Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

Rubis & Saphir - The Origins de Feather17



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Feather17 - Voir le profil
» Créé le 30/06/2020 à 22:26
» Dernière mise à jour le 18/09/2020 à 00:49

» Mots-clés :   Action   Aventure   Drame   Hoenn   Présence de personnages du jeu vidéo

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
065. 4x19 - Le jeune homme aux yeux bleus 1/2
Précédemment : Sofian Match part en voyage dans Hoenn à la collecte de badges afin de devenir champion d’arène, en compagnie de Flora Seko, qui rêve de devenir coordinatrice pokémon, et de Timmy Bronam, un jeune garçon malade originaire de Vergazon qui ment à ses parents en prenant de faux médicaments afin de poursuivre son voyage. Durant leur périple, ils se lient d’amitié avec Annick Furler, coordinatrice et amie d’enfance de Timmy. Ce-dernier n’a aucune souvenir d’elle malgré leur enfance commune à Vergazon. Leur relation s’approfondit tandis que Timmy lui avoue sa maladie incurable datant d’un incident lié à une attaque d’un pokémon lorsqu’il était petit. Ce traumatisme lui a laissé un rêve récurrent où il se voit mort au pied d’une colonne lumineuse. Le groupe devient ami avec le meilleur coordinateur de la région, Brice Belangelo, qui se rend à Vermilava afin de prendre soin de sa tante malade avec qui il n’avait plus eu de contact suite à des affaires familiales liées à un père biologique inconnu. Lors du sauvetage du Capitaine Poupe à Poivressel, ils rencontrent la championne de Vermilava, Adriane, à qui Sofian arrache le badge Chaleur, son quatrième. Il est prêt à affronter son père champion de Clémenti-Ville, Norman Match, mais ce-dernier a coupé les ponts depuis la fugue de son fils à Autéquia. S’ajoute à ces problèmes familiaux la présence de Sarah, sœur de Sofian et ancienne membre de la Team Magma, qui a décidé, grâce à l’aide de l’Admin Holmes, de quitter l’organisation criminelle suite au réveil du volcan du Mont Chimnée. Tandis que Nathalie, sa mère, la convainc de ne pas se dénoncer à la police, Sofian a plus de mal à lui pardonner son passé de criminelle. De leur côté, Jessie, James et Miaouss s’enfuient de la Team Magma et sont rattrapés par la Team Aqua avec qui ils passent un marché, à travers l’Admin Hercules : pour récupérer leur montgolfière, ils doivent leur amener Brice. Les trois membres de la Team Rocket retrouvent le coordinateur et amorcent leur mission. Mais un détective mystérieux poursuit son enquête sur les organisations criminelles tout en s’intéressant au passé de Brice.


