Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

Crossworlds de Khimeira



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Khimeira - Voir le profil
» Créé le 13/02/2014 à 22:37
» Dernière mise à jour le 28/04/2014 à 15:55

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
Chapitre 2: Point of no return
18 avril 2012
Paris, France
Point de vue: Amélie


"Tu dors ?"

J'émergeai lentement, pensant qu'il devait être largement l'heure de se réveiller, mais lorsque j'ouvris les yeux pour essayer de m'accommoder à la lumière, je n'en vis justement pas. En fait, je vis la lumière de la lune se refléter sur la fenêtre, et rien d'autre.
Je me levai et appuyai sur le radio-réveil pour regarder l'heure et voir quelle heure il était, parce qu'en avril je me doutais que si je me réveillais alors qu'il faisait encore nuit, c'est qu'il devait être très tôt. Quatre heures vingt-cinq du matin. Je soufflai du nez.

-Pourquoi tu m'as réveillée à cette heure-ci ? On est en pleine nuit, sérieux...
"C'est parce que ton ordinateur portable s'est éteint à cause de la batterie."

Je geignis légèrement, histoire de faire ressentir ma déception.

-Et tu me réveilles pour ça ? lançai-je à Zorua la voix cassée par le fait de vouloir dormir tranquillement et le fait d'être dérangée au beau milieu de la nuit.
"Disons que... J'ai voulu te réveiller plusieurs fois pendant la nuit, mais étant donné que tu n'as pas répondu j'ai attendu que tu sois à un moment où il était plus facile de te réveiller, et..."
-Tu sais, tu aurais pu simplement me prévenir que le fil de recharge était débranché et que l'ordi allait s'éteindre...
"Je l'ai fait et tu ne m'as pas répondu..."
-Enfin bref, je me rendors, fais de même s'il te plaît. Et la prochaine fois laisse-moi dormir. Ajoutai-je au Pokémon qui semblait amusé de me voir les cheveux en pétard.
"Comme tu voudras."

Je sentis Zorua bouger, se remettre dans une bonne position sur le pouf, puis s'assoupir. Il s'était endormi. Quant à moi, je n'arrivais pas à me rendormir, et restai regarder le plafond pendant de longues minutes, avant de partir me coiffer dans la salle de bains puisque je savais qu'il serait impossible de me rendormir, puis descendis dans la cuisine me préparer un café. La journée allait être longue.

* * * * *
J'étais tranquillement assise sur la table de la cuisine, mon café dans les mains et mon portable à ma droite. J'essayai d'émerger lentement de ma nuit un peu chaotique et essayai plus ou moins de lutter contre le sommeil.
Vers sept heures moins cinq, je vis tout d'abord un bac à linge entrer dans la cuisine en flottant. Au moment où je commençai à douter de ma santé mentale ou encore que j'étais en train de me demander si j'avais vraiment dormi, je vis Zorua rentrer juste derrière, ses yeux qui s'illuminaient en violet et qui fixaient le bac à linge. Okay, donc je ne rêvais pas, il était vraiment en train de soulever ce bac à linge par la pensée. Il posa le bac sur la table, monta sur une chaise puis sur la table de la cuisine puis s'allongea en mettant sa tête sur ses pattes.

"J'ai cru bon de te les prendre, qui sait ?" lança-t-il.
-J'ai pas envie de sortir de toute façon... Déjà assez crevée pour m'habiller à sept heures du mat'...

Il ma regarda en penchant la tête sur le côté. Ca y est, il allait encore se passer un truc pas net.

-Pourquoi tu me fixes ? lui lançai-je.
"Ce matin, on va faire du jogging, donc finis vite ta tasse de café parce qu'on part dans cinq minutes..."

Ah non, ça ne fonctionne pas comme ça. Déjà, tu me demandes, et en plus j'ai vraiment pas envie de sortir, donc désolé mais le jogging ce sera pour plus tard.
C'est à ce moment-là que je le vis poser sa patte sur mon bras et lancer:

"Et moi je te dis que tu vas faire du jogging, et - "
-Amélie, ça va? Tu as l'air d'être complètement fatiguée.

