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Le prince des mers et autres contes [Livre d'histoires] de Silver_lugia



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Informations

» Auteur : Silver_lugia - Voir le profil
» Créé le 29/04/2009 à 19:25
» Dernière mise à jour le 28/12/2009 à 15:27

» Mots-clés :   Absence de poké balls   One-shot   Présence de transformations ou de change

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Le chant céleste
Ce jour-là, dans les plus hautes branches du plus grand arbre de la forêt, la colonie était en effervescence. Les femelles apprenaient à voler à leurs petits qui ne le savaient pas encore. Ceux qui l'avaient appris récemment s'entraînaient : tomber pendant le Voyage, c'était la mort assurée. Les autres femelles étaient chargées de cueillir les grandes feuilles, celles qui n'avaient pas encore roussi et qui étaient solides, pour ensuite emballer grâce à elles leurs porte-bonheur et les branchages de leurs nids, que leurs compagnons s'appliquaient à déconstruire. Enfin, les pijakos qui n'avaient pas de compagnes ou de compagnons - on appelait ceux-là les célibataires - s'affairaient à trouver de la nourriture. Voyou, le chef de la colonie, supervisait le tout d'un oeil expert. Darma, dont le partenaire avait succombé lors du dernier Voyage, attaquait avec application les jeunes chenipans qui n'avaient pas encore appris à se défendre. Bien sûr, cette tâche était risquée : elle risquait les représailles des mères de leurs proies qui, sous le coup de la colère, pouvaient tout simplement les tuer. Mais Darma apprenait vite, et elle s'était très rapidement accoutumée à sa nouvelle vie de célibataire. Elle était encore jeune et se trouverait sûrement un autre compagnon. Mais, pour le moment, elle portait encore le deuil de Jona. Normal : Tout était de sa faute.
À chaque Voyage, il était de coutume d'organiser une grande fête en l'honneur de la fin du Voyage. Ce soir-là, Juno, oiseau-qui-soigne de la colonie et fille de Darma et Jona, avait interdit à son père de participer à la fête : peu endurant, Jona n'aurait pu voler le lendemain s'il avait été trop fatigué. Malgré tout, il avait veillé jusqu'à tard dans la nuit. Le lendemain, voyant que son compagnon avait du mal à suivre, Darma avait commis l'erreur de lui proposer de porter son porte-bonheur. Séparé de sa pierre fétiche, les ailes de Jona avaient soudain cessé de battre et le pijako avait sombré.

« Eh, Darma ! l'interpella Nalya, son amie, célibataire elle aussi. Qu'est-ce que tu fais ? Je te rappelle qu'on part ce soir, on n'a pas le temps de faire de pause ! »

Darma s'aperçut alors qu'elle était en train de pleurer et qu'elle avait laissé filer un chenipotte bien dodu.

« Oh ! Désolée... J'étais perdue dans mes pensées...
- Tu l'es souvent en ce moment, remarqua son amie. » Elle posa son aile sur la sienne dans un geste amical. « Jona ne reviendra pas, et tu le sais bien. Il est temps de penser à autre chose, maintenant. »

Et, avisant un aspicot, elle s'éloigna de son amie et continua sa chasse.

Le soleil allumait des reflets d'or dans le ciel crépusculaire lorsque le groupe se mit en route. Les pijakos, avec leur plumage haut en couleurs, étaient des proies faciles et préféraient voyager de nuit. Tous les oiseaux s'étaient rassemblés sur les plus hautes branches de l'arbre. Voyou et Juno allaient de l'un à l'autre, lui prodiguant quelques derniers conseils, elle s'assurant que tout le monde avait sa pierre et était en bonne santé. Enfin, Voyou se percha au sommet de l'arbre et poussa un bref cri. A ce signal, tous les pijakos s'envolèrent d'un même mouvement, dans un concert de piaillements et de bruissements de plumes. Voyou décolla à son tour de son perchoir et prit la tête de son groupe, qui s'organisa aussitôt en V derrière lui. D'autres groupes se formèrent à l'identique derrière d'autres pijakos. Darma était dans celui Bilbo, au troisième rang à gauche. Ses enfants, Juno et Hiko, étaient dans le groupe de Nalya. Voyou et son groupe partirent en tête, les autres suivirent. Dans le ciel mauve du crépuscule, le Voyage avait commencé.

