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Le désarroi Désarroi : nom masculin singulier, trouble provoqué par la survenue d'un événement inattendu et fâcheux.
Lonny vient de rappeler Florizarre. Nous sommes les derniers membres en état de combattre de notre équipe. Lui est plutôt mal en point, cette attaque Destruction qu'a lancé le Grolem adverse lui a fait beaucoup de mal. Il supporte la douleur, comme d'habitude. Lonny n'entend rien, évidemment, mais moi si. Je l'entends grogner de l'intérieur de sa Pokéball. J'ai été sorti de la mienne avant le combat. J'ignore si Lonny pensait que voir nos camarades se battre nous aiderait, mais moi ça m'a plutôt angoissé. Surtout quand je réfléchis.
Lonny a rappelé Florizarre. Il va donc m'envoyer à sa place. La fille d'en face le sait bien, elle aussi. Elle sourit. Elle regarde son Chimpenfeu, qui se place au centre du terrain en arborant un air fier et déterminé. Je n'ai pas peur, mais je n'aime pas trop ça. Tout bêtement parce que dans la nature, quand je vivais encore avec ma colonie et que je n'étais qu'un jeune Pomdepik sans défense, ma mère me disait toujours de me tenir le plus loin possible du feu. Se pourrait-il que la mère de Lonny ne lui ait pas dit ?
« Foretress, à toi ! »
Je m'avance. Je ne suis pas rassuré. J'ai peur de perdre. De décevoir Lonny. D'aggraver les souffrances de mon ami, qui devra fatalement prendre ma place. Mais je me concentre. Je dois maintenant faire mon maximum pour remporter ce duel. Renvoyer ce stupide macaque d'où il vient. Gagner, coûte que coûte.
Nous sommes maintenant tous deux au milieu de cette petite arène de combat. J'oublie toutes mes craintes. C'est entre lui et moi. Il ne bouge pas d'un pouce, il attend. Il canalise toutes ses forces pour réagir le plus vite possible dès l'annonce du début de la manche. Je ne m'inquiète pas. Je sais me défendre.
Le micro grésille. Le commentateur tousse. « Dresseurs, attaquez ! »
A l'unisson, Lonny et la fille hurlent leurs instructions. « Chippy ! Attaque Lance-Flamme ! - Foretress ! Contre-le avec ton Tour Rapide ! »
Trop tard. Ce cher Chippy a déjà ouvert la bouche et des flammes d'une envergure effrayante en sortent. Je tente de prendre de l'élan. Je tourne le plus vite possible sur moi-même, je tente un dernier tour qui me permettrait d'éviter les flammes avant qu'elles ne me touchent. Derrière moi, Lonny m'encourage. Je l'entends bien s'époumoner, mais cela ne sert à rien.
Le feu m'a encerclé. A travers le rouge éclatant, je perçois Chippy, qui continue de souffler. Je me demande bien s'il reprendra sa respiration un jour. Mes forces s'amenuisent, je faiblis, je le sens. Ma carapuce me protège, mais elle me brûle. Moi qui la pensais si forte et résistante, je me trompais bien lourdement.
Puis tout s'arrête. Le feu est toujours là, mais je ne me sens plus partir. Je résiste. Alors dans un dernier effort, je me remets à tourner. Je tourne, aussi vite que mes forces me le permettent. Je tourne encore. Puis le feu s'éteint. Chippy, l'air hagard, se demande pourquoi je ne suis pas encore à terre. Je me remets en place, j'entends le public applaudir et Lonny me féliciter derrière moi. Et dans une dernière provocation, je lance un clin d'œil à ce maudit babouin. Je suis toujours là. Et je n'abandonnerai pas. Je souffre pourtant. L'acier de ma coquille brûle mon corps.