Je levai le regard, histoire de montrer à la personne qui était dans la cuisine que j'étais plus que fatiguée, et que je me rapprochais plus d'un zombie. Je vis alors ma mère, qui me regardait avec un sourire et... Une minute.
Ma mère. Et y'a Zorua sur la table de la cuisine.
Ca va crier.

-Ah, tu as déjà tes affaires de prêtes ! Tu pars faire un jogging ?

Le hochement de tête de Zorua et le sourire presque démoniaque qu'il me fit à ce moment-là me fit rapidement comprendre que j'avais plutôt intérêt à dire oui.

-C'est bien, je suis contente de toi. Tu suis enfin les conseils de ta mère pour attirer les garçons...
-Mamaaaaaaaaaan... lui lançai-je, désespérée.
-Oh, ça va, mais le jour où tu trouveras un petit copain qui te corresponde, tu seras contente d'avoir eu les conseils de ta vieille mère !
-Maman ! surenchéris-je.
-Bon, d'accord, d'accord...

Elle repartit alors vers sa chambre, sans demander son reste.
Je continuai alors mon petit-déjeuner, comme si rien ne s'était pa – Attends.
Y'a quelque chose qui va pas, là.
Je cherchai une minute dans ma tête pour essayer de chercher ce qui n'allait pas, quand soudain je vis le quadrupède sur la table.
Zorua. Elle ne l'avait même pas vu.
Il était sur la table de la cuisine, et elle ne l'a pas vu.

Bon, je sais qu'il est sept heures du matin, qu'on est généralement fatigué à cette heure-ci, mais quand même elle aurait pu s'apercevoir qu'il y a un renard noir a crête rouge SUR LA TABLE DE LA CUISINE, et que ce quadrupède me regardait fixement avec un sourire bien narquois depuis cinq minutes grand minimum !

"Ca fait plaisir de voir que quelqu'un est d'accord avec moi." lança Zorua.
-Attends, juste, comment c'est possible que ma mère n'ait pas pu te voir ? Tu t'es rendu invisible ? Ou c'est juste moi qui ai fumé en fait ? Non ?

Il se rapprocha un peu, me regarda dans les yeux et me lança :

"Non."
-Comment ça, non ? A quelle question ?
"Je te laisse deviner."

Puis nous commençâmes à nous regarder en chiens de faïence, et après quelques secondes, Zorua se décida enfin et lança :

"Tu sors ?"
-J'ai dit non.
"C'est pas une question."

Je soufflai du nez. Il commençait légèrement à m'énerver., et je ne voulais pas sortir. Ce n'était pas lui qui allait m'en empêcher.
Soudain, il pencha très lentement sa tête sur le côté. Puis il commença à me faire des yeux de cocker. Je le regardai dans les yeux. Toujours pas. J'avais pas envie de sortir, et ce genre de trucs ne marchait pas avec moi.
Soudain, j'entendis les petits couinements. Il était en train d'imiter le chien battu. Je craquai exactement à ce moment-là.

-Bon, d'accord, t'as gagné, mais je ne partirai pas avant 7 heures et quart, d'accord ? lançai-je.
"Bon, si tu insistes..."

Je soupirai. Au moins, il me laissait un peu de répit, et un peu de temps pour finir mon bol de céréales.

