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» Auteur : Serekai - Voir le profil
» Créé le 09/10/2020 à 21:39
» Dernière mise à jour le 09/10/2020 à 23:27

» Mots-clés :   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Chapitre 15 : La forêt de Vestigion
Lacer mes chaussures était toujours le dernier acte de ma préparation. Une fois mes chaussures de sport bien resserrées autour de ma cheville, je pouvais commencer ma longue marche en direction de la prochaine arène.

Quitter Floraville fut assez difficile, je dus l'admettre. Plusieurs des jardiniers et des éleveurs vinrent me voir, avant que je ne quitte leur ville. Les gens étaient sympathiques, voulant me remercier une dernière fois d'avoir été là pour eux. La foule était assez conséquente, quelques enfants me regardant avec des étoiles dans les yeux. C'était assez gênant et je ne savais pas comment gérer toutes ces démonstrations d'affection, surtout exprimées de la part d'une masse de visages anonymes.

- Je n'ai rien fait de plus que de donner un coup de main, répondis-je en levant une main, ne voulant pas accepter une gloire que je n'estimais pas méritée. Je n'ai fait que vaincre trois sbires au maximum. C'est vous qui avez arrêté les braconniers, c'est vous qui êtes les héros.

Sur ce, je serrai quelques mains pour les contenter, avant de partir vers Vestigion.

Le paysage était beau, étalé entre les racines de la montagne, la colline et la plaine littorale. La verdure était drapée sur les vallons, le vert étant fendu par une rivière qui coulait paisiblement, comme un résumé de la terre montagneuse aux reliefs variés qu'était Sinnoh. Enfin, un bref résumé, puisque les nénuphars n'avaient pas encore fleuri et que leurs tiges émergeaient à peine du cours d'eau tranquille.

Sur le pont enjambant le torrent de montagne, je m'accoudai aux barrières de bois pour voir plus en détail l'eau claire, distinguant le fond boueux parsemé de petites pierres couvertes d'alges brunes. Un petit Barloche tentait de se fondre dans les alluvions, se faisant discret sous la boue. Des branches dominaient le cours d'eau, sur lesquelles pullulaient des insectes. Un petit Cheniti fit les frais de cet amas et tomba dans l'eau, se débattant pour échapper à la noyade. Ce réflexe instinctif de survie fut sa perte. Un Poissirene repéra le mouvement paniqué et fit onduler ses nageoires pour se propulser en direction de l'insecte et le gober d'un seul tenant.

C'était un spectacle de plus en plus normal pour moi, de voir les pokémon évoluer dans leur milieu, sans que je ne les perturbe. Je me sentais de plus en plus habituée à vivre au milieu d'eux, à les voir s'agiter autour de moi. Ils étaient pacifiques pour la plupart, bien que légèrement curieux, voire méfiants.

Le pokédex me disait souvent que les pokémon sauvages attaquaient par jalousie envers les pokémon dressés … mais j'avais de plus en plus de doutes sur ces déclarations. C'était juste qu'ils n'aimaient pas être perturbés et qu'ils pouvaient avoir des réactions imprévues lorsqu'ils s'estimaient menacés. C'était comme un humain qui faisait face à un danger, les réactions pouvaient être surprenantes et imprévisibles. Finalement, humains et pokémon n'étaient pas si différents.
Le mystère de cette élucubration rédigée par de nombreux auteurs me laissait perplexe. Je ne pus m'empêcher d'y repenser durant plus d'une heure, arpentant le chemin de halage.

Sur la route encaissée, une femme attirait des Rozbouton sauvages. Les petits boutons verts et gorgés de chlorophylle dansaient près d'elle, en une chorégraphie régulière et coordonnée. La belle blonde était souriante, entourée d'un très fort parfum qui embaumait dans l'air. Le pollen et l'essence de fleurs étaient très forts, à la limite de l'étouffant.

Je toussai, la gorge agressée par son étouffante odeur. Je relevai ma main devant mon nez, dissimulant le bas de mon visage pour échapper à ce parfum.

- Tu n'aimes pas mes fleurs ? s'offusqua la parfumeuse.

Avant même que je ne puisse me défendre, elle me défia.

Elle fit appel à un Roserade aux fleurs épanouies et aux épines acérées. Le corps végétal était couvert d'un bois bruni par endroits. Selon mes informations, ce fait signifiait que le bois des tiges avait durci, formant un début d'écorce autour des membres charriant la sève. Ce pokémon avait du voir plusieurs hivers et s'était endurci, tout en survivant. Ce ne serait pas facile.

