Chapitre 4 - Pur
Et si Hellä était un minion sous couverture ?!
Bref, mon rythme d'écriture s'est ralenti, avec la fac et tout, et le fait que j'attende Pokémon Y xD J'ai cependant des pages manuscrite du chapitre 8, que je ne retape pas pour faire pression sur fan-à-tics, afin qu'elle écrive du DL. HAHAHAHAHAHA, glorifiez-moi !
Bonne lecture =D
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Chapitre 4
Pur
La Tour Chétiflor était l'édifice le plus traditionnel de cette ville traditionnelle. Son architecte avait dû bien être inspiré et son ébéniste très patient pour produire de tels entrelacs de Chétiflor. Le Pokémon, plutôt ridicule à l'état naturel, était presque gracieux dans ces frises et estampes sculptées. En revanche, il avait toujours l'air d'un bulbe qui se serait fait la malle en se servant de ses racines comme pattes, dans les statues exagérément grandes, qu'on rencontrait tous les deux pas.
… dit comme ça c'était un peu flippant, si même les bulbes se faisaient la malle de leur gaine de terre, qu'est-ce que ça allait être la prochaine fois ? Une poignée de porte Pokémon se jetant à la gorge de celui qui la tourne ? Probablement un type Spectre, si c'était le cas, songea Quinn avait une grimace.
Ils se rendirent aussi haut qu'on l'autorisait aux touristes. Quelques moines discutèrent avec eux sur le chemin, leur parlant des œuvres d'art et des Pokémon de la Tour. Ils leurs apprirent que les Xatu qu'on voyait perchés sur les toits appartenaient à l'Ancien, et qu'ils protégeaient la structure des attaques perdues et des intempéries. Hellä passa le reste de la visite à rigoler quand une femme leur dit que le pilier central était autrefois un Chétiflor de 30 mètres. Quinn, lui, trouva cette perspective absolument terrifiante.
- Chétiflorzilla, gloussait encore Hellä quand ils sortirent du bâtiment.
Les terrains d'entraînement se trouvaient à quelques mètres de la Tour. Une sorte de tournoi s'y déroulait d'en l'optique d'affronter l'Ancien. Pour s'entraîner, ils décidèrent d'y participer. Un moine happa Hellä pour une bataille, l'enjoignant tout du long à prendre exemple sur la souplesse de son Chétiflor, à faire en sorte que son Nosferapti l'assimile et la fasse sienne. Quinn songea que Hellä n'avait pas personnellement besoin de ce genre de conseils : il ne connaissait pas plus souple qu'elle, à part les contorsionnistes. Il l'avait vue se glisser dans des interstices inimaginables sans difficulté, et passer des systèmes de sécurité comme si elle était faite de vent.
Quinn fit ses propres matchs de son côté. Si Reptincel avait un bon niveau, on ne pouvait pas en dire autant de Mimigal. Elle compensait par son type avantagé sur les Chétiflor proposés par les moines, et son esquive remarquable. Cependant, tout se corsa au deuxième tour quand la difficulté augmenta d'un cran.
En soi, ce n'était pas grand chose. Le tournoi était pour les débutants, après tout. Les Chétiflor cessèrent simplement d'être exclusifs dans les équipes, lesquelles se varièrent. Rien de bien méchant : Rattata, Coxy, Hoothoot… Quinn tomba sur ce dernier, et ne remportant le combat qu'en immobilisant les ailes du Pokémon avec les fils de soie de Mimigal. Déjà gauche, il perdit l'équilibre, et ne parvint pas à se relever. Hellä eut nettement moins de chance, mais franchement, c'était de sa faute.
Elle envoya Evoli sur le terrain. Son adversaire – pas un moine, mais une jeune fille qui avait passé le premier tour – choisit un petit Pokémon hirsute, violacé, à l'air plutôt mécontent. Quelqu'un, dans le public, lui apprit qu'il s'agissait d'un Moufouette, et Quinn se souvint d'en avoir brièvement possédé un quand il était dans la Rocket. Et Hellä éclata de rire. Comme ça, d'un coup.
