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La Vie en Couleur : Les Nuances de Rouge et de Noir. de Gein William



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» Auteur : Gein William - Voir le profil
» Créé le 13/12/2013 à 19:16
» Dernière mise à jour le 21/12/2013 à 21:28

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Chapitre 1 : Les cimetières de Landon.
Chapitre 1 : Les cimetières de Landon.

Ma vie a toujours été composé de cimetières. C'est ainsi que je la définirai pour commencer. Du début jusqu'à maintenant. Un alignement de tombes sinistres, de morts et de cadavres. De pokémon dont j'ai oublié le nom en guise de fosse commune. Beaucoup de mondes, au final, avec un passé, un présent et un futur espéré. Des pokémons comme moi : j'en suis un, avec un rôle à jouer, une existence qui a un sens, que certains cherchent, mais que moi j'ai trouvé. Je ne suis pas étranger à ces morts. Loin de là. Je ne suis pas un inconnu qui regarde bêtement les autres mourir. Non plus. Mon rôle, le sens de ma vie y est lié. En somme. En réalité j'existe pour annoncer la mort des pokémon que je rencontre.

Je m'appelle Landon et je suis un Absol. Nous autres, de notre espèce, nous ne sommes pas particulièrement apprécié. Nous existons pour annoncer des grandes catastrophes et nous y assistons, comme pour apprécier le travail bien fait. Nous sommes l'image même des cataclysmes à venir. Et tant que nous serons là et que nous nous montrerons, beaucoup ne vivrons pas en paix. Pourtant, où est le mal ? Nous ne faisons que faire ce pourquoi nous existons. Nous ne sommes pas à blâmer. Que nous soyons là où pas, des catastrophes se dérouleront. Nous ne sommes ici que pour les annoncer. Il en est ainsi et je ne pense pas que qui que ce soit puisse y changer quelque chose. Si nous ne sommes pas là pour le faire, quelqu'un d'autre le ferai sûrement à notre place. Et pourtant... Ils refusent de comprendre. On nous prend volontiers pour responsable. On nous accuse à tort de tous les mots du monde. Comme s'il fallait accuser quelqu'un pour ça. Nous sommes mis au ban du monde et de l'existence même. Inspirant une terreur sans nom, sans pour autant être craint ou respecté comme pourrait l'être certain.

Je pense que ça s'applique plus particulièrement à moi. Moi, j'ai un rôle particulier. Je ne pense pas être très différent de mes congénères. Physiquement parlant, peut être ! Pourquoi pas. Je ne suis certainement pas un Absol normal. J'ai un rôle particulier. Je n'annonce pas des catastrophes ou des cataclysmes de la même manière qu'elle pourrait exister chez les autres. Je pense que c'est très lié, tout de même. Mon rôle peut annoncer indirectement le leur, comme le leur peut annoncer indirectement le mien. Nos rôles ont chacun leur spécificité. Leurs détails qui font que j'occupe le rôle qui est le mien et les autres celui auquel ils appartiennent. En effet, mon rôle à moi est d'annoncer la mort des autres. Qu'importe comment elle arrive, que ce soit de vieillesse, de simple maladie ou par la voie d'un accident ou d'une catastrophe qui pourrait être annoncée par n'importe lequel de mes congénères.

C'est pourquoi, comme une marque qui montrait ma différence, comme un moyen de me différencier que je suis de cette couleur rouge. Comme le sang au fond. Même si je pense que ce n'est pas exactement de cette couleur précise et que je ne suis que d'une nuance de rouge bien différente de celle du sang. à vrai dire ce n'est pas moi qui me suis nommé ainsi. On m'a plus décrit ainsi que je ne l'ai fait moi-même. « L'absol sanguinaire » ; « L'absol de sang » ou « le sanglant » et d'autres surnoms comme on peut chacun en avoir. Au final, on oublie surtout le nom que l'on m'a donné et qui est le mien, même si surtout ceux qui le connaissent sont l'incalculable nombre de mort dont ma route a déterminé la fin de la leur.