Les premières lueurs de l'aube commençaient à poindre dans le ciel lorsque les pokémons arrivèrent à leur première étape. Il s'agissait d'une vieille grange abandonnée, mal isolée, aux poutres grinçantes et branlantes. Cependant, aucun humain ne s'y aventurant jamais, l'endroit était un refuge idéal pour les pijakos épuisés. Tous prirent place sur quelques vieilles poutres et Juno distribua les vivres cueillis la veille par les célibataires. Darma mangea rapidement sa part et s'endormit la tête sous l'aile, exténuée.

Hiko la réveilla à petits coups de bec.

« Il est l'heure de partir, mère.»

Partout autour d'elle, des pijakos aux airs ensommeillés émergeaient de leur sommeil. Dans le ciel crépusculaire, le groupe reprit sa route.

Au bout de trois nuits de voyages, les derniers vivres furent consommés.

« Nous arriverons à la ville demain, annonça Voyou. Là-bas, nous lancerons une opération ravitaillement. »

Cette nouvelle fut accueillie par des explosions de joie : il n'y avait rien de plus amusant, pendant un Voyage, qu'une opération ravitaillement. Darma, toute excitée, eut du mal à trouver le sommeil ce matin-là.
La troupe atteignit la ville avant le lever du jour. Les pokémons s'installèrent dans les arbres du parc et purent dormir plus longtemps que d'habitude, ce qui ne fut pas pour leur déplaire. Vers le milieu de l'après-midi, enfin, Voyou réveilla les volatiles. Ils se séparèrent en deux groupes : les assaillants et les attrapeurs. Darma était l'une des meilleures attrapeuses de la troupe.
Dans le parc, il y avait foule. Beaucoup d'humains y mangeaient des sandwichs. Voyou alla se poser bien en évidence sur un banc et commença à chanter. Darma ne comprenait pas les paroles de la chanson, elles étaient en langage humain. Mais leurs victimes, elles, étaient impressionnées : sans doute était-il rare qu'un pokémon chante dans leur langue. À présent, absorbés par le chant de Voyou, elles avaient toutes le dos tourné aux deux arbres dans lesquels se trouvaient les pijakos. Grave erreur : soudainement, sans crier gare, les assaillants attaquèrent les humains qui avaient de la nourriture, leur tirant les cheveux, leur piquant le corps à coups de bec. Pour se protéger, les victimes levèrent les bras et lâchèrent leurs vivres. C'est alors que les attrapeurs, vifs comme l'éclair, arrivèrent et saisirent la nourriture au vol avant de s'envoler dans le ciel, où Voyou les attendait déjà. Pendant que les assaillants continuaient leur offensive, l'autre groupe continuait sa route jusqu'à l'étape, où les assaillants les rejoindraient plus tard.
Un humain hurla quelque chose qui fit beaucoup rire Voyou.

« Qu'a-t-il dit ? l'interrogea Darma.
- Il a dit "Ah, ces pijakos ! Chaque année, à la migration, c'est la même chose !" La migration, expliqua-t-il, c'est le nom qu'ils donnent à notre Voyage. »

Darma et les autres attrapeurs rirent de bon coeur.

« Voyou, l'interrogea Tino, un jeune oisillon d'à peine cinq lunes. Comment fais-tu pour comprendre le langage des humains ? »

Finya, sa mère, lui donna un petit coup de bec réprobateur : on ne posait pas de telles questions à leur chef. Voyou, qui fit semblant de n'avoir rien remarqué, répondit :

« C'est que, vois-tu, jadis, je vivais parmi les hommes. Mais ce n'est pas le bon moment de parler de ça. Je t'en dirai plus à la veillée.
- Voyou, s'interposa sa mère, Tino est un peu jeune pour...
- Mais non, mais non, la coupa son chef. S'il n'est pas trop jeune pour participer au voyage, il ne l'est pas non plus pour participer à la veillée. Ah, nous arrivons à l'étape ! »

L'étape était un arbre gigantesque, plus grand encore que celui dans lequel logeaient les pijakos pendant la saison chaude. Du haut de son branchage, on pouvait apercevoir le scintillement de la mer, au loin. Bientôt, ils auraient à la traverser.
Le reste du groupe ne tarda pas à arriver. Personne ne manquait à l'appel. L'opération ravitaillement avait été un succès, comme toujours. Ce soir-là, les pijakos se régalèrent de mets humains avant de se remettre en route.

