Chapitre 6 : Un monde d’ombres [2/2]
Chapitre 6 : Un monde d'ombres [2/2]
Harvey se redressa, tout en observant le portail naissant. Les éclairs apparaissaient de plus en plus fréquemment. Un nouveau rugissement fit trembler la terre. Il commença à trembler malgré lui. La gamine n'avait pas bougé, paralysée par la peur. Il se rapprocha d'elle sans quitter le sinistre spectacle des yeux, et lui tendit la main.
« Faut qu'on se tire de là. »
Sans vraiment se contrôler, la petite acquiesça et prit la main du jeune homme, qui la tira pour l'aider à se relever. Il descendirent de leur promontoire, tremblant comme des feuilles, l'un tout autant que l'autre. Le jeune voleur se retourna pour observer une dernière fois le portail. Un flash lumineux l'aveugla. Une violente attaque vint frapper la colline où ils se trouvaient quelques secondes plus tôt. Celle-ci se fissura profondément, se disloqua. Le jeune homme porta son regard vers la distorsion. Une ombre filait autour. Elle cherchait quelque chose. Elle les cherchait. Il se releva, épousseta ses vêtements, prit la petite par la main et l'entraîna dans la forêt.
Un nouveau Dracosouffle manqua de les toucher. Il atteignit un arbre, qui se calcina instantanément. Ils étaient trop à découvert. Ils devaient se réfugier dans une grotte. Un souterrain. Harvey courrait comme il pouvait. La petite avait du mal à suivre. Il fallait aller encore plus vite.
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Ernest Valont consulta ses documents, serein. Autour de lui, ses associés l'observaient avec des regards de vautours.
« Bien. Je dois dire que notre affaire est plutôt florissante ! Nous avons le monopole du marché, et les plus riches s'arrachent les pierres que nous avons amassé. » dit-il simplement.
Il posa une sacoche sur son bureau, se leva et marcha en direction de la porte. Il se retourna alors vers les autres.
« Votre part se trouve dans cette sacoche. Je vous laisse vous départager l'argent. J'ai quelque chose d'urgent à faire, alors vous m'excuserez. »
M. Valont partit, prit soin de fermer la porte à clé, assez silencieusement. L'assemblée encore présente dans la pièce, silencieuse, se rapprocha de la petite sacoche de cuir. L'un d'eux entreprit de l'ouvrir.
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Ernest Valont s'arrêta à une brasserie et y commanda un café. Son regard perfide se porta sur la petite télévision en hauteur. Un sourire machiavélique se dessina lentement sur son visage.
« Nous venons d'apprendre à l'instant qu'une explosion à eu lieu dans une résidence pavillonnaire, avenue de Sainte Santé. La cause de cet accident est, selon les premiers rapports, l'explosion d'une conduite de gaz. Nous y reviendront une fois que nous aurons plus de détails. Je vous retrouve dans quelques minutes, après une courte page de publicité. »
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Au-dehors, des bruits sourds retentissaient, faisant trembler la roche. Harvey et la gamine s'étaient réfugiés dans une grotte, sans cristaux. La caverne était large et
profonde. Les parois semblaient polies. Finalement, les explosions cessèrent. Le pokémon s'était calmé, pour le moment du moins.
« On peut plus sortir de là. Je propose qu'on suive ce tunnel. Avec un peu de chance, nous trouverons de quoi survivre, un peu d'eau, quelques pokémons, ou même des plantes peut être. » murmura le jeune homme.
La petite acquiesça. En y réfléchissant bien, elle ne voyait pas d'autre solution. Elle prit un air un peu dégoûté en sentant la main d'Harvey prendre la sienne. Son mépris envers lui s'envola alors partiellement. Bien sûr, elle n'oubliait pas, mais elle trouvait un certain réconfort en sentant la main chaude du jeune homme. Elle entreprit donc de le suivre sans rien dire.