C'est pour cela que je pense que ma vie peut se résumer à un cimetière. Je suis en tête des cortèges funéraires. Du groupe qui entourera le futur défunt avant qu'il ne meurt. Et lorsque mon travail est fait, je repars. Je ne suis pas vraiment intéressé par l'après. J'annonce la mort. J'observe la mort. Et je repars. Ni plus, ni moins. De toute façon, je ne suis jamais très appréciés auprès des familles des morts. Pour eux, je suis le responsable, c'est de ma faute. Mais je n'ai jamais tué personne, ni jamais combattu en réalité. Je ne pense pas être quelqu'un de très farouche. Je n'ai rarement eu à le faire. Préférant la fuite au combat pour m'assurer ma sécurité face à des groupes bien souvent nombreux et accompagnés de membres assez forts pour éloigner les dangers. Ironiquement, dangers qui allaient bien souvent frapper l'un des leurs les jours suivants. Sous mes yeux et qui allaient le tuer.

De ce fait, je pense être le premier témoin de la fragilité de l'existence. On a tous tendance à l'oublier mais, quoi que l'on puisse faire, on meurt tous un jour. Je suis là pour le rappeler. Mon rôle est d'annoncer la mort. Et donc qu'une vie en est à son crépuscule. Quel qu'elle soit. J'ai vu des tas de pokémons mourir. Des forts et des faibles. Jeunes comme vieux. Seuls ou en famille. La mort frappe partout. Sans distinction et sans justice. Qu'elle soit méritée ou pas, la mort que j'annonce doit se dérouler. C'est au fond, extrêmement cruel, je le conçois. La mort frappe et on ne peut rien y faire. Partout, n'importe quand et n'importe qui.

Quelques jours encore je me trouvais dans les montagnes. Je pense que ces quelques jours sont un parfait exemple de ma propre condition. Toujours en voyage, en mouvement constant. Ne possédant pas d'endroit où m'arrêter ou me reposer. Ce que certains appellent leur « chez-eux ». Je n'en ai pas grande utilité. D'un côté, je ne suis accepté nulle part et de l'autre je n'en aurai pas le temps pour m'y poser ne serait-ce qu'une seule journée. à vrai dire, une fois reparti, je suis déjà en chemin pour le suivant. Je ne sais jamais où je dois me rendre, changeant, peut être, parfois, complètement d'environnement, passant comme c'était le cas ces derniers temps d'une forêt tout ce qu'il y a de plus normal à un paysage montagneux tout ce qu'il y a de plus classique. D'autres temps je pouvais rester sur une même zone pour plus d'une semaine, à raison de plusieurs cas sur un délai assez court. Je vivais alors en me cachant, des autres qui ne m'acceptaient guère parmi eux.

Je ne sais pas vraiment comment je trouve les « prochains ». C'est comme si je le savais comme la chose la plus naturelle du monde. C'est comme respirer. Je le fais de mon propre chef, guidé par mon instinct qui me mène là où je le dois. Arceus ou une autre force divine doit oeuvrer pour que tout ceci fonctionne correctement. Les Absols n'ont pas reçu ce don par hasard. Et moi encore moins. Nous savons et nous faisons. Et « ça » veille à ce que tout se passe bien. Je ne saurais probablement pas si c'est vrai un jour. Peut être à ma propre mort. Et encore, rien n'est moins sûr. Mais je verrais le moment venu.

Dans ces montagnes je m'étais mis en quête du prochain à mourir. à vrai dire que ce n'était pas chose aisée. Pas que le fait de la trouver était particulièrement difficile, je n'avais qu'à me laisser guide et je suivais. Non, là où ça n'allait pas était le chemin emprunté qui était difficilement praticable. Je ne pense pas être un pokémon fait pour ce genre de climats. C'était assez aride et la terre était ocre. En réalité, ce qui me dérangeait le plus, c'était la pluie des jours plus avant qui avait rendu le terrain boueux et glissant. Surtout dans ces pentes de montagne. C'était assez trivial comme détail, mais je n'aimais pas ça, par soucis de confort. Rien ne vaut le fait de sentir le sol sous ses pieds et savoir qu'il ne se dérobera pas sur un faux mouvement.

