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L'AnalysaBlog
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Magie des chiffres : autour du chiffre 2
Frères ennemis
Je me suis dit qu’il était peut être temps de s’attarder sur cette image :


Opposés l’un à l’autre par un jeu de miroir, ces deux Pokémon montrent à quel point Pokémon est avant tout un univers de la dualité, un monde régi par le chiffre 2. De la relation entre héros et rival au choix de la paire de cartouches, nous balaierons le spectre des valeurs du deux et du double au travers des quatre générations Pokémon.

D’emblée, on peut dégager que les 1G et 2G vont ensemble face au bloc des 3G et 4G. Cela sera admis par tous étant donné que la communication entre ces générations est possible. Un an et demi après la sortie de la 4G, le moment d’un bilan est venu. Comment le thème du double a-t-il évolué depuis RBJ ? Pourquoi ce motif reste-t-il aussi porteur dans le système régissant la série Pokémon ?

Bon, tout de suite, je peux dire que ces questions sont assez évidentes mais attendez de voir jusqu’où nous irons…

I. Deux, entre proximité et opposition

D’abord, je pense que l’on peut s’arrêter sur le personnage du rival. Ce terme n’est d’ailleurs pas anodin : c’est une relation complexe qui unit le héros à cet autre qui a toujours été comme un jumeau jusqu’à présent en particulier dans la 1G. A l’univers du jeu, s’oppose une époque antérieure au commencement du jeu et dont le Trainer’s Guide se fait le porte-parole. De même âge, les deux garçons sont présentés comme ayant toujours été proches jusqu’à ce que, récemment, le comportement du rival devienne égoïste et hautain. En latin, le rivalis est le riverain, le voisin ainsi que le jaloux en amour. Le choix de ce terme, peu courant en français, par les traducteurs met en valeur l’idée que opposition dans la passion et proximité spatiale ne forment qu’une seule et même chose, qu’un drame se noue dès que l’on est proche de quelqu’un. Du contact naît le frottement et du frottement continuel naissent l’irritation et la rupture. Le méprisant « minable » de la 1G est celui d’un mouvement destiné à abaisser l’autre qui est par définition égal à soi afin d’en acquérir une élévation et c’est justement ce mépris des autres qui sera la cause de la défaite finale du rival ( Chen lui disant qu’il a perdu car il n’a pas donné d’amour à ces Pokémon, prisonnier qu’il était de sa propre soif d’ascension ).

La Jaune marque une étape très importante dans ce drame de la proximité, de la rivalité. Chen n’y a qu’un seul Pokémon et il veut le remettre au héros et non à son petit-fils qui passe après alors que la proximité du sang voudrait le contraire. Délaissant la personne qui devrait lui être plus proche, Chen provoque cette haine ouverte et est le responsable de ce mépris des autres du rival. C’est dès lors que Chen met le héros plus haut que son petit-fils que ce dernier prononce pour la première fois ce nom de « minable ». Tout son but est en fait d’obtenir la préférence dans le cœur de son grand-père, le héros étant devenu un rival dans cet amour entre grand-père et petit-fils. De cette erreur de Chen découle toute l’organisation de Kanto comme le montrent les Iles Ecume. En effet, on apprend qu’autrefois elles n’étaient qu’une mais que maintenant elles sont séparées et forment des jumelles. C’est exactement ce qui s’est passé entre le héros et son rival. Tout ce qui les maintient liés l’un à l’autre est souterrain, enfoui et, même à la fin du jeu, aucune réponse n’est apportée vu que Chen emmène le héros à son apothéose en laissant le rival seul aux portes du panthéon.

Sombre, la 1G ne prononce pas les mots de la fin et un malaise persiste. Chen est tout sauf une figure positive : il tient avec le héros, certes, mais semble aveugle à ce qu’il lui reste de plus important. Ces petits enfants passent après son travail et il apparaît comme le bourreau aveugle de son petit-fils qui ne pense qu’à l’impressionner. Car pourquoi se rend-il à la Ligue si ce n’est parce qu’il sait que son grand-père y est invité par le Conseil des 4 comme nous l’indique le mail de son ordinateur ?

