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L'AVENTURE de Zekrom Le Supreme



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» Auteur : Zekrom Le Supreme - Voir le profil
» Créé le 02/03/2011 à 13:48
» Dernière mise à jour le 02/03/2011 à 13:48

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LYSA
Lysa dormait. Les jambes empêtrées dans le fatras des draps trempés de sueur, elle se reposait depuis onze heures déjà, le visage enfoui dans l´oreiller. Ses cheveux bleu turquoise étaient déployés sur la couette blanche. La bouche entrouverte, elle ronflait légèrement.
Sélès poussa un lourd soupir et tenta de secouer son amie pour la réveiller. Sans résultat. Lysa se retourna dans son sommeil en grognant. Sélès repoussa les cheveux rouge vif qui lui barraient le front, puis regagna son lit à contrecoeur. Lysa lui avait promis qu´elle l´emmènerait chez son frère ce soir. La jeune fille ne pouvait pas quitter les murs du couvent de Meltokio sans être accompagnée et son amie était suffisamment responsable pour que les pasteurs lui fassent confiance. Mais elle n´était pas fiable. Une fois de plus, il faudrait reporter leur sortie nocturne à un autre jour.
Sélès était âgée de seize ans. Ses cheveux étaient rouges, sa peau, très blanche, et ses yeux, d´un vert tirant sur le bleu sombre. Physiquement, elle était plutôt malingre, et le peu d´argent qu´elle recevait de sa famille ne lui permettait pas de s´acheter des vêtements dignes de ce nom. C´était une adolescente timide et effacée, pas vraiment sympathique, pour ne pas dire franchement désagréable. Les longues années qu´elle avait passées enfermée en compagnie de bonnes sœurs séniles n´avait pas contribuées à améliorer son caractère.
Sélès était la sœur de l´Elu de Tesséha´lla. C´était sa seule fonction : aux yeux du Pontife, du Roi et de son entourage, elle n´existait pas en tant que personne, mais en tant que « petite sœur de Zélos ». Elle était surprotégée, couvée, choyée par l´Eglise de Martel qui voyait en elle la roue de secours idéale si l´Elu venait à mourir au cours du périple de la régénération. Sélès était atteinte d´une maladie grave qui inquiétait grandement les médecins et obligeait le Pontife à la maintenir enfermée afin d´assurer sa sécurité. Par conséquent, elle n´avait, pour ainsi dire, jamais quitté les murs de Meltokio.
Durant des années, Sélès s´était demandée si la vie avait vraiment un sens dans les conditions actuelles. Elle ne pouvait pas sortir. La mère supérieure du couvent où elle vivait la détestait proprement et soutenait qu´elle marchait sur les traces de son demi-frère. Le demi-frère en question ne venait jamais lui rendre visite. Elle avait un caractère irascible qu´elle ne parvenait pas à maîtriser. Personne ne l´aimait.
Et puis elle avait rencontré Lysa. Dans un endroit assez improbable, d´ailleurs : les cuisines du couvent de Meltokio.
Le couvent de Meltokio avait été construit à côté de la cathédrale, dix ans auparavant. Petit à petit, des femmes de tout âge, vivant principalement sur le continent de la cité, étaient venues s´installer au couvent. Leur ferveur était répandue dans tout Tesséha´lla. Elles étaient réputées pour être particulièrement dévouées et n´hésitaient pas une seule seconde à aider les pèlerins qui passaient par Meltokio. Sans parler de leur prières et de leur bénédictions, si puissantes qu´elles auraient pu arrêter le cours d´un fleuve.
Mais les habitants de la ville susdite savaient qu´il ne s´agissait que d´une illusion : les sœurs en question étaient de vraies garces marinant dans un bain de rumeurs fortuites qu´elles créaient elles-mêmes lorsqu´elles quittaient les murs du couvent. On disait qu´elles étaient plus aptes à débiner leur prochain qu´à lui tendre la main. La mère supérieure maintenait ses filles à la baguette, qu´elle utilisait souvent pour cogner dans les chevilles des sœurs désobéissantes.
Le couvent était un endroit extrêmement protégé. Les pasteurs, ne voulant pas s´attirer la colère de la déesse vénérée, réclamaient chaque année une aide de la part du Roi afin que des gardes soient maintenus à l´entrée du couvent. La nourriture, bien qu´immonde, était fournie en abondance. Le chauffage était maintenu pendant l´hiver, ce qui relevait carrément du miracle. Bref, contrairement aux autres abbayes du continent, les conditions de vie étaient passables. Pas géniales, mais passables.
Aussi, lorsque Sélès, était née, on avait tout naturellement pensé à l´installer ici.
Elle habitait une cellule étroite et crasseuse où les livres s´entassaient jusqu´au plafond. Il fallait bien se distraire, et elle persistait à amasser les bouquins malgré les remontrances de la mère supérieure qui lui conseillait souvent de se tourner vers des activités plus propices au développement spirituel.
