Spéciale dédicace à Dragibus et King-of-Ice.L'hiver.
Quelle saison fascinante !
Quand le froid nous picote le bout de la truffe et nous fait sentir bien vivant et réveillé.
Quand les flocons recouvrent le monde d'un manteau de pureté, comme si rien de moche ne pourrait plus jamais arriver.
Quand la neige mange chaque bruit, et que le silence nous berce de sa mélodie imaginaire et merveilleuse.
Quand la glace fait fondre celle des cœurs et rapproche les gens, attisant leur chaleur.
Quand la nuit après la tempête laisse briller dans le ciel un nombre incalculable de petits diamants qu'on ne voit pas le jour.
Quand le jour avec le soleil fait scintiller sur le monde comme une poudre d'arc-en-ciel qu'on ne voit pas la nuit.
Quand le vent en colère hurle dans les arbres et qu'Ami me serre contre lui pour apaiser mes peurs.
J'adore l'hiver.
Mais aujourd'hui, c'est la tempête. Ami m'a interdit de sortir. Je voulais aller avec lui chercher à manger. Il m'a promis qu'on irait quand je serais plus grand. Alors je reste seul chez nous, dans le temple antique où nous vivons. Je suis un peu triste dans ces moments là, mais juste un peu. Ami m'a acheté des jouets formidables.
J'adore les jouets.
Quelqu'un est apparu dans l'entrée. Enfin ! J'abandonne mon jeu et cours vers lui.
Avant de me figer, soudain pétrifié de peur.
Ce n'est pas celui que j'attendais. C'est un inconnu, un monstre ! Il cache une partie de la lumière de l'entrée. C'est une montagne noire, avec la tête toute pointue ! Et le vent fait onduler ses contours, rendant sa silhouette plus menaçante encore.
Est-ce qu'il va me faire du mal ? Est-ce qu'il va me dévorer tout cru ?
Ami, au secours !
Je n'ose pas bouger. Peut-être qu'il ne me verra pas.
Il s'avance vers moi. J'ai peur.
Soudain il s'arrête. Est-ce qu'il m'a vu ?
Ah non, il retire sa tête. Je suis horrifié.
C'est un humain, avec un énorme manteau sombre. Va t-il me faire du mal ?
Soudain, il baisse la tête. Ça y est, il m'a vu !
Sa masse immense se baisse vers moi. Je tremble.
Et il me parle. Sa voix résonne étrangement. Elle est plus forte que celle d'Ami. Mais elle est assez douce. Il me demande si je suis seul ici. Il me demande où est ma maman, si je l'ai perdue. Puis il voit les jouets.
Non, pas mes jouets !
Mais il ne bouge pas. Il me demande si elle va bientôt rentrer. Il me dit de ne pas avoir peur. Il tend la main vers moi.
Je m'enfuis. Je cours me réfugier plus loin. Mais il n'y a rien pour me protéger. Rien que...
Ma couverture. D'une traite je me jette dessus, me débat avec le tissus et disparaît dessous.
Ami, au secours !
Le temps passe. J'essaye de bouger le moins possible. Et rien n'arrive. A-t-il oublié ma présence ?
Lentement, en silence, je retrouve le bord de la couverture et glisse la truffe dehors. Il y a de a chaleur. En soulevant un peu le bord, je peux voir ce qu'il se passe.
Lui aussi essaye de faire le moins de bruit possible. Il a allumé un grand feu sur les cendres de celui que fait Ami les soirs de grand froid. Soudain son regard glisse sur mon abri. En voyant mes deux petits yeux rouges, il sourit. Il me demande si je ne veux pas sortir de là. Je disparais sous le drap. Mais la curiosité est plus forte. Il n'a pas l'air si dangereux que ça... Mais peut-être est-ce une feinte ? Je dois en avoir le cœur net.
Je me remets en position d 'observation. Il a l'air fatigué. Il mange un truc. Oh, il m'a revu !
Doucement il se met à rire. Mais un rire gentil. Je ne ressens rien de méchant chez lui.