3 décembre 1992
S’il y avait bien un métier qu’elle n’aurait jamais choisi d’exercer, c’était celui d’accoucheur. La liste des raisons était beaucoup trop longue à énoncer, mais elle fit l’effort de se concentrer afin d’oublier sa douleur. Les longues années d’étude : impossible pour son passé d’étudiante lunaire. La collaboration avec des Leveinard indomptables : incompatible avec son manque de patience à l’égard des pokémons. Les ustensiles qui ressemblaient à des outils de tortures : et dire qu’ils allaient d’un instant à l’autre être utilisés sur elle !
Elle poussa un cri de douleur qu’elle réfréna courageusement. Ce n’était qu’une contraction, rien de plus. Ce bébé ne sortirait pas aujourd’hui, pas dans ces circonstances, pas sans lui.
— Madame Razzo, il va falloir arrêter de réfréner vos contractions, lui somma le médecin en agrippant une espèce d’engin métallique pointu.
— Non… je ne peux pas… c’est trop tôt… il… il n’est pas encore là…
— Vous avez perdu les eaux, votre bébé pointe le bout de son nez. Il faut pousser.
— Non, il n’est pas encore arrivé.
— Madame, essayez de la raisonner !
Sa belle-sœur serra sa main fort dans les siennes. Elle plongea son regard dans ses yeux bleus glaciaux et écarta sur son front une mèche de cheveux blonds plein de sueur. Mais elle tint bon. Elle n’allait pas laisser sa belle-sœur la faire changer d’avis. Ce n’était ni son teint pâle, ni le martyr qu’elle souffrait qui allait la pousser à avoir ce bébé aujourd’hui.
— Je t’en supplie, si tu luttes contre cet accouchement, tu vas avoir des complications, argumenta sa belle-sœur.
— Je ne peux pas… pas tant qu’il n’est pas arrivé…
— Il sera bientôt là. Je l’ai eu au téléphone, il va arriver, je te le promets.
— Je n’y arriverais pas sans lui…
— Tu connais mon frère, il a probablement été retenu à ses… « responsabilités ».
Une douleur lui traversa le bas-ventre, tel un petit couteau pointu qui lui déchirait les entrailles, et elle poussa un nouveau cri qui résonna jusque dans les couloirs de l’hôpital.
— Ça suffit, il faut intervenir ! alarma un accoucheur. Elle perd du sang !
— Leveinard, envoie ta « berceuse ». Nous allons passer à une césarienne d’urgence !
— NON ! ATTENDEZ !!
Le Leveinard s’approcha délicatement d’elle et entama une chanson douce dans ses oreilles. Elle sentit la réalité lui échapper, sa douleur s’évanouissait, la lumière s’estompait. Dans quelques secondes, elle allait quitter ce monde et laisser son bébé y faire son entrée sans protection.
Cependant, elle ne se sentit pas sombrer dans le sommeil. C’était comme si tous les actes médicaux qu’on lui faisait subir n’avait aucune conséquence sur ses récepteurs de douleur. Sa tête était trop lourde que pour observer ce qu’il se passait dans la seconde moitié de son corps, et elle garda ses yeux fixés sur le visage de sa belle-sœur qui semblait terrifiée par ce qu’elle voyait.
— M… Marielle…
Elle évita son regard, terrorisée.
— Il… il ne viendra… pas… articula-t-elle difficilement.
— Tout va bien se passer, rassura Marielle sans grande conviction.
Un poids s’effaça dans son ventre. Un cri de bébé déchira ses tympans. Il était né. Seul. Sans protection. Son père n’était pas venu. Il ne viendrait jamais. Il avait trahi sa famille. Il l’avait trahie et avec elle, son fils.
— Tu sais pourquoi… il n’est pas venu… dit-elle, le souffle court.
— Non, il n’a pas pu…
— Ton frère… Il a… Il nous a…
— Félicitations, Madame Razzo ! s’exclama l’accoucheur qui réunissait à lui seul tout le bonheur que la nouvelle maman aurait dû ressentir à cet instant. Votre fils est en très bonne santé.
On lui déposa un bébé tout chaud et humide dans les bras, mais elle n’avait pas assez de force pour pouvoir tourner la tête et l’admirer.
— Marielle, tu dois… le protéger…
— Q… Quoi ? P… pourquoi… ?
— Pars, loin… dans notre région natale… empêche-les de mettre la main dessus… Protège-le… d’eux…
Une légère brise glaciale souffla depuis la fenêtre entrouverte. Elle savait ce qui lui restait à faire.
Réunissant les derniers soupçons d’énergie de son corps, elle apporta sa main à son cou et en décrocha son pendentif qu’elle déposa au creux de la main de sa belle-sœur. Elle lui léguait le symbole de sa famille, son héritage.
— Protège mon fils… de son père… Protège Brice.
Et dans un dernier souffle, son regard se posa sur la petite tête tranquille du nouveau-né. Un silence pesant cadenassa la salle d’accouchement. Elle était partie. Marielle caressa le crâne chauve du petit être grassouillet qui cherchait de ses yeux à moitié clos la personne qui l’aimerait pour le restant de ses jours. Brice posa son regard bleu glacial dans celui de sa tante. Elle se jura d’honorer sa promesse de le protéger de son père jusqu’à son dernier battement de cœur.


