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Informations

» Auteur : Serekai - Voir le profil
» Créé le 22/12/2020 à 13:57
» Dernière mise à jour le 22/12/2020 à 13:57

» Mots-clés :   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Chapitre 21 : Se relever
Mon réveil fut difficile.

Rester couchée contre un mur donnait généralement de sacrées courbatures le matin et je n’y avais pas échappé. C’était encore plus vrai après avoir passé la soirée et la nuit dernière à me morfondre, dormant à peine. Le crépi du mur blanc m'avait laissé des marques profondes dans la peau, mais pas aussi profondes que d'autres. Je sentais la peau de mes joues agressée par les pistes salées que mes larmes avaient dessinées. Le tiraillement sur mes joues rondes et l’impression de sable sous les paupières me poussèrent à me masser les sourcils, mais le premier frottement sur la gauche de mon visage me fit regretter ce réflexe. Les plaies étaient encore là, se rappelant à moi.

Comme si je n’avais pas déjà de rappels suffisants autour de moi. Comme si je ne ressentais pas assez les effets de ma témérité et que j’avais pu oublier les conséquences.

Debout et amorphe, je serrai les poings en revoyant la pokeball close.

Qu’est-ce que je devais faire ?

Je ne m'étais jamais sentie aussi perdue. Je voulais juste un indice, un conseil. J'avais besoin d'un signe ou d'un mot.

Pourquoi est-ce qu’il n’y avait personne pour me dire quoi que ce soit ?

Je ne savais pas quoi faire.

Tout ce que je savais, c’était dans quel état je me trouvais. Je n’allais pas bien, mon estomac était serré et je n’avais pas l’énergie d’aller prendre une douche. Je souffrais à cause de ce petit trou, cette petite fente dans ma poitrine qui pulsait à vif. J’ignorais comment combler cette plaie et si même elle se fermerait un jour.

Tout ici empestait le deuil et le souvenir.

Je ne savais pas ce que je devais faire, mais en regardant mes bottines boueuses, j'avais cependant une certitude. Je ne voulais pas rester ici, je voulais juste mettre le plus de distance entre ce lieu et moi.

C’était probablement pour le meilleur. Je n’allais pas moisir dans cette ville.

Je quittai la chambre, me dirigeant vers la salle principale du centre. Alors que je déposais les clefs sur le petit pupitre de bois stratifié, l’infirmière m’interpella pour me donner une petite lettre datant de la veille.

Après avoir ouvert le pli et avoir pris connaissance de message à l'intérieur, je fourrai l’enveloppe dans ma poche. La missive était une invitation, signée par le vendeur de bicyclettes, m’invitant dans sa boutique pour me remercier.

Je n’avais grand-chose à faire d’autre, à part ressasser ma défaite en renâclant, alors j’acceptais. Je remerciai la préposée, avant de me diriger vers l’enseigne colorée, dont la vitrine servait de support aux publicités les plus variées.

A l’intérieur de la boutique, quelques clients matinaux étaient présents pour acheter des outils d’entretien auprès du vendeur. Il s’agissait du jeune homme de la dernière fois, mais il avait changé par rapport à la dernière fois. Le petit apprenti jouait avec son Mélofée. Il semblait un peu plus épanoui après avoir retrouvé son compagnon qui lui avait manqué. Le pokémon rose aux petites ailes dansait en suivant le doigt de son dresseur, faisant flotter la monnaie des clients, qui finissait dans la caisse.

Le spectacle était attendrissant, mais je dus l’interrompre, les dérangeant dans leur petit jeu. Le Mélofée sembla ne pas m’en tenir rigueur, mais le fils sembla un peu plus agacé.

- Excuse-moi, je cherche ton père. Il a dit vouloir me rencontrer.

- Dans l’arrière boutique, Madame, m'informa t-il en pointant la porte sur laquelle était vissée une plaque interdisant aux clients d’entrer.

Je haussai les épaules, approchant de la porte pour saisir une conversation qui ne me concernait probablement pas.

- Elle a précisé une chose, du genre « Mélofée vient de l’espace, il nous le faut ! » Ils semblaient obsédés par l’espace et par les étoiles. J’ai entendu parler de rayons ...

Je poussai la porte, surprenant le vendeur en pleine conversation avec une personne que je connaissais bien.

- Désolée, je dérange peut-être ? bégayais-je en reconnaissant l’agent Beladonis.

- Pas tellement, soupira l’enquêteur en replaçant le capuchon de son stylo plume, nous en avions presque fini.

