Chapitre 3 : Rencontre
Chapitre 3 : Rencontre
La forêt semblait immense, sans fin. Les arbres se succédaient et se ressemblaient tous. De temps à autre, un petit cours d'eau coulaient ça et là, paisiblement, au lieu de cette monotonie, recueillant les quelques pokémons des environs, venus y boire. Le soleil tentait de percer le feuillage des arbres, projetant de grandes taches lumineuses sur l'herbe, mouvantes et vivaces. Non loin, on entendait quelques Roucools chanter.
Harvey marchait sans réfléchir à quoi que ce soit. Il avait peur de repenser aux événements traumatisants de la veille, à ce cauchemar terrifiant. Mais était-ce vraiment un cauchemar ? Bien sûr que oui, et pourtant… cela semblait tellement réel. Afin d'éviter de se torturer l'esprit avec cette réflexion effrayante, le jeune Kantois marchait vite, fixant un point au loin, le regard un peu vague et aiguisé à la fois. Les bras se balançaient avec vigueur. Le sac à dos sautillait au rythme des pas de son porteur. Cette démarche donnait au jeune homme une allure de scout un peu trop fier et enfantin. Mais après tout, qui était présent pour voir ce spectacle ?
A coté de son maître, Pyroli trottinait joyeusement, insouciant et plein de vie. De temps à autre, il s'arrêtait, levait le museau et respirait profondément, ou bien humait le sol à la recherche d'une quelconque odeur. Il régnait dans cette forêt un parfum délicieux, indescriptible. Mais quelle bonheur pour les narines ! Quand il s'apercevait qu'il prenait du retard, le jeune Pyroli galopait à vive allure jusqu'à rejoindre son maître, qui n'avait pas remarqué son absence.
Cela faisait plusieurs heures que le duo marchait. Le soleil était à son zénith, commençant sa descente journalière. Pyroli haletait, laissant pendre sa langue. Harvey lui aussi était quelque peu fatigué. Maintenir son rythme rapide ne l'avait pas ménagé. Mais il sentait qu'il en avait bientôt fini avec cette jungle. Une vue dégagée sur le reste de la vallée, depuis un petit promontoire, le ramena à la réalité. Il n'était pas au bout de ses peines.
Le soleil continuait sa lente descente. La ciel se colorait petit à petit, prenant quelques légère couleurs rouges orangées. Les nuages, chassés par un vent violent, se dispersaient. Le maître et son compagnons s'étaient arrêtés un peu plus bas, dans une vaste clairière ouverte sur la vallée. Afin d'éviter les accidents, les deux s'étaient établis loin du bord, à l'ombre d'un grand sapin. Une large et profonde rivière coulait en contrebas. Tandis que Pyroli se tournait et se retournait sans cesse, tentant de trouver une position confortable pour se reposer, le jeune homme dégustait quelques gâteaux secs qu'il avait ramenés de la fête de la veille. C'était de petits gâteaux en forme de lingots, fourré à la baie pêcha, avec quelques râpés de baie mandia. Un véritable délice ! Ces gâteaux-là ne se trouvait presque exclusivement qu'au quartier maudit de Lavanville, une spécialité de ses habitants. Vraiment un régal. De temps à autre, le pokémon feu respirait à pleins poumons, se délectant de l'odeur de ces friandises.
Alors que le jeune homme s'apprêtait à savourer son troisième gâteau, quelque chose s'agita dans un fourré non loin. Un pokémon affamé devait sûrement s'y cacher, attiré par la délicieuse odeur de nourriture. Pyroli ouvrit un œil, ne se levant pas pour autant. Son maître quant à lui, se redressa d'un bond et se prépara à donner des ordres. Il plissa les yeux pour tenter de percer le voile de l'ombre qui tombait sur toute la montagne. Sans prévenir, poussé par la faim, le pokémon surgit de sa cachette et fonça vers le jeune homme, le poing en avant. Il effectua un superbe saut et se prépara à une attaque Pied sauté. Le pokémon Feu réagit immédiatement, bondit avec vivacité vers le mystérieux pokémon, et lui asséna une terrible attaque Morsure avant que ce dernier n'atteigne le jeune homme. Il réussit cependant à amortir sa chute. Pyroli retomba sur ses pattes, l'œil brillant et le poil hérissé. Harvey était tétanisé. Il avait eu vraiment peur ! Dans sa main droite, le gâteau n'était plus que miettes et confiture.
