L'astre perçait tout juste l'aurore que déjà, ils allaient en forêt. Ils avaient accepté d'aider le vieux bûcheron, car son apprenti était tombé malade l'avant veille et devait rester au lit. D'autre part, comme l'hiver approchait à grand pas et qu'il leur fallait du bois, ils espéraient que l'homme bossu leur en fournirait gracieusement quelques pièces. Ce n'est pas que le métier de bûcheron était rude, mais il fallait tout de même une certaine endurance. Les hommes ne coupaient pas eux-mêmes les troncs. Ils laissaient ce travail à des Pokemon. Il devaient toutefois prendre la hache afin de former leurs auxiliaires à la coupe. Ainsi, le vieux bûcheron était entouré de trois Insecateurs. La présence des hommes dans cette tâche demeurait nécessaire. En effet, le moindre incident causé par le tranchant déguisé de la lame contre un innocent coûterait très cher au vieux bûcheron. Les hommes devaient aussi porter les troncs, à défaut de trouver un Pokemon assez robuste dans la vallée, capable de supporter les lourdes charges, ou de s'en offrir un au prix scandaleusement élevé.
De manière générale, les habitants du village aimaient rendre service. Dans la mesure où leurs aptitudes le leur permettaient, ils n'hésitaient pas à aider leur prochain dans sa tâche, si harassante soit-elle. Ils le faisaient par humanité, la plupart du temps sans attendre de salaire. Parfois, ils s'étonnaient des bonnes intentions de leur hôte. La mentalité des hommes était ainsi, dans la vallée. Loin des grandes villes, aux chaumières sales et serrées, où l'on attend la première occasion de dérober ce qui appartient à autrui, les gens du village et de la vallée se faisaient entièrement confiance et ouvraient leur maison aux rares voyageurs.
Lorsqu'ils redescendirent la vallée, un soleil intense les éblouit. Ils marchaient calmement, comme pour reprendre leur souffle après un dur labeur. Ils sentaient leur cœurs battre à travers leurs mains rougies. Comme ils l'avaient espéré, le sympathique vieil homme leur avait donné des fagots de bois, qu'ils stockeraient à la ferme en attendant l'hiver. À présent, ils prendraient leur repas, puis ils iraient s'occuper des Ecremeuh de leur père.
Ils entrèrent dans la demeure en enlevant leur sandales, comme il est de coutume de le faire, mais il leur sembla ressentir un manque. D'habitude, à cette heure-ci, toute la bâtisse s'enveloppait d'un doux parfum d'amande et de curie. Ils entrèrent. Père était certainement encore occupé aux champs. Il n'a pas dû voir le temps passer. En circulant dans la maison, en ouvrant les portes coulissantes, il percevaient pourtant quelque chose d'anormal. La ferme, leur sembla-t-il, était calme ce jour là. On n'entendait aucun bruit d'eau ruisselante, pas plus que le bruit d'un seau ou ceux des pas de leur père. Haku et Yume commencèrent à s'inquiéter, car depuis leur naissance, ils ne se souvenaient pas d'un seul jour qui ne fut pas bercé par les bruits de la ferme. Les deux garçons s'activaient. Ils regardaient dans toutes les pièces de la maison, aussi silencieusement que des chats. Ils sortirent enfin, pour vérifier dans la grange, si leur père ne s'y trouvait pas. Tout à coup, Yume se figea. Son frère le rejoignit et remarqua sur son visage l'horrible expression. Il tourna lentement la tête et se figea à son tour.
Au milieu des ballots de paille gisait une main. Les frères s'avancèrent aussi doucement qu'ils le pouvaient. Ils espéraient, au fond d'eux, que la réalité serait autre que ce qu'ils imaginaient. En passant la tête au dessus de la paille, ce qu'ils redoutaient s'offrait à eux. Leur père était immobile, plongé dans un profond sommeil. Son expression était tranquille, la rudesse de ses rides avait disparue. Yume versa une larme le premier. Ce sommeil dans lequel était son père l'avait emporté pour toujours.
Haku prépara le repas tandis que son frère dressait la table. Les garçons s'assirent face à face, comme à leur habitude. Tout se déroula en silence, parfois brisé par un sanglot. Lorsque la vaisselle fut rangée, ils sortirent. Au fond du jardin, ils installèrent celui qui les avaient élevés. Ils ornèrent la pierre de fleurs avant d'y graver son nom « Noka Famugawa ». Ils se mirent à genoux devant le petit jardin, comme le faisait leur père jadis. Ils attendirent un long moment avant de prononcer une parole.
- Que vas-tu faire désormais ?
- Je ne sais pas, Haku. Nous sommes orphelins, sanglota Yume. Je ne pensais pas que cela arriverait ainsi.
Haku regarda son frère sans rien dire. Il comprenait. Il se tourna de nouveau vers le petit jardin, puis abaissa la tête.
- Yume, te souviens-tu de notre discussion sur les rêves ?
- Bien sûr.
- Je pense... Je pense qu'il est tant pour moi de partir à la conquête de mes rêves.
- S'il te plait mon frère, je ne souhaite pas discuter de cela maintenant. Veux-tu vraiment nous quitter, notre père, la ferme et moi ? Questionna Yume après un silence.