Il se tourna, contemplant la plaie immonde sur mon visage.

- Vous êtes vraiment têtue, Mademoiselle Noyer. Vous avez eu de la chance que je sois présent, dit-il sobrement.

- C’était vous le Cradopaud ? demandais-je, me rappelant du pokémon ayant repoussé le Moufflair qui m’avait déchiré la tempe.

- En effet. Je faisais quelques recherches dans leur société, lorsque vous avez débarqué et semé la pagaille. Vous m’avez permis de récupérer de précieuses données mais … si j’avais continué mes fouilles au-lieu d’intervenir, je ne sais pas dans quel état vous auriez fini … ni même si vous auriez survécu. Vos pokémon seraient tombés aux mains de la Team Galaxie.

Tous ces mots me firent trembler, alors que je réalisais l’ampleur de ma témérité et de ma stupidité. Les conséquences auraient pu être gravissimes pour mon équipe et moi-même.

Je me mordis la lèvre, tremblante, me tordant nerveusement les doigts, lorsque le vendeur toussota.

- Je pense que vous pourriez être plus … mesuré, inspecteur. Si la leçon est indéniablement nécessaire, le moment me semble mal venu pour la dispenser. Elle a déjà assez payé chèrement pour l’apprendre.

Beladonis sembla peser ces mots, avant de se montrer plus calme.

- Quoi qu’il en soit, vous avez été chanceuse. Ne comptez pas trop dessus. La Team Galaxie vous a fichée et … ils n’auront pas de pitié la prochaine fois que vous vous mêlerez de leurs affaires.

Il remercia le notable avant de le saluer et de repartir, enfilant son imperméable beige.

L’agent Beladonis passa près de moi, le visage fermé, ses yeux ne m’adressant pas un regard supplémentaire.

Le vendeur de cycles sembla un peu plus détendu une fois l’inspecteur disparu.

- Mademoiselle, je voulais vous remercier de votre aide. Malgré ce que M.Beladonis a pu vous dire, je ne suis pas tout à fait du même avis.

Il posa une main compatissante sur mon épaule, avec un sourire un peu paternaliste.

- Au risque d’être en porte-à-faux avec les paroles ou valeurs de l’inspecteur, je voudrais que vous gardiez en tête que, lorsque j’avais besoin d’aide, c’est vous qui avez osé agir. Pas la police, pas la justice, mais vous. Je voulais vous présenter personnellement mes condoléances et vous offrir un de mes meilleurs vélos-cross pour vous remercier d’avoir retrouvé le pokémon de mon fils. Je sais que c’est peu, mais c’est tout ce que j’ai à offrir.

C’était un beau cadeau, admis-je en le suivant dans la boutique. L’homme était très prolixe sur les réalisations de sa compagnie, vantant les recherches de ses ingénieurs. Il avait un ton très enjoué, exposant les avantages de son cadre en aluminium léger et solide. Il était intarissable sur la qualité des pneumatiques bien gonflés, avec un système de double couche anti-crevaison.

Il me fit cadeau de la belle bicyclette, ainsi que de la pompe et de l’antivol.

Avec un sourire, il plia la béquille, la tige de selle et le cadre, pliant le vélo en seulement quelques secondes.

- Mais, il est tout petit ! m’exclamais-je.

- Il est pliable, nuança t-il. Ce sera très pratique pour vous, accroché à votre sac.

- C’est une belle invention … ça a du vous prendre du temps.

- Des années, en effet. Mais elles n’ont pas été perdues, bien au contraire.

Il était visiblement fier de son travail, me le donnant de bon cœur.

- Je vous remercie. Je vous assure que j’en profiterais beaucoup.

C’est sur ces mots, que je le quittai, essayant le véhicule.

C’était difficile au début, puisque mon équilibre était précaire sur ces deux minces roues. Pourtant, après quelques minutes de tentatives laborieuses, je trouvai l’équilibre sur ce véhicule, parvenant à répartir mon poids et celui de mon sac.

J’avais l’impression d’être une enfant apprenant de nouveau à marcher. Chaque mouvement était un peu hésitant. Souvent, à trop compenser un déséquilibre, on en créait un plus grand.

Je me résolus à tester mes compétences d’équilibriste sur les allées dallées d’un parc voisin, pour m’habituer à pédaler en toute sécurité. Au bout d’une petite demi-heure, alors que je commençais à faire des progrès, une bourrasque violente secoua toute l’allée, faisant vaciller mon vélo, ainsi que plusieurs autres personnes qui poussèrent de petites plaintes surprises ou indignées.