J'étais arrivé dans cette vallée. Assez petite, à l'abri des regards et des prédateurs un peu trop dangereux pour n'importe quel groupe de pokémon. Je me demandai bien ce qui pouvait m'amener là. Cet endroit semblait calme et paisible. Rien qui ne laissait présager de ce que j'entraînais par ma venue. Cela montrait bien que personne n'était totalement à l'abri. C'était pourtant un bien bel endroit qui laissait de bonnes impressions et une sensation apaisante qui donnait envie de s'installer ici. Envie que je n'avais naturellement pas, qui n'était pas la mienne mais la leur, celles de ceux dont l'un allait mourir, soit les autres. De toute façon, même si je le voulais, je ne pourrais m'installer ici. Je ne suis pas vraiment un paria ou un monstre mais c'était comme si.

Je descendis donc la vallée ocre doucement, ne cherchant pas à particulièrement me montrer. Je le fis de la façon la plus naturelle possible. Peut être de la façon dont eux le faisait au quotidien pour repartir et revenir. Un quotidien bientôt brisé et qui n'arriverait plus... Pour l'un d'entre eux du moins. Bizarrement il n'y avait pas beaucoup de pokémon traînant dans le coin. Du moins je ne les voyais pas. Peut être étaient-ils cachés, me suivant du regard comme la chose effrayante que j'étais à leurs yeux. Ou alors étaient-ils trop occupés pour se rendre compte de ma présence.

En contrebas, il y avait quelques grottes, quelques petits espaces ouverts qui laissaient présager d'une vie en cet endroit. C'était assez rustique je dois dire, pas quelque chose de très sophistiqué comme j'avais pu le voir chez certains autres pokémon. C'était peu important au final, je ne comptais pas vraiment y rester et je n'allais pas y être accueillit de toute manière. Alors qu'importe. Ce serait ainsi et pas autrement, les nuits ne sont jamais trop froides pour moi et le sol jamais trop dur pour m'empêcher de dormir. Mais je sentais que je n'allais pas vraiment avoir besoin de dormir cette nuit. C'était mon instinct qui me le chuchotait.

Arrivé à l'entrée des relativement grandes grottes, pour ma taille. Je suis un Absol après tout, je ne suis pas impressionnant, en tout cas il y avait des pokémon qui l'était bien plus que moi. À la vue de la grotte je risquais de m'y retrouve confronter. Elle n'était pas beaucoup éclairée. Ce n'était pas quelque chose de très pratique mais, il fallait m'y faire. Je possédais, de toute manière, par habitude, une excellente vision nocturne. Le sol était dense, comme aplani par quelque chose de lourd et de solide et surement très sec, je m'attendais donc à un voir des pokémons roches. Ce qui ne me facilitait pas les choses au fond étant donné la puissance moyenne de ces derniers. Mais il fallait juste qu'il ne soit pas trop agressif et tout irait bien. J'imagine.

Plus je m'avançais pour j'entendais des voix. Il n'était pas seul. J'entendis des grognements de douleurs. Il n'en avait vraiment plus pour très longtemps. J'entendis des gémissements de paniques de membres plus jeunes. C'était une famille. Avant que je ne les vois face à face. C'était une famille de Rhinocorne, Rhinoféroce et d'un Rhinastoc réunit. Tous était autour de lui, il était grand, très grand même. Plus que tous ceux de sa famille et plus que la moyenne des Rhinastocs je dirais. Je n'en avais pas rencontré beaucoup mais, ils étaient tous impressionnant et celui là encore plus. Malgré tout, il semblait quand même affaiblit et usé par la force de l'âge, ce qui lui donnait une image de patriarche qui était sûrement le rôle qu'il avait dans la famille.

