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Informations

» Auteur : Serekai - Voir le profil
» Créé le 29/10/2020 à 03:59
» Dernière mise à jour le 29/10/2020 à 03:59

» Mots-clés :   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Chapitre 17 : Dans les souterrains de Sinnoh
Les contreforts cahoteux et couverts d'éboulis de la ravine étaient comme un paysage issu d'une œuvre dadaïste, dessinant un monde étrange et irrégulier au point de ne pas sembler naturel. L'eau des torrents mugissait au loin, ajoutant une touche de brutalité animale à tout ce tableau. C'était un curieux agrégat, assurément. Je me plaisais à l'observer et à le parcourir, lorsque un de ces cailloux bombés se suréleva.

Au milieu de tout ces rocs, un homme émergea du sol avec deux gros seaux emplis de graviers et de terre ocre. Son visage était dissimulé par une épaisse barbe crasseuse, tandis qu'un gros casque couvrait sa tête et ses yeux. Il regarda autour de lui, un peu comme un Rongourmand devant des noix, avant de s'extraire du trou qu'il parcourait.

- Bonjour dresseuse ! s'écria t-il en éteignant la lampe sur son casque.

- Euh … bonjour, saluais-je en retour, me remettant de cette surprise. Que faisiez-vous, si ce n'est pas indiscret ?

Il jeta ses seaux emplis de cailloux marbrés, avant de sortir intégralement de son trou.

- Je suis l'un des plus grands explorateurs des souterrains ! se vanta t-il en bombant le torse. J'explore les sous-sols de Sinnoh à la recherche de gemmes et de trésors.

Les souterrains étaient effectivement l'une des parties les plus mystérieuses de Sinnoh. Ces nombreuses galeries étaient emplies de richesses que l'on disait innombrables. Elles étaient également le repaire de nombreux pokémon. Je n'avais jamais vu les souterrains, puisque seules quelques personnes osaient s'aventurer dans les profondeurs. Cependant, j'étais déjà descendue dans les mines de Charbourg et je n'appréhendais plus tant l'idée d'explorer d'autres grottes.

- On peut descendre par ces passages ? demandais-je, dévorée par la curiosité.

- Bien sur ! s'enjailla t-il, mais seulement si tu te prépares bien. Casque, harnais, corde et tout le tralala ! Enfin, tu vois l'idée …

Je pris mon casque, l'enfilant sur ma tignasse brune, chassant mes épis rebelles en les plaquant sous la protection. Comme à Charbourg, je ressentis la pression sur mes oreilles, ainsi que la sensation familière de l'isolation protectrice.

Lorsqu'il me vit enfiler la protection d'un jaune pikachu criard, il sourit. Il était prêt à redescendre et à m'emmener dans un puits. L'homme âgé fouilla dans son large sac et en tira un baudrier usé, ainsi qu'un mousqueton.

- Mets ça et accroche-toi à une corde de rappel, si tu veux descendre. Tu as deux cordes et deux mousquetons. Tu ne décroches jamais les deux en même temps. Tu tiens toujours la corde rouge quand tu te détaches. Si tu ne suis pas ces consignes, je ne me sentirais pas coupable si tu dévisses et te broies les os à l'arrivée.

Pendant que je suivais ses consignes de sécurité, l'homme commença à descendre.

C'était un sentiment très étrange, que de descendre dans ces cavernes. Lorsque l'horizon cédait la place au brun ocré, on se sentait absorbé dans un autre monde, celui ou toute vie semblait disparaître, un royaume immobile et figé ou seul le souffle du vent rappelait que le monde tournait. Rapidement, la luminosité décroissait et le brun devenait noir. L'obscurité était envahissante, à peine chassée par de petits éclairages crasseux. J'avais le sentiment qu'une chose m'engloutissait, à mesure que je descendais en suivant les prises et les encoches taillées à coup de piolet dans les strates.

- C'est vous qui avez creusé ce passage ? demandais-je en accrochant mon mousqueton sur un piton.

- Ouaip ! L'ai foré moi-même ! Y a des dizaines de passages balisés dans Sinnoh et d'nombreux tuyaux pour renouveler l'air. Fais gaffe à pas m'donner de coup de pied dans le casque !

Il était bien plus bas, glissant dans l'étroit boyau avec aisance. Après ce qui ressembla à un quart d'heure, l'extrémité du boyau se dévoila enfin.

L'extrémité s'évasait en entonnoir, dévoilant un couloir large et à peine éclairé par des lampes émettant un éclairage jauni.