Hardiment je fais un pas hors de mon refuge. Puis un autre. Et un troisième. Lentement mais prudemment, je m'approche de cet intrus.
Je fais une halte vers mes jouets. Ils ont l'air d'aller bien. L'homme lui, me regarde en souriant. Il m'encourage de sa voix calme à venir. Redoublant de méfiance, je m'avance. Et enfin je me retrouve près de sa main tendue. Je la renifle.
Et quelle odeur !
Il sent l'humain, évidement, mais aussi... Il sent le vent et la terre. Il sent l'arbre et la pierre. Il sent l'eau et le sel. Il sent la chaleur et le miel.
Il y a des odeurs de pokémons sur lui. Et d'autres que je n'arrive pas à identifier.
Il sent le monde.
Soudain, l'un de ses doigts se tend et m'effleure le bout de la truffe.
Aaaah ! Ma truuffe ! En couinant de panique, je sprinte sous ma couverture et me tiens le nez. Est-ce qu'il est toujours là ? Il ne me l'a pas volé ?
C'était une feinte, je le savais ! Il parle encore. Il me dit qu'il est désolé, qu'il ne voulait pas m'effrayer. Mais c'est fini ! Terminé!
Je ne m'approcherais plus de ce toucheur de truffe !
Mais quand même, quel être fascinant, quelle odeur passionnante !
Et le temps passe encore. Je l'observe de loin.
Et enfin, Ami revient. Il a pris son apparence humaine. Sa silhouette se découpe dans l'entrée. Il regarde l'intrus, puis les deux joyeux rougeoyants que forment mes yeux. Il pose ses sacs et vient me prendre dans ses bras, me cajole, et demande de sa voix puissante :
-Qui êtes vous ? Que faites vous ici ?
-Je ne suis qu'un voyageur égaré. Je cherchais simplement un abri en attendant que la tempête se calme et le lever du jour. Je suis désolé pour le dérangement. Je ne voulait pas effrayer le bébé absol.
Je proteste.
-Je ne suis pas un bébé !
Mais Ami m'ignore.
-Dans ce cas, vous pouvez rester ici jusqu'à ce que vous puissiez repartir.
Encore une fois, je râle.
-Quoi ! Mais tu peux pas lui dire ça ! C'est un toucheur de truffe !
Mon protecteur me regarde surpris, puis éclate de rire.
-Un toucheur de truffe ?
-Exactement ! Il m'a laissé le renifler, mais en fait c'était qu'une feinte pour me toucher la truffe !
-Oh.
L'homme paraît intrigué.
-Qu'est-ce que... ?
-Il vous accuse d'être un toucheur de truffe.
-Farpaitement !
-Je suis désolé. Je ne voulais pas lui faire peur.
Lentement Ami vient et me présente à l'homme. Pourquoi fait-il cela ?
-Tu vois, tu n'as pas de raison d'avoir peur.
Et pourtant, si, je suis effrayé. J'essaye de toutes mes maigres force de reculer dans les bras d'Ami, de disparaître en lui. Mais rien à faire. L'humain lève la main, et très doucement, le caresse la tête. Un simple contact, tout doux.
-Tu vois, tu n'a rien à craindre. Et puis, je suis là maintenant.
C'est vrai. Il est là. Réconforté par cette idée, je décide de pousser plus loin mes recherches sur l'odeur de cet homme. Tout content, il continue de me caresser. Ce n'est pas si désagréable finalement. Quelle créature fascinante...
Soudain, il décroche de sa ceinture des petites boules rouges et blanches, qu'il fait grossir dans la main et lance en l'air un peu plus loin. Soudain des pokémons que je ne connais pas se retrouvent devant nous. L'homme nous les présente. Le grand tout vert qui fait peur, c'est Insecateur. Le grand enflammé, c'est Simiabraz. Le gros tout doux et tout bleu, c'est Azumarill. Celui tout jaune à quatre pattes, c'est Voltali. Le tout long et tout sombre, c'est Seviper. Et le petit bleu clair qui fait un joli bruit, c'est Eoko.