RF / VF vont cependant creuser ce rapport mais, pour comprendre cette évolution, il faut revenir sur la 3G et son rival sur Hoenn. Commençant dans un camion, soit à un endroit sans rival au sens spatial du terme, RSE crée un rival en tant qu’être purement opposé au héros dans la mesure où son sexe est différent de ce dernier. Dès lors, une influence hormonale certaine va agir et rendre beaucoup plus cordiaux les rapports entre les deux individus ( don de la CS Vol,… ). Bref, l’agressivité des deux générations précédentes est totalement occultée. Le terme de rival est même devenu beaucoup plus discret ce qui fait que le rival a en fait disparu, la complicité remplaçant l’agressivité. Dans ce nouveau système, comment faire un remake de la 1G à la virulence indubitable ? Simplement en adoucissant le rival. A Azuria, après le combat sur le Pont Pépite, le rival revient et donne au héros le Mémorydex sous prétexte que lui se moque des autres. Cet acte est celui d’un personnage qui pressent sa propre incapacité à être au monde, qui sait qu’il est dans un tunnel où la jalousie l’empêche de voir le monde. Confiant au héros la tâche de conserver la mémoire, il lui demande de créer un espace double où il mettra des souvenirs que lui pourra récupérer plus tard. Et l’après Conseil des 4 de RF / VF montre la sortie du rival du Plateau Indigo et son ouverture à cet ailleurs que sont les Iles Sevii où il vient avec « une vieille amie ». Ayant trouvé un autre à apprécier en la personne d’Olga, il n’est plus cette figure maussade de la 1G mais un rival qui se donne à l’entraînement de ses Pokémon comme sa sœur se consacre aux Pokémon des autres pour pallier à la perpétuelle absence d’un grand-père qui n’aime que son travail c’est à dire les Pokémon.

De l’influence de Chen résulte la scission entre les sphères de Blue et de Red. En séparant les jumeaux, Chen crée deux Kanto identiques et différents à la fois. Identiques au niveau spatial, ces Kanto se dissocient dans leurs Pokémon qui fonctionnent par doublet dans la 1G : Caninos / Goupix ( le chien de chasse et le renard ), Abo / Sabelette ( la belette mangeuse de couleuvres et le serpent ),… Nette, l’opposition est celle entre les deux protagonistes et la résolution de cette rupture n’est possible que par la communication, l’échange entre ces deux monde et ces deux êtres que tout oppose.

II. Deux, chiffre de l’affrontement

Comme le montrent les deux escaliers des Centre Pokémon de la 1G, la communication entre versions est toujours prise entre échange et combat. Notion clé, la rivalité est le concept sur lequel se fonde tout le système de Pokémon car chaque dresseur est en fait le miroir de celui qu’il affronte ou avec lequel il échange.

Tout combat Pokémon est par définition un acte de mise en rapport avec un autre qui partage le même amour des Pokémon que soi-même. Le but du combat est de montrer que notre amour des Pokémon est plus fort que celui de cet autre qui prétend pouvoir se vanter d’être plus aimé que nous. Chaque dresseur, que ce soit dans le jeu ou IRL ( In Real Life ), est un double que l’on peut combattre ou avec lequel on peut échanger. Le problème des habitants d’Azuria vis-à-vis de Léo est qu’ils le voient comme un vantard se targuant d’aimer davantage les Pokémon que les autres. Ce terme de « Pokémaniac », tous en sont jaloux car il est une preuve, un signe que l’on peut faire valoir auprès des autres comme si le mot donnait une autorité à notre passion.

Cette opposition entre dresseurs culmine dans la 1G tandis que la 2G va s’efforcer de la réduire en introduisant le téléphone par le biais du PokéMatos. Que l’on pense à Maxime Scout appelant pour nous parler du concours au Parc naturel ou aux multiples objets que l’on peut récupérer de cette manière dans la Cristal, le rapport aux dresseurs adverses tend à se doubler d’un lien d’échange et de partage. Rencontrer un dresseur devient plus le moment d’une rencontre avec un frère qui peut nous faire progresser tandis que la pure rivalité tend à devenir quelque chose de bestial ( la capacité Rivalité de la 4G montre bien que désormais la haine envers son semblable est un fait de l’instinct que possède les espèces Pokémon violentes ). Cela explique que les doublets changent de forme dès la 2G. Ce sont juste deux faces d’un même phénomène qui ne sont plus en rapport d’agressivité. Si on pense à la 2G, on peut citer Demanta dans la mer à l’ouest de la Or et qui est un Pokémon défensif spécial tandis qu’Airmure est dans les montagnes à l’est et incarne la défense pure. Ce ne sont plus des rivaux comme des ennemis naturels. Cela ne revient que dans la 3G avec Seviper et Mangriff soit le serpent et la mangouste ( son ennemi naturel ). A mon avis, ils préfigurent l’opposition entre Kyogre et Groudon qui incarnent une haine entre légendaires que ne connaissaient pas Ho-Oh et Lugia.

