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Concours de fanfics de Noël 2008 : création de mizmaz

Le repos éternel
Le sol caillouteux en guise de matelas, le ciel grisâtre en guise de couverture, Dame lune, floue, derrière la buée translucide, en guise de veilleuse, Karim, recroquevillé contre un gigantesque chêne, grelottait de froid, se tordait de faim. Salamèche essayait de le réchauffer avec sa flamme…sa flammette… Hélas, celle-ci était bien trop faible pour tenir tête à une si violente tempête, une si capricieuse tourmente… Karim entendait, sentait le verglas craquer sous son poids à chacun de ses mouvements. Quelques feuilles, branches, débris du chêne lui tombaient sur le visage, le couvraient, l'aveuglaient. Et lui qui pensait qu'en traversant cette forêt, qu'en arrivant à cette ville, ce pays des merveilles, il mènerait la vie dont il avait toujours rêvé. Eh bien il faut dire que cela ne serait probablement pas le cas : SDF, il naquit. SDF, il succombera. Il tendit la main vers Salamèche et lui fit signe de s'approcher. Ce dernier s'exécuta. Karim l'enlaça de toutes les forces qui lui restaient. Bien maigres, certes, mais suffisantes pour témoigner de tout l'amour qu'il éprouvait pour son Pokémon. Ses yeux, fourrés dans la poitrine de la bestiole, s'embuaient de larmes amères, froides, glaciales, larmes d'iceberg. Au loin, quelques Pokémons s'agitaient, s'affolaient, couraient dans tout les sens. Karim lâcha la bête à feu lentement avant de s'allonger, la nuque contre le tronc. La portière de ses paupières emprisonna ses yeux verts, ses yeux de savane, lentement. Un sourire énigmatique se dessina sur ses lèvres bleutées. Il entendit un retentissement de pas, sûrement ceux de l'au-delà qui étaient venus le chercher. Il allait enfin quitter cette âpre vie qu'il menait depuis sa naissance. Il aurait bien voulu avoir été quelqu'un, avoir fait quelque chose de sa vie, hélas, cela ne fut pas le cas. Il fut un moins-que-rien, un va-nu-pieds, au sens propre comme au figuré. Un va-nu-pieds qui, plus que n'importe qui, mérite ce repos éternel…
« -Réveille-toi, salopard ! »
C'était une voix rauque, si rauque qu'il en avait le cœur qui tremblotait. Il imaginait la voix des anges plus douce que cela. Sans parler du langage. Peut-être était-il en enfer… Pourtant, il croyait avoir tout fait pour éviter cela. Il ouvrit les yeux lentement. Devant lui, se tenait deux êtres, pour le moins : inquiétants. L'un d'eux, un homme énorme et robuste comme un buffle, portait un manteau rouge, épais. Sur chacune de ses larges épaules, reposait un tas de neige salie par les débris des arbres. Une toque noire, en feutre, cachait son crane dégarni. Une barbe noirâtre pendait le long de son menton et ses joues. L'autre, homme de taille effilé, portait une chemise à carreaux et serrait dans sa main droite une bouteille verte, en verre, de laquelle il buvait, fréquemment, des gorgées au goulot. Le décor était étrangement identique à celui de la forêt.
« -Qui suis-je ? Où suis-je ? »
La réponse fut aussi saugrenue que douloureuse : un coup de poing en pleine gueule. Salamèche essayait de le défendre, hélas, il ne pouvait exécuter aucune attaque par un tel froid. Il essaya de s'approcher du dégénéré et fut aussitôt éloigné, terrassé par une violente mornifle. Karim avait mal, partout, froid, peur, faim… Tout lui paraissait flou. Il ferma les yeux lentement. Un sourire énigmatique se dessina sur ses lèvres ensanglantées. Il entendait… il n'entendait rien…le calme absolu… silence de mort… l'au-delà ! Il ouvrit les yeux lentement. Il se trouvait dans une pièce si évasé…si large… quelques machines pleines de boutons et quelques écrans se trouvaient en face de lui. A l'autre bout de la pièce : les deux inquiétants. Eux aussi au paradis ? Paradis ? Cette pièce n'avait pas l'allure d'un paradis. Non, cela n'était surement pas le paradis… C'était quoi alors ? Les deux étaient ligotés. Il essaya de se lever… lui aussi était ligoté.
