One's feeling de imple

- C'est parti ! attaque charge !
« SBAM ! », le jeune garçon se percuta lourdement un arbre. Un azurill le regarda d'un air exaspéré.
- C'est une attaque basique et pourtant si difficile à faire ?! Va y Urill, montre-moi encore une fois !
Le pokémon effectua une attaque charge que le garçon essaya d'imiter juste après, mais sans succès.
- Roh ! Je vais y arriver ! Encore !... Encore !! Encore !!! ...

La matinée passa ainsi, le petit azurill montrant des attaques au garçon qui essayait de les reproduire. Sali et affamé, il finit par se résigner, récupéra son chapeau de pailles posé au sol et s'éloigna du terrain vague où il s'entrainait avec son pokémon.
Martin était un jeune garçon de 15 ans, vêtu d'une salopette sale et trouée à plusieurs endroits avec l'entrainement. Ses cheveux étaient d'un brun léger, ébouriffés par la séance d'entrainement, et il avait de magnifiques yeux d'un bleu profond semblable à l'océan. Légèrement égratignées, ses mains laissaient deviner qu'il travaillait beaucoup. Il descendait le long d'un petit chemin et ne tarda pas à apercevoir Poivressel.
Ce village de pêcheurs laissait apparaitre des petites maisons en chaume, les murs incrustés de coquillages. Des cabanes en bois surplombaient la mer et on voyait de nombreuses barques le long de la plage, prêtes à partir. Un grand marché s'étalait en son centre, rassemblant des produits de tout Hoenn et même parfois d'autres régions. Il se hâta vers une des chaumières où s'élevait une douce fumée. Sur le palier il entendit des voix s'élever et se raidit, essayant d'écouter la conversation
- ... en a encore parlé hier. Tu sais ce que j'en pense, c'est trop dangereux ! Et on a besoin de lui ici pour travailler dit une voix féminine, visiblement anxieuse
- Il va avoir 16 ans, ce n'est plus un enfant. Il ne veut pas partir trop longtemps, on peut se débrouiller quelques semaines sans lui. Tu sais bien qu'il en a besoin répondit une seconde voix grave
- Il n'est pas majeur pour autant !
- Il n'en a pas l'âge mais a besoin de ce voyage pour tirer un trait sur son enfance. Il a besoin de passer à autre chose pour vivre correctement...

Martin ne voulait pas en entendre plus. Ses parents se disputaient encore. Il essaya de ne pas attirer l'attention et se dirigea vers le cabanon, se baissant au niveau de la fenêtre pour éviter d'être vu par ses parents. Il alla chercher un seau, une pelle, et son sac laissé là le matin, puis prit la direction de la plage pour travailler. Il dévora le sandwich qu'il avait préparé quelques heures auparavant et repensa avec fureur à ses parents. Il allait bientôt avoir 16 ans et ils ne le pensaient toujours pas assez mûr pour voyager seul ! Il marchait à présent si vite que Urill derrière lui avait du mal à suivre et poussa un petit rugissement plaintif tandis qu'il se faisait distancer par le jeune homme. Interpelé par le cri de son pokémon, Martin sortit de ses pensées, se retourna et vit le pokémon essayer de le rattraper avec peine. Il s'arrêta et l'attendit et lui adressait des excuses lorsque le petit pokémon parvint enfin à le rattraper. Il s'aperçut aussi très vite que, pendant qu'il avait été dans ses pensées, il était arrivé à destination. Il pouvait enfin commencer à travailler.
A Poivressel, comme pour la famille de Martin, la majorité des habitants dépendaient de la mer pour travailler. Le métier de Martin consistait à récupérer des coquillages sur la plage pour ornementer les maisons, fabriquer divers objets ou encore les vendre à travers Hoenn. Aidé par son pokémon, il s'afféra à la tâche. Le travail était épuisant et long, et les blessures reçues le matin durant son entrainement le rendaient encore plus pénible.