Six jours et autant d'opérations ravitaillement plus tard, le groupe atteignit la mer. Elle avait beau la voir deux fois par an, Darma était toujours émerveillée du spectacle que lui offrait cette immense étendue d'eau. Les vagues se fracassaient contre les rochers, s'éparpillant en de multiples gouttelettes, puis se reformaient comme si de rien n'était. L'eau scintillait jusqu'à perte de vue, et se teintait de rouge au contact du soleil couchant. L'air était chargé d'odeurs enivrantes et apaisantes. Le bruit de l'eau semblait ne jamais devoir s'arrêter. La mer était immortelle...
Voyou la tira de sa rêverie.

« Comme vous le voyez, disait-il, la mer n'offre aucun point de repos. Nous ne pourrons faire halte, et devrons parcourir toute la distance en une fois. L'aventure sera périlleuse, mais elle en vaut la peine. »

Puis, lestement, il s'envola. Les groupes se reformèrent derrière lui et entamèrent la partie la plus longue, la plus fatigante et la plus exaltante du Voyage. La traversée des eaux dura deux nuits et un jour. Deux nuits et un jour pendant lesquelles les pijakos ne purent s'abreuver, s'alimenter, se reposer. Deux nuits et un jour pendant lesquelles, à chaque seconde, on craignait de s'effondrer d'épuisement et de ne pas terminer le Voyage. Deux nuits et un jour pendant lesquels on préférait le silence à la parole, les larmes au rire. Deux nuits et un jour pendant lesquels on ne voyait plus rien que de l'eau. Deux nuits et un jour pendant lesquels on crut mourir.
Plusieurs fois, Darma fut tentée d'arrêter de battre des ailes, de se laisser engloutir par ces eaux immortelles qu'elle aimait tant. De rejoindre Jona. Mais elle ne pouvait s'y résoudre. La fin du voyage était trop proche, à présent. Et, une lueur d'énergie nouvelle dans le regard, elle continuait.

Le soleil se levait pour la deuxième fois lorsque les oiseaux aperçurent, en bas, une grande tache jaune : la plage. Dès qu'ils l'aperçurent, les pijakos battirent plus vite des ailes. Tous étaient pressés de sentir la douceur du sable sous leurs serres. Derrière le banc de sable s'étendait une vaste jungle dans laquelle se trouvait l'étape. Là-bas, ils pourraient chasser et dormir autant qu'ils le voulaient avant de reprendre la route.
Voyou se posa le premier. Les autres suivirent. Darma, éreintée, avait envie de s'effondrer là, sur le sable. Mais avant, elle regarda la mer. Elle voulait la remercier de toujours lui avoir insufflé le courage de continuer, de ne pas baisser les ailes.
Un cri de détresse la tira de sa rêverie et la fit se retourner. Là, sortant de la jungle, une bande de persians avançait, montrant les crocs, fixant les volatiles comme s'ils choisissaient d'avance leur part.

« Fuyez ! » hurla Voyou.

Mais bien des oiseaux n'avaient pas attendu ses conseils pour s'envoler en hâte, hors de la portée des griffes des grands prédateurs. Lorsqu'elle s'envola à son tour, Darma aperçut une masse colorée et sanglante, secouée par les crocs d'un persian. L'un des leurs avait succombé. Les autres pijakos se repliaient déjà vers l'étape. Darma s'empressa de remonter jusqu'à Voyou pour lui faire part de la triste nouvelle.

« Nous ferons l'appel lorsque nous serons arrivés. », lui répondit-il.

L'étape était un grand arbre qui permettait d'offrir refuge et nourriture à chaque oiseau du groupe. Mais redoutant le retour des persians, Voyou préféra chercher un autre refuge. Ils sortirent de la jungle et débouchèrent dans une savane. Non loin de là, un oasis bordé d'arbres gigantesques se dressait, tel un miracle. Les pijakos s'installèrent dans le plus grand d'entre eux. Après appel, ils constatèrent que celui qui manquait était un dénommé Châ, l'un des deux anciens.

