Chapitre 2 : Le choix de Dynavolt
Alors que le soleil se couchait lentement à l'Ouest, la petite équipe qui avait enfin obtenu l'autorisation provisoire de sortir du hangar s'aventura dans la plaine les entourant. Ils avaient décidés d'un commun accord qu'ils resteraient ensemble au moins pendant les 5 premières minutes, le temps de prendre leurs marques. Le Dynavolt de Voltère et le Nirondelle de William étaient tout deux contents de pouvoir enfin prendre l'air et ils s'étiraient à qui mieux mieux. Alice et son Ténifix, originaires de Lavanville pour rappel, exploraient les environs, tâtant le sol de leurs pieds et délimitant mentalement la ville qui aurait dû se trouver là. Et justement, c'était bien ça le problème. Lavanville aurait dû être ici même. Elle avait disparut. Soudain, les sourcils d'Alice se froncèrent. Quelque chose d'autre clochait.
- Euh… Il y a un problème, énonça-t-elle aux autres. La plaine est beaucoup trop petite pour contenir tout Lavanville. La ville devrait normalement faire deux fois cette taille-ci, au moins !
- Tu veux dire que nous ne serions pas à Lavanville ? demanda Voltère.
- Non… Enfin, si ! Le paysage est exactement le même que celui que je voyais à travers la fenêtre de ma chambre, à l'exception près qu'il n'y a pas de bâtiments… Et ce qui me perturbe, c'est le fait que l'espace soit beaucoup plus petit.
- Simple illusion d'optique, suggéra Jamel en rattrapant son Chuchmur qui était tombé.
- La ville est normalement plus grande, répéta Camille en roulant des yeux. Je sais ce que je dis ! Je dessine beaucoup, la proportion et l'espace, ça me connait.
Jamel fit rouler ses épaules d'un air menaçant. Aussitôt, Voltère tenta de calmer le jeu en s'approchant de la table au centre de la clairière :
-D'accord, d'accord, on te croit. Et en imaginant cela, que voudrait alors dire cette map sur la table ? Pourquoi nous indiquer Lavanville ?
- Peut-être est-ce une reconstitution miniature de la région de Hoenn ? suggéra alors Helga en s'approchant.
Les autres la regardèrent avec surprise et elle s'expliqua simplement en posant son doigt sur une petite note gravée sous la maquette indiquant « Projet Nneoh ».
- Projet Nneoh ? s'exclama Camille en réfléchissant. On dirait que c'est « Hoenn » inscrit à l'envers.
- C'est vraisemblablement cela, répondit Helga. Mais comment peut-il y avoir une reconstitution de la région en plus petit ? Comment est-ce possible ?
Voltère haussa les épaules et répondit avec simplicité :
- Ouarf, du sable importé de la vraie Hoenn, de la terre fertile, des arbres, n'importe quel gros riche aurait pu commander un truc pareil.
A ces mots, tous les regards se tournèrent vers William qui baissa la tête entre les épaules en protestant :
- Eh, je n'y suis pour rien !
Personne ne répondit. Ils ne prenaient bien évidemment pas leur accusation au sérieux. De son côté, Voltère réfléchissait. Il trouvait l'aventure excitante et hors du commun. Etant un soldat en formation, il recherchait le frisson de l'aventure et du danger, mais il n'osait pas le crier sur tous les toits : son point de vue était visiblement loin d'être partagé par les autres. Mais comment étaient-ils arrivés ici ? L'endroit n'était pas apparu tout seul. Dans quel but ? Et surtout, pourquoi envoyer des personnes ici sans informations, et pourquoi ne pouvaient-ils pas voyager le jour ? Tant de questions qui lui brûlaient les lèvres et dont il décida de faire part aux autres.
- J'ignore tout comme toi la raison de toute cette merde, lui répondit Jamel en arrachant une branche à un arbre pour en faire un bâton. Tout ce que je sais, c'est qu'il fait nuit et qu'on est seul dans un endroit peuplé de pokémons sauvages. Préparez-vous, les prédateurs nocturnes sont les pires.
- Pas forcément, l'interrompit Voltère frustré de se faire voler la place de « chef d'armée ». Les créatures du jour sont tout aussi féroces. Puis nous avons nos pokémons avec nous.
- Si tu fais suffisamment confiance à ton pokémon, grand bien t'en fasse. Seul face à une horde de Grahyena, je ne pense pas que le mien tienne la route longtemps. Bon, en route. Il faut trouver un moyen de s'échapper.
Voltère attendit patiemment que Jamel tente vainement d'allumer le bout de son bâton avec un briquet. Puis lorsqu'il estima que le grand blond s'était suffisamment énervé dessus, il le lui arracha des mains.
- Tu n'as jamais appris à faire de torche de ta vie ou quoi ? Tsss. Il nous faut du tissu. Comme, par exemple, ma veste. Elle est épaisse, elle tiendra longtemps. Ensuite, le combustible et l'allumeur… Camille, tu veux bien me prêter ton Galifeu ?