Lysa, la meilleure amie de Sélès depuis qu´elle l´avait sauvée des griffes de la cuisinière qui menaçait de lui faire bouffer son ridicule chapeau si elle ne terminait pas son assiette, n´était pas une couventine. Bien au contraire. C´était une vagabonde, une Demi-Elfe errante qui avait grandi dans le village d´Exire jusqu´à l´âge de dix ans. Le jour de son dixième anniversaire, Lysa avait déclaré que si les Demi-Elfes contràlaient la magie, ce n´était sûrement pas pour rester suspendus en l´air durant des siècles. Et elle s´était enfuie. Depuis, elle parcourait le monde, seule ou accompagnée de caravaniers, de mercenaires ou encore de brigands. Elle était née de parents inconnus et elle s´en moquait complètement. À ceux qui se montraient un peu trop inquisiteurs sur la nature de ses origines, elle répondait invariablement qu´elle était la fille d´une prostituée et d´un assassin. Généralement, cette réponse clouait le bec aux questionneurs.
Lysa, à force d´entraînement acharné au cours de ses voyages, maîtrisait parfaitement l´art du combat avec des lames de coude, lesquelles avaient été forgées par Altessa en personne. Néanmoins, elle savait que ce n´était pas suffisant. Elle voulait plus. C´était la raison de ses fréquents voyages à Meltokio.
Aujourd´hui, Lysa était bien décidée à mettre la main sur ce bidule dont le mercenaire qu´elle avait rencontré récemment lui avait parlé : une exlèrphe… Ou une exsphère, peut-être. Oui, c´était ça. Une exsphère.
Mais, pour le moment, Lysa dormait, ce qui ne risquait pas de faire avancer ses recherches.
Amère, Sélès se glissait sous la couette, lorsqu´un grognement prolongé indiqua le réveil de Lysa. Celle-ci, la bouche pâteuse et les jambes en coton, se dressa sur son lit en regardant nerveusement autour d´elle.
…quot; Qu´est… bafouilla-t-elle. Qu´est-ce que je fais ici ?
…quot; Tu es venue ici hier soir, répondit Sélès en se levant. Tu t´es endormie direct.
Elle ajouta d´un air accusateur :
…quot; Je croyais que tu accepterais de m´emmener chez mon frère, mais tu ne t´es pas réveillée à temps…
Sélès détestait son demi-frère mais, chez lui, elle était libre de manger tout ce qu´elle voulait et de se vautrer sur le canapé si l´envie lui en prenait. Zélos vivait dans un luxueux manoir, qui, aux dires des mauvaises langues, ressemblait plus à un hôtel de passe qu´à la maison d´un noble Elu. À la différence près que les filles qui y passaient ne faisaient pas ça pour de l´argent.
Lysa murmura un vague mot d´excuse et jeta un coup d´œil sur l´horloge posée sur la table de nuit. Celle-ci indiquait placidement 22 h 30. Il n´était pas tard, et elle avait largement le temps de conduire Sélès chez son frère avant de commencer ses recherches sur les exsphères. Sous le regard surpris de son amie, Lysa enfila ses bottes et s´enveloppa dans sa cape de voyage noire. Elle s´approcha ensuite de la fenêtre et fit signe à Sélès de la rejoindre.
…quot; Viens, ordonna Lysa. On y va.
…quot; Je n´ai pas le droit de sortir du couvent à cette heure, geignit plaintivement Sélès. La mère supérieure va me tomber dessus !
…quot; La mère supérieure n´en saura rien du tout.
Sélès croisa religieusement les bras sur sa poitrine et fit la moue :
…quot; Elle s´est installée dans la chambre près de l´entrée exprès pour nous surveiller. Et même si elle est vieille, elle a l´oreille fine. Elle nous entendra sortir.
…quot; Rien à foutre de la vioque, répliqua la Demi-Elfe.
Elle fit une pause, puis ajouta avec un grand sourire :
…quot; On va passer par la fenêtre.
Sélès ravala un cri. Elle contempla son amie en silence, puis elle fit lentement tourner son index contre sa tempe gauche pour lui montrer ce qu´elle pensait de sa santé mentale. Lysa haussa les épaules.
…quot; Vous, les Humains, vous êtes si froussards…
…quot; Ce n´est pas de la peur, c´est du bon sens ! Tu es peut-être résistante, mais pas moi ! Si je saute par la fenêtre, je vais me tuer, pauvre crétine !
…quot; Qui parle de sauter ?
Sur ces mots, Lysa s´empara de son sac posé près du lit, fourragea quelques secondes à l´intérieur et en sortit ses lames de coude, longilignes et finement taillées. L´une d´entre elle était relativement courte, tandis que l´autre, très longue, mesurait deux fois la taille de son bras. Les poignées qui permettaient de les saisir étaient entourées de rubans noirs favorisant la prise. Les lames semblaient merveilleusement tranchantes : elles brillaient sous la lumière glauque que diffusaient les bougies. En somme, c´étaient des armes magnifiques. Sélès ne put s´empêcher de leur jeter un regard d´envie.
…quot; Qu´est-ce que tu comptes faire avec ça ? demanda-t-elle.
