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Chimères et patchworks [recueil d'OS] de Srithanio



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Informations

» Auteur : Srithanio - Voir le profil
» Créé le 28/01/2012 à 10:48
» Dernière mise à jour le 23/02/2012 à 14:06

» Mots-clés :   Absence de combats   Absence de poké balls   One-shot

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Aussi vrai qu'un arc-en-ciel
Les bâtiments grisâtres s'étendaient à perte de vue de l'autre coté du grillage, comme avachis au milieu de tout ce béton. Pas un être humain en vue ; les seuls mouvements étaient ceux des camions vrombissants qui sortaient sans arrêt des bâtiments périphériques. Aux yeux de Charlie, l'ensemble ressemblait à un gigantesque monstre de béton, tapi dans l'attente de sa prochaine proie. A ses oreilles, le monstre souffrait en plus de sérieux problèmes gastriques.

La vision déprimante n'empêchait pas la troupe d'adolescents regroupés devant la grille d'entrée de se répandre en gloussements idiots et bavardages sans queue ni tête. Les professeurs les surveillant avaient abandonné depuis longtemps tout espoir de les faire taire et se contentaient de s'assurer qu'aucun énergumène ne s'avise de gravir le portail.

Surtout que d'un instant à l'autre, celui-ci allait s'ouvrir et laisser la classe de quatrième pénétrer dans les lieux.

Charlie espérait que ce moment n'allait pas tarder. Il avait bien assez d'occasions d'attendre dans sa vie quotidienne, et cette attente au milieu de tous ses camarades surexcités lui mettait les nerfs à vif par phénomène de contagion.

Cela faisait des semaines que cette ambiance tendue durait, depuis que la classe avait appris qu'elle avait gagné le grand prix du concours du Ticket d'Or : une visite guidée de la chocolaterie de la ville.

A l'entente de l'annonce, ses camarades s'étaient aussitôt mis à hurler de joie telle une bande de gorilles invitée à engloutir des banana splits ; une occasion gratuite de récupérer du chocolat ! Le droit de s'empiffrer jusqu'à ce que son taux de glucose équivaille à celui d'une meringue à la fraise ! Que demander de plus ?

Tss, récupérer deux ou trois tablettes... Comment se contenter de si peu ?

Charlie s'en fichait, lui. Son ticket d'or, il comptait l'utiliser pour découvrir tous les secrets de la fabrication du chocolat. Une chose aussi merveilleuse au palais ne pouvait pas être conçue n'importe comment ; il allait sûrement croiser des petits êtres faits de cacao, des chocolatiers fantasques et des écrémeuhs dansant le tango.

Bon, en observant les bâtiments gris, il revoyait ses exigences à la baisse. S'il voyait une écrémeuh qui se trémoussait sur de la salsa, ce serait déjà bien.

Soudain, le silence se fit. Les professeurs, médusés, mirent une seconde à réaliser que leurs élèves avaient cessé de jacasser : l'expérience était nouvelle pour eux.

Pourtant, il n'y avait eu aucune demande de calme. Juste un faible grincement quand le portail s'ouvrit, lentement.

Un homme vêtu d'une charlotte violette apparut et se dirigea vers eux. Les claquements de ses chaussures de sécurité résonnaient sur le béton.

Et devant les élèves muets, il s'arrêta et cracha d'un ton brusque:

-C'est vous la classe des quatrièmes B ? Les gamins qui ont gagné le concours, là ? Moi, c'est Billy Wonka, je serai votre guide. Allez, rentrez j'ai pas que ça à faire ! En avant les mômes !

-_-_-_-_-_-_-_-

Grand-père Roald toqua timidement à la porte de la chambre.

Pas de réponse.

Il hésita quant à la conduite à tenir. Pousser la porte et enfreindre l'intimité de son petit-fils Charlie ? Ou la respecter et le laisser seul à broyer du noir ? Il avait l'air tellement sombre ce soir au dîner...

Il se décida pour un consensus : retaper au montant et appuyer "accidentellement" sur la poignée. La porte s'entrouvrit. Pas plus de réponse de l'occupant de la chambre.

Bah, s'il avait vraiment voulu être seul, il aurait fermé à clef sa chambre. Ou du moins, il aurait demandé à ce qu'on la referme. Non ?