* * * * *
Nous partîmes de l'appartement à 7 heures 15 pétantes. Quand je dis 7 heures 15 pétantes, c'est pas une seconde de plus ni de moins. Et c'était parti pour un jogging interminable dans Paris.
Je n'aimais pas être tirée du lit comme ça, et surtout pas pour faire un jogging, chose qui n'était pas concevable chez moi. Normalement, le matin je dors, je fais une grasse matinée mais pas de jogging.
Le quartier de Montmartre était déjà sensiblement animé ; les fenêtres s'ouvraient lentement, laissant passer l'air frais de ce début de matinée. Le soleil se levait lentement, et entre les gens pressés qui allaient vers le métro pour courir vers leur travail, les touristes matinaux qui prenaient le temps de profiter de la beauté du quartier, et les personnes qui habitaient dans ce quartier et qui regardaient tout ce monde passer avec leur café à la main, le quartier semblait s'éveiller, commencer lentement à prendre les forces nécessaires pour être actif pendant la journée.
J'aurais pu en profiter si je n'étais pas effectivement en train de courir, sous les ordres d'un renard de deux pieds de haut à peine.
Je passai à allure modérée devant un homme qui jouait de la musique avec son accordéon et eus le temps d'écouter quelques notes de la musique qui était jouée. Dans ce quartier, c'était un classique.
Mais avec l'autre qui me surveillait du coin de l'oeil, pas trop le moyen de m'arrêter. Je suais comme une pute à l'église (désolé, mais c'est l'expression) et je respirais comme un phoque parce que j'avais trop couru et j'en pouvais plus, mais pourtant j'étais toujours obligée de courir.
Après un quart d'heure de course intensive, on arriva à l'angle d'une rue. Je vis Zorua tourner et me préparai moi aussi à tourner sans même voir un autre mec qui sortait de la rue dans laquelle j'allais tourner et que je n'avais pas vu, et qui s'écrasa bien entendu contre moi.
Cette situation serait digne d'un cartoon, et aurait pu me faire rire si seulement j'avais voulu faire ce jogging et que j'avais dormi plus de quatre heures cette nuit. J'explosai précisément à ce moment-là :

-Non mais c'est pas possible !

Je regardai le gars sur qui je venais de tomber, au sens propre. Un mec de mon âge, un mètre 80 tout au plus. Pas très musclé, yeux bleus normaux, cheveux noirs. Vraiment pas musclé d'ailleurs.
Il vit d'ailleurs que j'étais énervée, et répliqua d'un ton désolé :

-Excuse-moi, je t'ai pas vu, je suis un peu fatigué et...
-Mais bien sûr, tu peux bien regarder où tu cours, non ? hurlai-je. Déjà que j'ai pas dormi de la nuit, si en plus il faut qu'un mec vienne me heurter pendant un jogging que j'ai pas voulu faire... Faudrait pas abuser, non plus !
-Eh, c'est bon, je me suis excusé, calme-toi ! C'était un accident, et je me suis excusé, qu'est-ce que tu veux de plus ?
"C'est pas bientôt fini ?"

Je regardai Zorua qui, lui, regardait le mec avec un air assez énervé. Je vis le gars le regarder avec un air surpris, l'air de vouloir savoir ce que c'était.

"De une, je sais pourquoi tu me dévisages, je connais très bien la tronche que tu fais, c'est une tronche de quelqu'un qui cherche à comprendre ; c'est la même tronche qu'à tiré Amélie hier, quand elle m'a posé ses questions. De deux, le "renard noir à crête rouge", comme tu l'appelles, s'appelle Zorua. Je pense que tu as pigé, parce que j'ai eu du mal à lui faire comprendre, à l'autre..." lança Zorua, apparemment vexé par cette réflexion.

Intérieurement, je me marrais légèrement. Cool, lui aussi venait d'apprendre que Zorua pouvait lire dans les pensées. Il n'avait pourtant pas l'air si surpris que ça, comme s'il avait plus ou moins l'habitude. Etrange.
Sinon, je remarquai à ce moment-là qu'il n'y avait pas qu'un Pokémon dans cette scène : en effet, une espèce de chacal bipède, tout recouvert de fourrure bleue et pas plus haut que mes jambes, était contre le mur et regardait la scène avec un air blasé. Il avait dû en voir beaucoup d'autres, lui.

"Bon, puisque tu l'as fait, je pense qu'il faut que je me présente à la fille qui me regarde avec l'air de vouloir savoir qui je suis." dit le Pokémon en question (s'il s'agit bien d'un Pokémon...) à Zorua.

Je m'aperçus soudain que le mec j'avais engueulé tout à l'heure me tenait la main, sans le savoir, depuis tout à l'heure. C'aurait pu être mignon, mais étant donné que nous nous connaissions depuis seulement deux minutes ce n'était pas trop possible.
Je retirai alors vivement ma main et la fis s'écraser contre son visage. Il se tint la joue d'un air choqué, tandis que je le fixai avec un regard assez assassin. Non mais oh. Je vais quand même pas faire ami-ami comme ça avec quelqu'un que je connais pas, faut pas pousser mémé dans les orties non plus.