- On… on dirait… haleta-t-elle, hilare au point de ne plus pouvoir respirer. On dirait… une… une putain…de… de PAIRE DE FESSES HAHAHAHAHAHAHAHA !
Quinn écarquilla les yeux, et ne fut pas le seul : beaucoup de spectateurs l'imitèrent, éberlués. Seuls quelques enfants de cinq ans ricanèrent en répétant le mot « fesse » stupidement. Ce qui amena le jeune homme à s'interroger sur l'âge mental de sa coéquipière. Laquelle ne se remettait pas de cette réalisation et continuait de se marrer, pliée en deux. OK, sous un certain angle, le museau de Moufouette évoquait des fesses, mais de là à bloquer dessus dix minutes…
Vexée, mais surtout agacée par l'inertie de son adversaire, la jeune fille au Moufouette mit K.O. Evoli en quelques attaques Ténèbres bien placées, l'éjectant de la compétition. Pour le plus grand malheur des enfants, qui désormais, voulaient tous un « Pokémon fesse ».
Arceus. Elle était en train de pourrir la prochaine génération.
- Bon j'ai perdu, déclara Hellä, des restes de rire dans la voix. Je vais au Centre pour Evoli et je reviens, alors te fais pas battre !
- Je peux faire que mieux que toi, c'est sûr, persifla Quinn.
- Wow, dit comme ça, avec tes lunettes, ça te donne une certaine classe. 'Te fais pas latter au prochain tour, ou t'auras l'air con ! le taquina-t-elle avant de se détourner, son Pokémon sous le bras. Pff… fesse… l'entendit-il glousser à mi-voix.
Soudain angoissé de s'être montré aussi prétentieux, et craignant de se prendre un retour de karma, Quinn réprima une forte envie de se ronger les ongles.
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Hellä emprunta avec insouciance les deux ponts séparant la Tour du reste de la ville. À cet endroit, le paysage était idyllique, avec ces adorables Ptitard jouant sur les feuilles des nénuphars et des Lombre. Elle s'y serait attardée plus longuement si Evoli n'avait pas gémi à secousse, endolori.
- Tu veux pas retourner dans ta Pokéball ? demanda-t-elle doucement.
Il secoua la tête, borné. Les gosses, tous les mêmes.
- Ah, j'imagine que tu ne veux pas que Nosferapti ait son tour…
L'air soudain coupable de son caprice, il accepta d'entrer dans sa Pokéball. C'était tellement aisé, la manipulation, songea Hellä. Elle sortit Nosferapti à la place, parce qu'elle devait tenir parole et qu'elle appréciait la compagnie, mine de rien. Il se posa sur son serre-tête, pareil à une barrette extravagante, entortillant ses longues pattes à ses cheveux rebelles sans qu'elle ne s'en soucie réellement.
Sans être bondé, le Centre avait été assailli par les dresseurs s'étant essayés à l'arène ou au tournoi de la Tour en ce bel après-midi. Hellä se demanda sérieusement à quoi ça servait de ne pas suivre un parcours rectiligne, si c'était pour se retrouver prise en sandwich entre un lardon angoissé et une gamine qui puait le fond de teint et le parfum à dix kilomètres. Quand son tour arriva, l'infirmière l'enjoignit à revenir récupérer son Evoli dans une heure. Great.
- Bon, bah, allons faire un tour, marmotta Hellä en prévenant Quinn d'un texto.
Il ne répondit pas, peut-être en train de combattre en ce moment même. Hellä songea qu'un peu de shopping ne lui ferait pas de mal. De plus, elle avait besoin de nourriture pour Nosferapti.
… et après tout, pourquoi se chercher des excuses ? Elle avait envie de faire ce que font les gens qui n'ont pas de livre ou le net sous la main : tuer le temps.