Oh, et puis tant pis.

Roald rentra dans la pièce, et referma doucement la porte derrière lui.

"Charlie ?" lança-t-il

Un reniflement se fit entendre. Il venait de l'amas de draps enroulés sur le lit, preuve que Charlie devait bien se trouver quelque part dessous.

Le sexagénaire attrapa la chaise à roulette du bureau et la plaça à coté du lit avant de s'asseoir précautionneusement dessus ; ces maudits sièges avaient tendance à se sauver au moindre moment d'inadvertance.

Et il attendit. Il savait d'expérience que le silence était la meilleure aide pour pousser un adolescent à la confidence.

Comme attendu, au bout de quelques minutes de reniflements, la chose sous la couverture souleva un pan de son abri pour voir si elle était observée. La tête de Charlie apparut et lui lança un regard mouillé.

"Papy, renifla-t-il, je veux pas en parler. C'est rien d'important."

Ben voyons, se dit Roald. Tu n'as pas laché un mot de tout le repas, tu es enfoui sous tes draps comme un enfant en bas âge qui craint que le croque-mitaine ne vienne lui grignoter les orteils, et en plus tu as les yeux injectés de sang et la goutte au nez. Soit tu viens de subir un gros chagrin, soit il va falloir que j'aille fouiller dans ton bureau histoire de voir si un sachet de "rien d'important" ne se cache pas quelque part.

Encore une fois, il se mura dans le silence. Pour occuper le temps, il essaya de faire l'inventaire des articulations qui l'élançaient ce soir. Alors, le genou droit qui grinçait, le gauche qui le tirait, le coude opposé qui l'élançait ...

Il en était à dix-huit quand son petit-fils reprit la parole :

"C'est juste que tu sais... Bah, on a visité la chocolaterie cet après-midi... Et c'était pas comme je l'imaginais".

Bref silence, puis il continua en chevrotant :

"A l'intérieur, c'était.. C'était... c'était, je sais pas ! Industriel ? Matériel ? Adulte ? Je sais pas ! C'était pas ce que j'espérais. Pas de magie pas de fantaisie pas de rêve pas de création pas de plaisir pas de pas de ! Rien, que du boulot bête et méchant, que du travail ! Créer du chocolat, c'est que du travail !

Ce dernier mot était craché, comme s'il constituait la pire insulte possible au monde. Les couvertures bougèrent : Roald eut l'impression que Charlie se recroquevillait, comme s'il avait honte d'en avoir trop dit.

D'une petite voix, l'adolescent continua : "C'est bête, hein ? Je croyais que fabriquer du chocolat, c'était du rêve. Comme une mission sacrée, tu vois papy ? Qu'on se levait heureux le matin, heureux d'aller créer la plus belle chose au monde, heureux de rendre les autres gens heureux un court instant. Que peut-être que finalement y'avait de la beauté à devenir adulte, qu'on ne devenait pas tout gris et raccorni, comme des coquilles vides d'enfant ..."

Le grand-père. senti son coeur se serrer. Comme tous les adultes, il s'était efforcé d'enfouir au plus profond de lui les terreurs simples de l'adolescence et pensait y avoir réussi. Mais son petit-fils leur avait fourni une excavatrice métaphorique, et il les sentait entamer leur ascension en cet instant-même.

Charlie, enlisé dans ses propres angoisses, reprit la parole sans se rendre compte de l'émoi que ressentait Roald : "Et le pire, c'est que c'était normal. Les autres n'ont pas été surpris. Les profs ont pris des brochures pour qu'on puisse se renseigner sur la formation, et les autres élèves avaient pas l'air contre. Mon copain Matt a même dit qu'il voulait faire ça plus tard, que ça avait l'air trop cool et qu'on pouvait facilement chiper une tablette avant de rentrer chez soi ! Remarque, la semaine dernière il voulait être éboueur parce que comme ça ses parents ne pouraient plus lui reprocher de mettre les pieds dans de la saleté. Et avant, il voulait être Miss Univers pour pouvoir faire l'idiot sur scène devant des millions de gens..."