Il semblait très bien entouré, enfin, ce n'était pas seulement son cas. Parmi les plus jeunes, remuant et en pleine santé, accompagnés des adultes qui avaient l'air plus calme mais aussi plus inquiet... à raison puisque j'étais là. Même s'ils ne m'avaient pas encore remarqués. En tout cas pas encore, si cela ne devait tarder. Se trouvait, avec le Rhinastoc plus vieux un groupe de ses congénères plus jeunes. Ces derniers étaient tout aussi mal en point que le plus âgé qui semblait, grâce à la force acquises avec les années, mieux tenir le coup. Même si la famille semblait plus s'inquiéter pour lui que pour les autres... Sûrement à raison de la place qu'il occupait.

- Grand-père ! Grand-père ! s'écriait inquiet les plus jeunes, s'affolant presque à chaque gémissement du grand-père.

- Doucement doucement les petits. répondit le concerné en soufflant un peu. Inquiétez-vous plutôt pour vos frères qui tiennent bien moins facilement que moi.

- Mais on a peur Grand-père ! Qui nous protégera si nous ne sommes plus là ?

Le Pokemon ne répondit pas. Nos regards s'étaient croisés et il s'était figé. Il n'avait l'air ni triste, ni surpris, ni apeuré, ni en colère. C'était un regard étrange, que j'ai déjà rencontré plusieurs fois. Celui d'une appréhension nouvelle, celui d'un soulagement et d'une tristesse entremêlés. Comme s'ils acceptaient leur mort tout en sachant que certains auraient des regrets dans leur entourage et que beaucoup n'allait pas accepter ainsi. Ce qui semblait visiblement le cas ici. À la vue des jeunes craignant pour leur aîné.

- Ainsi il est temps. Soupira-t-il à mon égard, attirant ainsi l'attention sur moi.

Je ne répondis rien. Ce n'était pas que j'avais quelque chose à réponde, loin de là. Mais ma simple présence suffisait. Le futur mort se trouvait ici et maintenant je n'avais plus qu'à attendre. Sous le regard accusateur du groupe. Je n'allais pas répondre, je ne parlais pas habituellement et je n'allais pas le faire là ici non plus. Je n'en avais pas le besoin. Ma présence suffisait, je n'allais pas prendre le risque de justifier ma présence ou de m'excuser pour quelque chose dont je ne me sentais pas du tout responsable.

Toute la troupe se mit soudain à me regarder dans un silence pesant. Ce n'était pas quelque chose qui était des plus agréables à vivre mais cela faisait partie des choses à laquelle je me retrouvais confronté, comme tout le reste. Et face à moi, à la manière de l'aînée, tout le monde me fixait dans une palette de regard. Changeant. Parfois déformé par les sentiments que ma venue provoquait. D'autres figées. Au fond c'était horriblement amusant. Amusant de part le malin jeu que je me faisais à essayer de deviner les émotions que certains laissaient transparaître par leurs expressions. Horrible car la mort ne peut être qu'horrible après tout. Que l'on y soit confronté en permanence ou une fois dans sa vie.

- Mes enfants, il va falloir être fort... lâcha dans un soupir le Rhinastoc.

- Non ! Non ! C'est... C'est pas possible ! il y a une méprise ! Vous... vous devez vous tromper ! sanglota une femelle Rhinoferos en éloignant ses petits le plus possible de moi.

- Ils ne se trompent que trop rarement. C'est le rôle qu'ils ont à jouer et qu'ils exécutent sans rechigner. Nous devons tous ici l'accepter et faire face ! Préparons nous pire... répondit toujours le patriarche avant d'être pris d'une violente quinte de toux. Amorçant une panique autour de sa famille. Je vais bien, je vais bien... Mon heure n'est pas encore venue. Même si visiblement elle ne saurait tarder. continuai-t-il pour rassurer sa famille.

- Grand-père ! grand-père ! Qui va nous protéger si tu pars ?