Son excursion lui prit moins de temps que prévu. Nosferapti choisit des mets à base de fruits – pourtant, avec ses dents, elle aurait juré qu'il aimait se la jouer Dracula – tandis qu'elle prenait un paquet de bonbons et un magasine. À la caisse, elle se mit derrière un jeune homme au moins dix fois plus chargé qu'elle, parlant à mi-voix au téléphone.
- … je sais que les Ruines le mettent en transe mais fais en sorte qu'il ne s'éloigne pas trop, OK ? … je sais que tu fais de ton mieux, mais je peux pas aller plus vite ! Qu'est-ce qui lui a pris d'adopter ce Ronflex d'abord ? T'as idée de tout ce que je porte là ? Nan, mais, je dis pas que tu fais rien d'utile, sis' ! (Il y eut un cri diffus à l'autre bout du fil.) Comment ça il est plus sur le ventre de Ronflex ?!
Inquiet, il jeta limite tous ses articles – principalement de la nourriture, pas étonnant, il avait évoqué un Ronflex – devant la caissière. Hellä l'entendit marmonner tout du long, tandis qu'il tapait du pied frénétiquement, qu'il n'avait aucune envie qu'« il » n'attire l'attention des scientifiques en faisant mumuse avec une horde de Zarbi. Il s'agita tellement, vibrant littéralement de frustration à la lenteur de la vendeuse, que sa casquette tomba par terre.
- Tu as fait tomber un truc, indiqua Hellä en lui tapotant l'épaule.
Le garçon se retourna, surpris. Il était assez jeune, de face. Plus tout à fait un ado, mais pas un adulte non plus. Peut-être dix-huit ans, avec de grands yeux chocolat et une tignasse hirsute de la même couleur. Il suivit la direction qu'elle lui pointa du doigt et ramassa son couvre-chef pour le ficher sur son crâne.
- Merci, dit-il avec un gentil sourire, avant de se précipiter pour payer et récupérer ses sacs.
Et tout ça sans lâcher son téléphone, dans lequel il hurla « J'arrive, White, continue de le chercher ! » avant de disparaître à l'extérieur.
- Ces jeunes ont tant d'énergie à revendre, lâcha Hellä, blasée.
Elle paya ses achats et passa le temps sur un banc en feuillant le magasine et en écoutant de la musique. Son casque audio imitait les ailes d'un Aéromite, en plus joli parce qu'il n'y avait pas le corps hideux allant avec. Nosferapti s'endormit à plat ventre dessus. Il devait apprendre à vivre le jour et non plus la nuit, mais avec tous ces combats, il manquait de sommeil. Hellä lut paisiblement son magasine, autant les articles culturels que son horoscope, qui lui apprit qu'elle aurait des tensions à son travail. Même si elle n'en avait pas, elle décida de ne pas tenter le Diable et de passer la journée à se la couler douce le plus possible.
Elle était en train de lire que le Maître de la Ligue d'Unys, Goyah, avait abdiqué en faveur d'Iris de Janusia, lorsqu'une voix forte perça les accords de Sarcasm, par Get Scared.
- Un Aéromite a poussé de chaque côté de ton crâne !
Hellä leva les yeux pour croiser son reflet sur les lunettes de Quinn. Il n'était accompagné par aucun de ses Pokémon et… il avait une belle pustule sur le coin de la bouche, qui n'était encore qu'une protubérance écarlate le matin même. Ah, la guerre des boutons… elle avait plus été « arme chimique » (produits antiacnéiques et magouilles diverses dans l'espoir de s'en sortir avec le moins de cicatrices possible) que « violent combat au corps à corps » (des ongles, des tire-comédons, tous les coups sont permis, croûtes et pores étirés en résultat), mais elle avait adoré percer les boutons des autres gamins à l'orphelinat. Elle aurait bien aimé s'y remettre, maintenant qu'elle voyait un bouton de si près…
Nan, Quinn hurlerait au viol. Ça serait marrant, mais elle n'avait pas envie d'ameuter la police.
- T'as perdu ? devina-t-elle en écartant un écouteur.
