019-Dettes
Il s'effondra à quatre pattes dans la caverne et alla se traîner jusqu'à la paroi en gémissant piteusement.
-N-non... Pourquoi... Comment j'ai pu faire ça... ? C'est... Non...
Il posa sa tête sur ses genoux et entoura ceux-ci de ses bras tremblants.
-Uh... Uh... Maintenant.... Je suis définitivement seul... J'ai... tout perdu...
La nuit tomba.
Soupir long. Sam referma le livre dans un bruit de pages froissées.
« Alors... »
Il regarda autour de lui, attentivement.
« Il existe vraiment un être capable de quelque chose d'aussi incroyable ?! Vaincu pendant une bataille... Je me demande si... Oui... Ca doit pouvoir marcher... Il faut que je le trouve... »
Le garçon eut soudain un regard fou qu'on ne lui avait jamais vu. Un sourire se fendit sur son visage lorsqu'il sortit de la vieille bicoque en ruine du professeur Kebdry qu'il venait de fouiller.
« Si les informations qu'il a écrit sur ce légendaire sont vraies... S'il a cherché à le sauver pour de vrai... Alors rien ne m'empêche d'essayer... Le prix à payer... De toute façon... Je n'ai rien à perdre alors... »
Il serra le poing et avança en direction de la ville la plus proche, un regard déterminé, brillant d'un éclat fiévreux et dangereux. Il avait là de quoi se repentir de sa faute.
« Alors oui, je trouverai... Aclanoirceur. »
Sam se concentrait. Appuyé le dos contre un mur, les bras pendants, concentré et les yeux fermés.
Il y avait beaucoup de Pokémon alentours et ils avaient besoin de partir maintenant. En volant de préférence. La fatigue dominait le garçon et les bruits alentours ainsi que les gémissements de Morgane l'empêchaient de se focaliser. Pourtant, le ranger ou ses Pokémon pouvaient débouler dans cette ruelle isolée d'un instant à l'autre.
Chap, le voyant en difficulté, lança d'un air paniqué :
-Chapignon, chap ! (-Elle ne va pas tarder à pouvoir bouger de nouveau ! Et je n'ai plus de poudre Sam !)
-Oui ! Je sais ! grogna le dresseur en retour.
Sam grinça des dents et reprit sa recherche de cible. Les esprits de Pokémon étaient très nombreux ici, entre ceux de la forêt, ceux de la ville, les sauvages et els domestiques. Mais il lui fallait une monture maintenant.
« Allez, concentre-toi... Là ! »
Le garçon se focalisa soudain sur l'esprit d'un grand oiseau. Il s'agissait d'un majestueux Roucarnage à l'âge déjà bien avancé. Ce volatile-là aurait la force nécessaire au transport de deux humains et d'un Pokémon tel que Chapignon. Il était parfait. De plus, le jeune homme devait élucider ce mystère de la glace même s'il supposait déjà la probabilité d'un rapport avec un –ou même plusieurs, qui sait- légendaires.
Le garçon se mit à trembler lorsque le Pokémon oiseau se mit à résister en sentant un autre esprit que le sien s'immiscer dans le sien. Le Roucarnage battait violemment des ailes comme s'il cherchait à envoyer une tornade vers un ennemi invisible. Ses yeux commençaient à se rétrécir à la manière des Pokémon capturés par un capstick mais le grand oiseau résistait violemment cependant. Ses serres se crispaient et se tordaient dans tous les sens tandis qu'il poussait des petits piaillements d'alerte.
Plusieurs Roucool et Roucoups s'envolèrent alors des arbres alentours et partirent vers la forêt dans un fracas de plumes.
-Gnm...
Sam se mordit la lèvre inférieure jusqu'à saigner mais Roucarnage ne put résister bien longtemps et bientôt, le puissant oiseau se posa devant lui sans broncher. Le garçon s'assura que la prise sur l'esprit du Pokémon était solide puis il rouvrit lentement les yeux et s'essuya la lèvre du bout des doigts.
Chapignon et Morgane avaient observé cette étrange manipulation qui avait duré moins d'une minute avec un œil impressionné pour l'un, vitreux mais avec une once de surprise pour l'autre.
« Comment... Est-ce qu'il a fait ça ?! » pensa la jeune fille, voulant reculer pour s'enfuir.
Les effets de la poudre jaune faisait effet de moins en moins et plus les secondes défilaient, plus elle parvenait à reprendre ses esprits. Elle bougea lentement son pied gauche vers l'arrière.
« Il faut que je retrouve Absol ! Si on quitte Esios, je ne le reverrai jamais ! »
Elle recula l'autre pied.
...
-Sol ! Sol ! Sol !
Le grand chien blanc à corne noire courrait à en perdre haleine en suivant l'odeur de la Galopa qui avait emporté sa partenaire. Son odorat lui disait aussi qu'un deuxième destrier avait poursuivi la jument et que, olfactivement, un autre humain était juché sur l'étalon.
Trois autres odeurs étaient reconnaissables : celles de Morgane, le vulgaire Chapignon et l'insupportable insecte géant. Plus ténue, l'odeur de la minuscule araignée jaune.
