Chapitre 1 : Aube
Alors même que les clameurs et hurlements de combats montaient jusqu'à mes oreilles, je pouvais entrevoir les premières flèches de la garde voleter dans le ciel pour enfin atteindre le sol, et pourfendre l'ennemi qui se trouvait aux portes de la ville. Ils avaient réussis à pénétrer l'enceinte de la ville-basse, d'après ce que j'en entendais de la population, et les habitants fuyaient vers l'intérieur de la cité. Les soldats, eux, faisaient le chemin en sans inverse, accompagnés de Pokémons tous plus impressionnants les uns que les autres.
Mon but avait été de retrouver quelqu'un, dans une taverne. Et j'avais espéré qu'elle ne se trouve pas fermée. Bien entendu, c'est ce qu'elle était. Je me faufilais dans un coin, bien décidé à observer les environs avant de décamper. Je devais retrouver cette personne, c'était vital. Je voulais retourner dès que possible dans mon domaine, afin d'aider les miens à se défendre, à lutter, ou à organiser une quelconque rébellion. Cette dernière option devait se faire dans le plus grand des secrets. Mais avant cela, je devais retrouver un homme qui avait prétendu, dans sa lettre envoyée quelques jours avant, pouvoir aider à contrer le royaume qui nous assiégeait. La capitale, Fedor, était perdue. Chacun en était conscient, mais le combat perdurait, et il perdurerait aussi longtemps que tiendrait les soldats à la porte.
Un cri me sortir de mes réflexions, et j'en vins à observer les alentours. Inquiet, je sortais de la ruelle dans laquelle je m'étais engagé pour éviter les affrontements éventuels. Nous avions des espions au sein même de nos soldats. Ces mêmes espions étaient capables de se battre contre un noble, si tant est qu'ils aient pu le reconnaitre. Mais ça n'était pas possible dans mon cas. Ma cape de voyage était toute simple. Pas de fils d'or brodés sur les coutures, ni d'armoiries sur le devant. Je n'étais qu'un citoyen parmi tant d'autres. Et seule mon attitude singulière durant ce siège pouvait me faire découvrir. Mais il n'en était rien. J'avais pris mes précautions.
Par malheur, je n'avais pu convaincre mon Roi de fuir. Il avait tenu à rester à Fedor, mais m'avait fait promettre une chose. Je devais permettre à son fils, le prince héritier, de fuir et de ne pas être capturé par la République. J'avais déjà tout prévu. Salamèche, mon partenaire, me désigna des ombres de ses griffes. Elles se mouvaient vers les portes.
- Sala-Salam !
Il me tirait par le bout de ma botte. Les choses n'allaient pas tarder à sentir le roussi. Je le sentais tout comme lui. Il s'agissait des espions, à n'en pas douter. Mon partenaire de feu avait un don pour prévenir les évènements. Il se mit à fuir dans la direction opposé. Mais je devais attendre cette personne. Cette personne importante. Dans cette lettre, l'homme m'avait exposé la situation. Il savait quand allait se dérouler le siège. Comment tout se terminerait. Il savait que nous avions des espions, et j'avais dès le début cru que l'on me demandait de trahir mon Roi. Cependant, les choses s'éclaircissaient vers la fin de la missive. Il m'avait enjoint de le rejoindre à Fedor. Il m'avait écrit qu'il m'expliquerait ce que j'avais à savoir pour mener la rébellion à bien. Et il avait également précisé que je devais venir seul, pour ne pas attirer l'attention. Maintenant que j'étais là, j'étais toujours seul, en compagnie de Salamèche. Qui me fixait droit dans les yeux, avec cette même inquiétude que lors de notre départ. Notre lien était fort, et nous savions ce que ressentait l'autre dès l'instant où nos regards se croisaient.
Pendant que je laissais mes pensées vagabonder, je n'avais pas entendu ce son caractéristique d'une lame que l'on sort de son fourreau. Ni vu cette main qui se posait sur mon épaule. Je ne réagis que trop tard, dégainant à demi ma lame. Mon partenaire se préparait à sauter à la gorge de l'inconnu. Mais il nous parla. Avec empressement. Son souffle était coupé, et il devait avoir couru peu de temps avant pour cela. Son visage m'était caché par une capuche rabattu sur sa tête. Seule une barbe épaisse grisonnante était visible.
- Allons, mon garçon. Dépêchons-nous ! Je voulais vous parler avant que vous ne partiez, mais l'ennemi avance et ne va pas tarder à pénétrer en ces murs. Nous devons fuir avant qu'ils n'arrivent. Allez chercher votre prince, et rejoignez-moi à la tour est. Il n'y aura personne.