Lysa posa un doigt sur ses lèvres, puis avança la main vers la fenêtre. Elle écarta les vitres. Un petit vent coulis vint effleurer son visage. Sélès braqua son regard sur Lysa. Elle avait plus ou moins deviné ses intentions mais refusait fermement d´y croire.
Lysa étendit ses bras devant elle, puis, tout en murmurant des phrases indistinctes, prépara son sortilège. Sélès se signa craintivement. Elle était heureuse que Lysa ait les yeux fermées : la Demi-Elfe n´était pas croyante, et elle se moquait volontiers de sa dévotion.
Un cercle lumineux apparu sous Lysa, puis sous Sélès. La jeune fille frissonna. Elle était sur le point de lui demander ce qu´elle s´apprêtait à faire, mais elle se retint, jugeant qu´interrompre le sortilège était une très mauvaise idée.
Brusquement, Sélès se sentit soulevée dans les airs, puis lentement transportée jusqu´à la fenêtre par une force invisible. Elle voulut crier, mais, sous l´effet de la terreur, elle ne put émettre qu´un long râle saccadé. Elle sentait des courants d´air frais glisser sur sa peau et gifler son visage. Ses cheveux volaient au-dessus de sa tête comme une ridicule perruque. Constamment enveloppée par le vent, Sélès sentait ses yeux lui piquer. Elle franchit la fenêtre, puis, très lentement, Lysa la fit descendre jusqu´au sol à l´aide de la magie. Sélès, morte de peur, évita de regarder en bas. Elle flottait à sept mètres au-dessus du sol, entre l´étage où se trouvaient les cellules des sœurs et celui des cuisines. Sélès sentit ses intestins se tordrent violement comme si quelqu´un s´était amusé à tirer dessus. Sa vessie était sur le point de lâcher. Elle serra les cuisses en concentrant ses pensées sur la raclée mémorable qu´elle foutrait à Lyra lorsqu´elle aurait touché le sol.
Lysa, qui avait rouvert les yeux pour surveiller la progression de son amie, se demandait pourquoi celle-ci se signait tout les deux mètres en gémissant. Il n´y avait absolument, catégoriquement, indéniablement aucun risque. Les Demi-Elfes étaient les maîtres de la magie.
Elle fit descendre son amie d´un ou deux mètres supplémentaires, puis les pieds Sélès se posèrent délicatement sur le pavé. Celle-ci, tétanisée, s´immobilisa, les muscles raidis et les jambes flageolantes. Le voyage n´avait duré que cinq minutes, mais, durant ces cinq minutes, elle avait cent fois risqué sa vie.
Il lui fallut plusieurs minutes pour comprendre comment Lysa était parvenue à la soulever : elle avait utilisé un charme de vent.
Lysa jeta un coup d´œil par la fenêtre, puis, s´étant assurée que Sélès allait bien, sauta dans le vide. Elle atterrit brutalement sur le sol et se releva en époussetant ses vêtements. Sans prêter attention aux regards assassins que lui jetait Sélès, elle lança avec légèreté :
…quot; Maintenant, on peut aller chez ton frère.
La jeune fille garda le silence. Elle renonça même à l´idée de la frapper. Elle n´en avait plus la force. Sélès commençait à comprendre pourquoi les Humains disaient qu´il ne fallait jamais se fier aux Demi-Elfes.
Sélès et Lysa arrivèrent devant le manoir de l´Elu un quart d´heure après avoir quitté le couvent. La Demi-Elfe dissimula ses cheveux trop voyants sous sa capuche et laissa son amie avancer jusqu´à l´imposante grille qui bloquait l´accès au manoir. Sélès se retourna.
…quot; Tu ne viens pas avec moi ? demanda-t-elle, attristée.
Dans son esprit, l´épisode du voyage à travers les airs était déjà oublié. Elle était nerveuse lorsque Lysa n´était pas auprès d´elle. Cette dernière secoua la tête et sourit gentiment.
…quot; Je suis une Demi-Elfe, Sélès, dit-elle doucement.
…quot; Et alors ? Grand frère n´est pas censé le savoir.
Lysa sourit, amusée par la naïveté de son amie.
…quot; Au cas où tu ne l´aurait pas remarqué, le sang Demi-Elfe est clairement perceptible en moi. J´ai les cheveux turquoise. Mes oreilles ne sont pas pointues, mais mes yeux ont une couleur inhabituelle. Même le dernier des crétins remarquerait que je ne suis pas humaine. Vas-y sans moi.
Sélès fit la moue, puis se retourna lentement vers la grille du manoir. Elle tira la cloche qui permettait d´avertir les domestiques de la présence d´un invité et, sans se retourner, salua Lysa. La grille s´ouvrit. Lysa suivit Sélès du regard jusqu´à ce que celle-ci disparaisse à l´intérieur du manoir. Lorsque l´Elu apparut et entraîna sa sœur à l´intérieur, la Demi-Elfe déserta les lieux. D´un pas rapide, rasant les murs, elle se dirigea vers l´hôtel Cicéron.