- Allons... Vous protéger de quoi ? Il ne passe aucun pokémon dans la vallée. Vous avez plus à craindre de la maladie de vos frères, soeurs, fils et filles. Il est déjà trop tard pour moi. Faites en sorte de ne pas pleurer ceux qui n'ont pas à partir.

Un long silence s'abattit alors... Encore une fois. Un silence de deuil. Comme s'il était déjà commencé et qu'ils souhaitaient que tout s'arrête au plus vite. Comme si cela n'était qu'un mauvais rêve. C'est comme ça que je voyais les choses en tout cas. Même si nous étions bel et bien dans une réalité. Celle qui est la mienne. Je décidai de tourner les talons, je ne voulais pas me confronter à cette famille qui représentait un danger potentiel à la vue de la puissance qui était la leur. Surtout en comparaison de la mienne qui était bien faible. Même pour un Absol. Et il avait raison. L'heure n'était pas encore venue et j'avais encore du temps devant moi. J'allais en profiter pour récupérer de mon voyager et me préparer à l'attente qui allait être longue.

Une fois à l'extérieur et habitué à la lumière du jour ; je me lançai, sous le regard que je sentais dans mon dos de la famille qui m'observait et je m'installai sur le versant opposé à celui où était creusé les grottes de la vallée et je me mis à dormir, Caché dans un petit espace à l'abri des regards indiscrets. Contrairement à ma force qui n'était pas exceptionnelle, j'étais tout de même plus habitué à la course et à la fuite. Ainsi il m'était facile de me cacher en fuyant les regards loin et assez vite pour comprendre où je m'étais réfugié. Je n'allais me montrer que quand le temps sera venu. Arceus sera là pour me prévenir et me guider vers le funeste destin d'un étranger dont je ne connaissais rien.

ça se passait souvent comme ça à bien y regarder. J'ai toujours un peu « d'avance » sur les morts. Pas encore agonisant, parfois en excellente santé. J'avais toujours une marge de quelques heures, allant parfois à presque une journée de temps à combler avant la toute fin. Souvent, comme maintenant, je comblais ça par un sommeil après plusieurs jours, en général, ou parfois une nuit de veille.

Durant les périodes de sieste... Si on pouvait appeler ça comme cela, je ne me souvenais jamais de mes rêves. J ne me cherchais pas à m'en souvenir non plus. Tout ce qui appartenait au domaine de l'illusion ne m'intéressait pas du tout en fait. Ce qui attirait mon attention c'était le réel, tel qu'il existe. C'est ce qui est vraiment important. Les rêves ne durent pas. Encore moins que la vie en elle-même. Plus que le réel, ce qui attise ma curiosité n'est que l'éternité. Elle seule peut s'imposer ici-bas. Il ne peut en être qu'ainsi. Rien ne reste, à part ce qui est fait pour durer et résister au temps lui-même. Je ne sais pas si la terre où nous dormons, nous en tant que Pokémon puisse avoir elle-même cette considération. Tout a un début et une fin. Rien n'est donc vraiment important j'imagine. En dehors de ce qui outrepasse ce domaine et de ce qui délimite le début et la fin. Arceus en quelque sorte. Ce qu'il est, ce qu'il fait, ce qu'il décide, tout ça reste, tout ça fait partie de lui. C'est pour ça que je dois suivre le rôle qu'il m'a donné. Et qu'on doit tous suivre le rôle qu'il nous donne.

Perdu de ce fait dans mes pensées et mon inconscient, je dormis. Je le crois et j'en suis certain, à l'abri des regards indiscrets. Il ne m'était rien arrivé, je le pense, je n'avais rien sentit, ni entendu quoi que ce soit donc tout allait bien. Je me réveillai alors, quelques heures plus tard. La nuit était tombée, bien fortement d'ailleurs, cette dernière montrant une nuit merveilleusement étoilé. J'estimais mon sommeil à une douzaine d'heure, comme je l'estimais. Et ainsi dans la moyenne de mes attentes.

