Chapitre 10 : Un bonheur non dissimulé
Chapitre 10 : Un bonheur non dissimulé
Le quartier Beauval de Lavanville Nord était un coin plutôt populaire, sans pour autant être pauvre. Les rues fourmillaient de vie. Les marchands sortaient leur marchandise devant leur magasin. Des gens s'arrêtaient parfois, tâtant un lot de baies Pêcha ou Ceriz. Le quartier était presque exclusivement piéton, en-dehors de quelques grandes avenues. D'après l'annuaire local, le commissaire Valentins vivait ici. Sa baisse conséquente de revenus l'avait forcé à quitter l'Ouest de la ville, devenu trop cher pour lui. Le jeune homme se rendit donc à l'adresse indiquée.
Il appuya sur la sonnette de l'un des appartements de l'immeuble, le numéro sept. Des bruits de pas résonnèrent à l'intérieur. La porte s'ouvrit largement, laissant entrevoir un grand homme brun, l'air mal réveillé, vêtu d'une simple chemise froissée et d'un pantalon noir.
« Bonjour, c'est pour quoi ? » demanda-t-il sèchement.
Il ne l'avait manifestement pas reconnu. Une drôle de sensation envahit l'âme du jeune homme.
« Vous ne vous souvenez pas de moi ? Pourtant, vous avez sué haut et fort pour me mettre les menottes aux poignets ! L'affaire Haster, vous vous souvenez ? Vous avez été démis de vos fonction parce que vous n'avez pas réussi à m'attraper, à l'époque ? Vous pensez que je suis la source de vos ennuis ? Détrompez-vous, tout ceci va beaucoup plus loin que nous le pensions ! Nous sommes tout deux des victimes ! Je vous offre une occasion de... »
La porte se referma brusquement, dans un grondement sec et lourd. A vrai dire, le jeune homme s'attendait à une telle réaction.
« Je n'ai aucune envie de traiter avec un criminel comme vous ! Partez, vous n'aurez rien de moi ! »
« Même si je vous aidais à retrouver travail et gloire ? » proposa le voleur d'une voix intéressée.
Le cliquetis des verrous se fit entendre. Valentins reparut, l'air renfrogné. Il fit signe à son ennemi d'entrer.
Il aurait attendu plus de relâchement de la part d'un haut fonctionnaire déchu. L'appartement était parfaitement rangé. Une grande pièce d'à peu près quinze mètres carrés lui servait à la fois de salon, salle à manger et cuisine. Un couloir donnait sur ce qui semblait être une salle de bain. Le canapé était recouvert d'un drap blanc et d'un oreiller plutôt rembourré. Valentins avança deux chaises pliantes qu'il plaça autour d'une table basse. Il invita le jeune homme à s'y assoir.
« Qu'avez-vous donc à proposer de si... intéressant ? »
Valentins demeura immobile quelques instants.
« J'espère que vous avez fait bonne fortune avec cette gemme, celle de la Tour pokémon de Lavanville, ce serait la moindre des choses, après m'avoir mis à la rue... »
Harvey ne fut pas vraiment surpris de l'animosité de son hôte. Après tout, il avait été l'un des dossier prioritaires du commissariat, et sans doute avait-il été présent dans plusieurs de ses cauchemars... Le jeune homme ne put réprimer un sourire.
« Et bien, justement non... Je ne vous détaillerai pas les raisons de ma longue absence, mais croyez bien que si j'avais fait fortune grâce ce maudit caillou, je ne serais pas assez fou pour venir rendre visite à mon ennemi... Non, rien ne s'est passé comme prévu, et j'ai besoin de vous pour réparer cette erreur. »
Edward partit d'un rire incontrôlé puis fixa Harvey dans les yeux.
« Et qu'est-ce qui vous fait croire que, moi, je devrais vous aider ? Je ne vous dois absolument rien. Dois-je vous rappeler que vous avez foutu ma carrière en l'air ? »
« Oui, j'ai appris pour votre poste. J'en suis sincèrement désolé. Si, vraiment ! Vous étiez mon commissaire préféré après tout... Ma proposition est la suivante : vous m'aidez à régler mon problème et je me rendrai. De ce fait, vous retrouverez l'honneur, votre poste ainsi que la gemme. Avouez que c'est un arrangement plutôt honnête et avantageux pour vous ! »
Valentins considéra la proposition un long moment. Elle était certes très alléchante, mais connaissant les crapules comme lui, il y avait forcement Serpang sous roche... Mais après tout, qu'avait-il à perdre ? Il était déjà au bas de l'échelle, il ne pouvait que remonter ! Il fit mine de réfléchir, bien que son choix était plus ou moins établi. Enfin, il fixa la cause de tout ses problèmes dans le blanc des yeux.
