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Le chemin que je pris de SeaMyuu



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Informations

» Auteur : SeaMyuu - Voir le profil
» Créé le 30/06/2010 à 10:55
» Dernière mise à jour le 02/07/2010 à 19:01

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Chapitre Unique -

Les artistes originaux possédant des pseudonymes composés de caractères asiatiques, je ne peux malheureusement pas les retranscrire ici...


Mon pied se balança nonchalamment avant de toucher le sol. Je sentais la sueur sur le fond de ma chaussure, qui collait à ma peau. Mes bottes vinrent faire un bruit de suintement en bougeant, le plastique jaune de tordant dans tous les sens et se creusant. Puis je levais l'autre, faisant ainsi un mouvement. Je marchais. Je marchais sur le trottoir qui bordait une chaussée à double voix, et j'étais sur le chemin de retour de l'école. J'étais seule et j'entendais mon propre soupir s'échapper alternativement de mon nez et de ma bouche. Mon regard se posait tantôt sur le sol humide d'une pluie récente, tantôt sur le trottoir opposé. Mais en réalité j'avais l'esprit ailleurs, qui vaquait à se focaliser sur quelque chose que je n'arrivais pas à trouver. Il tombait encore quelques gouttes qui coulaient des arbres qui se trouvaient juste à côté. J'étais prise en sandwich entre ces chênes mal entretenus et des immeubles peu hauts aux mines grisâtres. Mais je n'y prêtais pas non plus attention.
Sur mon dos, mon cartable pesait un certain poids, et j'étais courbée pour faire contrepoids. Je portais un anorak de goût douteux à la couleur jaune. En-dessous je portais multitude de couches toutes aussi chaudes les unes que les autres. Soudain, je levais la tête en crispant légèrement mon arcade sourcilière. Un léger rayon de soleil perçait à travers la grise mine du temps. Je ne pris pas le temps d'observer. J'étais... Pressée. Simple excuse pour ne pas plus m'ennuyer à marcher dans cette atmosphère troublante. L'avenue dans laquelle je marchais depuis dix bonnes minutes était longue, elle me semblait interminable même lorsque j'arrivais sur le seuil de mon immeuble. Je reportais mon attention sur mes pieds. Puis je reniflais, légèrement enrhumée. Tous les jours je faisais inlassablement ce même trajet, instinctivement mes pas me guidaient sur la même voie. Je n'avais plus besoin de prêter attention à ce que je faisais, à ce qui se dressait devant moi. Cette avenue était toujours déserte. Même les véhicules ne passaient quasiment jamais. Et pourtant, elle n'était pas la moins habitée que je connaisse… Non. Elle était simplement déserte aux rares heures où je sortais.

Je m'appelle June. Je suis une jeune collégienne, mais avant tout une passionnée par le dessin. Je suis quelqu'un de réservé, qui en dehors de l'école ne fréquente absolument personne. Mis de côté cela, je suis une personne tout à fait « normale ». Chez nous, il existe des créatures nommées Pokémon, on les fréquente au quotidien mais ce sont un peu des animaux, on les élève, on les croise dans la rue, à l'été sauvage. Et à côté, et bien nous avons lesdits animaux. Nous n'avons jamais vraiment cherché à connaître ces étranges bêtes, elles existent, cohabitent avec nous, mais ça reste quelque chose de normal pour nous.
Je collais ma langue à mon palais et fit retentir un bruit étrange. J'étais sur le retour de l'école. Toujours les mêmes choses, toujours la même avenue. Une feuille rousse me fit stopper ma marche lente et solennelle. Etonnée, je m'arrêtais brusquement et me mit à fixer le petit tourbillon orangé. Je lui accordais un instant, pas plus, et me remis à faire claquer mes pieds contre le trottoir goudronneux. Et soudain, je sentis qu'un léger pas feutré résonnait derrière moi. Je ne fis pas un geste, pensant à une impression. Mais le bruit persistait. Alors, je m'arrêtais à nouveau, et d'un mouvement sec je me retournais. Rien. Du moins à la portée de mes yeux. Quelque chose heurta ma jambe, et je posais mon regard dessus.
Là, à mes pieds, se tenait un étrange petit animal. Il ne me regardait pas et gardait le visage fixé sur ce qu'il venait de percuter. Je me demandais un instant comment il avait pu atterrir ici, et même depuis combien de temps il me suivait. Pas beaucoup, en tous cas, sinon je l'aurais remarqué bien plus tôt. J'haussais les épaules avant de reprendre ma route. Une seule fois, je me retournais, et je vis le petit Pokémon toujours les yeux rivés sur moi, au même endroit que je l'avais laissé. Et pour une fois, je continuais mon chemin avec quelque chose en tête.