« -Merde ! Je ne trouve plus ma Pokéball ! », Marmonna le costaud à son ami. C'est à ce moment-là que Karim remarqua l'absence de Salamèche. Il commença à l'interpeller. Rien… rien de chez rien…
« -Salamèche ! Salamèche ! Où es-tu, Salamèche ? »
Un éclat de rire grimaçant, sarcastique se fit entendre.
« -Regardez-moi ça ! Comme il est mignon, comme ça, à appeler son Pokémon ! »
C'était un vieil homme à l'allure de savant : petit de taille…très petit, crâne dégarni, tablier blanc et éprouvette dans la main gauche, quant à la main droite… elle était…bizarre…robotique. Le vieux était assis sur l'épaule d'un Mackogneur géant… géant comme Karim n'en avait jamais vu !
« -Salamèche… Où est Salamèche ? »
Quelque chose lui disait que ce savant fou savait où était Salamèche. Quelque chose lui disait aussi que Salamèche n'était pas dans le plus luxueux des états… les plus princières conditions. Cet homme ne lui inspirait pas confiance. Il lui rappelait ces vieux fous qu'il voyait dans le bois où il passait la nuit de temps en temps, penchés sur le sol, ramassant des Pokémons insectes… ces crasseux Pokémons… léchant la bave de ceux-là… et puis disant dans un chuchotement solennel : « Intéressant… ». A cause d'eux, il avait essayé de gouter à cette bave, apparemment, intéressante. A cause d'eux, il avait vomi tout ce qu'il avait mangé. A cause d'eux, il avait galéré des heures pour trouver quelque chose de digeste à avaler… de quoi remplir son ventre vide…son estomac démuni…
« -Salamèche ? Eh bien, figure-toi que Salamèche va servir à une noble cause…
-Une noble cause ? Rendez-moi Salamèche ! »
Karim criaillait de toutes ses forces. Il essayait de se déligoter, en vain. Il était si bien attaché. Progressivement, il retrouva son calme.
« -Quesque vous allez faire de Salamèche ?, dit-il d'une voix tremblante.
-Tu ne seras sûrement pas d'accord si je te le disais. Dis-toi seulement que Salamèche va servir à une noble cause.
-Qu'allez-vous faire de Salamèche ?, cria-t-il.
-D'accord…D'accord…Puisque tu insistes… Hum…hum… Eh bien je suis le professeur Aïachi. Je bossais, naguère, dans un projet…mon projet ! J'avais tout fait : les calculs, les expériences, tout…TOUT ! Mon projet consistait à donner aux Pokémons une autre tâche que celle de combattre comme des brutes, à tout bout de champs... Non, mais je me demande bien quel espèce de crétin de je-ne-sais-quoi a eu l'idée stupide et saugrenue de faire combattre les Pokémons ! Faire combattre des Pokémons quand on peut éclairer une ville entière grâce à l'énergie qu'ils libèrent ! Voilà mon idée ! Faire des centrales où l'on utiliserait l'énergie produite par des Pokémons ! Et figure-toi, ce que l'on m'a répondu quand je l'ai présenté, mon projet ?! Ces crétins de pseudo-scientifiques pensent que mon projet est affreux ! Non mais affreux ! Tu te rends compte ! Toute une carrière foutue en l'air ! L'homme et les Pokémons doivent vivre dans le respect et l'harmonie disaient-ils ! Allez vous faire voir, salopards que vous êtes ! Allez vous faire pendre ! Depuis ce jour où l'on a détruit ma vie…où l'on m'a détruit, je ne pense qu'à une chose…une seule chose : la vengeance ! J'ai commencé par capturer quelques Pokémons de cette forêt paumée. Nuls étaient ces Pokémons…nuls de chez