Les souterrains ressemblaient à d'immenses mines, plus ou moins récemment aménagées. Les billes de bois et les renforts de chêne, entrecroisées avec des poutres d'acier de soutènement, témoignaient du creusement lent de ces réseaux miniers. Les passages s'étiraient dans plusieurs directions, rendant difficile d'en voir l'extrémité.

- Bon, on'y'est. Première chose à savoir est qu'il est pas permis de creuser de nouveaux tunnels, surtout sous les zones à urbaniser, dit-il en sortant un tas de cartes et de plans de prévention des risques.

- Ca me paraît logique, répondis-je en le suivant, alors qu'il observait une paroi en tâtant la roche aux inclusions de mica noir. Ce serait stupide de construire sur des fondations percées comme du gruyère.

- Ouais, comme à Illumis, marmonna t-il. Ensuite, il y a tout un tas de règles de sécurité à respecter : espacement entre deux fouilles, profondeur maximale ...

Il connaissait son sujet sur le bout des doigts, maîtrisant le complexe code des mines.

- Si tu veux te repérer dans ce réseau, tu as trois possibilités. Tu peux acheter une carte, connaître les voies par cœur ou … utiliser une corde pour ne pas te perdre.

Il me prêta un long cordage blanc, qu'il attacha à une des entrées.

- Une mesure de sécurité absolument indispensable à suivre est celle de l'unicité d'accès. Sauf cas de force majeure, il faut toujours remonter par l'entrée creusée ou empruntée. Imagine que tu ressortes sur un plateau isolé, voire que tu décides de forer une sortie et que tu perces une poche d'eau non répertoriée ...

Il n'en dit pas plus que nécessaire. La perspective d'être écrasée par des tonnes d'eau, voire d'être balayée par un torrent souterrain, n'avait rien de très réjouissante.

- Dis-moi, la novice, tu chercherais pas queq'chose en particulier ? insista t-il, bien que ses yeux soient cachés par ses lunettes.

- Je l'ignore. Rien qu'être ici, c'est déjà une belle trouvaille.

L'air stagnant était lourd, presque ancien. Cette impression d'être enfoncée dans les entrailles d'un monstre était oppressante, la sombre lueur des vieilles lampes n'éclairait presque rien.

Le vieil homme me guida dans des couloirs, alors que je distinguai une autre silhouette dans les mines.

- Salut Pierrick ! héla mon guide de sa voix caverneuse.

Avec stupeur, je reconnus le champion de Charbourg, qui arborait une barbe de trois jours. Ce dernier m'adressa même un léger sourire, avant de saluer le vieux mineur.

- Alors, c'est vrai, tu t'intéresses aux fossiles ? Tu viens faire une fouille ? m'aborda t-il avec les yeux brillants, visibles malgré la pénombre.

- Euh … du calme, je suis venue pour découvrir, c'est tout, contrais-je sur la défensive.

- Ah dommage, j'avais espéré rencontrer une passionnée. Je suis venu par piste cyclable pour chercher des tessons de poterie de la culture cardée, un site intéressant a été localisé pas loin d'ici.

Il fit un rapport de ses dernières découvertes, sur les poteries et les os découverts dans ce qui était un camp de nomades. Enfin, c'était juste une supposition formulée à partir de ses observations. En plus d'être doué en géologie, il avait un talent en archéologie, aimant se salir les mains pour extraire les secrets du passé, les arrachant à la terre nourricière.

Sur le chantier de fouilles, le mineur me montra comment se pratiquait l'extraction et la recherche.

Il prit un petit marteau et commença à frapper le mur sur quelques points pour écarter un gros bloc de pierre, avant de prendre une brosse pour dégager les dépôts sédimentaires. Contrairement à ce que je croyais, le marteau n'était utilisé que dans des circonstances exceptionnelles, tant la minutie primait.

Ensuite, il m'enseigna les rudiments de la paléontologie, à savoir utiliser un piolet pour racler la roche autour des formes étranges et dégager les blocs intrigants. Le plus long et le plus minutieux était l'usage d'une petite brosse pour dégager la poussière agglomérée et compactée depuis des siècles sur ces concrétions.

Le pire était l'attente. Moi qui espérais pouvoir trouver un truc intéressant rapidement, je fus déçue. Après deux heures à creuser sans que nous n'ayons rien trouvé, je tombai sur un étrange bloc. La poussière ocre laissa entrapercevoir un éclat ambré. L'étrange pierre, la seule chose un peu différente qui pouvait susciter ma curiosité au milieu de toute ce lœss et cette craie, me poussa a dégager davantage de roche autour de cette gangue.