Pokémon #201e
19 ans plus tard…

Vermilava

Une agréable brise légère ébouriffa les cheveux dorés de l’adolescent aux yeux bleu glaciaux. Si les circonstances avaient été différentes, il aurait aimé profiter de la beauté du ciel bleu, de la chaleur estivale qui régnait sur Vermilava malgré ce solstice d’hiver entamé, et de l’enthousiasmante décontraction qu’avaient apportée les vacances d’hiver. Mais rien n’était aussi paisible qu’un Papillusion sauvage aurait pu le croire en voletant tranquillement, car quelque chose grondait au loin, comme reflétant la colère qui grondait dans son cœur à cet instant.
— Brice, on est là !
Le coordinateur sortit de sa rêverie. Une adolescente lui faisait signe sur la terrasse d’un glacier à l’entrée du parc. Sa bande de nouveaux amis était réunie autour de coupes de glace qu’ils semblaient apprécier autant que leurs pokémons en liberté dans le parc.
Brice les rejoignit et tira une chaise libre beaucoup trop brusquement que pour passer inaperçu.
— Quelque chose ne va pas ? lui demanda Flora.
— Non, tout va bien, mentit Brice.
— …et comment Hélédelle a d’un coup terrassé son Chartor ? disait Sofian qui avait passé toute la matinée à se remémorer son match de la veille contre la championne d’arène, Adriane.
— Oui, j’ai vu ça aussi, répétait inlassablement Timmy.
— Et t’as vu le visage d’Addie quand mon Dynavolt lui a pulvérisé son Camérupt malgré son type désavantagé ?
— Tu sais Sofian, nous étions tous présents à ton match, répliqua Annick sèchement. C’était déjà assez pénible d’assister à ce massacre de pokémon autorisé, autant ne pas nous le faire vivre une deuxième fois.
— Une cinquième fois, tu veux dire, soupira Timmy en se réfugiant dans sa coupe de glace.
Sofian haussa les épaules et préféra reprendre le nettoyage de ses quatre badges dans leur pochette métallique. Il était arrivé à la moitié de son parcours dans Hoenn. Quatre mois, quatre badges. A ce train-là, il défierait son père à Clémenti-Ville avant la fin de l’hiver ! Son père… encore fallait-il qu’il accepte de lui parler à nouveau.
— Maintenant qu’on peut enfin profiter de cette agréable journée, ajouta Annick avec satisfaction, dis-nous tout Brice : quel est le problème ?
Brice bredouilla une excuse afin d’éviter le sujet.
— Allons, on a tous bien vu que tu tirais une tronche jusque par terre, insista Annick. Même le plus dépressif des Psykokwak n’a jamais été aussi bougon !
Sa remarque détendit Brice qui se laissa afficher un sourire en coin, avant de soupirer.
— C’est par rapport à ma tante, révéla Brice, ou plutôt son état de santé. Elle a besoin d’un médicament spécifique qui l’aide à effacer sa douleur chronique, mais mon fournisseur vient de m’annoncer une pénurie inattendue.
— Mince ! s’exclama Flora, trop inquiète au goût de Sofian qui lui lança un regard agacé. Il n’y a pas moyen d’en trouver ailleurs ?
— Le problème ne vient pas de l’approvisionnement, il vient de la production du médicament. Il y a une plante spéciale qui ne se cultive que dans la montagne par des Gloupti qui les transforment en poudre, un peu comme le miel et les Dardargnan. Mais apparemment, ces Gloupti auraient arrêté d’en produire du jour au lendemain et auraient même déserté la montagne.
Tout à coup, Sofian se sentit très mal-à-l’aise. Un champ de fleurs et des Gloupti, cette image lui rappelait son entrainement dans la montagne qui avait donné lieu à la décimation du champ en question.
— Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? s’étonna Annick.
— J’espère que ce n’est pas un nouveau coup de la Team Rocket, s’inquiéta Timmy.
— Oui, ça doit être encore eux ! s’exclama Sofian, bien heureux d’avoir sous la main quelqu’un à qui refiler la responsabilité.
— Qu’est-ce que tu vas faire ?
— Il me reste encore de quoi tenir quelques jours, et puis les douleurs de ma tante réapparaitront et elle vivra un enfer, expliqua Brice.
— On pourrait… hésita Flora en évitant le regard de Sofian. On pourrait peut-être aller voir ce qu’il se passe dans la montagne et essayer de retrouver les Gloupti ? Ils ont peut-être un problème qui peut être résolu ?
— J’y ai pensé… J’ai vraiment que ça à faire : aller me promener en montagne pendant que ma tante agonise.
Sofian préféra laisser la conversation se dérouler sans lui et changea de position sur sa chaise, une qui lui permettrait de ne pas être pris à parti.
— Et puis, à nous deux, je suis sûre qu’on arrivera à régler le problème ! argumenta Flora qui, décidément, avait très envie de se perdre en montagne avec le beau Brice.
— Peut-être…
— Ça me parait un peu dangereux, non ? intervint Timmy.
— C’est la raison pour laquelle tu devrais rester ici, rétorqua Flora du tac-au-tac. Tu es beaucoup trop faible pour gravir cette montagne. Annick s’occupera bien de toi !
— Mais… commença cette-dernière avant de se faire couper la parole.
— Et puis je doute que tu aies très envie de retourner sur cette montagne, Sofian.
— Je te rassure, ce n’était pas dans mon intention.
— Alors, c’est décidé ! Allons chercher tes plantes, Brice !
Flora se leva d’un bond en renversant sa coupe de glace et porta son sac à dos sur son dos avec enthousiasme.
— On risque de ne pas être de retour avant la nuit, tu sais, prévint Brice, peu rassuré par le projet.
— C’est encore mieux : on campera dans la montagne à la belle étoile ! Ça va être excitant !
Et Flora récupéra ses pokémons, puis tira Brice par le bras avant de l’entraîner vers le nord de la ville.
— Alors là, chapeau bas à elle ! applaudit Annick avec jalousie. Je savais qu’elle était entreprenante, mais je ne la connaissais pas aussi décidée à obtenir ce qu’elle voulait.
— Comment ça ?
— Flora qui se propose d’aller faire du sport dans la montagne pour cueillir des plantes, vous pensez que c’est parce qu’elle aime la randonnée ou plutôt les fesses du randonneur avec qui elle se balade ?
Sofian s’étouffa dans sa glace.
— Non, je dois dire qu’elle a été impressionnante sur le coup ! En gagnant son premier ruban, elle a attiré l’attention sur elle. Il ne lui restait plus qu’à lui tenir tête en le combattant et c’est jackpot ! Attendez-vous à les voir revenir main dans la main !
— C’est fini, oui ? s’emporta Sofian en jetant sa cuillère dans sa coupe vide.
Annick s’amusa de la jalousie de l’adolescent. Malheureusement, ce n’était pas lui qu’elle avait essayé d’embêter avec son discours. Timmy n’avait pas réagi, ce qui l’embêta beaucoup.
Cependant, en l’observant attentivement, elle comprit pourquoi il avait été assez distrait pour ne pas avoir de réaction : le jeune garçon cherchait quelque chose dans ses poches, puis dans son sac, puis à nouveau dans ses poches. Ne pas trouver ce qu’il cherchait semblait le plonger dans une panique qu’il ne contrôlait pas.
— C’est ça que tu cherches ?
Annick sortit de sa propre poche le flacon orange qui contenait les pilules mystérieuses du jeune garçon. Mais le flacon était vide.
— Qu’est-ce que tu as fait de mes médicaments ?
— Je les ai jetés dans les toilettes, révéla Annick très simplement. J’ai dû tirer la chasse plusieurs fois, c’est qu’elles étaient tenaces ces petites pilules.
— POURQUOI T’AS FAIT ÇA ?!
Timmy s’était levé d’un bond si brusque que sa chaise s’était renversée derrière lui. Sofian sursauta : jamais il n’avait vu Timmy dans un tel état d’anxiété.
— Parce que je pense que tu es devenu addict à ces médicaments inutiles, répondit Annick en haussant le ton pour la première fois. Et quelque chose me dit que j’ai raison.
— C’est la seule chose qui me maintient en vie, alors c’est normal que… !
— Arrête de mentir, Timmy ! ordonna Annick.
Son ton avait été si sec que son ami en resta muet.
— Ton discours ne tient pas la route ! Tu as fait croire à tes parents que tu étais guéri mais les médecins ont prouvé que ta maladie était toujours bien présente. Tu refuses de me dire qui t’a donné ces pilules et tu es incapable de passer plus d’une heure sans en consommer. Alors, j’ai décidé de reprendre les choses en mains.
— Timmy, qu’est-ce qu’il se passe ? s’étonna Sofian qui découvrait le sujet.
— Annick, tu n’as pas le droit de… !
— J’ai tous les droits ! J’ai même le droit de téléphoner à tes parents à Vergazon et de te faire rapatrier chez toi !
Timmy considéra la menace de son amie et préféra se calmer.
— Bien, je vois que tu commences à être raisonnable. J’ai réservé un bassin dans les sources chaudes dans une heure pour t’aider à te relaxer et travailler sur ta respiration. Je pense que c’est par là qu’il faut commencer si tu veux gérer ta maladie. Prends tes affaires, on y va !
Sans un mot de plus, elle quitta la table en direction du parc où ses six pokémons la suivirent avant de disparaître au loin. Timmy évita le regard interrogateur de Sofian, récupéra ses affaires et la suivit à la trace.
— Donc en gros, c’est moi qui paie la tournée, c’est ça ?! s’exclama Sofian alors qu’il ne restait plus que lui et ses pokémons désabusés.
Il lécha les quelques gouttes de glace qu’il lui restait, prenant un maximum de temps afin de ne pas se rendre à l’évidence : seul, il n’avait plus qu’à retourner à son logement au centre pokémon où devait errer sa sœur. Depuis le coup de téléphone qu’ils avaient passé ensemble à leur père — qui était malheureusement resté sans réponse positive — et la soirée qu’ils avaient partagée pour sa victoire à l’arène, leur relation s’était assouplie. Néanmoins, Sofian n’était pas particulièrement désireux de retrouver les liens familiaux qu’ils avaient partagés par le passé.
Cependant, aucune meilleure idée ne lui vint à l’esprit, et il décida de rentrer à son logement. Un vent frais s’était levé, plongeant Vermilava dans l’ombre de nuages massifs. Quelque part dans le ciel, quelque chose allait gronder.