Roald sentit les commissures de ses lèvres se relever en imaginant un ado habillé de bottes en caoutchouc et d'une charlotte de papier entonner en se trémoussant sur scène le fameux air des "Cachoux" de la Castoidla.

"Mais il a vite renoncé parce qu'il s'est rendu compte qu'il devrait poser en bikini, expliqua l'adolescent, sérieux comme un pape.

Le grand-père se mordit les lèvres.

"Manque de chaussettes, qu'il a dit.."

Charlie s'arrêta, stupéfait de voir son grand-père se mettre à glousser. Mais qu'est ce qu'il avait dit ?

Roald essaya de se reprendre : "Désolé Charlie, je ne me moque pas de toi ! J'admire juste ton goût en matière d'ami. Si ça peut l'aider, j'ai des tas de chaussettes trouées qui ne me servent à rien..." Il eut une légère quinte de toux. Son petit-fils eut un léger sourire en le voyant tenter de cacher son rire.

L'ambiance dans la chambre s'était soudainement détendue ; l'évocation de sous-vêtements féminins n'y était sans doute pas étrangère...

Roald, qui avait profité de son hilarité pour poser une plaque de béton armé sur ses souvenirs et empêcher Trouille adolescente, Peur de l'Avenir et Questions sur le monde de faire surface, reprit les rênes de la conversation :

-Pour ce qui est de ce dont tu m'as parlé, la chocolaterie... Non, ne te cache pas dans ta couverture, sors de là ! On ne va pas en parler, d'accord ?

-Vraiment ?! demanda Charlie, d'une voix mêlant à la fois espoir qu'on oublie cet épisode honteux et déception qu'on le prenne à la légère.

-Vraiment. Par contre... Faut que je te parle de ce qu'est une chocolaterie. Une vraie chocolaterie.

-Mais j'ai vu ce que c'est, la visite était pour ça...

-Visite ? Pfff ! Tu n'as rien vu ! Est-ce qu'un vrai chocolatier irait dévoiler ses secrets à une bande d'adolescents en goguette ?

-Ben...

Dit comme ça, effectivement, ce semblait idiot.

-Est-ce que Mozart aurait dévoilé la création de ses oeuvres de génie devant un public d'ignares ?

-Techniquement, c'est ça un concert, fit remarquer finement l'adolescent.

-Erreur ! A un concert, les gens voient le produit fini : le type en queue de pie, le piano lustré, les notes qui s'envolent et s'impriment au fer rouge dans leurs tympans. Mais ils ne savent pas comment on les a inventées, ces symphonies virevoltantes. Personne n'est allé leur expliquer les affres de la création, les superstitions de chance idiotes mais qu'on suit au cas où, le cerveau qui se vrille et se dévrille, les doigts impatients de marteler la mélodie.

-Euh...quoi ?

-Parce que quand on est génial, on veut le rester. On ne refile pas la recette du génie aux autres. Ou alors, on leur file un semblant de recette vaseuse : comme ça, s'ils la suivent, au lieu de se retrouver avec un sublime entremets moelleux au chocolat et à la pomme à trois étages avec crème de framboise et cannelle, ils obtiendront un gateau au yaourt trop cuit.

Le grand-père s'arrêta, conscient qu'il s'était laissé emporté par les mots. Les métaphores se suivaient et se mélangeaient, créant des avortons d'idées hybrides.

-Tu veux dire que Mozart était mauvais en cuisine mais bon en piano, papy ?

Si ce n'était pas une preuve... Le grand-père reprit plus calmement

-Oublie les cinq dernières minutes, d'accord ? Retiens juste que quand on est bon, on veut le rester. On ne donne pas à n'importe qui le mode d'emploi pour faire pareil. Ta visite là, c'était que de l'intox. Moi j'ai travaillé dans une chocolaterie quand j'étais jeune. Tu veux savoir la vérité sur la fabrication du chocolat ?

Et sous l'oeil soupçonneux de son petit-fils, il commença :

"Pour faire du chocolat, il faut déjà du lait. Et le lait, tu sais d'où il vient ? "

-_-_-_-_-_-_-

A proximité de l'usine, dans une verte prairie, le troupeau d'écrémeuhs est paisible ; elles sont toutes occupées à mâchonner leur poignée d'herbe, les yeux dans le vague. Mais ce ne sont pas n'importe quelles écrémeuhs : elles sont violettes. Plus violettes qu'une digitale, mais moins qu'un coucher de soleil agonisant ; de l'exact violet de l'emballage d'un chocolat au lait.
Ce sont des vaches à lait chocolaté.