Au combat, succède un temps d’après combat permis par un tiers : le téléphone. Cette irruption d’un troisième membre dans le cadre du combat va de pair avec l’apparition des dresseurs doubles qui donne du combat l’image d’un 1VS2 où le miroir s’est brisé et où aucune rivalité n’est plus envisageable. Ce mouvement est visible dans la relation d’opposition de la 1G entre Kicklee et Tygnon qui se trouve résolue avec l’apparition de Kapoera qui incarne un équilibre entre les deux ( vu que son évolution a lieue lorsque l’attaque et la défense de Débugant sont égales ).

Ainsi, le face à face s’estompe grâce à l’effet d’un tiers et cela explique la présence de la troisième cartouche dans chaque génération. Electrique, le Pikachu de la Jaune frappe l’aquatique Tortank et l’aérien Dracaufeu. Créature d’harmonie, Suicune lie Ho-Oh à Lugia ( en se rendant de l’autre côté de la mer, cf. Johto, quel Johto ? ). Capable de mettre fin aux changements climatiques, Rayquaza annihile Kyogre et Groudon. Chaque troisième version a pour but de mettre en place un tiers qui réconciliera l’harmonie.

Arrêtons-nous ici sur la 4G. En effet, Platine est la version de Giratina et un Pokémon Renégat ne saurait être une créature d’harmonie car l’harmonie demande bien plutôt son exil. En effet, la dualité Dialga / Palkia est déjà maîtrisée par la Chaîne rouge des trois Cré’ qui incarne une trinité dans l’univers symbolique de Sinnoh. La présence de Giratina avec le temps et l’espace est un pur bouleversement d’autant plus qu’il brouille les frontières entre vie et mort ( personnellement, je pense que la présence de spectres humains dans le Vieux Château est le signe de la présence latente de Giratina sur Sinnoh qui brouille la frontière entre le fait que les Pokémon puissent revenir du monde des morts tandis que les humains non ). Alors que le troisième légendaire antérieur était extérieur au duo de départ, Giratina va renforcer les tensions initiales au lieu de les apaiser. N’étant plus une solution, le tiers va demander que l’on ne fasse plus appel au 2 ni au 3. On va avoir recours au 1 soit au Pokémon originel qu’est Arceus. En latin, arceo signifie « maintenir », soit « tenir dans sa main » ce qui peut expliquer cette référence aux bras : Arceus a une poigne symbolique. Mais Arceus n’est pas Dieu ( au sens où Dieu est l'éternité ce qui est l'absence de temps et d'espace ). Il est le Pokémon alpha soit le début d’une chaîne qui ne peut que finir par oméga soit la mort. Opposé à Giratina, Arceus est le créateur, le commencement soit cet avant-monde où la rivalité n’existait pas encore pour revenir à ce que je disais en début d’analyse. Pokémon à partir duquel tout se crée, il n’est ni l’éternité ni une divinité que l’on vénère mais juste un alpha, un avant comme le sont les Ruines d’Alpha de Johto qui renvoient à une époque qui n’existe plus.

III. 2 = 1 + 1 + 1 ou la mutation de la rivalité

Devenue élément à dépasser, la rivalité semble devoir être un concept absent de la 4G. Or, celle ci renoue avec la situation de la 1G où le rival est riverain. Voisin et ami d’enfance, le rival du héros ressemble beaucoup au rival de RBJ à cela près qu’il n’est plus en lutte avec la héros pour l’affection désirée : celle de son père c’est à dire l’Aigle Tour dont il attend la reconnaissance. Comme le dit Korner dans la TDC, le héros a lieu aussi un père qui bien qu’hypothétique est lui aussi un grand dresseur. Après l’apparition de Norman dans Hoenn, le héros perd définitivement ce caractère christique où il a une mère et pas de père. Cela permet de faire de la rivalité une simple compétition et non une lutte pour l’estime de la personne dont on est le plus proche ( d’autant plus que Bourg en Vol n’est pas le no man’s land de Bourg Palette où héros et rival n’ont que Chen pour voisin ).

