Chapitre 6: I'll never forget you
22 avril 2012
Heure inconnue
Lieu inconnu
La lumière venait de s'allumer. J'ouvris péniblement les yeux.
J'étais allongée sur un lit semblable à un lit d'hôpital, et je commençais à me lever pour voir où j'avais atterri. Le problème est que je sentis une énorme douleur au niveau de la poitrine. C'est alors que je me suis souvenue d'hier. La sortie avec Jared. La course-poursuite. Ce coup qu'on m'avait infligé à la poitrine et qui me faisait horriblement mal.
Je dus d'ailleurs attendre plusieurs minutes avant de pouvoir me lever et avoir une vue d'ensemble de la chambre dans laquelle je me trouvais.
C'était une chambre entièrement faite de plexiglas. Entièrement transparente. Seul un miroir et une fenêtre semblaient contraster avec la transparence de cette chambre. Une très grande chambre aussi, avec des murs ronds. J'en fis un peu le tour, en rasant les murs et me tenant le ventre, ma poitrine me faisant souffrir. Cette chambre était suffisamment grande pour caser cinq ou six lits comme celui que j'avais.
Je décidai de regarder au-travers de la vitre pour voir s'il n'y avait pas quelque chose de l'autre côté.
Je remarquai alors le complexe dans lequel j'étais.
Cela semblait être une prison, puisque la pièce dans laquelle j'étais semblait se reproduire à l'identique dans les trois côtés que je voyais, et sur les étages supérieurs. C'était une sorte de cube, dans lequel chacun avait une cellule semblable à la mienne, et je voyais quelques Pokémon passer de temps en temps pour donner aux détenus leur ration de nourriture.
Je regardai tout autour de moi pour voir quel genre de « prisonniers » pouvaient se trouver dans ces cellules.
Dans la rangée en face de la mienne, tout à gauche, un homme s'amusait à jouer avec une balle en caoutchouc qu'il faisait rebondir contre la vitre ; dans une cellule un peu plus loin, une jeune fille était en train d'écrire dans un cahier – sans doute son journal intime – avec un stylo rouge qu'elle aurait pu piquer n'importe où ; un autre détenu, situé sur le coin gauche à ma droite et l'étage au-dessus, lisait tranquillement un bouquin de Nietzsche, en sortant son crayon gris de temps en temps pour mettre des annotations sur le bouquin.
On entendit des sifflotements. Quelqu'un était en train de siffloter une chanson, et celle-ci je la connaissais. A beautiful lie, 30 seconds to Mars. J'avais écouté cette chanson beaucoup de fois, donc du coup je m'amusai à siffloter de concert avec lui. Nous continuâmes pendant une vingtaine de secondes jusqu'à ce qu'un coup contre la vitre de mon voisin me fit comprendre qu'il fallait arrêter.
J'entendis quelqu'un, ou du moins quelque chose, arriver au niveau de ma vitre. J'étais déjà allongée sur mon lit depuis pas mal de temps, donc je commençai à regarder qui venait me voir.
Il s'agissait d'un Pokémon assez imposant, un Riolu taille XXL, portant des lunettes, qui tenait une batte de base-ball dans une patte et un calepin dans l'autre.
Il me regarda une seconde, consulta son calepin, regarda le numéro de la cellule, me regarda à nouveau, releva ses lunettes en faisant un sourire puis repartit dans l'autre sens comme si de rien n'était.
-Ce coup-ci, il est pour toi.
Je levai la tête, choquée – avant de reposer la tête aussitôt vu comment j'avais mal. C'était un jeune de mon âge qui devait avoir parlé, et en sachant d'où venait le bruit j'en conclus qu'il s'agissait de mon voisin sur la gauche.
Je décidai alors de me lever – avec difficulté – pour me diriger vers un endroit où une petite trappe pouvait être levée, que je n'avais pas remarqué tout à l'heure.
Je levai la petite trappe dans le mur, qui laissa apparaître un jeune qui devait avoir cinq ans de plus que moi, tout au plus. Il avait les cheveux longs et bruns, les yeux d'un bleu assez clair et une barbe qui semblait ne pas être rasée depuis bien trois mois. Il me regarda avec un sourire puis lança :
-Cool, enfin quelqu'un à qui je peux parler. D'habitude, ils sont tous à s'isoler, je me sens toujours tout seul.