« Châ était un oiseau valeureux, prononça Voyou. Il ne manquait jamais de nous distraire pendant les veillées. Nous le regretterons. »

Les pijakos dormirent longtemps, pour se reposer de toutes ces émotions. Ils chassaient les petits pokémons qui venaient s'abreuver au point d'eau et récupérèrent vite des forces.
La veille du départ, Voyou s'exprima :

« Demain, nous arriverons au but de notre voyage. La veillée aura lieu ce soir. »

En temps normal, les pokémons auraient sauté de joie. Mais le départ de Châ les avait rendus tristes, la nouvelle eut bien peu d'effet parmi les oiseaux dépités. La veillée, espérait Darma, remettrait du baume dans le coeurs.

Ce soir-là, lorsque le soleil se coucha, la troupe se réunit, non pas pour partir, mais pour festoyer. Les pijakos mangèrent de bon coeur, puis Omar, l'autre ancien, raconta son histoire. Il la racontait à chaque veillée, et pourtant ce n'était jamais tout à fait la même.

« À l'époque où Voyou n'était pas encore là, contait-il, nous n'étions qu'une bande d'oiseaux sales, décharnés, et mal nourris. Nous mangions quand nous le pouvions, c'est-à-dire pas souvent ! Les humains - que l'on appelait à l'époque les longues pattes - nous jetaient leurs ordures. Nous n'étions qu'une bande de charognards. Parfois, quand nous avions très faim, nous nous mangions entre nous ! »

Une clameur horrifiée parcourut l'assistance. Les mères bouchèrent les oreilles de leurs petits.

« C'est alors qu'un jeune gringalet, fier de son plumage - et, ma foi, il pouvait l'être ! - est arrivé. Il nous a appris à chasser et à nous débrouiller seul. Grâce à lui, nous avons repris de la plume de l'oiseau. Il avait amené avec lui toute une bande de jeunes oiseaux en bonne santé, qui nous ont aidés à fonder le fantastique groupe dans lequel nous vivons maintenant. »

Des applaudissements saluèrent la fin du récit. Puis Voyou chanta quelques chansons en langage humain. Nul n'en comprenait le sens, mais les airs étaient mélodieux et rythmés. Lorsque Voyou eut terminé son concert, Tino lui demanda :

« Voyou, de quoi parlent tes chansons ?
- Eh bien, admit Voyou d'un air gêné. À vrai dire, je n'en sais rien ! Voyez-vous, les humains sont des créatures bien étranges. Ils ne nous comprennent pas et nous devons bien étudier leur langage pour les comprendre. Non contents de cela, ils se sont créés plusieurs dialectes, de sorte qu'ils ne se comprennent pas entre eux !
- Incroyable ! s'écria quelqu'un.
- Ma dresseuse parlait la langue du français. Mes chansons sont dans la langue de l'anglais.
- Les humains sont fous ! s'écria Nalya !
- Voyou, pourquoi as-tu quitté les humains ? l'interrogea Hiko.
- Les humains utilisent des moyens très cruels pour capturer les pokémons : les pokéballs. Quand on est capturé par un de ces engins, c'est aussi un morceau de notre cerveau qui est capturé. La pokéball manipule notre cerveau pour qu'on n'ait pas envie de repartir et qu'on soit fidèle à son dresseur. Mais la mienne s'est cassée : je me suis rendu compte que ma dresseuse m'avait manipulé, et je me suis enfui. »

Ce récit clôtura la soirée.
Le lendemain, très tôt dans la matinée, les pijakos atteignirent l'arbre dans lequel ils passeraient la saison chaude. Les oiseaux commencèrent à déballer leurs paquets. Darma s'aperçut alors qu'elle n'avait plus son porte-bonheur ! Elle avait dû le faire tomber dans la mer. Elle regarda le ciel en esquissant un sourire.

« Maintenant, je sais que ce n'était pas ma faute. La vie continue. »


Fic dédiée à ma céréale préférée, Dogsmaniac, qui le méritait vraiment après avoir enduré tous mes exercices et m'avoir dessiné un fond d'écran sur mesure. En espérant que ça t'ait plu ^^ !