***

3 décembre 2000

« BAM ! BAM ! BAM ! »
— Y a la grosse qui arrive !
— Vite, on se barre !
« BAM ! BAM ! BAM ! »
— Qu’est-ce que c’est que tout ce raffut ?!
— Vas-y, grouille si tu veux pas finir au trou !
« BAM ! BAM ! BAM ! »
Il tapait sur la porte à s’en faire saigner les poings. L’obscurité l’oppressait à mesure que le temps passait. De l’autre côté, il entendit les rires et les pas précipités des enfants qui s’enfuyaient alors qu’une adulte entrait dans le dortoir.
Soudain, un cliquetis retentit et la porte s’ouvrit à la volée. Il bascula à la renverse, entraînant sur son passage une demi-douzaine de balais, et s’effondra aux pieds de la dame replète qui venait de le libérer de sa prison.
— Je peux savoir ce que tu faisais dans ce placard à balais, jeune homme ? le sermonna la pionne.
— Ils m’ont enfermé, répondit-il d’une demi voix.
— Qui ça ?
Il baissa les yeux, terrifié à l’idée de révéler le nom de ses bourreaux. La femme s’accroupit auprès de lui et lui adressa un regard sévère.
— Si tu ne nous dis pas qui t’a fait ça, Brice, nous ne pourrons que te tenir responsable de tout ce vacarme.
C’était impossible : jamais il ne pourrait prendre le risque de dénoncer les adolescents qui voulaient sa peau.
— Tu es encore dans un sacré état, soupira la pionne en lui caressant le visage remplis de coups bleus.
Même la tendresse n’avait aucun effet sur lui : il était décidé à ne pas s’attirer les foudres revanchardes de ceux qu’il dénoncerait.
— Bon, puisque tu ne veux pas coopérer…
La pionne releva un balai qu’elle lui fourra dans la main.
— …tu es en retard pour ta part de tâche ménagère.
Et elle le força à se relever. Brice porta sa main à son cou et caressa son pendentif, la seule chose qui pouvait encore le réconforter dans cet orphelinat.