Quinn grimaça. Ouch, elle, elle tapait toujours où ça faisait mal…
- Contre la fille au Moufouette, exposa-t-il. Juste avant d'arriver à l'Ancien.
- C'pas une si mauvaise performance, commenta Hellä en survolant les dernières news « Poképeople ».
Quinn se sentit perdre l'équilibre, désarçonné par le compliment.
- J'allais au Centre Pokémon, marmotta-t-il dans un rougissement.
- Oh, c'est vrai, c'est bientôt l'heure d'aller chercher Evoli ! fit-elle en se redressant d'un bond.
Nosferapti continua de dormir comme si de rien n'était. Il devait vraiment être crevé.
Le Centre tendait à présent à se vider. Il n'y avait plus que des voyageurs et des dresseurs sortant de l'arène, certains ne cessant de brandir leur badge à tout va, fiers de leur victoire. L'un d'eux jubilait dans son coin en chantant qu'il en avait huit et qu'il pouvait se présenter à la Ligue.
- Moi, si j'étais championne d'arène, je serais toujours en vadrouille pour faire chier les dresseurs, commenta Hellä. Ou je leur donnerais des mission genre « Va faire ça. » ou « Va me chercher ça. » avant.
Ce qui n'étonna pas du tout Quinn.
Hellä récupéra Evoli, qui lui fit un gros câlin accompagné d'yeux de Caninos abandonné dans un caniveau. Genre, être resté une heure dans sa Pokéball avait été la pire épreuve de sa vie. Quinn dut attendre plus de temps pour faire soigner ses créatures, avec l'amas de dresseurs. Il s'installa par terre à côté de Hellä (qui elle s'était déniché un siège), de nouveau plongée dans sa revue.
- Tu comptes aller à l'arène aujourd'hui ? Ou demain ? s'enquit-elle distraitement.
- Ben, commença Quinn, gêné, je sais pas trop… je n'ai pas fini de m'entraîner et tout… je pense pas que Mimigal tienne le…
Un cri suraigu retentit, le coupant dans sa tirade. Les oreilles sifflantes, Quinn se demanda qui avait pu produire un son pareil, et Nosferapti aussi apparemment, car il se réveilla en sursaut et jeta un ultrason allègre en réponse. Ce n'est qu'en voyant l'expression choquée d'Evoli qu'il comprit que c'était Hellä qui l'avait émis.
Insoucieuse du silence de mort qu'elle avait abattu dans la salle de repos du Centre, elle fixait une page de la revue en sautillant sur son siège.
- Mais qu'est-ce qui te prend t'es malade ! s'exclama Quinn, honteux d'être au centre de l'attention.
- DIMANCHE PROCHAIN ! rétorqua-t-elle dans un couinement surexcité.
- Quoi dimanche ?!
Elle lui plaqua son magasine sous le nez. Avec ses verres sombres et la proximité, il eut du mal à décrypter, mais finit par percevoir « Super soldes au centre commercial de Doublonville le 26 mai, dès 14H ». Il lui jeta un regard voulant dire « Et alors ? », avant de se souvenir qu'il portait toujours ses lunettes. Ce fut peut-être ce qui lui épargna un discours moralisateur ou, plus probable de la part de Hellä, un regard débordant de pitié devant sa méconnaissance de la gente féminine. À la place, elle se leva d'un bond, entourée d'une aura enflammée, un air un peu fou sur le visage :
- Je vais à Doublonville, je trouve un travail pendant une semaine, et je dépense tout mon salaire dans les soldes ! décida-t-elle, la détermination imprégnant chaque trait de son visage.
Et elle éclata d'un rire machiavélique, comme si elle venait de décrire son plan de conquête du monde au lieu de son programme shopping de la semaine à venir. La honte qu'elle lui colla en agissant ainsi fut ce qui poussa Quinn à accepter son délire et à partir pour Doublonville sur le champ. Impatient de quitter les lieux, il annula leurs réservations, chargea leurs valises dans le coffre et démarra sur les chapeaux de roue en direction de la capitale.