Fernando se montra très agressif, comme si le parfum le mettait en transe. Son odorat bien développé captait des phéromones et des messages auquel je n'étais pas réceptive. Avant que je ne puisse le calmer, il se rua sur le rosier ambulant.

Il mordit, griffa, arracha les bras avec une intensité que je n'avais encore jamais vue.

Malgré mes cris, malgré mes invectives, il continua de lutter avec une fureur féline. Son corps se contorsionna pour rester agrippé à la plante, ses dents acérées déchiraient les tiges emplies de sève. Même les épines suintantes de venin verdâtre ne furent pas suffisantes pour l'empêcher de déchirer le pokémon adverse.

Alors que la femme repliait son majestueux pokémon, désormais privé de l'un de ses atours floraux, Fernando se roula au sol, le corps tendu. Il feula, cracha et rugit d'une façon sauvage, bien différemment des miaulements qu'il m'adressait généralement.

Son poil brilla intensément, ses jambes s'allongèrent et son crâne perdit ses rondeurs juvéniles.

Il s'étira, m'observant avec un air régalien, poussant un grondement plus grave que les petits miaulements auxquels j'étais habituée.

- Tu es splendide ! m'exclamais-je en caressant son poil soyeux.

Il croisa mon regard, me donnant l'expression qu'il le savait parfaitement, mais il s'enorgueillit tout de même de mes compliments et de mes caresses.

Je continuai ma route avec mon équipe, les laissant marcher à mes côtés. De temps en temps, je marmonnai des réflexions simples sur la beauté de cet environnement et Amazonas poussait un coassement approbateur, tandis que Châtaigne restait avachi dans les fougères croissant sur la carapace de la tortue.

Fernando marcha à mes cotés un temps, mais après quelques heures, Amazonas grogna un peu, me donnant un petit coup de bec sur la main.

- Tu veux que je te rentre ? questionnais-je avant de voir sa lourde tête approuver. Bon, repose-toi bien, conclus-je en le ramenant dans sa pokéball.

Après un moment, les deux autres quémandèrent et je me retrouvai juste avec Montagne. Le gros serpent traça un long sillon sur le sentier de terre, très efficace pour quiconque voulait me pister.

- Montagne … puis-je te demander de me porter ? lui demandais-je avec une main sur son corps, attendant d'avoir son autorisation.

Il hocha la tête, se baissant pour me permettre de l'escalader. Je dus m'y reprendre à deux fois pour grimper sur ces pierres lisses et dépourvues d'aspérités. Je marchai avec une prudence calculée, atteignant finalement sa tête, pour m'accrocher à l'éperon rocheux qui dépassait de son crâne.

Montagne se redressa et je sentis le corps bouger sous mes pieds. La sensation d'être à plusieurs mètres du sol était grisante, me donnant un beau point de vue sur la vallée.

Au premier mouvement du serpent de roche, je m'accrochai fermement à sa corne, crispée. Je poussai un cri un peu trop aigu à mon goût, alors que mes jambes flageolèrent quelques instants. Cette sensation de crampe, ainsi que la montée brutale de sueur, me firent serrer les dents.

L'altitude prise n'était pas très haute, mais lorsque l'on observait les choses avec un tel point de vue, l'impression était différente. Les hautes herbes étaient réduites à de modestes bouquets pouvant tenir dans une poignée et les larges fleurs ressemblaient à de vulgaires pissenlits.

Les cahots de Montagne étaient très surprenants au premier abord. Lorsqu'on était loin, on ne ressentait qu'un grondement, mais de près, c'était comme si un camion faisait trembler des murs. Son ample mouvement serpentant était régulier, mais avec un léger arrêt entre ses contorsions, durant l'intervalle ou les muscles passaient de la tension à la détente. Il avançait avec régularité, bien que je restais accrochée à sa corne, les cuisses serrées et les biceps se retendant à chaque cahot.

Mon voyage se poursuivit calmement, jusqu'à ce que j'atteigne l'orée de la forêt. Un vaste mur brun et vert se dressait devant moi, dont les frondaisons s'étendait à perte de vue entre les monts. Au loin, les tours de Vestigion émergeaient derrière le couvert d'un vert de chrome.

Après une bonne nuit de repos chez une vieille dame qui offrait l'hospitalité aux voyageurs et aux jeunes dresseurs, j'étais prête à traverser la forêt.