« Très bien, je marche. Je compte sur vous pour remplir votre part du marché une fois tout ceci terminé. Et si vous m'expliquiez ce que vous attendez de moi, exactement ? »
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L'affaire 245 avait pris un tournant inattendu. Après cinq ans d'absence, l'unique témoin était réapparu, avec l 'identité du traitre, ainsi que le moyen de faire fortune. Giovanni ne fut pas étonné en apprenant le nom du renégat. Par le passé, il avait déjà pris la tête d'émeutes, s'opposant ouvertement à la politique du Boss, qui avait investi dans un projet couteux, et en apparence non lucratif. Il avait été renvoyé sans avertissement.
Qu'il ait voulu se venger de la Team Rocket était facile à comprendre, mais pas à pardonner. Malheureusement pour lui, il ne prenait même pas la peine de se cacher. Il s'exhibait fièrement à la télévision, à la radio, et lors de quelques événements importants. En tant que criminel hautement recherché, Giovanni ne comprenait pas ce comportement ostentatoire. Mais au moins, cela facilitait les choses. Ils savaient exactement où le trouver.
« Et pour ce qui est d'Harvey Haster ? » demanda Sylvie, un peu en retrait.
Le Boss se retourna et l'observa un moment avant de s'assoir dans son fauteuil. Il cacheta une enveloppe, la tendant ensuite à la scientifique.
« Envoyez un sbire effectuer cette mission. Nous possédons un ennemi commun, je doute qu'il refuse notre participation... »
« Et pour ce qui est du projet ? sera-t-il relancé ? Je me complais bien plus derrière un microscope que derrière un bureau, Monsieur. »
Le maffieux lui lança un regard froid et terrible. La femme tressaillit imperceptiblement.
« Nous n'avons plus besoin de le développer. Ernest Valont nous livrera le secret qu'il nous as arraché il y a cinq ans, celui-là même qui l'a conduit à la fortune. Et cet Harvey nous y aidera. »
Sylvie hocha la tête. Elle prit soin de ne pas dévoiler sa déception de ne pas pouvoir reprendre son travail. Elle salua respectueusement son patron, avant de s'éclipser.
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Edward Valentins avait passé tout le mois à éplucher des dossiers sur Ernest Valont, en cachette. Il n'avait pas encore trouvé de preuves accablantes contre le multimilliardaire. Toutefois, et ce fut plus que facile, il dénicha l'adresse d'un contact de Valont, un gemmologue. Une facture avait été enregistrée par l'homme, ne sachant apparemment pas ce qu'il avait eu entre les mains. Harvey était partit l'interroger dès la nouvelle apprise. L'homme lui indiqua une autre adresse, celle d'une parapsychologue, une kinésiste établie dans les quartiers sud de Safrania.
« Foster, c'est elle ! » brailla un des passants.
Harvey le remercia et se dirigea vers la petite maison qu'on lui avait indiqué. C'était une minuscule baraque, coincée entre deux petits immeubles délabrés. De larges fissures apparaissaient sur les façades. Le jeune homme appuya sur la sonnette. Une silhouette fine, celle d'une femme, drapée dans une très longue robe d'un bleu déteint, l'accueillit. Mais quelque chose le tracassait. Il avait déjà vu cette personne quelque part. Il en était sûr.
« Qu'est-ce que je peux faire pour toi ? » lui demanda-t-il d'une voix mielleuse.
« Je voulais savoir, avez-vous reçu un client du nom d'Ernest Valont, un jour ? »
« Ce nom me dit bien quelque chose. Pourquoi ça ? »
« Je n'ai pas à vous donner de raison. Je veux des informations, point ! »
Une aura violette entoura soudainement les mains de la kinésiste. Son visage afficha une expression contrariée.
« Partez immédiatement ! Les informations concernant mes clients sont confidentielles ! Allez-vous en ! »
Comme pour souligner sa colère, elle fit flotter une pokéball jusqu'à elle, prête à la lancer. Harvey, lui, avait déjà sorti son Pyroli.
« Je crois qu'un affrontement dans votre maison aurait des conséquences plutôt désastreuses, surtout face à un pokémon Feu comme mon Pyroli... »
Résignée, la femme fit léviter sa pokéball jusqu'à la table. Son aur a disparut et son visage se détendit. Elle partit d'un pas lent et revint, une dizaine de minutes plus tard, un bout de feuille froissé à la main.
« Voici. Il y à cinq ans, cet homme m'a fait venir chez lui, dans les montagnes au nord, pour examiner une pierre, et estimer son potentiel. Maintenant que vous avez ce que vous vouliez, partez. »
Harvey lut rapidement la facture. Le montant estimé correspondait à ce qu'Ernest lui avait révélé avant de le jeter dans l'Autre Monde. Maintenant, il tenait une preuve tangible. Si la pierre n'avait pas été déclarée au fisc, il pourrait utiliser cette information pour accuser Valont de fraude fiscale grave, de vol et de recel d'objet volé. C'était finit pour lui, il était coincé ! Malgré tout, un détail le chiffonnait. Comment avait-il pu estimer la valeur du joyau de Lavanville, avant de le recevoir de ses propres mains ?