Avec son accord, il approcha du pokémon feu et lui demanda du combustible. Le pokémon acquiesça, ouvrit le bec et un étrange liquide opaque et visqueux en sortit. Des frémissements de dégoût et de surprise fusèrent du groupe. Voltère les regarda :
- Vous ne connaissiez pas ? C'est pourtant la base de la survie. Toujours avoir avec soit un pokémon eau et un pokémon feu. Les pokémons dans son genre possèdent un liquide combustible qui leur permet de réguler leur chaleur interne. Allez, après la rapide pause scientifique, Galifeu, tu veux bien m'allumer ça ?
Le pokémon obéit sans broncher comme son dresseur d'origine le lui avait demandé. Voltère éclaira alors chacun des membres à la lumière du feu, puis leur demanda :
- Alors, qui est partant pour aller se remplir l'estomac de bonnes baies ?
Il est vrai que tout le monde mourrait de faim après ces 12 heures passées sans manger quoi que ce soit. Ils suivirent alors tous Voltère sans hésiter. Mais alors que le groupe allait s'enfoncer dans les bois, William s'arrêta, inquiet :
- Attendez, où allez-vous comme ça ? Nous ne savons même pas où trouver des buissons à baies ! Et si nous nous perdions ?
Helga s'approcha de lui et posa ses mains sur ses épaules.
- Tu as raison. Je vois que ta Nirondelle ne semble pas effrayée par l'obscurité. Peut-être pourrait-elle survoler rapidement les environs et repérer ces fameux arbres pour nous, ne penses-tu pas ?
Aberré par l'idée, William serra contre lui son oiseau :
- Vous plaisantez ? C'est un oiseau de jour, elle ne vole pas la nuit ! Et puis… Je ne l'ai jamais laissée seule dehors…
- Raison de plus, le rassura la vieille dame avec le sourire. Ta Nirondelle découvrira le goût de voler parmi une nature sauvage et je suis sûre que cela vous rapprochera. Ne t'en fais pas, elle s'en sortira très bien !
Sous le sourire rassurant d'Helga, William se laissa convaincre. Il relâcha prudemment son oiseau, lui conseillant de faire bien attention à elle et de se cacher en cas de danger. Son Nirondelle ne se fit pas prier et dans un cri, elle s'envola haut dans le ciel. Le groupe attendit silencieusement que le pokémon revint. L'attente dura plusieurs minutes de tension, et chaque seconde qui passait convainquait William que sa compagne ne reviendrait pas. Seulement, la voilà, petite ombre claire dans le ciel noir qui fonçait à tire d'ailes sur son maître. Tout excité, celui-ci la réceptionna. L'oiseau, fier et joyeux, tenait dans son bec un fruit jaune et rond qui s'apparentait sans aucun doute à une baie Citrus. Le groupe s'exclama d'extase à la vue du fruit.
- Allez, Nirondelle, s'écria William tout excité. Conduis-nous là où tu as trouvé ça !
L'oiseau s'élança, le groupe sur ses talons. Il ne leur fallut pas longtemps avant de tomber sur un véritable trésor de baies. Le vert, le jaune, le rouge, incroyablement presque toutes les couleurs étaient réunies ici formant un véritable arc-en-ciel de nature dont même l'obscurité de la nuit n'arrivait pas à en altérer la beauté.
Surtout pour des ventres affamés.
Et le festin commença. Les humains et les pokémons se gavèrent le plus rapidement possible et surtout le plus possible. Voltère était le plus gourmand, d'ailleurs. Camille, en tant que grande stratège avait déjà commencé à remplir son sac de baies fraichement cueillies et Jamel avait suivit le mouvement ainsi qu'Helga.
Cela prenait du temps que de cueillir les petits fruits un à un et plusieurs heures se furent rapidement écoulées. Du temps passé dans le froid, dans le bruit, avec les petits doigts engourdis et fatigués ainsi que la tête ailleurs. Et personne ne semblait remarquer le danger qui s'approchait…
Soudain, un aboiement. Celui de Dynavolt qui avait répondu au crissement inquiet de Galifeu. Chuchmur comprit à son tour l'avertissement et, apeuré, fondit en larme si violemment qu'il vrilla les oreilles du reste du groupe. Tout le monde se redressa et stoppa ses occupations afin de se demander ce qu'il se passait avec le petit pokémon rose. Mais la bande n'avait pas été la seule à souffrir des cris effrayés de Chuchmur. Des ombres cachées dans les bois se redressèrent et des yeux rouges apparurent tout autour d'eux, accompagnés de grognements sévères. Alice pâlit lorsqu'elle découvrit les créatures les entourant.
- Des Grahyenas, murmura-t-elle avec effroi.
- Ne bougez surtout pas d'un poil, conseilla doucement Voltère en se redressant lentement. Ces pokémons sont dangereux, mais nous formons nous aussi un groupe. Ils ne nous attaqueront pas aussi facilement si nous ne leur montrons pas de signe de faiblesse.
- Qu'en sais-tu ? riposta Alice, furieuse. Tu es un éleveur, peut-être ?
Son ton acerbe eu comme effet d'énerver encore plus les hyènes noires et l'une d'entre elle grogna en s'approchant prudemment d'eux. Ils reculèrent encore plus.