-T'es là depuis longtemps ? Lui demandai-je.
Il réfléchit, puis eut un petit rire nerveux.
-J'ai envie de te dire que j'ai oublié depuis quand je suis là. La dernière chose dont je me souviens c'est de voir qu'un noir avait été élu président des Etats-Unis, alors te dire depuis combien de temps je suis là... ironisa-t-il. Toi, t'es la nouvelle venue. Je le sais, je t'ai vue arriver hier soir avec les gardes. T'avais l'air bien en souffrance d'ailleurs.
-T'es là depuis plus de trois ans ? Lançai-je, choquée.
Il eut un mouvement de recul.
-Ca fait déjà trois ans ? Woaw, c'est fou comme on voit pas le temps passer. En même temps, y'a pas de fenêtre, pas d'horloges, aucun contact avec l'extérieur, et les Pokémon qui sont ici refusent de dire quoi que ce soit. Tu vois le Lucario qui est passé tout à l'heure devant ta cellule ?
J'acquiesçai. C'était donc un Lucario. Noté.
-Bah lui, généralement, il vient, il prend un prisonnier au hasard, ensuite ce prisonnier se fait emmener dans la demi-heure. S'il se case devant ta cellule, qu'il consulte son truc et qu'il fait un sourire, tu peux être sûre qu'il est venu pour toi. Il ne dit jamais rien d'autre.
Après, t'as un Leveinard qui distribue la nourriture. Ses passages sont tellement irréguliers qu'on a tous perdu le sens du temps ici. Là, tu vois – il fixe un Pokémon à l'étage du dessus, qui ressemble à un œuf géant sur pattes, qui passe devant les cellules avec un chariot rempli de sachets de nourriture – c'est son passage quotidien. Personne ne sait quand il va repasser ensuite.
Le Pokémon que tu vois là-bas – il fixe une espèce de panda géant, à l'air pas très commode – c'est un nouveau. On a pas encore eu son nom – ça m'étonnerait qu'on l'ait un jour d'ailleurs.
-Tu les connais tous, les gardes, ici ?
-Je suis là depuis longtemps – plus de 3 ans si je te crois. Donc ouais, j'ai eu l'occasion de voir passer pas mal de monde, gardes comme détenus.
« On la boucle ici ! »
Nous nous retournâmes pour remarquer qu'un autre Pokémon, qui ressemblait à un poulet de combat tout rouge et jaune avec de grandes jambes, se trouvait entre nos deux cellules, et nous fixait d'un regard accusateur. Nous baissâmes tous les deux la tête puis remontâmes la trappe qui nous permettait de communiquer.
Le poulet anthropomorphe attendit que nous nous installâmes sur le lit, moi prenant la première chose disponible sur la table de nuit – à savoir un bouquin en allemand écrit par un footballeur – lui de son côté, puis partit en nous regardant du coin de l'oeil.
Nous attendîmes approximativement une minute, avant de nous relever lentement et nous replacer devant la trappe que nous avions descendue chacun de notre côté.
-Celui qui nous a demandés de la boucler, reprit-il avec un sourire, c'est Braségali. Il a l'air assez strict et intimidant au premier abord, mais il est très sympathique quand t'apprends à le connaître.
J'assimilai tous les noms au fur et à mesure que mon jeune voisin me racontait la vie ici.
Nous continuâmes à discuter, lui me demandant comment le monde avait évolué pendant tout le temps où il avait « disparu », et moi lui demandant comment il vivait son enfermement, et quelles étaient les conditions de vie dans cette prison géante.
A un moment, après un bon quart d'heure de discussion, il me regarda et lança :
-D'ailleurs, je connais toujours pas ton nom. Moi c'est Clyde, enchanté de te connaître.
-Amélie, de même.
Nous voulûmes continuer la discussion mais des pas se firent entendre dans notre couloir. Nous refermâmes rapidement la trappe puis nous replaçâmes sur le lit en vitesse, moi un peu plus lentement puisque ma poitrine me faisait toujours mal. Je n'avais bizarrement presque plus senti la douleur en discutant avec Clyde ; peut-être était-ce parce que j'avais besoin d'un réconfort, de quelqu'un à qui parler pour que ça passe un peu.