« Il y a aussi eu des combats, à en voir l'état de certains arbres et l'absence de Pokémon dans les environs... »
Le Pokémon continua son avancée rapide dans les bois. Il avait de plus en plus de mal à respirer, de plus il était encore loin de son objectif, les Galopa étant des chevaux dix fois plus rapide que Groknius. Surtout, notre cher Absol ayant toujours vécu dans les montagnes, n'aimait pas trop la forêt ; le sol mousseux, les plantes en abondance, les cachettes trop propices à une embuscade, le nombre de bestioles trop important, cette odeur étrange de fleur mélangé aux fruits des buissons qui enivraient son nez et le terrain plat mais traître du au nombre de petits cailloux incalculables. Non, décidément, Absol n'aimait pas quitter son habitat naturel.
« Je ne dois pas m'arrêter ! Je dois... retrouver Morgane ! Si je perds sa trace, la prophétie risque d'être modifiée et salie ! »
Il accéléra encore un peu et continua sa course effrénée lorsqu'il trébucha sur une masse au sol et tomba lamentablement par terre, le nez dans la poussière. Néanmoins, il se redressa bien vite et jeta un regard noir à l'être odieux qui avait osé ralentir sa course. Il ouvrit de grands yeux en voyant un être humain, un mâle, couché par terre, sur le ventre, du sang à divers endroits et la tête dans la terre, marmonnant de temps à autre des paroles incompréhensibles sur une guitare et un accordéon percé.
« Mais que... »
Il fit quelques pas en direction de l'homme puis se détourna.
« Je n'ai pas le temps. Je dois me concentrer sur Morgane .»
Et il repartit vivement, abandonnant le pauvre souffre-douleur Tobias, qui décidément aimait bien le groupe de rock de son rêve.
...
Sam fit monter Morgane sur le dos de l'oiseau de force; elle commençait à se débattre, la paralysie perdait de son effet et franchement, il n'avait pas le temps de s'amuser.
-Chap? fit-il en direction de son compagnon de route, attendant qu'il monte derrière la jeune fille.
Chap hésitait et rechignait à monter. Son traumatisme aérien lorsqu'il était un ramasse-poussière champignonien de deux heures lui rappelait de trop mauvais souvenirs. L'idée de voler sur le dos d'un Pokémon que son dresseur contrôlait à peine ne lui plaisait guère. On ne savait pas ce qui pouvait arriver avec ce genre d'engin précaire et douteux. Mais ce n'était pas tout. S'il n'y avait eu que ça, il aurait sûrement pris sur lui et serait monté en fermant les yeux et en s'agrippant comme il pouvait. Mais non. Pour une raison encore difficile à expliquer de son point de vue de champi-kangourou, sa confiance envers Sam semblait s'effriter ces dernières heures.
Chap secoua finalement la tête de droite à gauche en signe de négation.
-Chap?! Mais... balbutia Sam, désemparé.
Sam ne comprenait pas. Pourquoi son ami refusait-il de le suivre ? Le garçon avait besoin de son soutien, et de plus il aurait besoin de ses aptitudes toxicologiques.
-Chapignon Chap! (-Je ne peux pas faire ça... J'ai... Le mal de l'air...)
-Kwaaaaa? Tu m'abandonnes alors ?
Le garçon était plus qu'étonné sur le coup. Et ça l'embêtait pas mal d'ailleurs. Sans Pokémon, sur une terre lointaine d'Esios, avec une hystérique proclamant des vers à tout bout de champ bizarrement et poursuivi par un ranger pas du tout arachnophobe pour un sou, il sentait que ça ne serait pas du gâteau.
Certes, il avait survécu à beaucoup de désagréments sans Chap mais...
-... D'accord. Essaye de retrouver Brusty au moins. Et évite le ranger et son araignée, d'accord ? Si tu trouves le moyen de me rejoindre... Viens. Mais sinon, restez ici, ok ?
Le Pokémon plante combat hocha lentement la tête puis recula pour laisser monter le garçon sur le dos de l'oiseau.
-A bientôt, alors... murmura Sam, jetant un dernier regard au Pokémon tout en montant derrière la jeune fille qui tremblait de peur.
Roucarnage décolla et bientôt, les deux humains et l'oiseau ne furent plus qu'un point dans le ciel. Le Pokémon champignon recula alors vers les sous-bois et fut avalé par la végétation.
Quelques minutes plus tard, un Arcanin bondit sur la route pavée et renifla le sol avant d'aboyer en direction du ciel.
Un autre homme le suivit et grogna :
-Merde...
-Canin... grogna à son tour le gros chien.
-Pas grave... Suivons-les à distance. Drattak ! appela le dresseur, rappelant le chien.
Le dragon sortit de sa ball et gronda légèrement en se posant sur le sol pavé sous quelques yeux ébahis des passants. L'homme bondit sur le dos de sa monture qui décolla rapidement.
-Suis-les...
-Draaaa !
...
Morgane retrouva l'usage de l'ensemble de ses membres, cinq minutes après le décollage de l'oiseau. Elle ne put que fermer très fort les yeux et agripper férocement le cou de l'oiseau.