Après avoir bien remplit son seau et voyant la lueur du jour s'estomper petit à petit, il se décida à rentrer chez lui. La discussion surprise du midi raisonnait encore dans la tête et le faisait bouillir, mais il ne pouvait pas trainer plus longtemps. Il marcha d'un pas résolu vers sa maison à mesure que le ciel s'assombrissait et rentra chez lui lorsque les premières étoiles faisaient leur timide apparition. Il n'y avait aucune lumière dans la maison. « Mes parents ne sont pas encore rentrés » pensa Martin avec un grognement de satisfaction. Il entra et arriva dans une grande pièce, sombre à cause de la tombée de la nuit. Il y avait une grande table en bois entourée de bancs, une cheminée en pierre encastrée dans le mur à gauche et on distinguait une cuisinière en pierre avec de nombreux ustensiles au fond. Des coquillages décoraient à de nombreux endroits les murs et meubles.
Il se hâta de poser le seau sur la table et, avant que ses parents ne rentrent, se hâta vers le fond de la pièce, tourna à gauche, prit un petit couloir, monta sur une échelle et accéda à sa chambre. Elle se trouvait en hauteur, avec un plafond bas, penché, et des poutres apparentes qu'il devait éviter pour ne pas se cogner. Elle était petite et peu meublée, avec juste une petite table en bois, une armoire bancale ornée de coquillages, et d'un vieux lit rembourré avec de la paille. Il aurait bien aimé un lit plus moelleux, en coton de farfaduvet, mais c'était un produit cher, trop pour sa famille. On en trouvait sur le marché de Poivressel parfois, en provenance d'Unis, car on ne trouvait pas ces pokémons sur Hoenn. Rien qu'en pensant à ces autres régions, il se laissa tomber sur son lit, songeur. Il aimerait tellement pouvoir voyager comme ça dans les autres régions découvrir toutes ces villes, paysages, coutumes, pokémons. Il en avait parfois des aperçus en flânant le long du marché et à chaque fois son envie de découvrir le monde ne s'en trouvaient que grandie.
Il se mit à repenser à la discussion de ses parents. Il leur avait parlé quelques jours avant d'une envie d'un voyage jusqu'au mont Chimnée, projet qu'ils avaient accueilli avec une certaine réserve. Il le savait, Hoenn était un peu dangereux avec tous ces pokémons sauvages, mais il avait besoin de faire ce voyage. Sans lui, il ne pourrait pas tirer un trait sur son passé et ne pourrait pas devenir adulte. Ses parents n'arriveraient sûrement jamais à comprendre ça, et cette pensée lui faisait mal.

- Martin ! Tu es rentré ? Viens ici, nous voudrions te parler avec ton père, appela sa mère d'un ton sec.
Martin souleva la tête de son oreiller. « Ho, ils doivent sûrement vouloir me parler pour me dire qu'ils ne veulent pas que je fasse ce voyage » pensa-t-il d'un ton amer en se levant sans conviction pour aller vers la salle. Il traina des pieds le long du couloir pour se retrouver devant ses parents. Sa mère avait de longs cheveux couleur miel, attachés en une longue tresse, et portait de nombreux tissus organisés dans une sorte de robe sous un grand tablier abîmé par le temps. L'âge et le travail difficile ne suffisaient pas à tarir une élégance naturelle. Ses yeux d'un bleu très clair, presque blanc, étaient pénétrants lorsqu'il entra dans la pièce. Son père était étonnamment fin, avec comme son fils une salopette qui avait vraisemblablement déjà fait son temps. Les cheveux ébouriffés, d'un brun assez foncé, cachaient des yeux d'un bleu profond. Il adressa un sourire rassurant à Martin, mais celui-ci ne le remarqua pas, trop absorbé à essayer de fuir cette discussion.
-assieds-toi, il faut qu'on parle, lança le père
Le garçon obéit, redoutant la discussion à suivre.
-Ton père et moi nous avons discuté au sujet de ton voyage ... commença la mère
Ca y est, on y était ! Martin ne voulait pas entendre la suite, il la connaissait déjà « mais c'est trop dangereux, nous ne voulons pas que tu le fasses ». Mais ne pouvant fuir, il dû laisser sa mère continuer
-...et ...
Elle n'avait pas dit « mais » ?! Interpelé, Martin leva la tête vers sa mère, qui continuait à l'observer d'un air grave.
-... nous avons conclu que nous ne pouvons pas t'interdire de le faire, conclut la mère.
Il avait bien entendu ? Il était persuadé que ses parents ne le laisseraient pas partir, mais avait eu tort ! Avant qu'il ne puisse exprimer sa joie, son père enchaina :
-On sait très bien à quel point ce voyage est important pour toi, alors si ça peut t'être bénéfique, nous accepterons ton choix. Tout de même, tu sais à quel point ce voyage sera périlleux, alors je veux que tu prennes Mysdibule avec toi.
Il montra le pokémon debout à côté de lui. Martin eut un léger mouvement de recul. Il n'aimait pas mysdibule. Il avait un air effrayant avec sa grosse mâchoire à l'arrière, et, même s'il vivant avec lui depuis un moment, il n'avait jamais réussi à comprendre ce à quoi pensait le pokémon. Son père le devina et, anticipant une éventuelle remarque de son fils, poursuivait :
-Il m'a bien aidé quand j'avais voyagé, il est digne de confiance. Il te protègera en cas de danger. Je sais que tu n'aimes pas voir tes pokémons être blessés au combat. Je peux le comprendre, mais la nature est bien trop dangereuse pour que tu continues à essayer de te battre à la place de tes pokémons. J'aimerai que durant le trajet tu apprennes à remettre les choses à leur place.
Martin avait à nouveau baissé les yeux. Visiblement son père n'avait pas compris ses sentiments, les raisons pour lesquelles il agissait ainsi. Tout le monde le prenait pour un fou à s'entrainer pour lancer des attaques à la place d'un pokémon, il le savait, mais il ne pouvait pas se résoudre de laisser ses amis se faire blesser à sa place. Il était hors de question qu'il accepte ça !
-C'est bien compris ? lança sa mère, le sortant de sa réflexion. Tu veux toujours partir, même avec ces conditions ?
-oui, merci beaucoup ! répondit Martin, trop content de pouvoir partir.

Il n'y croyait toujours pas, il pourrait partir vers le mont Chimnée ! La soirée se déroula calmement tandis que Martin rêvait déjà de son départ prochain.