Cette apparition d’un père au sein du foyer des personnages et donc d’un tiers permet de déplacer la rivalité sur un autre terrain. Le père va attirer un rival désireux de devenir dresseur Norman / Timmy et Korner / rival de la 4G tandis que la quête du Pokédex va créer un autre personnage Seko / son fils ou sa fille et Sorbier / son assistant ou son assistante. Même si la sœur de Lucas / Aurore dit vouloir que le héros réussisse mieux que son frère / sa sœur, les contacts et les frottements se trouvent limités au maximum ce qui donne de la rivalité une version beaucoup plus édulcorée.

Mais pourquoi cette évolution de l’affrontement bilatéral à ce triangle amoureux ? A mon avis, cela est dû au fait que l’esprit de Pokémon est celui du trio. L’inspiration avouée des Pocket Monsters est le principe du pierre / papier / ciseaux ( shifumi japonais ) transposé sur des créatures. Dans chaque affrontement de type gravite l’ombre d’un tiers type établissant une harmonie entre eux. Cette image du tiers pouvant venir faire pencher et équilibrer la balance à tout moment est le principe même du gameplay de Pokémon. Dans la 2G, l’apparition de Christy, d’un personnage féminin dans un monde où tous les Pokémon prennent un sexe ( à quelques exceptions près ) met fin à ce face à face masculin entre Gold et Silver ( dont l’agressivité vient aussi de cet absence de père et d’amour paternel étant donné qu’il est le fils de Giovanni et que sa haine est tout entière dirigée contre la Team Rocket ) qui ne pouvait amener qu’à une impasse sans cet élément féminin qui crée un triangle amoureux où les rapports de force sont d’une fluctuance constante.

Cependant, même si les protagonistes des jeux sortent de l’affrontement duel, ce n’est pas le cas de tous les personnages. Dans RF / VF, la Route 4 nous donne à voir deux Karatékas l’un en face de l’autre qui se tiennent réciproquement pour des imbéciles car l’un ne se bat qu’avec ses poings et l’autre qu’avec ses pieds. Ses avatars de Kicklee et Tygnon sont comme un vestige de l’antique rivalité où chacun est devenu aveugle à l’autre qui vit pourtant sous ses propres yeux. Liés au type Combat, les Karatékas incarnent le combat brut, un type qui a longtemps mis à mal la règle de trois du gameplay avant l’arrivée du type Ténèbres avec la 2G. Tendant à l’opposition bilatérale, le type Combat est comme le Dojo de Safrania détrôné par Morgane. Edifice privé de reconnaissance officielle, il n’aspire qu’à s’élever de nouveau comme le montre l’entraînement du maître du Dojo dans le Mont Creuset. Le but est de gagner un face à face dont le titre de Champion d’arène est en jeu sans qu’un tiers n’existe jamais dans ce conflit.


Pour conclure cette analyse assez théorique , je reviendrai sur une différence qui me semble essentielle entre Arceus et Mew. Comme son palindrome de nom nous l’indique, Mew ( dont le nom se lie dans les deux sens ) est le Pokémon de la boucle. En forme d’œuf, de cellule œuf, son ADN est celui d’une perfection, d’un être qui naît sans cesse à lui même en étant le tout incarné. Alors qu’Arceus contient ( mot qui vient de « tenir » ), Mew incarne ( du latin caro, la chair ) ce qui fait de lui une unité étrangère à toute question d’harmonie. Il est l’harmonie en réduit mais n’a aucune influence sur la cosmogonie symbolique qui régit le monde. En lui, la rivalité n’a pas cours. Dès la 1G, il est dit dans le Manoir Pokémon : « Mew est papa ( maman ? ) ». Etre qui ne peut être mis d’un côté ou de l’autre mais également dans les deux, il est la vie dans ce qu’elle a de plus abouti tel une bibliothèque dont il suffit de prendre un livre pour donner vie. Cela donnera naissance à Mewtwo et donc à une forme de double qui ne s’oppose pas à Mew mais qui fait de l’homme un rival de lui-même dans le sein de sa propre conscience…
Article ajouté le Vendredi 06 Mars 2009 à 18h09 | |

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