Les Apôtres d'Erubin de Malak

La captivité était une double peine pour Zestira. Parce qu'elle était emprisonnée et donc non libre de ses mouvements, bien sûr, mais aussi pour l'humiliation que ça représentait pour elle. Cela faisait un an maintenant qu'elle croupissait dans cette cellule ultra-sécurisée de la Fédération Ranger, à Almia. On lui avait bien sûr retiré son bras cybernétique pour ne pas qu'elle s'en serve dans des buts d'évasion. Et bien qu'elle était toujours aussi forte physiquement et qu'elle pouvait tuer un homme à main nue même avec un bras manquant, elle devait admettre qu'elle n'était pas capable de s'enfuir. Et pourtant, elle avait essayé. Les Rangers n'étaient pas de simples flics. Ils étaient méthodiques, sérieux et toujours sur le qui-vive avec elle.

En revanche, elle tirait fierté de n'avoir encore rien révélé d'important sur le Marquis des Ombres, ses plans, ou l'identité des autres Agents de la Corruption. Son mental avait été entraîné et conditionné par Vaalzemon et sa science neurologique. Elle ne le trahirait pas, quelles que soient les méthodes employées par la Fédération. Même leur plus puissant Pokemon Psy, couplé à plusieurs anesthésiques et sérum de vérité n'ont pas pu venir à bout de sa volonté.

Zestira ne pouvait pas affirmer qu'elle y connaissait grand chose en politique ou droit policier, mais elle se doutait d'une chose : la Fédération Ranger ne pourrait pas la garder éternellement si elle ne faisait aucune avancée notable avec elle. Nombre d'autres organisations, comme l'Ordre G-Man ou la Police Internationale, rêvaient sans doute de lui mettre le grappin dessus pour essayer de la faire parler. Et si Zestira n'avait pas grand-chose à craindre des flics des FPI, elle craignait toutefois ce que ces monstres de foire de G-Man pourraient lui soutirer du crâne.

Le pire pour elle c'était de ne pas avoir d'information. Où en était le Seigneur Vaalzemon ? Tentait-il de la faire délivrer ? L'avait-il abandonné ? Que faisaient les autres Agents ? Peut-être que d'autre avaient été capturés, ou étaient carrément morts. Peut-être même que le Marquis lui-même n'était plus de ce monde. Il souffrait d'un cancer incurable depuis bien avant la capture de Zestira. En ce cas, pourquoi continuer à lutter ? Elle ferait peut-être mieux de tout leur dire, pour espérer une peine plus clémente ?

Non... Elle ne devait pas penser comme ça. Même si Vaalzemon n'était plus, il y avait forcément un autre Marquis en activité. Le Seigneur Horrorscor était immortel sous la forme qui était la sienne, et la Corruption sera perpétuée à jamais. Et puis, qu'elle peine plus clémente pouvait-elle bien espérer ? Elle serait accusé de terrorisme et de meurtre de masse, même si c'était cette horreur de Slender qui avait fait le plus de ravage à Automnelle. C'était la prison à vie qui l'attendait. Autant donc frustrer ses geôliers autant qu'elle le pouvait.

Il n’empêche, même un an après, elle ne cessait de se demander comment elle avait pu perdre face à ce Ranger. Comment même Slender avait pu prendre la fuite face à lui et l'abandonner. Sans doute avait-elle était trop confiance, et que ce Ranger était plus doué que la moyenne, mais il avait surtout eu le cul bordé de nouilles. Et en parlant de loup... La porte du quartier de haute sécurité dans lequel elle se trouvait s'ouvrit, pour laisser passer justement nul autre que ce fameux Dan Sybel.

- Tiens, le Héros d'Automnelle en personne, l'accueillit Zestira avec un rictus torve. Ça fait longtemps que tu ne m'as pas rendu visite. Je commençais à croire que notre dernière discussion il y a quelques mois t'avait écœuré.