"Je suis Riolu, et j'ai été "recueilli" par Jared il y a quelques jours."

Donc ce mec s'appelle Jared.
… Et j'avais la claire impression de l'avoir déjà vu quelque part. C'était quand même pas le mec auquel je pensais ?

"Enfin, c'est plus moi qui me suis incrusté dans sa vie privée..." continua le Pokémon.
-Tu l'as dit, bouffi, lança le concerné.
"La ferme, toi, je t'ai pas causé. Donc, je reprends... Je me suis donc incrusté dans la vie privée de Jared, donc, et je voulais que ce dernier te rencontre pour voir comment vous réagiriez si on vous mettait tous les deux ensemble. Bon, là ça a assez mal commencé, mais on va bien finir par y arriver, pas vrai Zorua ?"
"Mouais.", lança le Pokémon renard tout en fixant le mec du coin de l'oeil.

Je regardai les deux Pokémon discuter avec un air assez choqué. Ils voulaient qu'on se mette ensemble ? C'était presque surréaliste.
Pourtant, je trouvais quelque chose de chez lui d'attirant, qui faisait que je pouvais m'approcher de lui. Je ne savais pas exactement quoi, c'était une espèce d'intuition féminine que j'avais et que j'avais envie de suivre.
Le silence dura quelques secondes, pendant lesquelles, je pense, moi et ce Jared étions tous les deux un peu gênés. Je finis finalement par faire le premier pas :

-Amélie Grizals, enchantée de te voir. Lançai-je en tendant la main.

J'attendis alors la réponse de l'autre côté. Il me regarda avec un air assez choqué. Je suppose qu'il avait compris, mais j'avais l'impression qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Il me tendit la main en retour, me la serra et lança alors, sur un ton formel :

-Jared Anderson, de même.

J'avais bloqué exactement à ce moment-là. C'était lui.
Je le cherchais depuis des années, et il était enfin revenu.

-Quelque chose ne va pas ? Lança Jared.

Je bloquai une nouvelle fois, le regardant dans les yeux avec un regard vide.

-J'ai l'impression qu'on se connaît... ajoutai-je.

* * * * *
Nous étions tous les deux assis sur un banc, essayant de digérer l'information presque choquante qui venait d'être lancée.
Ca faisait... six ? Sept ans que je ne l'avais pas vu ? Et là je le revois. Il a tellement changé, c'est tellement fou.

-Alors t'es finalement revenue sur Paris... commença-t-il.
-Ouais, lançai-je.
-Ca fait longtemps qu'on s'est pas vus, c'est marrant de te voir comme ça six ans après...
-Ouais.
-Et puis t'as bien changé, depuis le temps, je t'avais pas reconnue...
-Ouais.
-Tu vas continuer à parler en monosyllabes ? Ajouta-t-il avec un regard amusé.
-Ouais.

Il rigola un peu, et je le suivis. Mon rire était un peu plus nerveux par contre.
Je restais complètement choquée. Comment se faisait-il que, plusieurs années après, je finisse par revoir quelqu'un que j'aimais à cette époque ? Et avec ce Riolu, qui disait qu'ils voulaient nous mettre ensemble... Comment avaient-ils pu amener Jared jusqu'à moi, alors que nous étions amoureux l'un de l'autre plusieurs années en arrière ? Ca ne pouvait pas ne pas être lié au hasard, ce n'était pas possible. C'était complètement improbable.
Je sentis une main sur la mienne et levai le regard pour voir Jared, me souriant. Je lui souris légèrement puis détournai le regard en rougissant.
Après plusieurs secondes de blanc, nous finîmes finalement par reprendre la conversation, essayer de savoir qu'est-ce qu'on était devenus pendant ce temps, qu'est-ce qu'on était devenus chacun de notre côté, où on avait fini par faire nos études, et tout ce genre de trucs que pouvaient se raconter des personnes qui se voyaient pour la première fois depuis des années.
Soudain, Jared me regarda dans les yeux ; je lui rendis le regard et il me lança :

-On va chez toi ou chez moi ?
-Ben, chez moi, étant donné qu'on est plus près... répondis-je.