Aussi longtemps qu’il s’en souvenait, Brice n’avait toujours connu que les murs de cet orphelinat lugubre. Ce qui rendait cet endroit détestable à ses yeux, ce n’était ni l’odeur de moisi qui embaumait les dortoirs, ni les courants d’airs glaciaux qui s’infiltraient par les fenêtres mal-isolées, ni même la nourriture infecte qu’on leur proposait trois fois par jour. Non, c’était plutôt la manière avec laquelle on le traitait, lui, en comparaison avec les autres pensionnaires.
L’orphelinat qu’il fréquentait était sa seule famille, et il était le plus jeune. Du haut de ses huit ans, chaque pensionnaire le dépassait de plusieurs têtes et chacun profitait de sa domination physique pour le terroriser et obtenir ce qu’il désirait de lui. Il avait cru avoir des grands frères et des grandes sœurs ; il s’était très vite rendu compte qu’il était entouré d’étrangers hostiles.
C’était la raison pour laquelle il s’était très vite lié d’amitié avec tous les pokémons de l’orphelinat. Paradoxalement, c’était aussi la raison pour laquelle il était devenu le bouc émissaire de chaque individu humain qui vivait entre ces murs. En effet, l’on réservait aux pokémons de cet endroit le même sort qu’à Brice : abandonnés de leurs maîtres, les pokémons s’étaient mis au service du personnel en proposant leur aide dans les tâches les plus éreintantes. Un jeune Sancoki était chargé du lavage quotidien du sol des dortoirs, un Lixy abandonné s’occupait de maintenir les installations électriques conformes, tandis qu’un vieux et frêle Laporeille avait été chargé de l’organisation des repas dans les cuisines délabrées.
Jeune, abandonné et frêle, Brice s’était tout de suite identifié aux pokémons alentours, si bien qu’il avait été admis qu’il devrait lui aussi partager les corvées. Les plus grands des pensionnaires y avaient vu là un signal leur autorisant à le maltraiter, et pour Brice avaient commencées les galères.
Il ne se souvenait plus du nombre de fois où il avait été roué de coups pour avoir refusé de faire leurs lits, du nombre de repas qu’il avait dû leur céder, ni même du nombre d’appels à l’aide auprès du directeur de l’orphelinat qui avaient été complètement ignorés. Une fois, on lui avait même jeté son pendentif dans les toilettes avant de tirer la chasse, et il n’avait pu le récupérer que grâce à l’aide d’un Mustébouée handicapé qui lui avait permis d’accéder aux égouts.
Personne ne s’était jamais occupé de lui, sous prétexte qu’il ne donnait pas envie que l’on s’intéresse à lui. Aujourd’hui, c’était son anniversaire, et il avait eu pour seul cadeau son incarcération dans un placard à balais. Mais tout cela allait changer : il en était décidé. Son huitième anniversaire sonnait pour lui sa libération. Il avait tout prévu et mit son plan à exécution.
Profitant du moment du repas, où tous les pensionnaires et le personnel étaient réunis au réfectoire, il feignit un mal de ventre douloureux afin de s’éclipser hors de la vue du Cradopaud qui patrouillait. Il délogea une fenêtre aux châssis pourris du troisième étage et se fit glisser hors de l’établissement à l’aide d’une corde qu’il avait créée en nouant de vieux draps de lits rapiécés ensemble.
Ses pieds s’enfoncèrent dans une épaisse couche de neige qui lui frigorifia les orteils. Devant lui, le champ qui entourait l’orphelinat était couvert d’un manteau blanc et le froid de la nuit ankylosait le silence des environs. Il était libre ! Derrière lui, son passé à l’orphelinat. Devant lui, son futur dans la vie réelle !
— SONNEZ L’ALERTE !
Des voix grondèrent derrière les murs de l’orphelinat et une alarme assourdissante réveilla quelques Etourmi sauvages. Il fallait fuir le plus loin possible avant que les autorités ne le retrouvent !
Brice s’enfuit dans l’obscurité de la nuit hivernale avec comme seul protection son pendentif qu’il serra fort autour de son cou.