nuls ! J'aurais besoin d'une dizaine pour produire l'énergie d'un seul dressé ! Depuis que j'ai découvert cela, j'ai commencé à voler les Pokémons des autres… VOLER ! Voyez comme l'on m'a aplatit ! Avili, abaissé, voilà ce que l'on m'a fait ! J'ai mis au point une bombe qui explosera avec l'énergie de tous ces Pokémons que j'ai concoctés ! Ils vont voir à quel point l'énergie produite par les Pokémons peut être énorme ! Pour ce qui est du quand : cette nuit est l'heureuse élue. La veille de Noël ! »
Noël ? Karim n'avait jamais eu la chance de connaitre vraiment cette fête. Le seul cadeau qu'il ait eu pour Noël, de toute sa vie, fut un porte-clefs en forme Pokéball. C'était son père qui le lui avait offert, ce cadeau ne l'avait plus quitté de ce jour. Ce même porte-clefs n'avait jamais eu la chance de faire son devoir, à savoir : porter des clefs. Il pendait, là, attaché à sa ceinture, depuis une éternité. Karim disait que c'était son porte-bonheur. On plaisantait souvent en lui disant que son porte-bonheur ne lui avait pas vraiment porté bonheur.
« -Maintenant, tu sais beaucoup trop de choses pour que je puisse te libérer. Tu vas rester, là, avec moi. Nous verrons tous ensemble de quoi notre bombe est capable !
-Vous êtes ignoble ! Vous êtes…vous êtes…
-Je suis quoi ?, répondit le psychopathe dans un ton sarcastique.
-Vous êtes un incapable, voilà, ce que vous êtes : un incapable !
-C'est ce qu'on verra quand la bombe explosera !
-Je suis écœuré…vous êtes un monstre !
-Merci du compliment ! Maintenant tu vas fermer un peu ta gueule. Je te trouve un peu trop bavard pour mon goût. Mackogneur, fais ce que tu as à faire ! »
Karim s'attendait à ce que le Mackogneur le terrasse d'une violente mornifle. Ce ne fût pas le cas. Mackogneur décolla, délicatement, un morceau de scotch d'un rouleau et le lui colla sur la bouche. Karim essaya de placer une dernière injure, en vain. Il regarda le savant fou s'éloigner puis s'éclipser derrière une porte. Pendant les heures qui suivirent, Karim essaya, vainement, de se détacher. Après quoi, il fut obligé d'écouter la parlotte à dormir debout des deux hommes sans pouvoir y participer.
Karim entendit une espèce de crissement derrière lui. Il jeta un coup d'œil par-dessus son épaule : un Ratatta était en train de grignoter la corde avec laquelle il était ligoté. Cela pourrait-il être vrai, ou bien est-ce le fruit d'une illusion due à plus de vingt-quatre heures de jeûne ? Hassan pouvait-il être là ? Le Ratatta avait réussi à couper la corde. Karim regarda ses mains, il ne les avait pas vues depuis des heures, les traces de la corde étaient encore gravées dans son poignet. Il ressentait une légère douleur à cet endroit. Il enleva le scotch qui le rendait muet. Il eut un sentiment de liberté jamais ressenti auparavant. Il remarqua, sur la queue du Ratatta, un petit bout de papier, attaché avec une ficelle. Il le prit et le déroula.
« -Eh, vous-autres ! Je vous détache à une condition…
-Quoi, salopa…mon ami ?
-Quelqu'un de vous deux sait lire ?
-Oui, moi… », Marmonna l'effilé.
Il lui montra le bout de papier et lui demanda de le lire.
« -Tu me détaches et je le lis…
-Tu le lis et je te détache ! »
L'infortuné ivrogne n'avait rien d'autre à faire que de lire le bout de papier.