Il fut reconnaissant tout le trajet que Hellä soit trop occupée à jubiler sur ses prochaines dépenses pour remarquer qu'il fuyait ni plus ni moins l'affrontement avec le champion.
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C'est ainsi qu'ils passèrent leur première nuit dehors. Quinn aurait pu conduire jusqu'à Doublonville, mais ils seraient arrivés dans la nuit, avec l'impossibilité d'entrer dans le Centre – et c'était plutôt stupide de payer un hôtel pour quelques heures. Ils décidèrent d'un commun accord de se trouver un coin où camper. Quinn gara la Jeep à la lisière d'une forêt, à côté d'un noigrumier.
La nuit commençait à tomber et la température à baisser. Au mois de mai, il faisait encore un peu trop frais le soir pour dormir à la belle étoile. Hellä sortit une housse de son sac, dont elle extirpa un cercle de tissu violet foncé. Elle le jeta, et la tente instantanée se déploya, prête à l'usage. Elle était plus petite que celle de Quinn, qui monta la sienne en deux temps trois mouvements. Il avait plus de pratique qu'elle à la vie sauvage, après avoir vécu à moitié dans les bois pendant un an. Les piquets et les sangles n'avaient plus aucun secret pour lui.
Hellä était en train d'étendre un sac de couchage aux teintes absolument outrageantes – qui avait eu l'idée d'allier ce rose avec ce violet ? Ou même d'inventer ces nuances ? – quand Mimigal décida de tisser une toile tout autour du campement. Elle s'y installa avec une délectation évidente, arrachant un frisson à la jeune femme.
- C'est dégueulasse, chantonna-t-elle à nouveau, tirant jusqu'à sa valise dans l'habitacle déjà réduit.
- Tu ne vas pas te planquer là jusqu'à demain matin, ricana Quinn.
- Nope, je vais entraîner Evoli et Nosferapti depuis ma tente, loin de ces trucs gluants.
Elle attrapa son carnet et lança des instructions. Nosferapti était en grande forme après sa longue sieste et Evoli en avait encore dans le ventre. Ils entamèrent un duel plus ou moins équilibré.
Quinn estimait que ses Pokémon avaient assez donné pour la journée. Il servit une gamelle de croquettes à Reptincel et laissa Mimigal s'envelopper dans ses fils de soie. Chaque fois qu'un petit insecte se prenait dans la toile complexe qu'elle avait dessinée, il était lentement tracté vers le cocon où l'araignée se cacherait pour la nuit entière. C'était vraiment glauque, et Quinn comprit mieux pourquoi Hellä en avait des sueurs froides.
Hellä ne daigna sortir de son refuge que pour venir manger avec lui les sandwichs qu'ils avaient achetés en toute hâte avant de partir. Elle y retourna presque aussitôt, laissant son magasine à Quinn comme on laisse des crayons et une feuille à un gamin pour l'occuper. Elle lui souhaita bonne nuit et s'enferma dans sa tente, ne laissant qu'un interstice suffisant à ses Pokémon pour sortir s'ils le désiraient. À la lumière de la lampe qu'elle alluma et aux ombres chinoises qui se dessinèrent, Quinn devina qu'elle se démaquillait. Il pâlit et alla promptement se planquer dans sa propre tente quand elle commença à se changer pour la nuit.
Après tous les combats qu'il avait mené durant la journée, et ses heures à conduire, le sommeil n'eut aucun mal à le faucher. Quinn se pelotonna dans son sac de couchage, laissant Reptincel se coller dans son dos pour lui fournir un peu plus de chaleur.
- Bonne nuit, mes chéris, susurra Hellä de son côté.
Nosferapti, allongé à plat ventre dans un coin, lui renvoya un son doux en retour. Plus prolixe, Evoli vint lui lécher le visage et se lova dans ses bras, avide de câlins.
- OK, bébé, comme tu veux, murmura Hellä d'un air endormi.
Le sommeil la gagna rapidement elle aussi, tandis qu'elle caressait distraitement le dos de son Pokémon.