Nous nous levâmes tous les deux puis commençâmes à arriver dans le quartier de Montmartre. Cette fois-ci, nous décidâmes de marcher, puisqu'après un jogging nous n'avions pas envie d'en faire un autre pour rentrer.
Nous arrivâmes devant l'accordéoniste, qui jouait toujours la même musique depuis que j'étais passée devant lui une première fois. Nous nous arrêtâmes quelques secondes pour profiter de la musique, puis repartîmes pour monter les marches qui allaient jusqu'au quartier de Montmartre.
Le quartier semblait un peu plus vide maintenant que tous ceux qui partaient au travail étaient partis. La place, vers huit heures du matin, semblait plus remplie de touristes qui profitaient du fait qu'il était tôt pour prendre des photos du Sacré-Coeur. Nous passâmes devant une flopée de touristes d'une nationalité asiatique que nous ne cherchâmes pas à deviner, et qui était en train de se prendre en photo devant le monument, puis nous arrivâmes cinq minutes plus tard au niveau de mon appartement.
Dans l'escalier qui menait au cinquième étage – étant donné qu'il n'y avait pas d'ascenseur – nous essayâmes de courser les deux Pokémon, ce qui s'est avéré impossible puisqu'alors que nous avions cru les avoir semés, nous les vîmes devant la porte, en train de nous attendre, comme s'ils s'étaient téléportés. Nous ne cherchâmes plus longtemps à comprendre les trucs surréalistes qui nous arrivaient depuis hier et entrâmes directement dans l'appartement, pour finalement nous installer dans la cuisine.
Nous continuâmes alors de discuter de nos études, et nous parlâmes tellement que je n'entendis même pas Lucie faire irruption dans la cuisine, vers 9 heures du matin.
Elle nous regarda avec un sourire jusqu'aux oreilles, et je m'aperçus qu'il y avait Jared à côté de moi. Oups.

-Han ! Amélie, t'as un nouveau petit copain ? Quand Maman va savoir ça... lança-t-elle.

Elle remonta à toute vitesse vers la chambre de ma mère pour lui annoncer la nouvelle. Je le savais. Je savais qu'elle allait le faire, je sais pas pourquoi.
C'est à ce moment-là que nous quatre (à savoir: Jared, Riolu, Zorua et moi) nous regardâmes, puis je lançai :

-J'ai pas envie que tu voies mes parents. On se casse ?
-On va chez moi ?
-Vendu.

Nous nous levâmes puis partîmes en quatrième vitesse avant même que mes parents n'aient pu arriver en bas, puis nous courûmes hors de l'appartement le plus vite possible pour que les parents ne nous remarquent pas.
Nous passâmes une troisième fois devant l'accordéoniste, en courant ce coup-ci, et nous arrêtâmes juste à un croisement, essoufflés et en rigolant bêtement.

-Ca, c'est de la course.
-Au pire, commençai-je entre deux inspirations, ça nous fait un deuxième jogging...

Nous rîmes en cœur. Bon, après ma sœur risque de pas apprécier le fait qu'on est un peu partis comme des voleurs, mais c'est pas grave.

* * * * *
Nous arrivâmes quelques minutes plus tard devant chez lui. Il tourna la clé dans la porte, puis l'ouvrit et m'invita à rentrer. J'acceptai vivement, puis il rentra et ferma la porte derrière lui. Je pus alors voir à quoi ressemblait l'endroit qui allait sans doute devenir mon "refuge" quand j'en aurai marre.
Un petit 40 mètres carrés – ce qui, pour une personne seule, était carrément raisonnable – avec une salle de bains, une chambre et un salon - salle à manger - cuisine, avec un pouf dans la chambre sur lequel Riolu s'était empressé de se jeter à peine arrivé. Zorua ne mit pas longtemps avant de le suivre, et nous regardâmes, amusés, les deux Pokémon en train de se disputer le pouf.
Nous nous installâmes sur la table du salon, et mon hôte prit l'initiative de sortir un plat de cookies du placard. Il expliqua qu'il avait été obligé de cacher ce plat pendant des heures pour ne pas se les faire bouffer par Riolu – il était carrément prévoyant sur ce coup-là – et me les présenta.
Il en restait cinq ou six – sur les trente qu'il avait préparés pour la semaine, avait-il précisé – et nous en prîmes deux chacun avant de ranger la boîte. Nous continuâmes alors de discuter de notre passé, et je remarquai que depuis tout à l'heure on avait parlé uniquement de moi.

