Coupure
Le jour venait de se lever sur Kanto.
Tout Azuria était déjà à l'œuvre pour réparer au maximum les dégâts. Les lignes de téléphone étaient coupés et l'électricité encore très capricieux, ce qui rendait toute demande de renforts impossible pour le moment.
Le groupe de dresseurs travaillait aussi à rassembler les déchets, à accomplir les premiers travaux de reconstruction et surtout aménager les endroits les moins touchés afin de permettre à tout le monde de dormir convenablement.
Ils avaient tous passé une très longue et très pénible nuit blanche. Revan avait tout raconté à Frantz du début à la fin, ce dernier mit un long moment pour réaliser ce qui c'était passé.
Les Pokémon du dresseur avaient participé aux efforts de la ville. La beauté même, Suicune, aidait à transporter les matériaux, Mangriff et Papilusion s'étaient associés pour transporter et découper les matériaux de base, Carapuce aidait à clouer les planches préparées par ses compagnons en chantant une chanson de Hoenn. Ce carapuce avait effectivement la particularité de parler l'Humain couramment et ce grâce à un apprentissage long et difficile. Archéomire, devant son apparente inutilité décida de servir de dessous de plat volant pour ravitailler les travailleurs en Chocolat chaud. Seul Ronflex, qui était entré dans une phase de sommeil, ne participait pas.
L'infirmière Joëlle d'Azuria rejoignit Revan et lui confia les cinq pokéball contenant son équipe complète, à nouveau en pleine forme.
« Mais… vous ne m'avez pas confié vos six pokéball Revan ! » dit Joëlle en désignant une Ball étrange fixée à la ceinture du dresseur.
- Hein ? Ah non celle-ci ce n'est pas la peine. S'écria t-il en s'empressant de la cacher sous un pan de son manteau.
- Je peux m'en occuper tu sais…
- Non non ça ira ! assura Revan… rigide.
- Bon… comme tu veux… »
Les yeux de Revan étaient fixes et son expression tendue…
« Personne ne doit la toucher… »
Frantz qui avait tout vu s'approcha de lui et chuchota à son oreille
« Moi à ta place je la laisserais dans le PC…
- S'il te plaît… laisse-moi… » répondit Revan, encore tendu.
Frantz s'éloigna, résigné.
Reprenant ses esprits progressivement, il s'assit un peu à terre… contemplant le ciel d'un air songeur. Il saisit doucement la pokéball qui lui restait à la ceinture. Elle se détacha avec un léger « clic » sonore. Le dresseur la prit soigneusement en main, appuya sur son bouton central et l'admira un peu. C'était un ball comme il n'en existait que peu à travers le monde. Son dresseur aimait tellement sa couleur blanche immaculée… lui donnant un aspect d'une grande pureté.
Mais bien vite il la rangea en sécurité sous son manteau noir, se releva et lança ses pokéball en l'air. Faisant surgir les membre de sa team de leur ball. Geijiku sortit de sa Pokéball avec une énergie retrouvée… mais avec une rage décuplée de n'avoir pas réussi à relever le défi qui se présentait à lui. Il resta assis, les bras croisés sur ses genoux, à méditer sur tout ce qui s'était passé. Les autres se joignirent aux bras armés de la ville. Shini le Dimoret, Kyùran le Drattak, Tlaloc l'Aquali, et Saphir, le léviator fétiche de Revan ; tous se mirent au travail afin de réparer la ville comme ils le pouvaient.
Joëlle d'Argenta avait installé un pokématos sur la place du village et avait activé la Radio. Elle avait tenté une nouvelle fois d'utiliser la fonction téléphone mais les lignes ne transmettaient plus. La musique entraînante de la Fanfare Pokémon motivait les troupes et les travaux avançaient bien.
Soudain, à 11h24, selon l'horloge électronique, la radio cessa de fonctionner. L'un des villageois tenta de voir si le défaut ne venait pas du matériel mais bien vite il fit part de sa déduction : La radio fonctionnait parfaitement… seulement… les ondes n'étaient plus émises.
« Si la Tour Radio a cessé d'émettre c'est mauvais signe ! murmura Frantz, en intense réflexion. Peut-être encore la Centrale qui déconne.
- Impossible… tu as bien vu on a encore du courant dans les maisons peu touchées… répondit Revan avec certitude.
- Alors ça veut dire… commença Joëlle
- …Que la Tour Radio a cessé d'émettre ! acheva Revan.
*******
Une pluie diluvienne tombait sur Lavanville. Des éclairs déchiraient le ciel dans un vacarme assourdissant et des flash lumineux aveuglants. Il semblait que c'était une musique épique jouée par le ciel pour marquer ce jour d'une pierre noire… comme toutes celles qui figuraient dans le célèbre mausolée du vieux Fuji.