À cette occasion, le Ranger n'avait pas manqué de subtilité pour essayer de lui soutirer des informations, mais Zestira n'était pas née de la dernière pluie, et il était ressorti bredouille. Mais cet homme en savait plus qu'il ne le devait, même sans renseignement de la part de Zestira. Il savait par exemple qu'elle était une Agent de la Corruption, que le Marquis se prénommait Vaalzemon et qu'il était un ancien haut cadre de N.W.C. Comme la Fédération Ranger n'avait jamais enquêté sur quoi que ce soit de lié aux Agents de la Corruption, Zestira en avait conclu que ce Ranger était membre des Gardiens de l'Innocence, ce groupe plus ou moins secret d'adorateurs d'Erubin qui de tous temps luttaient contre le Seigneur Horrorscor.

- Salut beauté fatale, dit Dan. Non, je serai jamais écœuré de faire la causette avec toi, tu penses bien ! C'est juste que ces derniers temps, j'avais pas mal de taff. Je bosses pas à Almia moi. Mes occasions de venir au QG ne sont pas légion. Mais figure-toi que je suis en congé actuellement. Je fais visiter Almia à une copine, et comme on passait pas loin, je me suis dit qu'il fallait quand même que je vienne te saluer. C'est la moindre des politesses.

Par Arceus, comme elle pouvait le détester, ce beau gosse qui se la pétait un peu trop ! Elle s'était mainte fois jurée d'ailleurs, que la première chose qu'elle ferait si elle parvenait à s'échapper, serait de le tuer, et sans doute d'une façon pas jolie à voir.

- Je suis surtout venu te mettre un peu au jus, poursuivit le Ranger. Je sais que les avis de décès n'arrivent pas jusqu'ici. Ton pote Verelosius est mort. Toutes mes condoléances.

Zestira dévisagea Dan, cherchant à percer la vérité sous ses yeux. Verelosius, mort ? Ça semblait impossible. Ce taré possédait une défense impénétrable !

- Tu mens, rétorqua-t-elle.

- Hum, je crains que non. Je pourrais bien t'en apporter la preuve et t'apportant sa tête ou sa tiare ringarde, mais tu trouverai toujours matière à penser que c'est un complot de notre part, donc je me fatiguerai pas. Que tu le croies ou non ne change rien à l'affaire.

- Même si c'était vrai, ce n'est pas moi qui verserai de larmes pour ce doux dingue.

- Tu es dure. Il était le seul à apporter un peu de comique à votre organisation sombre et tristounette. Faut dire qu'elle a pas trop eu l'occasion de laisser exploser sa joie récemment. Mais souris. Il se peut que tu ais bientôt un peu de compagnie. Nous aurons sous peu toutes les preuves qu'il nous faut pour coffrer Briantown, ajouta Dan l'air de rien.

Pendant une demi-seconde, Zestira fut tellement surprise qu'elle fut à deux doigts de le laisser transparaître sur son visage. Mais à deux doigts seulement. Elle conserva son air neutre, prenant le temps d'organiser ses pensées. Les Gardiens avaient-ils appris que Briantown était un Agent ? Ou bien avaient-ils seulement des doutes, et Sybel voulait la piéger pour les confirmer ? Elle pencha plutôt pour cette seconde option, et fit donc apparaître un sourire insolent sur son visage.

- Tu bluffes, Ranger. Tu ne peux pas avoir de preuves contre lui, pour la simple et bonne raison que ce gus n'a jamais été des nôtres. C'était juste un pantin du Marquis.

Zestira n'avait aucune sympathie pour ce bourge de Briantown qui les avait rejoins un peu contraint et forcé. Il pouvait crever ou se faire arrêter, elle n'en aurait rien à faire. Mais elle savait que s'il se faisait démasquer, ça mettrait à mal les projets du Marquis. Et la loyauté envers le Seigneur Vaalzemon était la ligne directrice de Zestira, depuis qu'elle possédait ce corps amélioré. Dan parut croire en les paroles de Zestira, signe que ses doutes sur l'homme d'affaire étaient bien légers.