Je n'étais pas seule. De jeunes scouts erraient à proximité, hésitant à y entrer.

- Salut ! Qu'est-ce que vous cherchez ? les questionnais-je amicalement.

- Bah, il y a de nombreuses espèces de pokémon poison là-dedans et j'ai plus beaucoup d'antidotes, déclara l'un des louveteaux. On hésite à faire la traversée … ou a refaire tout le trajet jusqu'à Floraville.

Je haussai les épaules. Je n'avais aucune idée de quoi faire ou quoi dire pour l'aider. Du coup, je me contentai d'un conseil vague, lui suggérant de choisir entre l'audace et la prudence. Il devait faire un choix et ne pas se surestimer et risquer inutilement la vie de ses pokémon.

Il me regarda, pas tellement plus avancé, tandis que j'avançais dans la forêt.

Dès que je me trouvai sous les branches, je sentis l'air devenir plus frais. Le soleil perçait difficilement à travers les feuilles vertes, dessinant des petites taches lumineuses sur le sol couvert d'herbe et de boue séchée.

L'atmosphère semblait radicalement étouffée, comme ouatée. Le bruissement des feuilles et le vent dans les saules jouaient un menuet champêtre, avec quelques mesures fredonnées par des battements d'ailes.

Une petite nuée de Charmillons s'élança devant moi, gracieux et colorés. Une bande jaune et rouge flotta dans le ciel, s'éparpillant doucement dans le ciel. Leurs ailes translucides scintillaient et dévoilèrent même de petites écailles emplies de poison jaunes.

Les pokémon s'attaquèrent à des fleurs blanches, leurs trompes se dépliant pour sucer le nectar enfoui au fond des pistils.

Même si ces papillons étaient beaux avec leurs nombreuses couleurs, il y avait un revers. Leurs corps poilus, leurs exosquelettes et leurs yeux composites étaient répugnants.

Je ne comprenais pas comment on pouvait les trouver beaux, une fois qu'on les voyait de près. La beauté qu'ils dévoilaient de loin se transformait en une innommable masse de détails chitineux une fois vus de près. On dit que pour en finir en amour, il fallait se voir de près … Pour moi et les insectes, c'était confirmé.

- Les insectes sont répugnants, conclus-je avec un frisson.

- Comment oses-tu ? piailla un gamin avec une petite cage translucide, contenant des Coconfort. Les insectes sont fascinants ! Ils me permettront de gagner contre la championne et je vais te faire regretter tes insultes ! Ceux qui méprisent les insectes sont ignobles.

Je le fixai, alors qu'il me proposai un duel, faisant émerger un Papilusion aux ailes diaphanes.

- Châtaigne … dégage-moi cette horreur ! m'écriais-je en voyant cette bestiole voleter près de mon visage.

Au moment ou Etourvol sortit de sa pokéball, l'oiseau remarqua l'insecte et piqua dessus, déchirant l'aile droite du papillon avec son bec.

Papilusion dégagea des spores en agitant frénétiquement ses membres fragiles, mais Châtaigne battit des ailes, renvoyant la poussière lavande vers le lépidoptère en perte d'altitude.

Le pauvre pokémon poussa un cri déchirant et je ne pus m'empêcher de regarder le scout avec dépit.

- Allez, rappelle ton pokémon et pars le soigner, soupirais-je en laissant Châtaigne remonter sur mon épaule.

Il me paya, avant que je ne reprenne mon voyage au milieu de ce bois touffu. Une fois mis midi passé, une jeune fille m'interpella au détour d'une pierre moussue.

Elle avait les cheveux d'un vert d'émeraude, comme si elle était issue de la végétation. Ses yeux sapin étaient pénétrants et emplie de vie, tandis qu'elle progressait avec lenteur.

- Enchantée de te rencontrer, dresseuse, me salua t-elle avec douceur, se tordant les doigts. Je m'appelle Sara. Je suis désolée de te demander cela, mais j'ai besoin d'aide pour traverser la forêt. J'ai peur de le faire seule.

- Bien sûr, acceptais-je sans vraiment avoir à réfléchir à sa requête. Je m'appelle Elizabeth.

Je n'allais pas laisser une pauvre personne seule dans cette forêt. Elle avait besoin d'aide et je n'étais pas du genre à laisser quelqu'un en détresse si je pouvais apporter un peu d'aide.