Tout en se ressaisissant, le jeune homme observa son agresseur. A en juger par la forme et la taille, c'était sans aucun doute un Férossinge. La veine sur son front était contracté à son maximum son regard sévère transperçait de part en part le dresseur. Ses poings étaient serrés et semblaient vouloir cogner.
Harvey s'essuya la main sur un mouchoir et tendit cette dernière vers le pokémon sauvage.
« Tu vois, il n'y à rien à manger ici. Va -t-en maintenant. »
Le Férossinge se courba, serrant les dents, aiguisant son regard. Pyroli se prépara à contre-attaquer.
« Tu n'as pas l'air de vouloir lâcher l'affaire… Tu l'aura bien cherché. Pyroli, Vive- attaque et Morsure ! »
Le pokémon n'attendit pas et se jeta sur son adversaire, le prenant totalement de court. Il le cribla de coups et termina avec une terrible attaque Morsure. Le pokémon sauvage tint bon. Malgré ses blessures apparentes, il était toujours debout. Pyroli n'eut pas le temps de réagir. Le pokémon Combat répliqua avec un uppercut d'une puissance terrifiante. Pyroli vola littéralement, retombant plusieurs mètre plus loin, un peu sonné. Il essaya de se relever, chancelant. Il tenait mal sur ses pattes. Il tenta malgré tout de rester debout. Son arsenal était désormais limité aux attaques à distance.
« Très bien, Lance-flammes ! … Euh… Non, attends ! »
Trop tard. Le pokémon avait déjà exécuté l'ordre de son maître. Une gerbe dévastatrice de feu s'abattirent sur le Colossinge, ainsi que sur la forêt environnante, enflammant les arbres alentours. Harvey contempla les conséquences de son acte avec horreur. Il avait mis malencontreusement le feu à la forêt ! Les flammes se répandaient comme une traînée de poudre, bloquant désormais toute issue. Non ! Il y avait encore un moyen ! Risqué. Il fallait sauter. La rivière plus bas était le seul échappatoire. Il fallait sauter. Ne pas regarder. Ne pas hésiter. Juste sauter. Sans réfléchir Harvey rappela son pokémon dans sa pokéball. Il se rapprocha du bord de la falaise, jeta un œil en bas. La tête lui tournait. Le crépitement violent des flammes le fit sursauter. Il se retourna, observa le feu grignoter les arbres alentours. Mieux valait mourir écrasé ou noyé que brûlé. Il ferma les yeux, et sauta.
Le choc fut terrible. Durant quelques secondes, le jeune homme ne put faire le moindre mouvement. Puis, comme traversé par un éclair, il s'agita vivement, multipliant les mouvements hasardeux et inutiles. L'air commençait à manquer. Luttant contre le courant, le jeune homme tenta de rallier la berge. Une fois parvenu, il s'écroula sur l'herbe verte, extenué. En haut, les flammes étaient désormais faibles. Elle s'éteindront dans quelques minutes tout au plus. Le jeune homme retira son sac à dos, en extirpa le paquet qu'il transportait depuis maintenant trois jours, et le leva au dessus de sa tête. Une faible lueur violette filtrait à travers le papier. Cette chose valait-elle vraiment la peine qu'il risque sa vie ainsi pour elle ?
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Assis sur un banc du cimetière, à l'ombre de l'immense tour, M. Fuji contemplait les derniers rayons du soleil. Il avait failli à sa tâche. Cette pierre que ses ancêtres avaient protégée avec tant d'acharnement, il ne l'avait plus. Seul Arceus savait où cette pierre se trouvait désormais, ou même ce qu'elle allait devenir…
Un homme, vêtu d'une veste marron clair et d'un pantalon en lin noir, s'approcha du vieil homme. Il avait la mine grave. Il était sûrement porteur de mauvaises nouvelles.
« M. Fuji ? Puis-je vous parler ? Je peux repasser demain matin si vous le désirez… »
« Non, asseyez-vous donc. Vous apportez de bonnes nouvelles, j'espère… »
Le ton acide et agressif du vieil homme fit tressaillir le commissaire. Il s'avança et s'assis à coté du gardien.
« J'ai bien peur que non. Le voleur à quitté la ville désormais. Nous organisons des battues dans les montagnes, au nord. Une trace de calcination à moyenne échelle peut avoir un rapport avec l'homme que nous traquons. Toutefois, si nous progressons davantage, nous entreront en domaine privé. Cela prendra quelques jour avant d'obtenir une autorisation de la part du particulier concerné… . »
M. Fuji baissa la tête et croisa ses mains sur ses jambes.
« Commissaire Edward Valentins, je compte sur vous. »
Le commissaire Valentins se releva, murmura un « Très bien. » et partit sans prononcer un mot de plus, laissant le vieillard seul dans ce cimetière qui était le sien.