Bientôt, un silence paisible tomba sur le camp improvisé, à peine troublé par le hululement des Hoothoot et le bruissement des feuillages. Une nuit calme s'annonçait. Pourtant, Mimigal sentit quelque chose se prendre dans sa toile si sensible. Quelque chose de gros, qui ne s'agita pas pourtant de terreur comme les humains lambda.
- Je suis désolé, dit une voix agréable. C'est ta maison ? Je ne faisais pas attention, c'est de ma faute. (Pause, le temps que l'inconnu examine son environnement.) Non, tu es avec un dresseur… (Sourire innocent, resplendissant d'une douceur presque douloureuse.) Peux-tu m'aider à me dégager, s'il te plaît ? J'aimerais faire le moins de dégâts possibles…
Intriguée, Mimigal sortit de son cocon de soie.
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Evoli bailla, s'étira et s'extirpa prudemment de l'étreinte de sa dresseuse pour ne pas la réveiller. Il faisait un peu trop chaud pour lui dans ses bras, à cause de la couette dans laquelle elle s'était enveloppée. La gueule sèche, il décida d'aller faire un tour près de la gamelle d'eau qu'elle avait laissé dehors. C'est encore un peu groggy, courbaturé par ses combats récents, qu'il lapa l'eau, sans faire attention à son environnement. Il lui fallut un certain temps pour réaliser qu'il y avait un intrus dans le camp.
Ce n'était pas l'humain de sa maîtresse, celui qui les empêchait de se papouiller tranquillement. Celui-ci était plus petit qu'elle, tandis que celui-là était grand, très grand. Il avait une longue fourrure claire derrière la tête, sous un de ces chapeaux à visière que les humains affectionnaient. Il jouait avec Mimigal comme s'ils étaient amis depuis toujours, grattouillant son ventre sans dégoût. La plupart des humains n'aimait pas les créatures comme Mimigal.
- Salut, toi, lui dit gentiment le jeune homme.
C'était clairement un mâle – il n'avait pas ces jolies courbes où il était si agréable de se loger, contrairement à Hellä.
Il s'approcha de lui d'un pas tranquille, Mimigal sur l'épaule, et s'agenouilla à sa hauteur. Le ciel commençait à peine à s'éclaircir de l'aube imminente, mais Evoli n'y voyait pas si bien que ça. Il parvint cependant à distinguer des iris clairs en croisant le regard de l'humain. Ils étaient doux, et d'une pureté inimaginable. Sans doute luisaient-ils, cristallins, à la lumière du soleil, mais pas seulement. Dans ce regard-là, Evoli, doté de cet instinct infaillible qu'ont les Pokémon, lut une innocence sans bornes. Et il se détendit. Cet homme ne pouvait leur vouloir de mal. Sans doute, ne songeait-il même pas à faire du mal à qui que ce soit en premier lieu.
- Que tu es mignon, murmura l'homme en lui caressant l'oreille. As-tu trouvé un bon dresseur ?
Evoli acquiesça. Expliqua. Et l'humain le comprit. Il connaît notre langage, lui siffla doucement Mimigal, depuis son perchoir.
- Je vois… ton amie te traite mieux que tes anciens propriétaires… il est triste que mon espèce considère la tienne comme un trophée. Je m'en excuse.
C'était comme s'il prenait toutes les fautes de la race humaine sur ses épaules, pour les repentir comme les siennes. Mimigal comme Evoli protestèrent vivement, presque trop : Quinn grogna dans sa tante, le sommeil perturbé. Les deux Pokémon baissèrent d'un ton, sans cesser de contester avec véhémence le point de vue de l'humain.
Ce dernier émit un rire léger, et pourtant suintant d'une angoisse purulente.
- C'est ce que ces deux-là me répètent à longueur de journée. Mais, qu'y puis-je ? Je désespère de faire de ma Réalité une vérité… parfois, même ma Réalité m'échappe… suis-je encore digne de sa confiance ?