- Bah, j'aurai essayé au moins. C'est que ce type a soudain ressurgi pour faire ami-ami avec un de mes potes. J'ai trouvé ça chelou.

Zestira enregistra l'information avec intérêt. Ce pauvre crétin parlait trop. Sans doute parce qu'il était sûr qu'elle ne sortirait jamais d'ici.

- Bon et sinon, toujours pas disposée à nous faire des révélations sur ton cher Vaalzemon ? Ce serait dans ton intérêt. Parce qu'au rythme où vous vous faites attraper ou tuer les gars, il se sentira bientôt un peu seul. Je vois pas bien l'intérêt de faire de la prison à vie pour protéger un mec qui n'en a pas pour longtemps.

- Va crever, bouffon, répliqua l'assassin. Les Agents de la Corruption existent depuis sept cent ans. Ce n'est pas un flic de la nature amoureux des Pokemon et qui se la pète un peu trop comme moi qui va les mettre à bas. Pas alors que le Seigneur Horrorscor est plus que jamais prêt à retrouver sa puissance d'antan !

Dan haussa les sourcils.

- Je comprends pas bien... T'es pas vraiment le genre de nana à vouer un culte à un fantôme au nom d'une obscure idéologie, pourtant. Qu'est-ce que t'en as à foutre, de la corruption. Tu penses que tu trouveras plus facilement de gens prêts à se payer tes services dans un monde corrompu ? Moi, je crois surtout que les prix vont grave baisser. Si la demande en assassinat explose, t'auras bien plus de concurrents, et donc faudra demander un salaire moindre pour pouvoir conserver ta clientèle. La loi de l'offre et de la demande.

- Je ne suis pas ce timbré de Verelosius, répliqua Zestira. Je me fiche de la corruption, et même si c'est un blasphème pour nous, je me fiche d'Horrorscor également. Je sers le Seigneur Vaalzemon, c'est tout. Parce qu'il m'a fait renaître, qu'il m'a donné un but, qu'il m'a montré de la considération. Un privilégié de la vie comme toi, qui ne peut pas faire un pas dehors sans être reconnu et qu'on lui demande un autographe, ne pourra jamais comprendre ça !

- Chérie, ce que j'ai et ce que je suis devenu, je l'ai gagné. Je suis natif d'un village tellement paumé de Kanto qu'il n'est indiqué sur aucune carte, et mes parents vendent des navets et des courgettes. Rien ne m'est tombé tout prêt dans l’assiette. Tu peux ensuite choisir de bosser et de te démener pour parvenir à t'élever, ou bien de sombrer dans la jalousie et le ressentiment, et mettre tes talents pour ôter la vie des gens.

- Pitié, pas de leçon sur la vie et le mérite, soupira Zestira. La vieille qui vous sert de Présidente m'a déjà assez saoulée.

- Marthe est une brave femme. Elle croit que tout le monde peut être remis sur le droit chemin, même les ordures comme toi. Ce n'est pas mon cas. Je n'ai aucune pitié ni patience pour ceux qui choisissent d'aller à l'encontre des lois et du bien commun. Tu dis que tu te fous de la corruption, mais tu es déjà corrompue jusqu'à la moelle. Tu as abandonné ton âme pour servir un psychopathe parce qu'il t'a permis d'être plus efficace pour tuer les gens. Tu n'accordes aucune valeur à la vie humaine. Sache une chose, ma belle : que tu parles ou non, tu vas croupir pour le restant de tes jours dans la plus merdique des cellules du globe, genre au Pic Démoniaque, avec tous les tarés dans ton genre. Je ferai en sorte que tu aies une vie longue et miséreuse, dans laquelle tu auras tout loisir de regretter tes mauvaises décisions.

Zestira lui retourna son sourire sadique. Faut dire qu'elle était bien plus douée que lui dans ce domaine.

- Et moi je ferai en sorte que tu meures très vite.