Pokémon #201v
La pente était abrupte et chaque pas lui coutait une douleur dans les fessiers qui lui rappelait à quel point elle avait délaissé son exercice physique depuis qu’ils étaient arrivés à Vermilava deux semaines plus tôt. Elle s’arrêta un instant afin de calmer un point de côté et jeta un coup d’œil au chemin déjà parcouru : depuis le pan de la montagne au nord de la ville sur lequel ils se trouvaient, la ville semblait minuscule, enclavée dans la vallée du Mont Chimnée. Ils n’étaient pas partis depuis bien longtemps, et pourtant ils avaient déjà gravi pas mal de mètres d’altitude. En repensant à Sofian qui s’était mis au défi de monter au sommet tout seul, elle frissonna en se rendant compte de la différence de niveau qui les séparait à présent.
— On ferait mieux de s’y remettre si on veut arriver avant le coucher du soleil, appela Brice au loin.
L’adolescent n’avait pas décoléré depuis leur départ et avalait les mètres à une vitesse vertigineuse, si bien que Flora avait parfois bien du mal à le suivre de près. Elle lui fit signe de patienter un instant, et s’abreuva auprès de son Flobio qui semblait souffrir lui aussi de la chaleur anormale.
Préférant ne pas laisser Brice s’impatienter, la coordinatrice le rejoignit d’un pas pressé et ils reprirent la route en silence.
En proposant de l’accompagner dans son périple, la jeune fille s’était attendue à passer un agréable moment en compagnie de son idole qu’elle admirait tellement, tant pour ses talents que pour son physique avantageux. Si elle avait bien profité pendant ces quelques heures de la forme généreuse de ses fesses durant leur ascension, elle avait tout de même fini par trouver le temps long. Elle connaissait l’affinité de Brice pour les pokémons de type glace, mais jamais elle ne se serait douté qu’elle allait devoir briser elle-même la glace entre eux.
— C’est marrant comment on se ressemble beaucoup, toi et moi, finalement, lâcha-t-elle courageusement.
Brice fronça les sourcils pour toute réponse, toujours concentré sur sa marche.
— Toi, célèbre pour tes talents artistiques, moi célèbre pour mon appartenance à la famille Seko, poursuivit Flora qui manquait de souffle. Tous les deux coordinateurs, tous les deux souffrant de parents absents.
Si tous ces points de ressemblance ne l’aidaient pas à créer un lien affectif entre eux, elle ne savait plus quoi faire pour attirer son attention.
— Je t’arrête tout de suite, répondit Brice froidement, mes parents ont toujours été là pour moi. Ceux dont tu parles, ce sont mes concepteurs biologiques.
— Oh, je suis désolée. Je ne voulais pas te blesser.
— Tu ne m’as pas blessé, rassura Brice. Juste que j’ai vécu une enfance heureuse… avec mes parents, rajouta-t-il après un moment de réflexion.
— Je comprends mieux pourquoi tu es si attaché à ta tante et pourquoi tu t’en occupes si bien.
Brice soupira. Interloquée par sa réaction, Flora préféra ne rien ajouter. Le coordinateur se rendit compte de l’ambiance glaciale entre eux et s’arrêta dans sa marche.
— En réalité, il s’agit de ma vraie tante, avoua-t-il. Je veux dire : la sœur de mon père biologique.
Flora s’arrêta à son tour une fois l’avoir rejoint. Hésitante, elle préféra ne pas lui poser de question et s’appuya sur son Flobio pour se reposer en contemplant le paysage magnifique que lui offrait Vermilava sous le soleil hivernal.
— Je n’étais plus revenu à Vermilava depuis très longtemps, dit-il, les yeux perdus sur le Mont Chimnée qui s’étendait devant eux de l’autre côté de Vermilava. C’est en apprenant la maladie de ma tante que j’ai décidé d’y revenir, malgré la promesse que je m’étais fait de ne plus jamais y mettre les pieds.
— Pas si heureuse comme enfance, finalement, marmonna Flora sur un ton compatissant.
Brice émit un soupire d’approbation.
— Comment ne pas s’occuper d’une personne malade quand il ne lui reste que toi ?
Flora lui caressa le dos pour le réconforter et son cœur se serra dans sa poitrine lorsque sa main entra en contact avec les muscles de son idole. Le voir aussi triste la faisait totalement craquer.
— Tu as vu ça ?!
Tout à coup, Brice avait tourné la tête et semblait chercher quelque chose du regard au bout du chemin rocailleux qu’ils venaient de parcourir.
— De quoi ?
Brice ne lui répondit pas : il cherchait du regard quelque chose qui manifestement n’était pas visible car le chemin était vide.
— On aurait dit… que quelque chose nous épiait…
— On ferait mieux de s’y remettre, proposa Flora qui commençait à sentir le stress monter en elle. Le chemin a l’air encore long.
Brice mit un certain temps avant de se concentrer.
— Pas vraiment. Le champ de fleurs est littéralement au-dessus de nos têtes.
Il pointa du doigt le plan incliné rempli de roches et d’arbres qui avaient poussé à l’horizontal, leur offrant un mur d’escalade comme Flora n’en avait jamais vu dans sa vie.
— J’espère que tu aimes le sport car il va falloir faire un peu d’alpinisme !
— J’adore ça, grommela Flora dans ses dents.
Et les deux coordinateurs se lancèrent dans l’entreprise d’escalade.

*
Qu’est-ce qu’un dresseur était censé avoir comme activité lorsque toutes les arènes de la région étaient fermées pendant deux semaines de vacances annuelles ? Sofian remuait machinalement cette question dans sa tête tandis qu’il cherchait désespérément un endroit intéressant où passer sa journée. Se balader seul dans le parc l’avait ennuyé, même si ses pokémons s’étaient réjouis de profiter d’un moment de plaisir, et visiter Vermilava l’avait lassé car cette ville perdue dans une vallée montagneuse n’avait pas beaucoup d’attractions à visiter. Il s’était résolu à se rendre au centre pokémon et flâner dans sa chambre devant la télévision, une activité qu’il n’avait plus explorée depuis très longtemps.
Mais en entrant dans sa chambre, il surprit sa mère assise sur son lit, le visage humide.
— Il y a un problème ?
En l’examinant de plus près, elle était entourée de mouchoirs usagés et tenait fébrilement une feuille de papier froissée dans les mains. Incapable de prononcer un mot dans ses sanglots, elle lui tendit la lettre.
S’attendant au pire, Sofian saisit le bout de papier qui avait subi l’assaut des larmes de sa mère, et dirigea son regard directement à l’endroit de la signature : « Sarah ». Qu’est-ce que sa sœur avait-elle pu encore faire comme bêtise ?
Sofian s’installa à côté de sa mère et démarra sa lecture.