-Ah... Tu as repris tes esprits on dirait... murmura Sam, scrutant le ciel.
-Où... où est-ce que tu m'emmènes ? demanda Morgane d'une voix tremblante.
Le garçon fixait l'horizon.
« Pour l'instant... droit devant... »
Il décida de ne pas répondre.
La jeune fille tremblait et gémissait doucement. Le garçon se rapprocha vers l'avant et toucha involontairement la jeune femme.
Elle eut un long frisson, presque un spasme et partit brusquement vers l'avant.
« Mais... Que... ? » s'interrogea Sam en reculant légèrement, ne voulant pas la faire tomber.
-Pourquoi tu fais ça ? T'as failli tomber !
-...N... Ne me touche pas...
-...Pourquoi ?
-.................................
« Elle est tellement bizarre... Qu'est-ce que ça veut dire... ? »
Sam se plongea dans ses pensées tandis que le Roucarnage contrôlé par ce même homme continuait sa rapide avancée aérienne vers une nouvelle région.
...
–Eh Morgane !
La petite fille se retourna. Elle avait maintenant huit ans.
-Eh !
-Ah ! Tobias ! s'écria Morgane en levant le bras et en agitant sa main de droit à gauche en signal d'appel.
-Natu tu ! fit le petit oiseau sur la tête de la fillette.
Le petit garçon rejoignit son amie et s'arrêta devant elle.
-Eh ! Eh ! Tu sais quoi ? Tu sais quoi ?
-Quoi ?!
-Je vais bientôt rejoindre une école de ranger ! fit Tobias, tout enthousiaste.
« Une... école... ? » pensa Morgane.
-Comme ça je pourrai protéger cette forêt des vilains qui l'attaqueront !
-Oh... Mais tu... vas partir alors ? hésita la petite.
Le garçon pencha la tête sur le côté.
-Bah... ouais... ça t'embêtes ?
-....
Le visage de Morgane se fendit d'un sourire.
-Non, je suis contente pour toi !
-Ah ouf ! sourit le garçon. Pendant un instant, j'ai cru que...
Mais la petite fillette blonde n'écoutait plus. Ses yeux brillaient de larmes contenues et elle avait du mal à imaginer le fait que son meilleur ami allait la laisser là.
Surtout maintenant. Quelque chose d'étrange, un sentiment malfaisant préoccupait la petite. Et personne ne s'en rendait compte. Elle avait besoin d'aide.
Et sa seule aide allait maintenant partir loin d'elle.
« Pourquoi maintenant... ? J'ai peur... »
-Viens, on va jouer ! fit Tobias en attrapant le bras de Morgane et en l'entraînant avec lui dans les sous-bois.
Morgane renifla et ravala ses larmes, profitant de ce moment de jeu avec son ami.
-Grr...
-Hh... Non !
Telle une proie traquée, les yeux exorbités, elle recula lentement. Le Démolosse, les babines dégoulinantes de bave se rapprocha.
-L...laissez-moi !
Deux pas en arrière.
-A...Arrêtez... Je ne voulais pas... Je ne savais pas que... c'était votre territoire...
-Tu vas mourir, sale Absol ! grogna le chef des Malosse.
-Aah... Non ! Pitié ! geignit Péti.
-Graaa ! hurla le chien des enfers en balançant une gerbe de flammes sur la chienne à corne.
Celle-ci ferma les yeux douloureusement mais la brûlure ne vînt jamais. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, c'était Groknius qui grinçait des dents, la peau de son épaule à vif et fumante.
-Ah ! G... Groknius !
L'Absol, après un temps de tremblements douloureux, se retourna, le regard noir et des lamres de douleur perlant dans ses yeux :
-Ne m'appelle pas comme ça !
Puis il envoya une violente vibrobscur vers l'alpha de feu qui se la prit de plein fouet.
-Cours Péti ! lança ensuite le chien à corne en direction de la femelle.
-Oui !
Elle partit à toute allure, laissant Absol molester férocement le Démolosse qui lui avait laissé pour toujours une brûlure incurable sur l'épaule. Ce jour-là, Péti décida de ne plus jamais appeler l'Absol qui venait de la sauver par le nom de Groknius. A partir de maintenant, il resterait juste Absol.
« ... Et puis... Je t'aime Absol... » pensa-t-elle alors qu'elle fuyait le lieu de bataille.
A suivre dans Crépuscule...
Roucarnage se posa lentement au sol dans un bruissement d'ailes.
Sam mit à pied à terre, suivi par le pas plus craintif de Morgane.
-Kanto on dirait. Enfin... soupira le garçon.
-...
-Allez on av...
Soudain, un Kraknoix glissa devant eux. Un Tortank sauta devant lui. Sam écarquilla les yeux.
-Que... ?
-Krak... (-Argh..)
« Un... Kraknoix ? Ici ? » pensa Morgane.
Le Pokémon se tourna vers eux et vers le garçon qui le fixait amoureusement.
« Un Kraknoix ! »
-Krak...noix ! (-Ai... aidez-moi !)