-Dis, Jared... lui lançai-je, pour essayer de voir.

Il se retourna avec un grand sourire.

-C'est à propos des cookies, c'est ça ? plaisanta-t-il.
-Mais non, ils sont très bons, tes cookies ! Je voulais juste te demander quelque chose...
-Ouais, tant qu'à faire. ajouta-t-il en s'appuyant contre la porte de la cuisine.
-Tes parents, ils sont devenus quoi ? Parce qu'on parle des miens depuis tout à l'heure, mais j'avais déjà croisé les tiens, qui étaient très sympathiques au demeurant, et je me demandais qu'est-ce qu'ils étaient devenus, pourquoi tu te retrouves tout seul, et tout ça...

Gros silence. Je le vis détourner le regard, et sentais que j'avais touché une corde sensible.

-Si tu veux, tu peux ne pas en parler... continuai-je.
-Ce serait préférable, ajouta-t-il avec les yeux baissés.

Je n'insistai pas. Je sentais qu'il leur était arrivé quelque chose de grave rien qu'au ton que Jared avait pris. Vu sa réaction, ça paraît assez dégueulasse de le dire comme ça mais je pense qu'ils avaient dû mourir.
Nous passâmes donc directement à un autre sujet.

-Et donc, pour tes études...
-Je les paye moi-même, je bosse à côté en gagnant neuf cents euros par mois en faisant des petits boulots par-ci par-là. Ces neuf cents euros sont bouffés directement dans les factures et le loyer par ailleurs, et j'ai un budget bouffe de cent euros par mois ce pourquoi je me suis décidé à me rationner et à faire la cuisine moi-même...
-Et les cookies ?
-C'est normalement mon dessert. Avec un par jour, je suis sensé tenir un mois, mais Riolu a cru drôle d'en bouffer vingt-cinq en deux jours... ironisa-t-il en rigolant.
-Je vois le genre, ouais.

Nous rigolâmes légèrement puis s'en suivit un léger blanc. Je baissai les yeux puis repensai à la petite discussion de tout à l'heure sur ses parents. Je me sentais un peu mal à l'aise pour lui, obligé de subir ce genre de choses, et fallait avouer que j'y étais allée un peu fort.

-Jared... Je m'excuse, pour tout à l'heure...
-T'inquiète, c'est pas grave, certains l'ont fait de façon beaucoup plus cash que toi.

Il me fit un petit sourire, que je lui rendis. Il ne l'avait pas trop mal pris, c'était une bonne chose.
Soudain, après quelques secondes de blanc, nous vîmes alors les deux Pokémon, qui avaient apparemment fini de se disputer le pouf, revenir dans le salon et s'installer sur deux chaises. Un nouveau blanc se fit entendre.

-Dis, Jared... lançai-je à Jared.
-Ouais ?
-Rappelle-moi.... quelle est l'utilité d'avoir quatre chaises alors que tu vis seul chez toi ?

Jared n'eut même pas le temps d'ouvrir la bouche que Riolu lança sèchement un « Aucune » qui fit souffler du nez le gars en face de moi, vexé par le fait qu'on lui ait encore une fois coupé la parole.
Nous nous tournâmes lentement vers le chacal bipède, qui lança :

"Okay, c'est bon, je n'ai rien dit. Mais je tenais juste à le dire, hein."

Mon homologue masculin leva les yeux au ciel.
Finalement, je me résolus à partir vers midi pour rentrer à la maison, après bien sûr une longue étreinte entre nous deux à la porte de chez lui. C'était la première fois depuis longtemps qu'on se voyait, et notre amour n'avait pas changé.
Je sentis un petit pincement au cœur à l'idée de rentrer chez moi ; le fait de revoir Jared – ou du moins de savoir que c'était lui – m'a fait l'effet d'un boomerang. J'étais arrivée à un point mort dans ma vie, dans lequel je n'avais plus de relation stable, et Jared arrivait, ou du moins revenait, pile au bon moment. J'avais enfin trouvé quelqu'un à qui me raccrocher.
J'avais enfin trouvé quelqu'un à aimer.