- Il le faut. Comprends-tu, je me suis fixé l'objectif d'entreprendre tout ce qui est nécessaire à la vie que je souhaite mener et pour ce faire, je dois vous quitter.
Le frère aux cheveux blanc se leva, puis referma la porte du jardin. Sa chevelure se décorait à présent de reflets jaunes.
- Tu ne peux pas partir voyons. La vie que nous menons ici ne te plait plus ? Puis, Haku, nous avons toujours tout fait ensemble. Même les gens du village disent à quel point nous sommes unis !
- Eh bien il est tant de changer !
Haku marqua une pause, conscient de ce qu'il venait de dire.
- Je suis désolé. Avec la... Mort de notre père, j'ai dû m'emporter. Bien entendu, j'aime notre vie au village, mais maintenant que nous ne sommes qu'à deux, rien ne sera jamais plus pareil. Je préfère partir, Yume, avant que...
Haku stoppa ses paroles. Il aurait voulu dire « avant que je ne finisse par me morfondre sans avoir goûté à la liberté du monde extérieur », mais il constata que son jumeau, lui, était déjà en état de choc. Il résolut de quitter la vallée dans l'après midi. Il emballa quelques affaires et se munit de vivres, puis il souhaita bon courage à Yume. Les deux frères s'embrassèrent longtemps et chaleureusement. « reviens vite ».
...
Yume avait décidé de rester au village. Durant les jours qui suivirent le départ de son frère, il continua à s'occuper de la ferme. La nouvelle avait rapidement circulée. Les habitants déposaient de nombreux présents pour le garçon et venaient se recueillir devant le petit jardin. Ils proposèrent leur aide pour les travaux et les tâches agricoles. Yume accepta volontiers.
Le garçon se rendait lui-même au jardin, dés qu'il le pouvait. Souvent, il parlait à son père, sans prononcer aucun mot. Il lui disait que la maison était vide, que désormais, il vivait seul. Il racontait à son père qu'il lui manquait, mais surtout, que l'unicité avec Haku lui manquait. Il était difficile de s'endormir seul le soir, de s'asseoir seul à la table. La gentillesse et la présence des villageois le rassurait, mais l'atmosphère de la maison avait changée.
...
Un jour qu'il avait laissé des villageois s'occuper des tâches importantes, il était parti pour méditer au bord d'un étang. Alors qu'il se recueillait, il se questionna sur le tournant que prenait sa vie. Il se disait que, finalement, il était comme ces larves d'insectes, comme ces Chenipans dont on s'occupe mais qui, en réalité, n'avaient rien pour se défendre une fois seuls. Peut-être, se disait-il, que cela n'était qu'une épreuve pour lui permettre de devenir Chrisacier, plus résistant à une rude vie, faite de manques et de vides.
Les habitants du village avaient à cœur de soutenir Yume, à l'aube de sa nouvelle existence, mais au fond de lui, le garçon se sentait perdu. Comme pour libérer ses pensées, il fit ricocher un petit caillou à la surface de l'étang. Il ria de voir sursauter l'Aracdo qu'il avait réveillé lorsque tout à coup, une douleur se manifesta. Elle survint comme la brûlure d'une flamme. Le garçon aux cheveux blancs se tint le bras et serra un instant les dents, puis le mal s'enfuit. Il tenta un deuxième ricoché. Cette fois, le caillou sembla se mouvoir plus vite. De plus, il fut interloqué par une sorte d'aura rougeâtre qui entourait son bras. Il recula légèrement et, après une légère hésitation, tenta un troisième ricoché, sans caillou. Yume fut stupéfait par ce qu'il venait de faire. Lorsqu'il avait jeté sa main vers l'avant s'était créé une balle de flamme. À présent, elle fonçait vers la surface de l'eau, au contact de laquelle elle s'écrasa, avant de s'enfumer.
À ce moment, son expression fut partagée entre la fascination de ce qu'il avait accompli et la peur d'une situation inconnue, de quelque chose qui venait de se créer en lui. Il resta un moment immobile et constata que certaines parties de son corps vibraient intérieurement. Ses cheveux reflétaient à présent le violet. Il regarda encore une fois l'étang. De la fumée s'en élevait encore. Il craignait ce qu'il avait fait. Comme pour échapper à la mort, il se mit à courir aussi vite qu'il put. Plusieurs fois, il chuta dans la forêt et s'écorcha avec des ronces. Il ne fut rassuré que lorsqu'il pénétra de nouveau dans le village.

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Note:Pas énormément pour ce chapitre. Il y a beaucoup de personnel.Le bûcheron m'a été inspiré par un épisode de
Pokemon Jotho, où Sacha aidait un pauvre apprenti à retrouver ses Canarticho, près d'Écorcia.
Toujours
Éragon. La marque sur la paume de Yume est inspiré de celle d'Éragon en tant que dragonnier. Chaque fois que cette marque se déclanche se produit une sensation de picotements ou de chaleur. La marque est aussi sensible aux émotions. Si Yume est trop énervé, sa main lui fera mal. Contrairement à Éragon, la marque de notre héros est plus petite et représente une flamme, tantôt rouge, tantôt bordeaux ou orange…