Mais je ne supporterai pas une autre attaque. La prochaine offensive me sera fatale, et ce sera au tour de Florizarre. Il n'aimera pas ça. Et il perdra certainement, il est trop affaibli par son affrontement précédent. Je retiens mon souffle. J'espère que Lonny trouvera une solution. Après tout, c'est lui le spécialiste.
Je ne me retourne pas, mais je l'entends aspirer l'air. Puis rien. La fille attend le bon moment pour ordonner à Chippy de m'achever. Le public ne parle plus non plus. Lui aussi est suspendu aux lèvres des dresseurs.
« Foretress, Explose !! »
J'ai mal entendu. Explosion. On n'utilise jamais cette attaque. Je dois réagir avant que Chippy n'en profite pour me lancer le coup de grâce. L'explosion est dangereuse, elle pourrait me tuer. La fille regarde Lonny, l'air effaré. Elle non plus ne comprend pas. Le public s'est tu. Maintenant, tout est entre mes mains. S'il voit que j'hésite, Chippy attaquera. Mais si je me montre déterminé, il perdra à coup sûr.
Un dixième de seconde. Un dixième de seconde de retard et me ramener à l'intérieur de ma balle sera inutile. Mort. Je ne veux pas mourir. L'explosion est dangereuse. Dois-je écouter sans sourciller les directives de Lonny et courir le risque d'y perdre la vie ? Ou dois-je me protéger, désobéir, faire perdre ce combat à mon dresseur, et ne plus être appelé au combat ? Je doute. De moi, de Lonny, de cette attaque. Que faire ? J'appartiens à mon dresseur, mais ma vie m'appartient. A moi.
La foule me regarde. Ils sont debouts. Ils attendent. L'attaque Explosion est rarement utilisée dans des petits combats, et elle est très spectaculaire. Certains n'en ont sûrement jamais vu, d'autres n'en verront jamais. Le commentateur me regarde. Il est là. La bouche ouverte. Le micro continue son grésillement incessant. A son âge, c'est peut-être le match de sa vie. Commenter une explosion, en direct, à seulement quelques mètres du lanceur. La fille d'en face me regarde. Je ne sais pas si elle a de la peine pour moi ou si elle essaye de me convaincre de renoncer pour lancer son attaque. Elle veut gagner, je la comprends. Lonny me regarde. Lui aussi veut gagner. Je sais qu'il en a envie. Mais il nous aime. Il ne ferait rien qui pourrait nous blesser grièvement. Il attend. Il sait que j'hésite. Mais il a un plan. J'en suis sûr. Un plan qui pourrait échouer, tout compte fait. Et Chippy me regarde. Il me toise. Le bruit de l'explosion, la foule qui crie, le commentateur qui s'égosille sur son micro, autant de distractions qui pourraient me coûter cher. Il se demande si je fais assez confiance à mon dresseur pour tenter cette attaque.
Oui. Je me concentre. Rien ne transparaît. Tout le monde a toujours l'air d'attendre. Aucun bruit. La pression monte dans ma carapace. Mon corps se tend, il tente de s'échapper de cette coquille maintenant trop petite. Je pousse. Je ferme les yeux. Je focalise toute mon énergie sur l'explosion. Je n'avais jamais explosé avant. Je ne me pose plus de question, c'est instinctif. Me concentrer sur l'explosion. Penser à l'explosion. Le boom qui viendra clore ce duel entre Chippy le primate et moi. L'énergie de mon corps devient plus forte, tellement plus forte que celle que je peux contenir. Je la sens fendiller ma coquille, s'échapper par les crevasses. Toujours plus intense, toujours plus forte. Elle s'échappe de plus en plus vite. Puis son apogée. Une seconde de conscience, une détonation au loin. Très loin ...
...
Des Leveinard qui s'activent. Ils parlent trop fort. Trop vite. Trop aigu. J'ai mal à la tête. Mal. La douleur. Elle est là, je la sens.
J'ai réussi. On a réussi.
Article ajouté le Dimanche 16 Septembre 2012 à 17h06 |
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