Cependant, le temps n'était pas à l'admiration des étoiles. Loin de là. Il était temps. L'heure même. Au petit matin je serais reparti, de la même manière dont j'étais venu. J'allais à nouveau voir la mort frapper comme elle l'avait toujours fait, comme elle allait le faire et comme elle le fera toujours. De façon cruelle et froide. Et moi je serais là pour y assister. Et subir les complaintes et la haine des proches. Il en était ainsi. C'était mon rôle à jouer. Et je devais l'accepter. Je me dirigeais donc droit vers les grottes, dans le creux de la vallée, en contrebas. C'était bien silencieux. Et même assez sombre. Même si l'un où l'autre n'était pas gênant. Je n'avais qu'à suivre mon instinct pour me rendre dans la bonne direction. Je me rendis donc dans la grotte où je m'étais trouvé précédemment. S'y trouvait alors le Rhinastoc qui faisait office de sage et les petits. Tous dans un État plus ou moins critique et affaiblis par la maladie. Seul l'ainé était éveillé. à mon arrivée il me fixa avec un air grave. Comme s'il redoutait la suite des événements malgré la force qu'il avait acquis avec les années. Il semblait malgré tout prêt à faire face.

- Ainsi il est l'heure. Fit-il sur un ton triste.

Je ne répondis pas, je continuai à m'avancer, suivant mon instinct vers le condamné.

- Mes fils seront tristes quand ils me verront demain matin. L'un d'entre eux prendra ma place. J'espère avoir été un bon modèle pour eux et qu'ils sauront être assez fort pour ne pas détruire ce que nous avons commencé ici. Nous ne devons pas nous séparer, enfin... eux, toute la famille. Cette place est très belle et idéale pour nous. Et... Seule les maladies nous menacent. Continua-t-il comme pour combler le silence entre ses propres gémissements et ceux des jeunes qui souffraient tout autant que lui, l'expérience et la force de l'âge en moins.

- Mais qui a dit que ma venue vous concernait ? Demandai-je à l'attention du Rhinastoc qui fit une mine surprise puis qui se décomposait lorsqu'il comprit où je voulais en venir.

En réalité, je pensais tout à l'heure à la vue de la situation que le mort dont était le sujet de ma venue était le vieux personnage en face de moi. J'avais une vision global de la scène lors de mon arrivée et la masse l'entourant n'aidait pas mon instinct à me montrer qui allait mourir dans les heures qui allaient suivre. Maintenant que seul les plus faibles étaient présents, les autres se trouvant sûrement dans les grottes avoisinantes, je pouvais savoir avec précision qui n'allait pas survivre à cette nuit. Et plus je m'étais rapproché du petit groupe plus il me devint clair que ma cible, si je pouvais l'appeler ainsi, n'était pas l'ainé, mais un membre des plus jeunes. Qu'importe mes premières impressions. J'étais tout de manière faillible et je n'avais qu'à me fier à mon instinct comme je l'avais toujours fait.

- Non... Non ! Pitié ! Faites que je meurs ! Mais pas l'un d'eux par pitié ! implora-t-il dans une panique et une détresse nouvelle. Ils pressentent que c'est moi. Ils y sont préparés maintenant. Mais si l'un d'eux meurt... Ils ne s'en remettront pas. Personne n'a envie de voir l'un de ses enfants mourir avant soi ! Sa propre descendance ! Mais moi ce serait dans l'ordre des choses et...

- Je n'y peux rien. coupai-je sèchement avant de plonger la grotte dans le silence.

J'étais maintenant à une distance très proche. J'étais à peine à quelques centimètres du groupe. Je balayai du regard l'ensemble du groupe avant d'arrêter sur l'un d'entre eux. Un Rhinocorne comme les autres, en dehors du fait qu'il était plus mal en point que les autres. Il avait le sommeil agité et gémissait régulièrement. Très régulièrement même. La comparaison avec ces frères et ses soeurs étaient sans équivoque. Ce serait lui. Il n'avait rien de particulier. Je ne saurai décrire avec précision les rhinocornes et je ne saurais trouver ce qui les différencie les uns des autres. Pour moi s'en était un parmi le reste. Mon instinct me le montrait presque, comme si une aura, une présence émanait de lui me disant que la mort le tenait déjà et que ce n'était plus qu'une question de temps.