Le même scénario de destruction qu'à Azuria avait été appliqué. Toutes les denrées et les personnes étaient rassemblées sur la place principale. Parmi les captifs, le vénérable Monsieur Fuji, dont la longue barbe blanche témoignait de son grand âge, tremblotait. Son visage par contre témoignait d'une grande sérénité et un grand calme.
Jeanne, elle, suivie de son Majaspic, arpentait les escaliers de la célèbre Tour Radio de Kanto. Au fur et à mesure de sa montée elle croisait plusieurs de ses hommes affairés à pirater les ordinateurs et tout le matériel électronique. Arrivée aux derniers escaliers elle croisa son bras droit qui, aidé de son Siderella coupait les câbles des systèmes d'urgence et d'alimentation de l'émetteur à haute Fréquence.
« Alors Gilles ? Comment ça se passe ?
- Aaaaaaspic ?! fit le pokémon de la dresseuse, curieux.
- Comme prévu Jeanne. La Tour vient de cesser d'émettre… tout Kanto sera privé de ses ondes radio.
- Parfait ! Je suis contente de vous tous. Je vais au dernier étage… veille à ce que personne n'entre derrière moi.
- Très bien Jeanne.
- Spic !! » tonna Majaspic pour couper court à la discussion, suivant sa maîtresse.
Gilles, d'un geste nonchalant tendit le bras vers la cage d'escalier pokéball en main et en laissa sortir son Bétochef. Se remettant au travail parmi les fils et les câbles il déclara d'une voix plate :
« Personne ne doit passer… monte la garde.
- Chef ! » s'écria le pokémon se mettant en position de garde.
Jeanne finit de gravir les dernières marches et parvint dans la dernière salle de la Tour. Elle se constituait d'une pièce étroite finissant sur trois plaques noires. Jeanne marcha vers elle, joignit les mains quelques secondes puis posa un genou à terre.
« Pardonnez-nous de déranger votre repos éternel. Nous oeuvrons pour la Justice et le bien du monde. Veuillez-nous pardonner. »
Une douce brume apparût soudain autour d'elle et de son pokémon. En son for intérieur elle distinguait une petite voix lointaine qui murmurait une phrase inaudible… Sur la plaque noire centrale était inscrit en haut-relief :
Ci-gît Ossatueur
La mère d'osselait
Qui fut injustement
Assassinée par des malfaisants
Son esprit repose maintenant en paix
*******
« Mais on a besoin de vous ici ! Déclara Joëlle d'Argenta et d'Azuria, simultanément.
- Si la tour a cessé d'émettre il faut aller voir sur place ! s'écria Revan
- Il a raison… ce n'est pas normal. Confirma Frantz.
- Et… et comment vous allez y aller ? s'inquiéta Joëlle d'Azuria.
- Sur le dos de mon Kyùran…
- Tu es sûr qu'il va supporter notre poids ?
- Le mien oui… le tien… m'enfin disons qu'on avisera… j'ai pas d'autre pokémon volant…
- Moi non plus…
- Ben voilà donc devant l'urgence… faut faire avec. Tu te sens prêt Kyùran ?
- Raaaaaah ! affirma Kyùran, motivé !
- Alors allons-y »
Les deux dresseurs enfourchèrent le pokémon avec hésitation. Revan tapota très gentiment son Pokémon afin de finir de le motiver. Drattak tenta de s'envoler à grands mouvements d'ailes. Un énorme courant d'air se créa, bousculant au passage quelques feuilles volantes. Malheureusement il ne parvint à s'élever que de quelques centimètres : la charge était trop lourde.
« Je crois que ton Pokémon n'y arrivera pas… commenta Joëlle d'Argenta, sarcastique.
- Si ! Tu vas voir… » affirma Revan.
Il sortit de sa poche un petit flacon à l'allure médicamenteux. Il l'ouvrit et donna le contenu à boire à Kyùran. Le pokémon dragon sembla revitalisé, prêt à en découdre avec des ennemis qui n'étaient pas encore présents.
« Tu lui as donné quoi ? s'enquit Joëlle.
- Des protéines… fit Revan en remontant sur le dos de son dragon.
- Comment tu as eu ça ?? demanda Frantz.
- Non mais j'ai eu ça en cadeau quand j'ai acheté mon matériel à Hoenn…
- Je vois… »
Au signal de son dresseur, le dragon retenta de décoller. Il parvint à s'élever de quelques mètres puis s'écrasa à nouveau à terre.
« Il faut te mettre à l'évidence… tu n'y arriveras pas… ricana Joëlle, bien contente d'assister à un tel spectacle.