* * * * *
"Tu sais qu'il te regardait avec insistance ?"

Je ne répondis pas, trop occupée par ce que j'étais en train de faire.
J'étais revenue vers midi et demie chez moi. Ma sœur faisait la tronche parce que j'étais partie sans que mes parents puissent me prendre sur le fait, mais mes parents me firent un sourire en arrivant, et je leur rendis un sourire très sincère avant de retourner vers ma chambre, Zorua sur mon épaule.
J'avais ensuite passé l'après-midi entre la révision de mon oral et l'envoi de multiples textos à Jared. Je commençais déjà à rattraper le temps perdu.

Il était environ dix-neuf heures trente lorsque Zorua me lança cette phrase. A ce moment-là, j'étais allongée sur mon lit, regardant l'album de mes photos de classe. J'y voyais des têtes dont j'avais oublié le nom, d'autres qui étaient parti loin, deux ou trois avec qui j'avais gardé contact et avec qui je discutais de temps en temps.
Sauf qu'arrivés à la photo de classe de sixième, je me rends compte qu'un jeune, sourire un peu niais, l'air timide et chétif, regardait l'objectif fixement parmi toutes ces têtes soit sérieuses, soit en mode pimbêche. Je ne mis pas longtemps avant de le reconnaître.
C'est marrant, mais il avait grandement changé. Ce n'était plus le mec un peu gamin que j'avais rencontré en sixième : c'était devenu quelqu'un de mature, sans doute depuis qu'il habitait seul. Je posai ma tête sur l'oreiller, et voyais Zorua s'installer lentement sur le pouf.

"Alors comme ça tu le connaissais ?"
-J'avais fini par l'oublier. Ca faisait tellement longtemps que j'avais pas vu un de mes premiers amours... C'est fou comme le passé peut te revenir dans la tronche en un éclair...

Sur ces mots, je vis Zorua bondir du pouf, puis je vis un flash violet, et enfin Zorua atterrit sur le sol.
Du moins, ça, c'est ce que je pensais.
Car à la place du petit Pokémon mignon que j'avais soi-disant "recueilli" se trouvait un petit garçon, sans doute âgé de onze ans. Je regardai la photo, qui devenait soudain troublante de réalisme.

-Attends... Tu peux te transformer ?
"C'est bizarre, les gens me regardent toujours avec un air ahuri quand je fais ça. Et je vois que ça n'a pas réellement changé..."
-Non, mais... tu viens de prendre l'apparence de Jared ou je suis en train de faire un trip sous champignons ?
"Non, tu ne rêves pas. Je peux prendre son apparence, la tienne et bien d'autres personnes encore..."

Je comprenais de moins en moins pourquoi j'avais accepté de le recueillir. Il me faisait peur, sérieusement. Plus les jours avançaient, plus j'avais peur.
Non, mais sérieusement : il était arrivé comme ça, s'était tapé l'incruste dans ma vie, était capable de faire n'importe quoi et développait tellement de capacités qu'il serait capable de me tuer sans même lever une patte.
Et puis dans trois jours, je reprenais les cours. Génial. Je me demandais comment j'allais faire pour cacher Zorua, avec mes parents et ma sœur qui allaient finir par le voir, me demander ce que c'est, et...

"Tes parents ne peuvent pas me voir, Amélie, et les autres non plus. Rappelle-toi, ta mère ne m'a pas remarqué ce matin quand elle est rentrée dans la cuisine, et ta sœur non plus, et c'est pas faute d'avoir remarqué dans ma direction. Ne va pas paniquer pour ça..." lança Zorua avant de revenir à sa forme d'origine dans un éclair violet et de venir s'asseoir sur le lit.

Je m'allongeai sur le lit, un peu soulagée. Mais il y avait encore trop de questions qui se bousculaient dans ma tête.
Et je ne savais toujours pas pourquoi il était là.