Ma petite maman,

Je ne peux commencer cette lettre sans te partager le bonheur que je ressens chaque jour depuis que nous nous sommes retrouvées. Une fille ne peut pas vivre sans la présence de sa mère, sans sa protection, sans son amour. Toutes ces années passées loin de toi m’ont déshumanisée. Te retrouver ma redonner un souffle de vie. Merci de ne pas m’avoir abandonnée malgré tout ce que je t’ai fait vivre.
Malheureusement, mes actes passés constituent un fardeau trop lourd à porter sur mes faibles épaules. T’avoir retrouvée, voir dans les yeux de Sofian un début de pardon,… de tout cela je ne mérite rien. Si mon dossier criminel a été falsifié afin que je ne sois pas inquiétée par la justice, ma conscience n’en reste pas moins torturée. Je pensais que je pourrais vivre ainsi. Je pensais que je serais assez forte pour profiter d’une vie en liberté.
Puis, j’ai passé ce coup de téléphone à papa. Et ce que j’ai vu dans ses yeux est probablement pire que tout ce que j’ai fait subir à ces pauvres innocents. Ce n’était ni de la haine, ni de la rancœur, ni du mépris, mais de la honte. Je n’ai plus fermé l’œil de la nuit depuis.
C’est pourquoi j’ai pris une décision, et elle est irrévocable. Au moment où tu liras cette lettre, je me serai rendue à la police et j’aurai avoué tous mes crimes. Il est temps pour moi de payer le prix de mes méfaits si je veux avoir accès au pardon de papa. C’est la seule façon pour moi d’arriver à me pardonner.
Je ne pourrai jamais vous remercier assez, toi et Sofian, d’avoir trouvé une place dans votre cœur pour m’y accueillir à nouveau.
Je vous aime,
Sarah


— Sarah est… elle est… sanglota Nathalie.
— La fille la plus stupide de toute la région ? s’emporta Sofian en roulant la lettre en boule dans ses poings.
Il jeta la boulette de papier contre le mur et se leva d’un bond.
— Où… où est-ce que tu vas ?
— L’empêcher de commettre la deuxième plus grosse erreur de sa vie !
— Sofian, attends !
Sa mère se précipita sur lui et l’empêcha de sortir de la chambre.
— C’est trop tard, dit-elle, elle s’est déjà rendue au commissariat.
— Avec un peu de chance, elle n’a pas eu le temps de se livrer. Tu sais comment ils débordent de travail.
— Sofian…
— Je ne peux pas rester ici à ne rien faire, m’man !
Il se dégagea de l’emprise de sa mère avec force, ce qui la fit vaciller. Nathalie se laissa pleurer à chaudes larmes. La quadragénaire était si fatiguée, si loin dans ses réserves d’énergie.
— Quand je suis parti en voyage dans Hoenn, tu m’as mis en garde de ne pas essayer de la retrouver, se souvint Sofian. Et je t’ai dit que je n’en avais pas l’intention, ce qui était vrai. J’étais tellement en colère contre elle qu’elle avait quitté mon champ de la réalité. Elle n’existait plus. Mais depuis deux mois, depuis ce que j’ai vécu dans la base secrète de la Team Magma, l’enlèvement, la torture psychologique, les attentats horribles qu’ils ont commis,… Je l’ai vue dans leurs rangs et quelque chose a changé. J’ai mis du temps à m’en apercevoir, j’ai mis du temps à entendre ce que mes amis essayaient de me dire. Maman, je suis convaincu qu’elle est avant tout une victime de la Team Magma. Ça n’enlève rien à ses actes criminels, et je ne pense pas arriver un jour à les lui pardonner, mais ça les explique. Et la justice ne tiendra pas compte de cette réalité. Je ne peux pas me résoudre à la perdre une seconde fois.
Nathalie prit son fils dans ses bras et sécha ses larmes, tandis que Sofian sentait monter en lui un sentiment qu’il n’avait plus ressenti depuis bien longtemps : un sentiment fraternel.
— Allons-y avant qu’il ne soit trop tard.
Sofian ouvrit la porte mais sa mère ne le suivit pas. Elle resta plantée au milieu de la chambre, le regard figé sur la fenêtre.
— Qu’est-ce que c’est que ça ?
Sofian jeta un coup d’œil à la fenêtre. Ce qu’il vit à l’extérieur, dans la montagne, lui glaça le sang.