Il ne me restait qu'à attendre. Selon moi c'était plus une question de minutes que d'heure dans les faits. Plus cela allait, plus son État empirait. Et déjà il semblait bien affaiblit par la maladie. Rien de bien impressionnant. Ni de remarquable d'ailleurs. Mais j'avais l'oeil. Une question d'habitude je dirais. à force d'observer les malades agonisants, il était facile pour moi de voir qui était en pleine forme, ceux malades et ceux mourants. La mort en elle-même n'avait rien de bien impressionnant en dehors de quelques cas bien précis. Accident assez spectaculaire comme un éboulement ou un glissement de terrain ; confrontation à un prédateur lui-même impressionnant et destructeur... C'était assez rare et je m'assurais de rester à distance. Même si les prédateurs me fuyait comme la peste. On ne sait jamais.

Ici ; rien de tout ça. Juste la mort cruelle d'un petit trop faible pour survivre à une maladie comme le ferait ses frères. Ou le Rhinastoc qui comme moi observait. Lui, cependant frémissait à chaque gémissement du condamné. Comme s'il craignait l'inévitable. Il ne me regardait plus et avait fixé son attention sur le mourant. Il était cependant impuissant face à cela. Il n'y avait plus rien à faire. Il n'y avait même rien à faire puisque j'étais là. Et que je scellais donc son destin. Je crois, comme beaucoup qu'il n'arrivait pas à se faire au fait qu'un de ses proches puisse mourir. Même si lui encore plus, attendant sa propre mort avec appréhension.

Puis le pokémon commença à voir son état empirer de façon dramatique. C'était pour lui la longue marche vers la mort. Je ne saurais dire s'il était conscient ou pas mais la souffrance se lisait sur son corps tout entier. Tout commençait alors par une difficulté à respirer, comme si on était dans une panique la plus totale. Ce n'était pas une simple toux ou un gémissement de douleur. Ici c'était un râle rauque rapide et saccadé. Il n'indiquait rien de bon. Puis se rajouta les spasmes. Causés par la douleur, naturellement. Comme si le corps se tordait sous la souffrance. Jusqu'à ce que ces crises finissent par engendrer la douleur elle-même. Elle prenait possession de notre corps et nous détruisait de l'intérieur. Comme si elle voulait finir ce qui avait été commencé. Tout s'intensifiait ensuite. Comme si tout se passait plus vite et plus fort. Plus violemment. Les râles devenait une incapacité à respirer périodique et ceci, de plus en plus longtemps. Les spasmes devenaient incontrôlable et les positions prises devenaient presque comiques. Son corps semblait se déchirer comme s'il ne pouvait plus rien supporter d'autre que ça. Puis enfin le corps se raidit d'un seul coup. Il se tend, se contracte, se stresse plus intensément que lors des crises qui précédaient. En une seule et unique fois. Comme un ultime sursaut du corps qui tente à se raccrocher à la vie qui lui échappe. Et puis... le corps se relâche, comme s'il était en pleine relaxation ; au repos. Mais ce dernier était éternel. La mort avait fait son office. Le mien en était tout autant terminé. La vie avait quitté le jeune, l'ainé gardait la sienne encore pour un temps et le cadavre encore chaud attestait et ma présence attestait que j'avais bien fait mon travail. Comme toujours. Le Rhinastoc se mit alors à pleurer :

- Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi... maugréa-t-il en serrant le corps dans ses bras.