«-le code pour ouvrir la porte rouge est : 19ALD3. Je suis derrière celle-ci. Hassan.
-L'imbécile ! Il a oublié que je ne sais pas lire…, ricana Karim
-Bon, tu nous détache maintenant ?
-OK…OK… »
Il les détacha et leur demanda de le suivre. Il balaya la pièce du regard à la recherche d'une porte rouge. Il y en avait effectivement une. Ils se dirigèrent, à la queue leu leu, vers celle-ci. La porte n'avait pas de poignet. Une espèce de clavier était collé au mur à coté de celle-ci.
« -Laisse-moi faire.
-Quoi ?
-Donne-moi cette feuille. »
Karim s'exécuta. L'ivrogne fixa le bout de papier pendant cinq ou six seconde puis pianota quelques lettres et chiffres sur le clavier. La porte s'ouvrit, comme par magie. Karim resta quelques secondes, éberlué, avant de réaliser ce qui venait de se passer. Derrière celle-ci, apparut Hassan, souriant, les bras ouverts.
« -Cela fait si longtemps !, dit Hamid en se jetant dans les bras de Hassan.
-Hamid, je ne pense que ce soit le moment… On a beaucoup à faire et très peu de temps. Bon, je ne vais trop tourner autour du pot. Voilà ce que j'ai découvert : pour neutraliser cette bombe, on doit couper l'électricité dans ce bâtiment. Pour couper l'électricité, on doit détacher ces deux fils électriques, dit-il d'un ton sérieux en montrant deux fils attaché avec du scotch, Or, tout dans ce bâtiment, tout, y comprit les portes, marche avec l'électricité, et ces fils sont à l'intérieur du bâtiment. Un vrai casse-tête. Celui qui coupera ces fils restera, là, pour le restant de ses jours. Forcer la porte ? N'y pense même pas. Trouer le mur ? De même. Les matériaux et la technologie utilisés dans ce bâtiment sont…inébranlables. Du jamais vu !
-Et comment on va faire ?
-C'est Ratatta qui coupera les fils…, chuchota-t-il d'un ton désolé.
-Ratatta ?! Mais il est avec toi depuis ta plus tendre enfance ! C'est ton premier Pokémon ! Et tu ne l'as jamais laissé évoluer tellement tu l'aimes ! C'est impossible ! Tu ne peux pas vivre sans lui…
-C'est soit un rongeur qui crève, soit toute une ville…
-C'est moi qui crèverait. Au moins, j'aurais sauvé des milliers de gens. J'ai toujours rêvé d'être un héros.
-Non, je ne te laisserai pas faire. »
Karim répondit avec un discours plein d'émotion que je ne vais pas citer pour cause de longueur. Sachez seulement qu'il a su convaincre Hassan. Après des adieux lugubres où les larmes coulèrent à flot, Karim demanda à Hassan de retrouver Salamèche et de prendre soin de lui. Hassan lui répondit qu'il avait délivré tous les Pokémons que le professeur avait emprisonné et que ce savant fou était ligoté dans la pièce contiguë. Hassan et les deux ivrognes trainèrent vers la sortie du bâtiment. La porte rouge se fermait lentement. Au fur et à mesure que les deux portières se rapprochaient, Karim espérait trouver un monde meilleur dans l'au-delà. Cet au-delà qu'il avait, tant de fois, frôlée. Il entendit la voix de son ami :
« Tu peux y aller ! »
Karim décolla le scotch qui attachait les deux fils, les détacha, s'allongea par terre et mit une main sur son cœur. Il jeta un dernier regard à ce monde désastreux puis ferma les yeux. Un sourire énigmatique se dessina sur ses lèvres parfaites. Un écho solennel retentissait dans le plus profond de ses oreilles : « SDF tu naquis…héros tu succomberas ! » Une mort dont il était fière…le plus beau cadeau de Noël que l'on pouvait lui offrir. La voix redisait : « Repose en paix. Toi, plus que n'importe qui, mérites ce repos éternel… »
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