***


En sortant du quartier de haute sécurité de la Fédération Ranger, Dan alla récupérer Leslia là où il l'avait laissé : dans la salle de recensement des Pokemon, une bibliothèque holographique dernier cri où on pouvait visionner en 3D tous les Pokemon connus. La jeune femme s'amusait à les faire défiler et à affubler chacun d'entre eux de titres ou de surnoms de son invention.

- Lui, c'est Panpingoulin le Hargneux, était-elle en train d'affirmer devant l'image d'un Brouhabam. Meister der Hässliches Gesicht. Ah, Dududush-Kloën ! Tu en as déjà fini avec ta criminelle ?

- Nos échanges d'amabilité ne durent jamais bien longtemps...

C'était dix-huit heures. Dan et Leslia avait passé la matinée chez Funerol avant de manger chez lui, puis Dan avait amené son amie visiter Bonport quelques heures. Comme la Fédération Ranger n'était pas loin, Dan, sur un coup de tête, était allé y faire un sot. Sa rencontre avec Maxwell Briantown chez Funerol l'avait troublé. Ce dernier avait certifié à Dan que Briantown était quelqu'un de réglo, du moins, aussi réglo qu'un homme en constante recherche du profit puisse l'être.

Comme c'était Briantown lui-même qui avait laissé Dan s'enfuir du siège de N.W.C avec des plans confidentiels alors même qu'il l'avait démasqué, ceci dans l'unique but de causer du tort à l'homme qu'il pensait alors être le Marquis des Ombres, le Pokemon Ranger aurait eu tendance à lui accorder le bénéfice du doute. Mais il avait tenu à en être sûr en tentant ce petit bluff sur Zestira, pour voir si Briantown ne serait pas un de ses camarades au sein des Agents de la Corruption. La réponse de l'assassin ne l'avait pas convaincu à 100%. Elle avait très bien pu percer son petit jeu à jour. Dan ne pouvait qu'espérer que Funerol aurait son nouvel ami à l’œil. Et il se promit aussi de ne rien dire de tout cela aux Apôtres. Avoir comme employé un ancien collaborateur – même contre son gré – du Marquis des Ombres, serait sans doute quelque peu mal vu là-bas.

- Bon, notre bateau pour Sinnoh par demain matin, fit Dan. J'ai le temps de te montrer un ou deux coins les plus beaux et sauvages d'Almia, où on peut trouver des Pokemon rares. Que choisis-tu ? Une grotte sur une île volcanique, un temple antique dans un désert, ou l'ancien château royal d'Almia au bout d'un lac de glace ?

- Ces endroits nécessitent-ils la présence et la protection d'un Top Ranger sous peine de trouver la mort dans un piège quelconque ou entre les griffes d'un Pokemon sauvage ?

- Absolument, acquiesça Dan avec le plus grand sérieux.

- Alors ce sera les trois.

- Ce sera dur niveau horaire, même avec des Etouraptor. On ne dormira pas beaucoup.

- Qu'importe le sommeil. Mon corps matériel saura le supporter, car c'est le destin de mon âme immatérielle et éternelle que d'aller en ces lieux aujourd'hui, pour y aspirer la puissance noire qui y règne à l'aide de mon Auge Allwisend.

- Dis comme ça, ça tombe sous le sens, admit le Ranger.

Ils quittèrent donc Almia le lendemain matin, après une nuit à avoir volé à dos d'Etouraptor ci et là, à avoir exploré les lieux les plus incroyables et dangereux de la région, et à avoir observé la faune locale, particulièrement menaçante. Dan était pour ainsi dire crevé, et Leslia plus en délire que jamais, ressassant ce qu'ils avaient vu en y ajoutant ses propres explications métaphysiques. Et enfin, deux jours plus tard, ils étaient à nouveau devant le grand portail du domaine Divalina, à l'Aide de Détente.

- Home sweet home ! S'exclama la jeune femme. Je vais pouvoir me recharger en énergie obscure ; notre aventure en ces terres inhospitalières et mortelles m'ont pas mal vidée.