Le lendemain, toujours sur le trajet du retour. Je répétais sans arrêt les mêmes mouvements de marche, toujours le regard dans le vague, l'esprit tourné vers l'insondable. Seulement, étrangement, au moment où je me trouvais là où j'avais laissé la petite créature, je m'arrêtais. Et puis, je le vis. Cette fois, il se tait derrière un arbre. Je compris que c'était de là qu'il était sorti la veille. Il scruta mon regard de ses petits yeux à la fois irrésistibles et humides. Il osa un pas. Puis deux. Et il s'approcha de moi, jusqu'à arriver à quelques pas de distance. Je pu alors préciser à quoi il ressemblait. Il était relativement petit, et son corps semblait enveloppé par une couche de poils de couleur bleue. Sa tête ainsi que ses pattes antérieures étaient blancs, et il possédait des pattes palmées. Sur son visage, on pouvait distinguer un nez assez particulier de couleur orangée, et deux sortes d'oreilles se dressaient de part et d'autre se son crâne. Une petite queue plate sortait de son arrière-train, et un demi-coquillage décorait son ventre. Cependant, rien de tout cela ne m'interpella vraiment. Tous le temps de ce face-à-face, je ne fixais que ses yeux profondément troublants.
Je ne repris mon chemin qu'au bout d'un certain temps. Avec une certitude : Demain, il reviendrait.

En effet, il revint le lendemain. Puis le surlendemain. Pendant plusieurs mois, sur le chemin de retour, je me mis à l'attendre, à lui parler. J'appréciais sa compagnie, et il semblait que c'était réciproque. J'appris qu'il s'appelait Mijumaru. Il devint quelqu'un à part entière à mes yeux. Tous les jours, je marchais plus vite pour le voir, je le retrouvais derrière son arbre, et je rentrais tard chez moi. Mes trajets n'étaient plus monotones. Je savais qu'au bout, je le retrouverais lui, et que je ne ferais pas que de rentrer chez moi. Je ne parlais à personne de cette amitié, même si c'était un lien très fort qui m'unissait à cette petite créature. Oui. Pour moi, c'était mon meilleur ami.
Puis, un jour, je ne le vis pas. Je l'attendis pendant deux longues heures, mais il ne vint pas. C'était une journée qui avait bien commencé, mais qui s'était mal terminée. J'avais pleuré seule en rentrant chez moi. J'avais peur qu'il lui soit arrivé quelque chose. Il ne vint plus pendant un certain temps, je repris mon habitude de fixer mes pieds sur le chemin du retour. Je ne m'arrêtais plus pour l'attendre. Mon pas ne se pressait plus pour le voir. On aurait pu croire que je l'avais presque oublié. Mais ce n'était pas le cas. J'avais toujours une pensée pour lui, je priais pour qu'un soir, en rentrant, je le croise de nouveau. Mon cœur se serrait chaque fois que je dépassais son arbre. Il me manquait atrocement. Mais je m'étais dis qu'il devait mener une vie quelque part d'autre. Il devait avoir trouvé un endroit meilleur pour grandir, qui sait, peut-être même avait-il rencontré une femelle avec qui finir sa vie.

Et un soir de printemps, je le vis de nouveau. Il m'attendait sur le trottoir, devant son arbre. A ce moment, mon cœur explosa et je couru dans sa direction pour m'assurer que c'était lui. Je le pris dans mes bras, l'examinait, lui parlait, rigolait… En quelques instants, je redevins celle qu'il croisait à chaque rentrée du collège. Ce jour-là fut l'un des plus beaux que j'ai jamais vécu. On aurait pu croire que ce fut impossible de partager cela avec un Pokémon. Mais… Pour moi il était bien plus. C'était mon meilleur ami, et je ne voulais plus jamais le quitter. Cependant, le temps des séparations arriva vite. J'avais beau me dire que je le verrais sans doute le lendemain, j'avais peur que comme précédemment, il disparaisse pendant un temps indéterminé. Mais il fallait que je rentre. Et lui aussi. Il m'adressa un petit regard en me désignant le chemin par lequel il arriverait désormais. Il fallait traverser la chaussée, pour arriver dans une ruelle. Je savais qu'elle débouchait vers le bord d'une rivière tout au bout. Lentement, je me levais, ne quittant pas du regard Mijumaru qui partait. Il avançait sur la route, m'adressant juste une seule fois un regard en arrière, me souriant. Je repris ma route, moi aussi. Avant d'entendre le vrombissement inquiétant d'un moteur. Et avant de le voir encore en train de traverser.

Un battement. Un autre. Mon souffle rauque vint percuter le masque qui recouvrait ma bouche et mon nez. J'ouvris les yeux sans savoir où je me trouvais. Quelles étaient toutes ces perfusions dans mon bras ? Que faisais-je dans un lit blanc et morbide au possible ? Mon esprit ne mis pas longtemps à comprendre malgré le mal que j'avais à faire un quelconque effort. J'étais seule dans la petite salle, et des machines affichaient des chiffres, des rythmes et des diagrammes tout autour de moi. Je ne pouvais pas bouger, trop faible. Mais je sentais que plusieurs de mes os étaient brisés à l'intérieur de mon corps. Mon bras gauche était ficelé par des bandages imbibés de sang. Il en allait de même pour ma tête, enrubannée à la manière des momies. Mon cœur se serra. Où était-il ? J'avais du mal à respirer et mon regard s'éteint de lui-même, recouvert par mes paupières. Une larme coula le long de ma joue griffée, et ma mâchoire se crispa de désespoir. Dans ma tête, seule une scène me revenait. Je le tenais serré contre moi, et la voiture fonçait vers nous.

« Attends-moi. Je te rejoins… »

Et mon ultime souffle résonna dans la salle vide.