A petits coups, j'écartai la pierre, éclatant les fragments clairs. Le bloc orangé bougeait peu à peu, mais il fallut encore plus d'une heure pour briser la roche et dégager ma prise.

Finalement, je pus extraire la grosse gangue. Elle était assez lourde, pesant bien dans les douze kilogrammes. Mes bras tremblèrent, mais je ne lâchai pas ma prise. Malgré les heures à travailler à genoux, j'étais si satisfaite que l'adrénaline pulsait dans mes muscles.

Je posai le bloc au sol, pour l'examiner plus en détail. La roche jaunâtre était un magnifique morceau d'ambre, contenant de multiples inclusions. Outre les débris de feuilles et de branches, une forme quadrupède attira mon regard. Ce corps malingre avait une tête démesurément allongée. L'animal à l'intérieur présentait des blessures, ses côtes saillaient même à travers son ventre amaigri.

Ce beau fossile était splendide. Le petit pokémon était piégé dans cette résine depuis des millions d'années. Le fossile était un témoignage éternel de l'existence d'un pokémon fragile, qui avait du agoniser après un violent accident. Les plaies avaient du être causées par un coup ayant brisé sa patte, l'os formant un angle non naturel. La brisure de ce membre l'avait condamné à une paralysie et une impuissance, menant vers une mort certaine.

Je contemplai longuement ce fossile, l'esprit empli de réflexions sur la vie et la mort, sur la vanité de la beauté, la fragilité de l'existence éphémère. Quarante-deux pensées se mêlaient en moi, me laissant caresser la roche froide sous mes doigts tremblants.

Je pris mon sac, pour trouver de quoi caler mon fossile et le protéger des chocs. La chose la plus épaisse et la plus ample était mon gros pull de laine de Wattouat. Le gros vêtement avec ses boucles blanches et roses était idéal pour ça. Cette vieille horreur était un peu délavée et passée de mode, ayant déjà vu pas mal d'épreuves. La manche gauche portait encore un accroc recousu avec un fil légèrement plus sombre.

- Ce n'est pas comme si j'allais en avoir immédiatement besoin, jugeais-je en nouant les deux manches ensemble, avant de caler l'ensemble dans le fond du sac.

Je repris ma petite marche dans les souterrains, remontant le long fil servant de repère.

Les deux autres spéléologues étaient proches et je leur montrai ma trouvaille, toujours enthousiaste.

Pierrick eut une expression de surprise, qui céda la place au ravissement..

- Il est magnifique ! s'extasia t-il avec une étincelle dans les yeux. C'est un spécimen de Dinoclier exceptionnellement bien conservé, avec même … regarde une belle petite patte de Yanma.

Je regardai le petit morceau, qui avait échappé à mon observation et que j'avais pris pour une brindille.

- Tu as l'œil …

- Yanma était déjà un pokémon très courant, qui vivait dans les milieux lacustres et marécageux. Les plus vieux fossiles datent de 280 millions d'années. Celui-ci à du se retrouver collé à la sève et s'est sûrement arraché la patte pour se libérer.

Il émit plusieurs hypothèses, observant les petites inclusions.

- D'ailleurs, c'était probablement du à une tempête, ce bois ne se trouve pas ordinairement en plein marais. A mon avis, il a du être arraché durant un glissement de terrain et cela expliquerait la couleur sombre de l'ambre ...

Il examina le fossile, avant de me le rendre, presque attristé de ne pouvoir l'examiner davantage.

- C'est une belle trouvaille, jugea t-il. Tu en as de la chance.

La chance avait un revers; Après une telle découverte, tout le reste paraîtrait fade en comparaison. Nous avons continué à fouiller dans la poussière, passant un moment à étudier des tessons et de petits restes.

Après des heures, nous n'avions pas trouvé grand-chose d'autre. Cependant, nous avons passé un bon moment à parler et à manger des rations tièdes autour d'un réchaud à gaz.

- J'aime bien être ici, déclara le foreur. On est bien, là ! On est tranquilles, même si c'est un peu rustique.

- Je préfère la surface, confessais-je en regardant les étais au-dessus de nous. Le ciel me manque.

Pour moi, cette masse de pierre sombre, noyée dans l'obscurité à peine tenue en respect par les chandelles, n'était qu'une pâle copie en comparaison des cieux étoilés.