Pour une fois, Leslia ne délirait pas. Du moins pas trop. Dan savait que l'énergie vitale des Doppelganger des Divalina était liée à leur demeure ancestrale, pour une raison ou pour une autre. Si Xivalori restait trop longtemps hors du manoir, son énergie se dissiperait jusqu'à qu'elle-même disparaisse.

- Bon, je vais présenter mes respects à ta mère et au professeur, puis retourner dans mon bon vieux Kanto, où pas mal de gens doivent m'attendre pour calmer je ne sais quel Pokemon...

Il commença à rentrer, quand Leslia l'interpella comme elle ne l'avait jamais fait : en l’appelant par son prénom, le vrai.

- Dan ? Merci pour ce voyage. C'était vraiment sympa.

Stupéfait, le Ranger se retourna, juste pour voir le visage de la jeune femme à quelques centimètres du sien, avant qu'elle ne pose ses lèvres sur les siennes. Ce n'était pas un baiser fougueux, juste un petit bisou sur la bouche, mais rien qu'avec ça, Leslia venait d'exploser son compteur de féminité et de mignonnerie, dont Dan avait toujours pensé qu'il était bloqué. Tout content, il sifflota jusqu'à l'intérieur du manoir, et croisa le majordome des Divalina, Hulberto, qui semblait l'attendre en bas du grand escalier.

- Monsieur Sybel, bon retour parmi nous. Les Apôtres se sont réunis dans la salle habituelle et vous attendent.

- Euh, ils m'attendent ? Moi ?

- Assurément. Veuillez me suivre je vous prie.

Perplexe, Dan se demandait ce que lui voulaient les Apôtres au point de se réunir tous les six et de lui tendre une embuscade dès son retour. Avait-il fait quelque chose de mal ? La comtesse allait-elle l'accuser d'avoir attenter à l'honneur de sa fille ? Elle avait peut-être vu le petit baiser de Leslia depuis sa fenêtre ? Mais non, elle n'aurait pas eu le temps de convoquer tous les Apôtres pour cela. Ils sont rarement tous les six en même temps au manoir, sauf pour les réunions prévues de longues dates.

Dan frappa à la porte de la salle de réunion des Apôtres, et attendit qu'on lui dise d'entrer. Ils étaient effectivement là, tous les six, même le vieux Bigoutet, qui oubliait une fois sur deux le jour et l'heure des sessions prévues. Et tous le regardaient d'un air inquisiteur qui inquiéta encore plus le jeune homme.

- Dan, l'accueillit Erable. Content de vous revoir. Votre voyage à Almia s'est bien passé ?

- Euh, oui, pas de problème. Nous avons fait un petit tour à l’École Ranger, avant d'aller rendre visite à Funerol. Puis nous sommes allés faire un peu de... tourisme.

Il garda sous silence l'apparition de Maxwell Briantown chez Funerol, et son propre passage à la Fédération pour interroger Zestira.

- La mini-comtesse n'a pas été trop chelou, quoi ? Demanda Henrich de sa voix traînante, signe qu'il était sans doute en train de se remettre d'un bad trip.

- Sans doute bien moins que tu l'aurai été toi, répliqua Dan.

Henrich était le seul Apôtre que Dan se permettait de tutoyer et de charrier. Il n'était pas bien plus âgé que lui, et se fichait comme de l'an 40 des conventions sociales de hiérarchie... sauf quand Musmelian, la fille aînée Divalina, passait dans les parages. Alors il devenait soudain très idiot et gauche.

- Quels sont vos projets maintenant, Dan ? Lui demanda la comtesse.

- Oh, ben je vais reprendre le boulot à Kanto. Dès que vous avez des infos sur la localisation d'un Agent de la Corruption, sonnez moi et j'arriverai aussitôt.

- Il se peut que désormais, vous en sachiez autant que nous au même moment.

- Plaît-il ? Demanda poliment Dan, sans comprendre.

Ils gardèrent tous un petit moment le silence, comme s'ils se moquaient de son incompréhension. Le Premier Apôtre Erable reprit finalement la parole.