(-Pourquoi, il existe d'autres type de lait papy ?
-Bien sûr. Les écrémeuhs bleues pour le lait fluoré, rouges pour le lait à la fraise, vertes pour le lait Prechaunn.)

Elles mâchent et remâchent leur herbe grasse, ces ruminantes, sans se douter que leur lait fera le bonheur des petits et des grands.
Dissolution par les sucs gastriques, absorption par les cellules intestinales, sucres se dispersant dans le corps par le réseau sanguin puis se réunissant pour fournir le lait nourricier... Qu'importe. Quoiqu'en dise la science, tout ce qu'on voit de l'extérieur ce sont ces bêtes placides et violettes, entièrement absorbées par le décompte des brins d'herbe, ou par l'observation des particules de poussières dorées. Sans les brusques flatulences qu'elles lâchent, on oublierait totalement leur métabolisme si particulier.


(-Beuuurk, tu veux dire qu'elles pètent ?!
-Bien sûr. D'où tu crois qu'elle vient, cette bonne odeur de chocolat qu'on sent dans les chocolateries ?)

Tous les matins et tous les soirs, les écrémeuhs vont se faire traire à l'étable par des hordes de capumains. A la base sélectionnés pour la couleur violette de son pelage, ils se sont vite rendus indispensable avecs leurs trois mains habiles. Une main pour tenir le seau, une pour le pis, et une troisième pour flatter l'animal ; en quelques minutes, l'affaire est dans le seau, et hop-là ! Changement de bête ! Un véritable ballet chorégraphié que ces petits singes qui sautent d'une place à l'autre, font des roulés-boulés et des pirouettes entre deux traites ! Et vas-y que je te saute entre les cornes, et que je fais un salto sur le dos de la suivante, hop attention à mon seau bougre de macaque , retiens tes entrechats, on a du travail à faire ! L'esthétisme en plus de la rentabilité ; leur salaire est amplement justifié.

(-Tu veux dire qu'on emploie des pokemon ? Ils ont un salaire ?!
-Ils touchent des cacahuètes. Chocolatées pour les primes.)

Sitôt la traite finie, on appelle les bekipans. Ce sont ces gros patauds d'oiseaux qui assurent le transport ; leur bec hypertrophié leur permet de transporter plusieurs litres bien à l'abri des intempéries.
Les ouistitis chargent le précieux liquide, vérifie l'étanchéité des bidons et vole ma po... vole ma mouette !
Les volatiles s'envolent à tire d'aile jusqu'à l'aire de réception de l'usine voisine. Le plus dur pour eux est l'atterrissage ; déséquilibrés par leur bec lourd, il arrive qu'ils se crashent à l'arrivée. C'est pour cela que les sols de cette zone sont tendus comme des trampolines ; en cas de chute, vlaf ! Voilà l'oiseau qui reprend son essor et peut retenter de reprendre doucement contact avec le sol.


(-Soit dit en passant, on utilise le même mécanisme pour faire les milk-shakes... Mais je te raconterai ça une autre fois, d'accord ?)

Le lait est ensuite transporté par des pifeuils jusqu'à la salle de mélange. Arrivés là, ils arrivent devant une gigantesque cuve au fond de laquelle se trouvent une couche de sucre de mystherbes qui sont des bêtes raves et, par dessus encore, des éclat grillés et concassés de fèves de Noadkokolatier.
Et hop ! Le lait crémeux est versé d'un seul coup. Le sucre se dissout doucement dans la masse crèmeuse alors que les éclats font quelques bulles puis viennent mollement voguer à la surface.


(-Beurk, on dirait les soupes de maman !
-Attends de voir la suite.)

Pour lier le tout, on fait venir des camerupts en période de chaleur, qu'on place sous la cuve. Ils doivent donner de toute leur ardeur pour faire chauffer le mélange et que le chocolat puisse commencer à exister en tant que tel.