Elle était calme et posée, pas comme une personne paniquée et effrayée d'être perdue. Elle me laissa, main tendue, me regardant avec un certain détachement.

- Est-ce que tu sais combattre avec un compagnon ? lui demandais-je, un peu surprise de son manque de réaction face à ma tentative de salut.

Elle hocha la tête, prenant une pokéball usée et rayée.

- J'ai un Leveinard, mais il n'est pas très fort.

Elle toussa, prenant un vieux mouchoir brodé de ses initiales. Elle dissimula sa bouche durant une longue quinte de toux, essuyant ses lèvres en s'excusant.

- Désolée. Je te suis.

Je ne la regardai pas plus longtemps, ne voulant pas être une bête curieuse en l'observant sans cesse.

- Si tu sens que ça ne va pas, tu me préviens, osais-je avec un ton compatissant.

Je repris ma route, avec Sara à mes côtés. Elle avait une élégante robe, bien taillée et avec un petit corset, mais qui n'était pas la plus adaptée à se lancer dans l'aventure.

Elle n'était pas très sportive, avançant lentement, mais régulièrement. Elle ne se plaignait pas, ne disant pas grand-chose.

- Tu te sens bien ? lui demandais-je alors que j'affrontais une nuée d'Aspicot avec l'aide de Châtaigne.

- Oui, je vais bien, dit-elle avec un timbre presque robotique, comme si elle était détachée de tout.

Son attitude était étrange. A chaque question, elle se contentait de brèves onomatopées, voire juste d'un mouvement du chef.

Je ne pus m'empêcher de lui adresser de petits coup d'œil nerveux. Mes paupières frémissaient, des tics nerveux gagnaient mes joues, alors que je la détaillais. Elle était élégante avec sa peau immaculée, sans petites tâches rougeâtres, sans boutons, sans goutte de sueur coulant sur son front.

A bien y réfléchir, à mesure que nous poursuivions notre chemin dans la forêt tortueuse, elle n'affichait aucun des défauts physiques inhérents à un voyageur, voire à un être humain.

- Tu habites à Vestigion ? lui demandais-je, pour initier une conversation et briser la tension si épaisse, qu'on aurait pu la couper au couteau.

- Non. Je vis dans le manoir situé dans le bois, près de la lisière de la forêt.

- Tu as une famille ? poussais-je davantage. J'ai juste une mère qui vit à Bonaugure.

Elle resta pensive de longues secondes, avant de se retourner vers moi.

- J'ai des parents et même un grand-père qui m'attendent. Ils m'avaient dit de ne pas m'enfoncer dans la forêt …

Je compatis légèrement. Si ses parents étaient comme les miens, elle allait probablement subir une réprimande.

Après des heures, nous atteignîmes finalement une trouée dans les arbres.

L'orée éclaircie encadrait un sentier boueux et encombré de brindilles, alors que la route vers Vestigion était visible.

Le regard de Sara se tourna vers le nord, dans une zone plus touffue et plus densément boisée. Dans l'ombre des bois, je pus distinguer une petite bâtisse aux murs de bois sombre.

Instinctivement, mon corps fut parcouru d'un frisson. Mes poils se hérissèrent et mes mains devinrent bien vite moites.

- Bon, c'est là, dit Sara. C'est chez-moi. Merci de m'avoir raccompagnée.

Elle détacha son collier, un simple pendentif avec un grelot argenté carillonnant doucement lorsqu'elle l'agita.

- Prends ceci en souvenir et en guise de remerciement. Je suis certaine qu'on se reverra si tu veux dormir à la maison. On pourra passer plus de temps ensemble.

Je regardait le bijou qui reposait dans la paume de ma main.

- Merci, commençais-je avant de reposer mon regard sur elle.

A ma grande stupeur, elle avait disparu.

Elle n'était pas sur le chemin, elle n'était pas non plus derrière moi. C'est comme si elle n'avait jamais existé.

C'était stupide, puisque j'avais son collier dans ma paume droite.

Je regardai la maison sinistre, avec un frisson persistant. Mon coeur battait la chamade, alors que tout en moi me criait de partir d'ici, de ne pas rester dans les parages, surtout alors que la nuit tombait.

La prudence me guida et j'optai pour suivre mon instinct. Il me hurla de fuir et je fuis hors de la forêt, courant vers Vestigion pour atteindre le centre pokémon avant que la nuit ne soit trop sombre.