À ces mots, Mimigal et Evoli sentirent monter une terrible colère, provenant de la veste du jeune homme, au niveau du cœur. Le pelage du Pokémon Normal se hérissa, l'araignée claqua nerveusement ses mandibules.
- Désolé, désolé, rit doucement l'humain à l'intention de l'invisible. Je sais que tu crois en ma Réalité. Quand bien même elle se teinte d'Idéal.
Son rire se changea en sourire désabusé, et il parut s'abîmer dans de profondes réflexions. Tortueuses. Pour le distraire, Evoli tapota d'une patte le drôle de cube qui pendouillait à une chaîne de sa ceinture. Il s'en dégageait une aura étrange… archaïque, battant sans bruit, tout doucement. Comme en sommeil…
- Ceci ? fit le jeune homme. C'est une des raisons pour laquelle je suis ici. L'autre, c'est que je cherche à distinguer la Réalité de l'Idéal. Mon amie… celle qui m'accompagne… soutient que la frontière entre les deux est si floue, que nul ne peut dire où l'un ou l'autre commence et s'achève. Mais moi… j'aimerais me rapprocher au plus près de la vérité…
Ses multiples bracelets cliquetèrent quand il caressa la tête des Pokémon.
- Et vous, qu'en pensez-vous ?
Rien. Les Pokémon se souciaient rarement du sens des choses. Ils le vivaient sans le subir, suivaient leurs instincts, profitaient pleinement de chaque seconde. Seuls les plus humains d'entre eux réfléchissaient, se tourmentaient d'interrogations hurlantes. Le sens de la vie n'était-il pas simplement d'exister ? Pourquoi se torturer quand il en fallait si peu goûter au bonheur ?
Les humains étaient si étranges.
Le jeune homme pouffa à leur explication.
- Oui, moi aussi j'aimerais être un Pokémon, avoua-t-il. Tout est si simple à travers vos yeux… tellement plus beau. Les humains ne sont-ils là que pour enlaidir le monde ? Je me suis longuement penché sur cette question, et j'ai maudit d'appartenir à cette race. Cependant… (Son expression s'adoucit, d'une tendresse infinie. Soudain, l'innocence lancinante dans son regard ne fut plus si insoutenable à contempler.) je les ai rencontrés, et quand je suis avec eux, j'ai foi en cette humanité moribonde. C'est pourquoi les fondements de ma Réalité flanchent, à présent…
Il y eut du mouvement dans le sous-bois. En jaillit un petit renard sombre, aux yeux si clairs qu'ils luisaient dans le noir. Il sautilla sur place, enjoignant l'humain à le suivre, visiblement paniqué.
- Oh, White a dû se réveiller, et remarquer que Zorua avait pris ma place, commenta-t-il. Je dois partir, avant qu'elle ne me retrouve et réveille vos dresseurs. Par chance, j'ai une excellente excuse, sourit-il, espiègle.
Tel un gamin ravi de ses méfaits, il tira des poches de son blouson un tas de baies Pêcha. Il ne réalisait sans doute pas son comportement très humain, en cet instant.
- Tenez, pour vous et vos dresseurs, offrit-il, abandonnant quelques baies au pied d'Evoli. C'était très agréable de parler avec vous, j'espère que nous nous reverrons un jour.
Il caressa une dernière fois Evoli, puis Mimigal avant de la reposer sur sa toile. Cette fois, il esquiva habilement cette dernière, et disparut dans les ombres avec son Pokémon.
Ébranlé par cette rencontre, Evoli resta assis au pied des baies jusqu'à ce que le soleil se lève, avec lui sa dresseuse.
- Cutie pie ? appela cette dernière en sortant de sa tente, encore pyjama, toute échevelée.
Sur sa tête, Nosferapti bâilla, encore somnolent, dans les mèches où il s'était entortillé. Pieds nus sur l'herbe humide de rosée, Hellä s'avança vers lui et se pencha dans une pluie de cheveux blonds pour lui parler :
- Tu as ramené des baies pour le p'tit-déj' ? C'est gentil, mon bébé.