Un prisonnier, la vingtaine, se tenait dans l'autre cellule juste en face. Il me regarda m'installer sur le lit, déplaça son regard vers sa droite, puis s'approcha doucement de la fenêtre. Nous nous fixâmes lentement, puis il retourna dans son lit, me fixant. Il semblait attendre quelque chose, qui pouvait arriver à n'importe quelle heure.
Il y avait une petite musique d'ambiance que je n'avais pas entendu quand je discutais avec Clyde. Une petite musique d'ascenseur, qui a le don de stresser les gens, et qui signifie une attente. Sans doute interminable, pensai-je.
Après quelques secondes à vérifier s'il n'y avait personne, je me relevai et me déplaçai jusqu'au miroir, non sans mal à cause de la douleur lancinante dans ma poitrine.
Je me regardai: j'avais une tête de déterrée, comme si j'avais pas dormi depuis trois jours. J'avais aussi pâli, et mon teint avait maintenant l'air de celui d'un vampire. Je faisais vraiment peine à voir.
Je n'avais pas vu la porte s'ouvrir et deux Pokémon entrer.
Je me retournai et vis celui qui m'avait frappé à la poitrine hier. Je reculai vivement, puis me retrouvai coincée contre un coin arrondi de la pièce. A sa merci. Il pouvait me tuer à sa guise.
"Oh, mais je n'ai pas l'intention de te tuer, loin de là."
Et il lança un petit rire. Je ne me sentais pas du tout en sécurité, mais il s'approcha de moi, me retourna et m'attacha avec des menottes. Bien sûr, je n'opposai aucune résistance, de peur d'avoir un nouveau coup qui risquerait de me tuer. Je ne prononçai pas un seul mot, par ailleurs. J'aperçus un second Pokémon, qui semblait humanoïde, vêtue d'une robe, qui accompagnait l'autre et qui restait en second plan. Ils me firent sortir tous les deux de ma cellule puis m'emmenèrent dans le long couloir. Je passai devant Clyde, qui me regarda d'un air triste en me voyant partir.
Le garçon de la cellule d'en face s'était replié sur lui-même. Il semblait attendre, à nouveau. Puis d'autres, que je vis prier. Je ne mis pas longtemps à comprendre que c'était pour moi, et pas plus de temps pour comprendre la gravité de la situation.
Puis un long couloir avec quelques lumières, créées apparemment par des Pokémon en forme de bougie, pendant lequel le Zorua bipède me poussait légèrement vers l'avant quand je n'allais pas assez vite, sans que je n'ose faire de commentaires.
On arriva ensuite devant une grande porte dorée, qui s'ouvrit presque aussitôt. Ils me firent avancer, me laissèrent là et repartirent dans l'autre sens. J'eus alors jusqu'à ce qui me semblait être le centre de la salle, et à peine arrivée je vis un projecteur se braquer sur moi.
"Ah, te voilà. Ma chère Amélie..."
Je ne savais pas d'où venait cette voix. C'était une voix assez masculine, très chantante, presque séductrice. Je vis soudain une ombre s'approcher dans ma direction, puis ouvrir des yeux bleu foncé qui me firent sursauter. Je ne voyais rien d'autre que ses yeux ; tout le reste semblait plongé dans le noir. Comme si la créature en face de moi n'était faite que d'ombres, d'obscurité.
"Je me disais que tu allais finir par te réveiller à un moment où à un autre..."
L'ombre me tapota l'épaule. Je sentais des frissons partout ; cette présence était loin d'être amicale, et cela se sentait.
"Même s'il faut avouer que nous avions légèrement exagéré. Je ne savais pas que ta douleur à la poitrine serait si grande..."
Il appuya contre ma poitrine, et je m'effondrai de douleur, presque incapable de me relever.
"Et subsisterait encore plusieurs heures après."
-Quelle heure est-il ? réussis-je finalement à lancer.
"L'heure n'a pas d'importance. L'important est ici de savoir ce qui va t'arriver dans les prochaines heures."
-Qu'est-ce que vous allez me faire ? lançai-je, paniquée.
Il y eut un silence de quelques secondes, puis la voix se mit à répondre d'une voix enjouée en criant presque dans mon oreille :
"Surpriiiiiise !"