- Non, répondit calmement Voltère. Mais moi je connais les règles de survie.
Les Grahyenas, un peu plus sûrs d'eux-mêmes, sortaient à présent de leurs cachettes et resserraient le cercle autour de leurs proies qui se collèrent l'une contre l'autre. Soudain, Jamel arracha la torche à Voltère et la balança au milieu des pokémons ennemis en hurlant, espérant ainsi créer une intimidation. Cela marcha plus ou moins. Les bêtes s'écartèrent en hurlant d'angoisse et de douleur face aux flammes ardentes, mais elles ne lâchèrent pas prise.
- Courrez ! ordonna alors Voltère à tout le groupe en poussant en avant Alice et Camille.
Cette dernière se retourna et ordonna à son Galifeu plusieurs Danse-flamme bien placés qui stoppèrent les poursuivants pendant un moment. Tout le petit groupe se mit alors à courir à toutes jambes, comptant sur la Nirondelle de William pour leur montrer le chemin jusqu'au hangar où ils pourront facilement repousser l'attaque des loups noirs. Seulement, à la frontière de la forêt, et on ne sait qui des membres trébucha sur la racine en premier, William et Camille se heurtèrent et tentèrent de se rattraper à Voltère qui chavira par terre.
Alors que les Grahyenas rattrapaient dangereusement le groupe et que l'un d'eux allait sauter sur eux, Dynavolt s'interposa courageusement entre les deux camps en aboyant puis il se faufila entre les rangs adverses sous les cris angoissés de Voltère. Trop tard. Il avait déjà disparut dans les profondeurs de la forêt avec deux bêtes affamées à ses trousses. Le jeune militaire, effondré, sentis les bras forts de Jamel le soulever pour le remettre sur pied et avec regret, il fit demi-tour et couru pour rejoindre ses coéquipiers, le cœur battant et brisé, la douleur s'insinuant au plus profond de son être, dans ses décisions et dans ses gestes. Il ne sentait plus le souffle des Grahyena sur ses talons, il ne pensait plus à la peur d'être tué. Il ne faisait que suivre Jamel et les autres qui le guidaient vers le hangar et le poussaient à l'intérieur. Camille, Helga et Jamel s'évertuèrent alors à abaisser la grande porte de fer du hangar pour bloquer l'accès aux créatures qui arrivaient à toute allure.
Lorsque la lourde porte claqua par terre avec un son tonitruant et que le noir se fit complet, seul le bruit des pattes des Grahyenas contre le métal rappelait l'horrible moment qu'ils avaient passés à l'extérieur. C'est à ce moment que Voltère se rendit compte de la situation. Il hurla :
- Nooooooon ! Vous ne pouvez pas fermer ! Dynavolt est toujours à l'extérieur, il va mourir ! Dynavoooolt !
Le militaire se propulsait contre la porte de toutes ses forces, la faisant trembler et faisant gémir de frustration les loups dehors. Il frappait dedans et donnait des coups de pieds en hurlant, se refusant à accepter la situation. Il sentit des bras tenter de le saisir et de le consoler, mais il n'y porta pas attention.
- Dynavolt va mourir ! Je refuse de le perdre, ouvrez-moi ! cria-t-il au ciel, plus fort qu'il ne l'eut jamais fait auparavant.
Derrière, on pu entendre Chuchmur pleurer à chaudes larmes comme s'il comprenait la situation. Et à côté, Alice parvint enfin à poser sa main sur le poing blessé de Voltère.
- Je suis désolée, Voltère, lui murmura-t-elle sincèrement. Mais nous devions fermer cette porte, auquel cas les Grahyenas seraient rentrés. Dès qu'ils partiront, je te promets que nous t'ouvrirons et que tu pourras chercher ton ami avant le lever du jour. Qui sait, peut-être qu'il est encore en vie.
Le jeune soldat soupira, signe qu'il était résolument d'accord. Il se sépara de la porte et alla lentement s'isoler dans un coin du hangar, recroquevillé sur lui-même. Dans l'obscurité, on entendit la voix de Camille :
- De toute façon, il ne pourra pas aller bien loin. Si les Grahyenas rodent encore dans les parages et que le jour se lève bientôt, le mieux serait qu'il attende son Dynavolt. S'il est encore vivant, il viendra sûrement retrouver son maître ici.
C'est ce que Voltère fit lorsque la meute de Grahyenas eu déserté les environs. Le soldat s'assit au milieu de la plaine et il attendit, poussant parfois des appels à son compagnon, avec un espoir de réponse. William proposa même d'envoyer son Nirondelle pour le retrouver, et c'est d'ailleurs ce qu'il fit. Après tout, les pokémons ne craignaient visiblement pas le rayon laser du Magnézone puisqu'ils pouvaient vivre sereinement ici.
Voltère attendit encore et encore, mais il fut forcé par le Magnézone qui approchait de reculer dans le hangar.
- 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1, 0.
A la fin du décompte, Voltère perdit tout espoir de revoir un jour son ami Dynavolt en vie.