- Oh ça va hein !! s'écria Revan en donnant un coup de pied à un caillou. C'est bon ! »
Le dresseur rappela son Pokémon dans sa Sombre Ball et sans rien ajouter prit le chemin de la Route 5
« Où tu vas comme ça ? cria Joëlle, visiblement vexée de ce départ.
- Puisqu'il n'y a pas moyen d'y aller par le Vol j'y vais à pied !
- Hey ! Moi j'aime pas marcher… ajouta Frantz , déconcerté
- Tu préfères peut-être rester ici ? » demanda Revan qui s'était retourner pour poser sa question.
Frantz se retourna… mais à voir l'aura de colère qu'entourait Joëlle il s'empressa de rejoindre son ami.
« Non non, je viens avec toi… balbutia le dresseur.
- En plus je ne vois pas pourquoi tu te plains… si tu n'as pas de pokémon Vol, comment tu es venu jusqu'à Azuria ?
- Eh ben heu… c'est… beh… co…commence pas à m'emmerder aussi…
- Revan !!! Je te hais ! Tu aurais pu au moins dire au revoir ! hurla Joëlle.
- Ouais, moi aussi je t'aime ma belle ! » lança le dresseur au loin sans même se retourner.
Les deux dresseurs s'éloignaient…petit à petit ils ne devenaient que de petites silhouettes lointaines. Joëlle était encore plus rose que son leuphorie et son regard fixait toujours l'horizon.
« Admets-le Joëlle… Tu l'aimes bien le Revan, non ? murmura la championne en faisant des clins d'œil.
- Oh ça va hein… d'abord pas du tout ! Et puis j'ai pas besoin des conseils de la croqueuse d'hommes.
- Mais… ce n'est pas de ma faute si je suis si mignonne…
- Ca veut dire quoi ça ??? grinça Joëlle »
*******
Jeanne descendit les dernières marches de la Tour Radio. Elle rejoignit la place centrale du village de montagne qu'était Lavanville, toujours suivie de son Majaspic qui jetait un regard perçant sur la foule de ses yeux rubis. Les denrées et tout le matériel utilisable disponible avaient été rassemblés et entassés. Suivant à la lettre le même rituel qu'à Azuria, la dresseuse mit Feu au tas. Elle leva les bras vers le ciel en implorant les Dieux de lui venir en aide dans sa quête de Justice et d'Equilibre.
Un des sbires en toge noire se pencha de côté vers l'oreille de Gilles.
« C'est quoi la suite du plan ?
- Tu le fais exprès ou quoi ? On doit se rendre à Safrania maintenant.
- Mais vous ne trouvez pas ça un peu facile ?
- Si parce que pour le moment on est encore sous l'effet de surprise… mais il faut rester sur nos gardes.
- Dites, j'ai entendu dire qu'on irait à Safrania à pied ?
- Oui… soupira Gilles. Parce que les Déflaisan sont trop fatigués de nous porter…
- Ah d'accord… »
« Pas dommage » pensa Gilles, épuisé de tout le temps ré-expliquer leur plan à ce jeune novice.
Soudain sortant de derrière la Tour, trois duos de sbires traînèrent deux jeunes filles et un jeune garçon jusque devant les pieds de Jeanne, tous trois poings liés. Ils étaient mal en point, leurs vêtements déchirés et leur mine encrassée prouvait une défaite sévère.
L'un des sbires s'avança vers sa chef.
« Jeanne, voici trois dresseurs qui ont tenté de nous prendre à revers pour défendre la ville… ils n'ont pas fait long feu.
- Félicitations… bien joué. »
Elle posa un genou à terre et prit une des deux filles par le collet pour mettre son visage face au sien. Elles étaient si proches que l'une pouvait ressentir le souffle de l'autre. Celui de la jeunette était saccadé et lourd.
« Vous pensiez vraiment venir à bout de notre groupe aussi facilement ? Pauvre naïfs que tu es…
- Kan…Kanto est une… une région libre ! murmura la fillette visiblement endolorie et terrifiée.
- Oui… libre de faire n'importe quoi oui… de jouer avec le feu et de se permettre de jouer aux apprentis sorciers… »
Elle lâcha le visage de la fille… la faisant tomber à terre dans un choc violent. La dresseuse d'Unys s'écarta d'elle, et dans la lueur du feu et dans le vacarme des éclairs elle déclara d'une voix sombre et profonde :
« En route pour Safrania… Nouvelle étape vers une ère plus saine et plus juste. »
La troupe noire laissa la ville dans l'état même sans se préoccuper du reste et fit route vers la ville centrale de Kanto. Ce n'est qu'après qu'ils fussent loin que les trois jeunes furent déliés par les villageois encore sous le choc.
Parmi les rangs des sbires noirs, l'un d'entre eux demandait à tous ses camarades :
« Mais au fait… on va où ??? »