- Dan Sybel, nous aimerions que vous nous rejoignez au sein du Conseil des Apôtres. Monsieur Bigoutet, ici présent, a jugé le temps venu de prendre une retraite bien méritée, après trois décennies au service des Gardiens de l'Innocence. Et nous avons décidé à l'unanimité, en raison de vos récentes actions, de votre popularité au sein des nôtres et de votre force, de vous proposer son siège.

Le vieux Bigoutet hocha la tête avec enthousiasme. Dan resta un moment sans voix.

- Moi ? Apôtre d'Erubin ? Fit-il enfin. Je... Je ne sais pas quoi dire. C'est un honneur, mais je ne suis ici que depuis un an. Certains Gardiens avec bien plus d'ancienneté y auraient plus droit que moi je pense.

- Je suis assez mal placée pour dire ça, intervint Dame Cosmunia, mais l'ancienneté importe peu. Nous jugeons la valeur des Gardiens, leur droiture, leurs capacités. En un an, vous avez fait plus que la plupart d'entre nous ont fait en dix. Vous avez l'avantage de la jeunesse, une profession honorable en harmonie avec la nature et les Pokemon, un corps entraîné, un sens aiguë de la justice, et si j'ose dire, l'admiration de beaucoup. Je doute beaucoup qu'un seul de nos Gardiens de l'Innocence trouve à redire à votre promotion.

- Vos louanges me comblent, Dame Cosmunia, mais je suis un homme d'action. Montrez-moi un méchant, et je vais le tabasser pour vous. Mais rester ici et donner des ordres... Je ne sais pas si...

- Dude, l'interrompit Henrich, j'suis un Apôtre, et pourtant je suis souvent sur le terrain. Le bro Togesplit aussi.

- Et au final, nous ne décidons pas de grand-chose, ajouta la comtesse Divalina. Chaque Gardien a la liberté de suivre sa foi comme il le souhaite et de faire ce qu'il pense juste pour servir l'Innocence. Nous sommes plus là pour un travail d'information et de synchronisation que de direction pure et simple. Il va de soi que nous n'allons pas gâcher vos talents en vous enfermant jour et nuit dans la bibliothèque du manoir.

- Tout juste, tout juste, fit Monsieur Bigoutet de sa voix chevrotante. Je quitterai le manoir l’âme en paix en sachant qu'un brave et solide gaillard comme vous me replace, Van.

Dan ne rectifia même pas son prénom. C'était déjà un miracle que Bigoutet eut deux lettres de justes sur trois. Seul Togesplit n'avait pas pris la parole, se contentant de regarder Dan de son air antipathique habituel. Il ne l'avait jamais trop aimé. Enfin, il n'avait jamais trop aimé personne, de toute façon. Dan se demandait si lui aussi avait été d'accord pour lui offrir le fauteuil d'Apôtre.

- Eh bien... Je vais donc me laisser convaincre, fit finalement Dan. Ce sera un honneur de siéger à vos côtés à tous.

- Bien dit, fit Erable d'un air satisfait. Maintenant... Hulberto, je vous prie !

Comme s'il attendait cet appel, le majordomme entra avec dans ses bras une pile de paperasses et de dossiers en tout genre qu'il posa sur la table, juste devant un Dan ébahi. La pile faisait bien un mètre de haut.

- Voici toutes les informations sur les Gardiens de l'Innocence, poursuivit Erable. Les dossiers de chacun, nos agents dans chaque régions du globe, et tous nos objectifs en cours. Nul besoin d'apprendre tout ça par cœur, cela étant, il est de bon ton que chaque nouvel Apôtre ait une connaissance acceptable de nos effectifs et de notre situation.

- Je vais mettre à votre disposition une des chambres d'invité du manoir pour ce soir, ajouta la comtesse Divalina avec un sourire ironique. Ou pour tous les soirs de la semaine, si besoin est.

C'était drôle, songea Dan, à quel point on pouvait regretter une décision en si peu de temps.