raison pour le laisser roupiller ici. Une fois leur tâche accomplie, le duo se plaça devant la porte de l'hélicoptère, peu confiants.

— C-C'est haut..., commenta Sofian.
— C'est pour ça qu'on a des parachutes ! répliqua Jean-Kevin.
— J'me disais aussi que ce n'était pas que pour le style... donc faut tirer sur cette espèce de languette pour l'activer c'est ça ?
— Je crois... de toute façon, on verra bien si c'est ça ou pas.
— Génial... et on fait comment pour lui ? geignit Sofian en désignant Zmrc. Qui va activer son parachute ?

Steeve balaya l'air d'une main nonchalante.

— Bah, est-ce vraiment important ? Il est pas censé être invincible ? Et aussi...

Le Sbire d'élite n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Un missile explosa juste à côté de l'hélicoptère, le faisant tanguer très dangereusement...

— AaaAAaah !!

… et pour Sofian, Jean-Kevin et Zmrc, beaucoup trop proche du vide, ce fut le début du grand saut.

— Bonne chance amigos ! les salua Steeve.

Subitement, en un éclair, les yeux du Sbire d'élite se glacèrent.

— Bon, fini de rire, j'ai mon rôle à jouer à présent.

D'un geste rapide, Steeve retourna son hélicoptère, faisant face à l'armada volante qui le poursuivait. Brusquement, il lança d'un coup tous les missiles que l'engin à hélice avait en stock. Cela faisait seulement 10 minutes qu'il conduisait cet hélicoptère, cependant, il en avait rapidement comprit chacun de ses fonctionnement. Il était un Sbire d'élite après tout, l'adaptabilité en toute circonstance était une compétence de base.

Seul contre tous. Grand classique. Steeve zigzaguait habilement et effrontément entre ses ennemis, causant une pagaille sans-nom parmi les hélicoptères de la prison, qui n'osaient même plus tirer sous peine de toucher un de leur allié.

Steeve savait que ce qu'il faisait était suicidaire, mais aussi nécessaire. Mais il savait qu'il allait survivre, il le fallait. Il venait à peine de s'échapper de sa longue captivité, il ne pouvait pas mourir maintenant. Avant cela, il devait retourner à la base, se faire engueuler par sa femme, ses amis, et pourquoi pas rendre une petite visite à sa petite sœur ! Maintenant qu'il était libre, rien ne pourra l'empêcher d'aller les voir maintenant.

Rien, sauf peut-être un missile carnassier fonçant droit sur lui.