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Harvey se réveilla lentement. Il faisait encore nuit. La lune éclairait convenablement la plaine où ils se trouvaient. Le vent frais du nord le fit grelotter. Au moins, il n'était pas en train de faire un nouveau cauchemar… Il se leva, s'étira tout en observant le ciel piqueté d'étoiles. Il n'y avait aucun nuage. Le jeune homme détourna les yeux de cette merveille et fit quelques pas, le regard vague, la tête vide. Puis, un crépitement soudain le fit sursauter. Il fit volte-face et se retrouva face à une gigantesque flamme bleue. Cette dernière l'enveloppa, le brûlant, le lacérant de part en part. Le jeune homme appela à l'aide, en vain. Le Pyroli dormait profondément. Il resta sourd aux appels de son maître. Soudain, un gigantesque éclair frappa l'esprit d'Harvey. Il voyait tout. La forêt rongée par les flammes, les pokémons fuyant, la catastrophe dont il était responsable. Il s'agenouilla et frappa la terre de ses poings. Ces visions lui étaient insupportables. C'en était assez ! Tout ça devait finir !
« Asseeeeeeeeeeeez ! »
Comme par magie, les flammes fantomatiques se retirèrent, disparaissant petit à petit, malmenées par le vent.
« Aaaaaaah ! »
Le jeune homme se leva d'un bond. Il se frotta la figure avec la main droite, laquelle sentait encore la confiture. L'aube pointait, timide et peu décidée. Encore un cauchemar. Décidemment, il avait l'imagination un peu trop fertile. Il bailla, s'étira dans un grognement sourd et se leva enfin. Si ça se trouvait c'était cette pierre qui lui filait ces visions… Cette possibilité n'était pas à exclure ! Aussi, plus vite il l'aura livrée, plus vite il pourra retrouver une vie normale, trouver un boulot, une femme, peut-être des enfants, qui sait ?
« As-tu passé une bonne nuit ? »
Le jeune homme sursauta. La voix semblait proche. Ça n'allait tout de même pas recommencer ! Il tenta donc de rester sourd à cette question et se prépara à partir.
« Tu feins de m'ignorer ? Tu ne devrais pas. »
Le jeune homme s'arrêta un instant. C'était une petite voix toute fluette, presque enjouée. Harvey plissa les yeux. Il lui semblait apercevoir quelqu'un sous un pommier, plus loin.
« Tu ne me réponds pas ? »
« Je ne répondrai que lorsque tu te sera montrée ! »
La personne sembla se lever et fit quelques pas, entrant dans la faible lueur de l'aube. C'était une petite fille, rousse aux yeux gris. Pas de doutes possibles.
« Encore toi ? Qu'est-ce que tu veux ? »
« Je veux simplement… récupérer ce qui m'appartient. Et je te le reprendrai, de gré ou de force ! »
Comme pour confirmer ses dires, l'Ectoplasma surgit de terre et prépara une Balle ombre.
« Je ne vois pas de quoi tu parles ! Maintenant, va-t-en gamine ! J'ai autre chose à faire ! »
« Je ne souhaitais pas en arriver là. Mais si tu insistes… Ectoplasma ! »
Le pokémon Spectre lança sa Balle ombre, visant le Pyroli endormi. Celui-ci reçut l'attaque de plein fouet, retombant plusieurs dizaines de mètres plus loin, percutant un arbre qui fut déraciné sous la force de l'impact. Harvey rappela son pokémon.
« Très bien, j'ai peut-être, effectivement, malencontreusement, pris quelque chose chez toi. Mais je ne l'ai plus ! Je l'ai jeté, c'était sans valeur. »
« Tu mens, et je te suivrai jusqu'à ce que tu me rendes mon bien. Et je suis plutôt tenace, tiens-le bien pour dit ! »
Le jeune homme roula les yeux. Il n'avait vraiment pas envie de se coltiner cette gamine têtue. D'autant plus que si elle venait avec lui, elle allait tout savoir. Mais après tout, cet Ectoplasma pourrait bien servir. Si elle voulait récupérer son bien, elle serait obligée de le protéger ! Moui, c'était un marché plutôt équitable…
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« Le courrier ne va pas tarder à arriver Monsieur. »
« Parfait ! Préparez l'entrevue, il faut accueillir notre invité comme il se doit ! »