Evoli aurait voulu lui parler de sa rencontre avec l'homme qui comprenait son langage, mais Hellä ne possédait pas un tel don. Et puis, cette idée le déserta en voyant le visage de sa dresseuse, dépourvu de maquillage, la lumière du matin illuminant ses iris bleus tel que le serait le ciel dans quelques heures. Ils étaient empreint d'une affection tranquille, qui lui était toute destinée. Evoli n'y décela pas la même candeur qu'en ceux de l'humain inconnu, juste, tout au plus, les mêmes lambeaux d'une solitude tenace.
Cependant, il n'aurait fait l'échange pour rien au monde.
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[justify] Une joyeuse musique, venant d'un appareil à hauteur de son oreille, lui vrilla le tympan.
- Salut, les p'tits loups, c'est Buena ! Le mort de passe du jour est… Rattata ! N'oubliez pas ! Je vous attends à la Tour Radio de Doublonville, ou contactez-moi au…
- HELLÄ ! cracha Quinn, arraché à son sommeil bienfaiteur.
Un gloussement de lutin espiègle retentit de l'autre côté de la toile, et Hellä s'éloigna d'un pas sautillant avec sa musique infernale.
C'était mort pour se rendormir, et Quinn s'extirpa de son sac de couchage en grognant comme un Ursaring qui sort de son hibernation. Reptincel, n'avait pas bougé, paisiblement roulé en boule à côté de ses goggles. Le veinard. Quinn enfila ses lunettes et un pantalon et alla à la rencontre de sa tortionnaire.
Cette dernière, déjà habillée, lui adressa un grand sourire innocent, déjà parfaitement apprêtée mais son mascara encore à la main. Genre, ce n'était pas elle qui faisait mumuse avec son Pokématos, mais les « jolies lumières brillantes ».
- Il est presque neuf heures, tu as de la chance, tu as failli manquer le Mot de Passe de Buena ! Alors, tu te souviens de ce que c'est ?
Quinn marmonna quelque chose qui n'était certainement pas poli et agréable.
- Que de vilains mots, soupira Hellä en secouant la tête, faussement atterrée. Si j'avais un Pokémon Eau et du savon…
- Tu m'as appris ces mots.
- Et tu as été assez influençable pour les adopter.
Son ton moqueur l'irrita profondément. Quinn n'était pas du matin, spécialement après un réveil brutal.
- Là, là, avale ça, dit Hellä en lui tendant des baies. C'est trop bon.
- Où tu les as trouvée ? s'étonna Quinn.
- Evoli, répondit-elle en haussant les épaules.
- Evoli ? Mais pour qu'elles soient de cette taille, elles ont dû pousser en hauteur…
Il regarda le petit renard et, nope, pas moyen, avec son gabarit, il lui était impossible de cueillir des fruits aussi hauts. Ceux du bas de l'arbuste, peut-être… de plus, la chair n'arborait aucune marque de crocs, et Evoli n'avait pas de mains… Ce dernier évita le regard suspicieux de Quinn en allant se pelotonner sur les genoux de sa dresseuse.
- T'installe pas, mon chou, on part dès que Quinn a fini de bouffer.
- Rapide, soupira l'adolescent.
- Y'a pas de petits profits ! Je vais me faire un max de thunes et me payer des trucs de fou !
Et elle repartit dans un rire flippant.
- OK, mais c'est toi qui conduis.
Elle lui adressa un grand sourire ravi qui lui colla des frissons dans dos. D'un bond, elle chargea ses affaires, se mit au volant et brandit le poing :
- TO NARNIA !
- … j'ai peur pour ma vie.
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« Il en faut peu pour être heureux, oui vraiment très peu pour être heureux~ » (> tout ce dont je me souviens du Livre de la Jungle, avec le « Aiiie confiaaaance » flippant) *envoie un rocher sur Balou* Tell me about it, bitch !
Ahem. N est un personnage que j'apprécie beaucoup, et je crois que je suis pas la seule… donc petite dédicace à ma Cat <3
Merci d'avoir luuu =D