(-Et le castorno, il met le chocolat dans le papier d'alu...
-Ah non, les castorno ne s'occupent que des guimauves. Fais un peu attention ! )

Et on ne reste pas inactif du coté de la marmite : on améne l'agitateur. Ou l'agitateuse ; les chocolatiers ne sont pas sexistes. Dans la cuve, on laisse tomber un (ou une) léviator dressé. Plouf ! Le pokemon s'étonne, s'agite, remue en tous sens pour découvrir son nouveau domaine ; les fèves de cacao virevoltent dans son sillage, coulent et émergent, commencent à timidement se lier avec leurs nouvelles amies les protéines de lait.

(-Euh, papy, on met vraiment un leviator à nager comme ça dans le chocolat ? Vraiment ?
-Si je te le dis.
-Maiheu... Je veux dire... c'est pas très.. Enfin, comment il fait si... Euh. Enfin, tu vois quoi ...
-Tu n'as jamais entendu parle de "crotte en chocolat" ?)

Puis arrive le véritable moment du mélange, le moment sans lequel le chocolat ne serait pas la friandise douce, sucrée et aérienne qu'on connait.
La Cascade.
Le léviator lance l'attaque Cascade. Le lait s'envole en masses compactes et retombe en trombe, faisant buller et mousser le chocolat. Les gouttes s'envolent en tout sens avant de retomber comme la plus douce pluie qu'on puisse imaginer. Les derniers résidus de cacao, vaincus par cette puissance de fouet, déclarent forfait et c'intégrent définitivement au mélange.
Mais le léviator n'arrête pas pour autant ; c'est une tornade de douceur qui file dans les airs, un tsunami de mousse qui éclabousse les murs. Sans dessus dessous, le chocolat volte en tout sens et s'agite, jusqu'à que le léviator épuisé s'effondre dans sa bassine tiède.
Le chocolat est prêt à être dégusté.


(-Mais pourquoi un léviator papy ? C'est un monstre surpuissant ce pokemon ! Pourquoi le mettre dans une cuve de chocolat ?!
-Parce que si on avait pris un magicarpe il n'aurait fait que trempette, quelle question !)

On enlève de la cuve le léviator grâce à une gigantesque écumoire, puis on envoie le chocolat par un réseau de canalisations jusqu'à la salle de préparation finale. Pour les chocolats parfumés, on y ajoutera de l'extrait de banane de tropius ou de miel d'apireine par exemple. Ou on le fourrera des truffes déterrées avec soin par des gruikis. Ou encore on le fera couler et solidifier autour de ces bâtons d'esquimaux qui font tant plaisir aux enfants...
Ne reste plus qu'à mettre en paquet et tablette l'aliment qui fera tant rêver les petits et les grands...


-_-_-_-_-_-_-_-

-Et c'est ainsi qu'est vraiment fait le chocolat, Charlie.

Roald s'arrêta doucement, la bouche sèche d'avoir tant parlé.

Sous les couvertures, cela fait longtemps que les reniflements et les larmes ont cessé. L'adolescent, au début plein de soupçons, s'était fait happer par les paroles de son ainé et laissé aller à imaginer ce monde si haut en couleurs qui lui était décrit.

Le laissant émerger tout doucement, le grand-père se releva de sa chaise. Il s'étira avec précaution – Arceus que cette hanche lui faisait mal – et se dirigea vers la porte pour sortir.

Alors qu'il allait sortir de la pièce, une petite voix l'interpella encore une fois :

-Papy ?

-Oui ? Souffla-t-il.

-Je voulais savoir... tout ce que tu m'as dit, avant, c'était vrai ?

-Aussi vrai qu'un arc-en-ciel, l'assura Roald.

-Tu as vraiment travaillé dans une chocolaterie ?

-Ca a de l'importance pour toi ?

Roald ferma la porte dans le silence songeur qui suivit sa réponse. En relevant la poignée, il crut entendre un faible "Merci", mais ne s'arrêta pas pour autant. Certaines choses devaient être dites, mais il n'y avait pas besoin de s'appesantir dessus. Les dire suffisaient.

Dans sa chambre, même s'il savait qu'il n'était pas entendu, Charlie répéta sa phrase : "Merci de ne pas être tout gris et racorni papy. Merci..."