Le souterrain était aussi sombre que la plus sombre des nuits. Une sorte d'escalier naturel facilitait la descente. Harvey et la petite prêtaient attention à chacun des pas qu'ils faisaient, tâtant le sol du pied avant d'avancer. Ils continuèrent ainsi jusqu'à un endroit plat. Soudainement, Harvey lâcha la main de la gamine. Un bruit sourd se fit entendre, suivi de près par un « Humpf ! ». La petite eut peur un moment de ne plus sentir la main du jeune homme. Mais elle se garda de faire une remarque.
« Ca va ? » demanda-t-elle simplement.
Harvey se releva et tâta le sol à la recherche de la chose qui l'avait fait chuter. Il mit la main sur un drôle d'objet. Il s'agenouilla pour l'examiner du bout des doigts. C'était quelque chose de massif, recouvert d'une gaine en caoutchouc et muni d'une poignée. Une plaque lisse et froide constituait l'embout. En tentant d'en savoir plus, le jeune homme appuya malencontreusement sur un bouton qui inonda la caverne d'une lumière blanche. Les deux compagnons restèrent aveuglés un certain moment. Ils avaient déniché une lampe. Harvey la souleva, surpris par sa masse plutôt conséquente.
« Qui aurait cru qu'on tomberait sur un truc pareil ici ! La veine qu'on a ! C'est pile ce qu'il nous fallait ! » dit-il avec une certaine jubilation dans la voix.
« Justement, c'est pas censé être là, ça. Tu trouve ça normal, qu'une lampe électrique se trouve ici, dans cet endroit paumé ? Moi, j'trouve pas. » répondit-elle, préoccupée par la présence de l'objet dans cette caverne. « Ce que j'en dis, c'est que tout ça est vraiment bizarre. D'abord, on tombe sur une carrière bien défrichée. Ensuite, les parois sont bien lisses, et après, cette lampe. Je sais pas toi, mais moi, ça m'inspire pas… »
« Ouais, t'as raison. Mais je suis pas mécontent de l'avoir trouvée. Peut être que si on descend encore, on va finir par dénicher autre chose ! »
La gamine relâcha ses épaules. L'enthousiasme de son compagnon la désespérait, même si elle partageait entièrement sa déduction. Ils se remirent en route.
« Attends, t'as entendu ? » demanda la gamine, visiblement angoissée.
Le jeune homme se retourna vers elle et l'observa avec incompréhension.
« Non, j'ai rien entendu. J'aurais dû ? »
Afin de rassurer la petite, le jeune homme balaya la zone du faisceau de sa lampe. Il n'y avait qu'un tas de gravats, quelques tables renversées, divers objets par-ci par-là.
« En effet, je commence à partager ton avis. Mais comment… » continua-t-il.
Le bruit se répéta. Cette fois-ci, ils l'avaient entendu tout les deux. On aurait dit une pierre qui roule, accompagné d'un léger craquement. Harvey inspecta une nouvelle fois les environs de sa lampe. Il n'y avait toujours rien. Il faillit abandonner lorsqu'il repéra une tache blanche, derrière une des tables. Le jeune homme fit signe à la gamine de ne faire aucun bruit, tout en se rapprochant discrètement.
Lorsqu'il fut près du point qu'il avait repéré, un nouveau bruit, comme des craquements, résonna. Il promena le faisceau de sa lampe autour de lui, lorsque la tache blanche réapparut. Comme apeurée, elle s'enfuit. Harvey la poursuivit. La gamine les suivaient en tâtant l'obscurité.
Lorsque, quelques dizaines de mètres plus loin, il rattrapa la forme blanche, celle-ci tomba au sol, et fit face à son poursuivant. Le jeune homme n'en revint pas. Ils demeurèrent immobile. Là, vêtue d'une blouse blanche poussiéreuse, comme celles que portent les médecins et les chercheurs, une tignasse verte en bataille, une femme, d'une trentaine d'années peut-être, voire plus, l'observait d'un regard terrifié. Elle n'osait pas bouger, retenant sa respiration. Se rendant compte qu'il l'aveuglait, il écarta légèrement le faisceau lumineux.
« Non… je… Je n'ai rien fait ! Laissez… laissez-moi en paix ! Allez-vous-en ! Je ne veux pas… » clama-t-elle d'une voix tremblante, avant de s'évanouir.