De justesse, je me rattrapai, mettant pied à terre, tandis qu’un pokémon monté atterrit au milieu de l’herbe, sous les exclamations des passants. La bête, musclée et magnifique, avait la peau d’un bleu sombre digne d’une nuit d’été. L’énorme bipède dominait toutes les autres créatures, son profil de squale imposant la crainte et le respect à tous ceux qui le voyaient. Son regard ambré scruta son nouvel environnement, avant qu’il ne pousse un violent rugissement empli d’arrogance.

Mon coeur manqua un bond, alors que je reconnus ce prédateur féroce et iconique. Tout le monde avait du le voir au moins une fois sur une affiche ou dans un clip de publicité, étant donné qu’il était indissociable de sa fameuse maîtresse.

Suite à un ordre sec qui claqua fortement, le pokémon se coucha au sol, permettant à sa dresseuse de descendre avec élégance. La femme vêtue d’une combinaison de cuir noir caressa alors le cou de son pokémon avec douceur.

Cette belle blonde retira les lunettes de moto protégeant ses yeux, les laissant pendre autour de sa gorge, dévoilant ses yeux d’un gris acier.

Le dragon aux écailles saillantes usa de ses griffes acérées pour chasser un petit Aeromite qui lui tournait autour, s’agitant brusquement.

- Calme, César ! ordonna t-elle en tendant son index vers le museau à l’étoile jaune scarifiée.

La maîtresse de la ligue murmura des paroles à son pokémon, avant de se tourner vers moi, marchant avec confiance, sa combinaison de cuir légèrement ouverte sur sa gorge couverte d’une fine pellicule de sueur. La blonde avança, droite et digne, avec cette confiance qui la caractérisait. Je l’avais rencontrée il y a quelques jours, mais maintenant, elle chevauchait son célèbre Carchacrok. Elle me faisait toujours le même effet, m’impressionnant avec son charisme, sa confiance et sa beauté.

- Bonjour Maître, bafouillais-je avant de me calmer.

- Bonjour, jeune dresseuse. J’aimerais que nous puissions parler, si tu le permets.

Je hochai la tête, un peu intimidée, n’osant pas lui refuser quoi que ce soit.

Elle avisa un banc et s’assit, faisant crisser sa combinaison noire, traçant involontairement une marque sur la terre avec ses bottes. Son imposant pokémon se coucha à coté, observant les environs, m’adressant un regard méfiant.

- Je souhaiterais aborder plusieurs choses. Tout d’abord, je souhaiterais te présenter mes condoléances. Je sais ce que c’est …

Son gant de cuir tapota mon épaule en un geste compatissant.

- Vous ne savez pas ce que je ressens, coupais-je, un peu trop acide.

Cynthia inspira, comme agacée.

- J’ai été dresseuse bien avant toi. J’ai suivi un parcours similaire au tien … bien que je sois originaire de Célestia. Mon premier pokémon était Marisa, une petite Evoli et non César. Maintenant, Elizabeth Noyer, j’aimerais te poser une question. A ton avis, combien de pokémon ai-je perdu ?

La question me prit de court. Je n’avais jamais réfléchi à ça. Trop occupée à me lamenter sur mon sort, je n’avais jamais fait preuve d’empathie à ce point.

- Je ne sais pas, mais … c’est pas juste.

- Treize, répondit-elle sobrement. Pourtant, j’ai continué.

La championne regarda le ciel quelques instants, caressant distraitement César.

- Cette perte était injuste et tu ne la méritais pas. Mais j’aimerais que tu sois bien consciente d’une chose … c‘est que la vie n’est jamais juste. Je ne te dirais pas de ne pas pleurer ou ne pas crier ou même t’énerver … mais libérer ta rage ainsi n’aura pas grand intérêt, surtout si tu t’apitoies sur toi-même.

- Alors je dois faire quoi ? grondais-je en découvrant les dents.

- Accepter. C’est difficile, mais beaucoup de dresseurs ont vu la mort et ont perdu des pokémon, parfois à un âge bien plus jeune.

La vision du Keunotor au bord du lac Vérité me revint, avant de s’effacer, remplacée par celle d’une petite fille pleurant à chaudes larmes devant un Cheniti.

Je m’étais comportée avec cette fillette de la même façon que l’avait fait Jupiter avec moi. Je me sentais nauséeuse … mais pourtant j’avais été moins blessée à cette époque, culpabilisant moins et faisant preuve de moins d’empathie.