Ami décide de discuter avec lui tout en préparant à manger pendant que je montre mes jouets à Voltali et Eoko. C'est l'étranger qui cuisine. Il dit que c'est pour nous remercier. Il nous prépare une spécialité de Shinnoh. Ça sent incroyablement bon. J'en ai l'eau à la gueule.
-Vous avez voyagé loin, dites moi.
-Je suis originaire de là-bas. Je fais le tour du monde.
-Vous avez dû voir beaucoup de choses.
Cette bride de conversation pique au vif ma curiosité. Je gratte ses chaussures, il me regarde gentiment, et je lui demande alors :
-Pourquoi ? Pourquoi vous faites ça ? Vous n'avez pas peur ?
Ami lui fait la traduction.
Alors il se penche vers moi, et me dit tristement :
-Je voyage, parce que je veux rencontrer tous les chats du monde.
-Les chats ?
Mon tuteur m'explique :
-Les chats sont une catégorie de pokémon, comme les miaouss, skitty, chaglam, et leur évolutions.
Et se tournant vers l'homme, il lui pose la question qui me brûle la langue :
-Pourquoi faire une chose pareille ?
L'homme sourit d'un air peiné.
-C'est insensé, je sais. Mais voyez-vous...
Il existe une légende. Tout le monde l'a oublié. C'est une vielle légende. Aussi vieille que le monde.
Autrefois, les êtres vivants peuplaient le paradis, un jardin merveilleux qui se trouve au ciel et où tout le monde avait une vie en rose. Puis un jour, ils mirent en colère Arceus. Celui ci les chassa sur terre. Mais l'un d'eux était triste et nostalgique du lieu où il avait vécu. Il est donc parti à la recherche du paradis. Après moult épreuves et un long chemin, il l'a retrouvé, et fut autorisé à rester là bas. Ce héros était un chat.
Certains prétendent qu'il fut autorisé à y rester une heure, d'autres qu'il resta là-bas pour toujours.
Quoiqu'il en soit, depuis ce jour, on raconte qu'il y a toujours sur terre un chat qui connait le chemin du paradis.
Il y a un silence. Ami est tout bizarre.
-C'est pour cela que vous voulez rencontrer tous les chats du monde ? Pour trouver celui qui connait le chemin du paradis ?
-Oui. Je veux lui demander si ma petite fille est bien arrivée.
Il y a un autre silence, plus lourd.
Le lendemain, la tempête était calmée, et l'homme est reparti chercher le chat qui connait le chemin des cieux. J'espère qu'il le trouvera. Ami est resté jouer avec moi toute la journée.
A des centaines de kilomètres de là...
-Meow ?
Le roucool ne volerait plus jamais.
-Miii !
Il le prit contre son petit corps rose. Ses yeux bleus comme le ciel s'illuminèrent un instant, et l'oiseau disparut en une foultitude de lueurs.
-Mew !
Puis le petit pokémon disparut.
Cette légende que raconte le voyageur n'est pas inventée.
On raconte que le troisième fils d'Adam et Ève, Jacob, fut si triste et nostalgique du paradis qu'un chat fut touché par son chagrin et décida de l'aider à y retourner. Après un long chemin de plusieurs jours et de nombreuses épreuves, ils arrivèrent à destination, où ils furent invités à entrer. Certains prétendent qu'ils furent autoriser à y rester seulement une heure.
Quoiqu'il en soit, le secret se transmit à leurs descendants, si bien que jusqu'à la fin du monde, il existera toujours sur terre un chat (et un enfant selon les versions) qui connait le chemin du paradis. Edit: Et la musique qui va avec :
http://www.youtube.com/watch?v=BcL---4xQYACette musique de Led Zepplin a été composée en l'honneur de la fille du batteur, décédée d'un cancer. (D'où la référence du voyageur voulant savoir si sa petite fille est bien arrivée.)