Et l'ombre éclata de rire. Quant à moi, je n'avais plus tellement le coeur à rire. Je ne voulais qu'une chose, et je parvins à l'articuler avec grande difficulté :
-Où est Jared ?
Il s'arrêta net de rire et lança, avec une pointe d'ironie :
"Excuse-moi, je n'ai pas entendu. Tu peux répéter ?"
-Je veux... voir Jared.
"C'est mignon, la fille qui veut voir son amoureux. C'en serait presque affligeant."
La dernière partie de sa phrase fut lancée sur un ton qui pouvait facilement s'assimiler à du dégoût. Il sembla alors se tourner vers quelqu'un puisque je ne voyais plus ses yeux. Il lança ensuite :
"Emmenez la fille se changer, puis laissez-la dans la salle 5. On verra ce qu'on fera d'elle plus tard."
On me fit me relever, puis on m'emmena dans une première salle, où on me laissa me déshabiller. Je n'avais même pas eu le temps de réagir, je n'avais même pas eu le temps de voir qui m'avait emmenée.
En enlevant le T-Shirt je vis la trace de la blessure à ma poitrine. Une énorme trace bleue. Je paniquai, et tentai de sortir. La porte était fermée. J'étais à deux doigts de sombrer dans la folie, puis je sentis le regard des deux créatures qui me fixaient. Je savais qu'ils étaient capables de me tuer sans aucune forme de procès, donc je me résignai à prendre la tenue de détenu, d'un blanc immaculé, et la mis par-dessus mes sous-vêtements sous l'oeil méfiant des deux Pokémon.
A peine eus-je mis mes nouveaux vêtements qu'on me prit puis on m'emmena dans une autre salle, où on m'enleva mes menottes et on me lança dans la « cellule ». Je fis deux pas puis m'effondrai sur le sol dur. La douleur était atroce, et il m'était impossible de me relever. Je restai dans une position quasi-foetale pendant de longues minutes, puis je sentis quelque chose me soulever, puis me poser assise dos au mur. Je ne vis pas qui m'avait déplacée, la salle étant dans l'obscurité la plus totale. Soudain, je sentis qu'on me regardait.
La lumière s'alluma, et je fus alors complètement aveuglée ; je vis quelque chose qui avait la forme d'un dragon rouge, qui était en train de me regarder souffrir sans réagir.
"Regarde-moi."
Sa voix était calme, plus féminine, plus gentille. J'attendis que mon œil s'accommode à la lumière puis je levai les yeux et tâchai de la regarder. La créature avait fermé les yeux. Je ne savais pas pourquoi, mais je vis quelques secondes plus tard ses yeux rouges s'ouvrir.
Je fus alors propulsée contre le mur, essayant de crier mais ne pouvant pas sortir le moindre son. Ce fut comme si on me poignardait le cerveau plusieurs fois : la douleur était absolument intenable, au point où je ne pouvais même plus me lever, condamnée à rester dans cette position alors qu'on était en train de sonder mon esprit. Je finis finalement par m'évanouir, à cause de la douleur.
Quelques temps après, je me réveillai dans un nid, complètement allongée. Se lever semblait impossible, mais j'y parvins dans un effort et une souffrance que je n'avais jamais connus avant ; je manquai d'ailleurs de m'écrouler en étant complètement levée. Mon regard se dirigea vers une fenêtre plus haut, qui semblait avoir une vue sur une autre cellule. J'escaladai l'endroit qui menait à la fenêtre et eus une pleine vue sur la salle adjacente. Dans cette salle, je vis Jared, à terre, en train de pleurer. J'ouvris la bouche mais ne m'entendis pas crier. J'essayai de taper sur la fenêtre pour qu'on m'entende de l'autre côté, mais je ne vis aucune réaction et mes poings ne tapaient même plus. Je ne pouvais plus émettre le moindre son, sous peine d'avoir une douleur encore plus importante.
Lui aussi était en train de souffrir. J'ai commencé à pleurer à ce moment-là. Je voulais savoir ce qui lui arrivait, je voulais savoir les douleurs qu'il avait ressenti. Je voulais connaître ses souvenirs, son passé, savoir la vérité sur lui. Je voulais simplement l'aider.
Mais au moment où je m'apprêtai à vouloir lui parler, je ressentis une douleur à la poitrine qui me fit reculer de quelques pas, puis basculer de plusieurs mètres de hauteur dans le nid où je me trouvais précédemment.