Maintenant, s'en suivait une scène d'une banalité qui était à mes yeux ; affligeante. Ce moment où l'un pleure l'autre de tristesse. Je l'avais vu, revu des dizaines, peut-être même des centaines de fois. Pour moi, tout ceci n'avait pas grand sens. Ce n'était qu'un mort de plus. Tout le monde meurt non ? Il n'y avait rien de bien extraordinaire. C'est arrivé maintenant pour l'un, cela arrivera plus tard pour un autre... C'est censé arriver ? Pourquoi geindre contre l'inévitable ? Contre notre propre destiné ? C'est pour ça que je ne restais jamais bien longtemps après la mort. Je n'étais pas là pour me plaindre, pour partager la souffrance des autres. Je ne pense pas, de toute façon en être capable. Ici, il en était de même. Je n'avais pas vocation à rester. Une fois bien assuré qu'il fut mort, je me dirigeai donc vers la sortie de la grotte. L'ancêtre et protecteur de la famille m'interpella alors :

- Tu m'as l'air d'être un bien triste pokémon. As-tu quelqu'un qui t'attend quelque part ? Moi j'ai ma famille. Et toi ? Qui se souviendra de toi lorsque ce sera ton tour ?

Il avait raison. Je n'avais techniquement personne dont la compagnie m'était agréable. Pas de lien. Pas d'ami. Ni de famille. Je n'avais jamais voulu essayer. Je n'en avais jamais ressenti le besoin. Selon ses standards j'étais celui à plaindre. Car j'étais seul. Et que lorsque ma mort arrivera, personne ne viendra me plaindre comme lui le faisait pour sa descendance. Certes. Mais ceci, m'est d'une futilité absolue. Je ne peux pas me lier avec quelqu'un d'autres. Je ne croise que les morts. Me lier d'amitié avec eux serait tout simplement idiot et précaire. Tant que j'accomplirai ce pourquoi je suis né et que je suivrai cette idée ; je n'aurai pas à avoir quelqu'un d'autre pour m'épauler. La satisfaction du travail bien fait remplira cet office, et le sentiment qu'Arceus a accordé sa confiance à la bonne personne. Je n'avais donc pas à répondre. Je connaissais la réponse. Il n'avait pas à la connaître.

Je le laissai donc seul, avec les autres malades et le corps du tout jeune Rhinocorne. Il fallait maintenant reprendre la route. Plus vite parti, plus vite je serais arrivé vers ma prochaine destination. Il me fallait agir à flux tendu. Ne pas laisser de temps mort. Et de cette manière, toujours avoir un temps d'avance, plutôt qu'un temps de retard. J'en avais toujours pour quelques jours de voyage, à suivre mon instinct. Lui-même sûrement guidé par Arceus et les capacités qu'il m'avait conféré. Symbolisé par la couleur rouge de ma peau.

Ainsi je traversais parfois des zones et des régions entières, courant à travers plaines, montagnes et forêt pour atteindre ma prochaine destination. Je m'alimentais par de courtes pauses, régulières, sauf si les conditions ne le permettaient pas. Ou que je ne trouvait rien de bien satisfaisant sur la place choisit. Manger, boire et dormir puis reprendre mon chemin. Tout en faisant attention à ne jamais me mettre en danger. Rester loin des pokémons agressifs et des prédateurs de façon générale. N'importe qui ferait ça. Juste pour la sécurité et l'envie de rester en vie. La seule différence entre moi et les autres menait dans l'intention. Je voulais éviter les prédateurs non pas parce que je voulais à tout prix rester en vie, mais parce que je voulais continuer à accomplir ma mission.
Ainsi, j'allais me diriger vers une nouvelle tombe de mon cimetière. Une autre, que je ne connaissais pas encore mais, dont j'allais voir apparaître le nom et la forme. Je serais là pour dire que quelqu'un, là-bas est mort. Et Arceus lui-même présidera sûrement la mienne. à moi que je rencontre un autre Absol rouge qui soit là, enfin, pour annoncer ma propre fin. Que j'accepterai, comme la part futile et inconsistante de ma propre existence. J'aurai à faire face et personne ne me pleurera alors. Tel est mon destin, comme celui de tous les autres. Mais pour l'heure, je dois accomplir la mission qui est la mienne et annoncer le terme des vies et la suivante, qui lors de ma venue comprendra que son existence appartient déjà au passé.