Hypocrite, me chuchota une voix dans mon oreille.

- La vie est fragile, mais elle continue, récita Cynthia. Tu as droit d’être en colère, mais jamais tu ne dois oublier de réfléchir. Le temps passé à réfléchir n’est que très rarement perdu.

- Vous en savez plus sur la Team Galaxie ? l’interrogeais-je en guettant ses expression, la mine encore basse.

Elle sembla réfléchir, cherchant les mots, mais je savais qu’elle n’était pas totalement ignorante.

- Inutile de te prendre pour une idiote. Ils font du trafic illégal de pokémon, ainsi que des expériences sur l’énergie évolutive. Je n’ai que quelques éléments, grâce aux enquêtes de plusieurs agents, mais ils sont doués pour cacher leurs traces. Tout ce que nous savons, c’est qu’ils cherchent à collecter de grandes quantités d’énergie, mais dans un but qui nous échappe.

- Vous avez pu en arrêter quelques uns ? tentais-je avec espoir.

- Juste du menu fretin. Ces sbires sont souvent ignorants des tenants et aboutissements des commandants. Il y a peu de charges importantes contre eux et la majorité s’en est tirée avec des peines légères. Un mandat d’arrêt a été lancé contre cette Jupiter, mais elle a réussi à échapper à l’agent Beladonis. Ou plutôt, il l’a laissée s’échapper pour s’occuper de toi.

Je serrai les dents, réalisant que j’avais involontairement aidé la Team Galaxie.

- Au moins, tu nous a aidés à démanteler cette branche de l’organisation. Nous pourrons peut-être obtenir plus de données de leurs ordinateurs. C’est toujours mieux que rien.

- Que comptez-vous faire alors ? insistais-je en croisant et décroisant nerveusement les doigts.

- Ce que j’ai à faire, trancha t-elle avec détermination dans ses iris d’acier. J’ai une administration à présider, des combats à mener et une organisation à surveiller.

Je me tus, réalisant que j’avais sans doute été un peu indiscrète.

- Je suppose que toi, dit-elle en me regardant dans les yeux, tu vas reprendre ta route. Trouve un endroit ou enterrer ta pokéball ou dépose-là au mémorial de la tour perdue. Puis, continue et garde la tête haute.

- C’est facile à dire, murmurais-je avec un ton qui laissait poindre une certaine déception.

- Oui, mais pas à faire. S’il suffisait de rester avec les fesses vissées sur une chaise pour réussir, tout le monde triompherait toujours et il y aurait deux gagnants dans chaque combat.

Elle me sourit, s’avançant d’une façon un peu trop proche à mon goût, me mettant mal à l’aise.

- Continue et crois en toi, jeune dresseuse. La Team Galaxie risque de se trouver de nouveau en travers de ta route, alors … prépare-toi et sois prudente.

- Bel … L’agent Beladonis m’a conseillée de m’écarter de leur route.

- Parce que tu penses pouvoir disparaître de leur radar, maintenant que tu as attaqué une de leurs bases ? Navrée de te détromper, mais tu es désormais mêlée à tout ça. Il va falloir vivre avec.

Je déglutis, réalisant que j’avais provoqué un groupe criminel. Je ne savais pas comment j’allais appréhender ce nouveau développement.

- J’ai quelque chose pour toi, me dit-elle subitement, attisant ma curiosité.

Elle fouilla dans son sac, prenant une boite de métal. Elle l’ouvrit et me dévoila l’intérieur. Autour de l’épaisse masse de mousse protectrice, le coffret contenait un gros œuf blanc, orné de motifs bleus et rouges.

- Je te donne cet œuf. Je sais qu’il ne remplacera jamais ta perte, mais … la vie et la mort sont un cycle. Une nouvelle vie pourra en sortir.

- Pourquoi faites-vous ça ? m’étonnais-je. Pourquoi tant de favoritisme ?

- Parce que je sais reconnaître une dresseuse d’exception. Je suis certaine que tu t’occuperas bien de ce pokémon.

Sur ce, Cynthia se releva et siffla César. Le pokémon imita sa dresseuse, avant d’être chevauché par la femme vêtue de cuir. Dès que Cynthia eut replacé ses lunettes de protection, elle donna l’ordre à son pokémon de s’envoler. César fléchit ses puissants membres postérieurs et bondit avant de replier ses bras et de filer dans les cieux à la vitesse du son.