Le dragon rouge de tout à l'heure arriva à ce moment-là, complètement paniqué, se plaça quelques centimètres au-dessus de moi puis posa sa tête sur ma poitrine. Je la sentais pleurer, je voyais ses larmes, et je ne pouvais rien faire. Je ne pouvais même plus bouger, la prendre dans mes bras pour la consoler. Après quelques secondes le Pokémon lança :
"Je... suis désolée."
Je ne pouvais pas lui répondre, même pas émettre le moindre son. Je voulais la rassurer, en lui disant que ma douleur va passer, mais je n'eus même pas le temps de la consoler puisque je sentis quelque chose arriver dans la salle et me prendre sur son épaule et me conduire dans une autre salle.
En partant, je voyais le regard attristé du dragon, dont je n'avais pas eu le nom. Elle baissa le regard en me voyant partir, et la porte se ferma alors.
Je n'avais plus aucune connaissance de l'heure qu'il était. Je ne savais même pas si on était le jour, la nuit.... Il n'y avait ni lumière naturelle, ni horloges, ni un quelconque moyen de se repérer dans le temps. Même mon horloge interne devait être détruite. Le temps, le seul repère qui me restait ici, m'était supprimé.
J'étais presque dans un état second, incapable de faire quoique ce soit. J'étais comme un poids mort.
Ces couloirs étaient longs, trop longs. Je n'en pouvais plus. Le Pokémon qui me portait ne me faisait pas mal, mais c'est tout simplement que j'étais fatiguée. Je ne savais pas depuis combien de temps j'étais éveillée, mais j'avais l'impression d'avoir été retenue éveillée durant des jours. Je ne sentais plus mon corps, c'était comme si j'étais dans le coma mais encore consciente, encore capable d'entendre ce qui m'entourait.
Quelques instants plus tard, je sentis qu'on me déposait à même le sol et qu'on m'attachait à des chaînes. Je ne pouvais plus bouger, et je commençai à voir autour de moi. Cela ressemblait à une espèce de table d'opération, sur laquelle je voyais quelqu'un. Il ne me fallut pas longtemps pour savoir qui était sur cette table d'opération. J'avais déjà vécu cette scène.
Ce n'était pas un cauchemar.
C'était une préméditation.
-Jared... lançai-je avec une voix faible, sachant mon problème à la poitrine.
Il se retourna, et me regarda dans les yeux. Je sentais chez lui un mélange de compassion et de tristesse. Il savait qu'il allait mourir, sous mes yeux. Et je savais que j'allais perdre la seule personne que j'ai jamais pu aimer.
Je vis deux autres Pokémon entrer dans la salle dans laquelle nous nous trouvions. Je n'arrivais plus à distinguer les silhouettes à cause de la lumière.
-Surtout... commence-t-il.
Je commençai à pleurer. Je vis une seringue pointée sur lui. Je vis Jared discuter avec un des deux Pokémon se trouvant de l'autre côté de la table d'opération. Puis il me regarda, avec un sourire, et lança :
-Surtout, je te demande de tourner la page. Ce sera sans doute la dernière fois que l'on va se voir, donc je voulais te dire que je t'ai tout le temps aimé, Amélie. S'il te plaît, essaie de m'oublier, je ne veux pas que tu souffres... Je suis désolé qu'on en soit arrivés là.
-Non... S'il te plaît...
Puis je vis la seringue se planter dans le bras de la personne que j'ai voulu aimer. A ce moment-là, je voulus hurler de toutes mes forces. J'arrivai à hurler, à prononcer une seule syllabe avant que mon corps ne se bloque. J'avais gaspillé mes dernières forces en voulant essayer de le sauver. Mais c'était inutile. Il allait mourir là, sous mes yeux.
Je finis alors par tomber dans l'inconscience. C'était fini, j'avais perdu la seule personne qui comptait à mes yeux, plus que mes parents, plus que ma sœur. C'était la personne avec qui je voulais finir ma vie, et elle m'était enlevée. Et je n'avais rien pu faire.
Je sentis à ce moment-là deux grands bras me prendre, mais je ne pouvais plus distinguer ce que c'était. Je plongeai alors dans un profond sommeil, alors que quelque chose me sortait de la salle d'opération.