Je n'eus pas le temps de lui demander quel était son nom qu'il s'évanouit dans l'ombre, me laissant de nouveau seul. Le temps nous était compté, c'est-ce qu'il avait dit. J'ignorais comment il pouvait être au courant de ma mission de mettre le prince en sécurité, mais je n'avais plus le choix. Pour ne pas être capturé par les soldats tibaréens, je devais suivre les indications de cet homme mystérieux.
Avant d'être allé au rendez-vous de l'homme, j'avais installé le Prince dans un endroit que j'avais estimé sûr. Et à moins que les espions ennemis n'aient pu avoir vent de mon plan, il y était encore. Je fis un signe à Salamèche, pour qu'il me suive, bien que je n'ai pas à le faire habituellement. Mais j'avais pour habitude de commander des hommes, et ils ne faisaient pas preuve d'initiatives. Du moins, pas de celles que prenaient mon partenaire Pokémon.
Remonter les rues de Fedor fut difficile, la population n'ayant plus le droit d'aller plus en hauteur. La Basse-Ville prise, il ne restait plus que les quartiers commerçants et bourgeois avant le château.
Chacun des habitants voulaient fuir, et il courrait comme rumeur qu'une issue existait dans le château, menant vers la mer. Mer qui était bien visible depuis la muraille est. Et la tour est. Mon hésitation sur le lieu où cacher le Prince m'avait évité de nombreux ennuis. Ayant eu pour idée de le placer dans un petit local, dans le château, je m'étais vite dit qu'il deviendrait difficile d'y retourner si je tardais trop. À la place, je lui avais dit de rester bien sagement dans un vieux commerce à l'abandon, où personne n'irait le chercher. Je mis un certain temps avant d'y arriver, prenant parfois la peine d'attendre Salamèche qui peinait à me suivre, tant il y avait du monde dans les rues. J'en vins à le prendre dans mes bras, quitte à être un peu ralenti. Mais enfin, après de nombreuses minutes à être bousculé de tous les côtés, je pouvais enfin entrer dans la petite bâtisse. Ce n'était pas un établissement bien grand, ni très luxueux. La majorité des fenêtres avaient perdu tout vitrage, et l'obscurité qui régnait dans ce lieu témoignait bien du manque d'activité quotidien. Une ombre se déplaça fugitivement sur ma gauche, et je sentis un fin courant d'air à l'arrière de ma nuque. Réagissant au quart de tour, je lâchais Salamèche et me baissais pour éviter le coup. Réflexe salvateur, qui me permit de prendre l'avantage sur mon agresseur... Qui n'était autre que mon Prince, terrorisé. Le jeune homme, d'à peine dix-sept ans, tremblait de tous ses membres et tenait une vieille bouteille de la main droite. Je me rendis bien vite compte que je l'avais saisi à la nuque et qu'il manquerait d'étouffer si je ne le lâchais pas. Il retomba sur les genoux, encore tout tremblant de peur.
- Erkh... Erkhan... C-C'est vous...? J-J-J'avais cru a-a-avoir à f-faire à un de c-ces espions à la solde de la République...
Je ne pris pas la peine de lui répondre, observant l'extérieur par la fenêtre. En regardant de nouveau le Prince, je constatais qu'il portait encore ses armoiries et ses vêtements prouvant son appartenance à la royauté. Je lui arrachais sa cape d'un geste vif, provoquant son indignation et son étonnement.
- Mais... Que faites-vous ? Vous n'avez pas le droit !
- Sire, si vous voulez sortir de Fedor, vous aurez tout intérêt à faire profil bas. Et vous pavaner avec vos armoiries, ce n'est pas ce que j'appelle de la discrétion. C'est votre vie qui est en jeu, cette fois !
- Mais, je ne...
Un seul regard vers lui le fit taire. Avoir été son percepteur pendant ses sept dernières années m'avait permis d'avoir une certaine autorité sur lui. Ou, au moins, mes conseils avaient-ils de la valeur pour lui. Je lui intimais d'enlever les vêtements les plus voyants dans une foule, tandis que j'allais chercher des affaires qui apparaitraient plus... citadines et moins royales.
Revenant, je posais les affaires et m'avançais de nouveau vers la fenêtre, attendant que mon Prince ait fini de se rhabiller. Des mouvements dans la foule m'inquiétèrent alors. Un petit groupe de quatre personnes se détachait de la masse et se dirigeait vers le petit commerce abandonné. Ce n'était pas tant ce quatuor qui m'inquiétait, mais plutôt les épées qu'ils dégainèrent et leur allure vive. Je venais de trouver mes espions.