*
La jeune fille se glissa dans le bassin lentement, faisant disparaître sous la surface de l’eau chaude ses jambes lisses et son ventre plat jusqu’à ses seins cachés dans son bikini. Timmy sentit quelque chose se tendre au niveau de son bas-ventre et remercia le ciel pour la présence de vapeur d’eau qui cachait de vue tout ce qui se passait sous l’eau.
— On n’est pas bien, ici ?
Timmy bredouilla quelques mots qui ne lui semblèrent pas sensés à l’oreille.
— Si je ne te connaissais pas trop fier pour me le dire, je t’obligerais à me remercier tout de suite, s’amusa Annick.
Timmy devait se l’avouer, se relaxer dans les sources chaudes lui faisait un bien fou. La chaleur détendait chacun de ses muscles — « ou presque ! », pensa-t-il secrètement —, ce qui lui facilitait la respiration. Jamais il ne subirait de nouvelle crise dans cet endroit si reposant, et surtout en si bonne présence.
Annick se rapprocha de lui dans le bassin et leurs bras entrèrent en contact. Le jeune garçon sentit son corps se raidir davantage et déglutit. Il fallait qu’il se débarrasse de ses pensées qui le déconcentraient trop.
— Merci de t’occuper de moi de cette manière, dit-il, avant de se sentir très bête.
— De quelle manière ?
— Je veux dire… m’accompagner dans ma maladie, rendre mon quotidien plus agréable, me faire oublier les douleurs physiques… Merci, quoi. Surtout qu’il parait que je n’ai pas vraiment été très gentil avec toi lorsque nous étions enfants.
— Oh ! ne t’en fais pas pour ça, c’est du passé ! Quand les gens survivent à un attentat, s’enfuient d’une chambre de torture, et échappent à la mort ensemble, des liens finissent par se créer naturellement.
Timmy éclata de rire et se sentit tout de suite plus léger. Jusqu’à ce qu’Annick lui accorde un baiser sur la joue qui le pétrifia dans le bassin.
— Tu ne te souviens toujours pas de ton enfance ? demanda Annick en lui offrant l’opportunité de ne pas réagir à cette action.
— Je n’ai aucun souvenir, et j’en suis profondément désolé. Depuis que tu m’as dit que nous étions très amis dans notre enfance, j’ai essayé de chercher des souvenirs, mais impossible. C’est comme si ma vie avait commencé après le déclanchement de ma maladie.
— Cette maladie m’a l’air pas mal étrange ! Si je résume : aucun médecin n’a jamais vu ça dans sa carrière, aucun traitement ne fonctionne, tes souvenirs t’ont été effacés et un jour sur deux, ton état est si faible que tu frôles la mort instantanée.
— C’est à peu près ça…
Timmy soupira. Il savait qu’Annick essayait de prendre le sujet sur un ton décontracté, mais ses mots étaient si justes qu’il n’avait pas d’autres moyens que d’aborder le sujet que par le drame.
— Tu n’aurais pas été maudit, par hasard ? suggéra Annick en rigolant. Un genre d’attaque « malédiction » d’un pokémon spectre qui t’aurait touché ?
— Qui sait ?
Un flash traversa sa rétine : il était au sommet d’une colonne de lumière et chutait vers le sol tandis qu’un petit être vert tournoyait autour de lui. Ses visions nocturnes, son rêve prophétique.
— Il faut que je t’avoue quelque chose que je n’ai jamais révélé à personne…
Timmy prit une bouffée d’air chaude, comme pour se donner du courage. Annick le laissa parler à son rythme. Le jeune garçon regarda une dernière fois le Mont Chimnée qui s’étendait tout autour d’eux, comme pour y puiser l’énergie nécessaire à la narration de son histoire :
— J’ai longtemps fait un rêve lorsque j’étais petit et que je passais mes journées à l’hôpital, avoua-t-il. Je me voyais à mon propre enterrement, comme si ma maladie voulait me torturer à travers mes rêves. Et en réalité, ces rêves semblaient si réels qu’à chaque fois que je me réveillais, j’avais l’impression d’être au contraire entré dans un rêve. J’ai toujours eu du mal à déterminer à quel moment j’étais éveillé, et à quel moment j’étais endormi. Avec le temps, ces rêves se sont dissipés. Mais depuis quelque temps, depuis que je suis parti de Clémenti-Ville… ils sont revenus, et de manière de plus en plus récurrente. D’ailleurs, ils ont un peu changé. À présent, je vois aussi d’autres morts : Klein, le sbire de la Team Magma qui s’est suicidé près d’Autéquia, ou Picko, le Goélise de Monsieur Marco que nous n’avons pas réussi à sauver. Et il y a cet œuf. « L’œuf de la vie »… l’œuf de la mort, plutôt. Un œuf noir qui ne reflète rien, comme s’il aspirait toute la lumière. Il est si léger, si familier que j’ai l’impression que c’est une partie de moi. Et enfin, il y a…
Timmy s’interrompit. Devant lui, à des centaines de mètres en altitude, au sommet du volcan du Mont Chimnée, une colonne d’énergie noire s’était dressée, grimpant à perte de vue jusqu’au soleil au zénith.
— Qu’est-ce que… ? TIMMY ?!!!
Annick détacha son regard de la colonne d’énergie. Timmy avait disparu sous la surface de l’eau. Elle plongea dans le bassin et remonta le corps de Timmy, mais ce-dernier convulsait violemment, si bien qu’il lui fut presque impossible de le ramener hors du bassin.
— TIMMY !!
Étendu de tout son long sur le sable chaud, le corps de Timmy était parcouru de soubresauts. Ses yeux s’étaient révulsés, de l’écume sortait de sa bouche, et le jeune garçon semblait à court d’oxygène.
— A L’AIDE !!!

Pokémon #201
5 décembre 2000
Comment avait-il pu être aussi téméraire ? Comment avait-il pu croire un instant qu’il survivrait seul en pleine nature ? L’orphelinat était un endroit horrible, certes, mais au moins il avait eu le confort minimal pour lui permettre de vivre. Seul, perdu dans le froid hivernal, au milieu d’une forêt montagneuse interminable, Brice se laissa tomber au sol.
Il rassembla dans ses petites mains d’enfant un tas de neige qu’il porta à ses lèvres. Le goût était répugnant, mais au moins sa soif s’était dissipée. Qu’allait-il devenir ? Cela faisait deux jours qu’il marchait sans but, loin de toute civilisation. Il avait réussi à semer le personnel de l’orphelinat qui était parti à sa poursuite, et avait réussi à éviter les villes où devaient se réunir des dizaines de policiers pour organiser une grande expédition à sa recherche.
Brice s’était concentré sur une seule chose : les paroles d’une comptine qui lui tournait en boucle dans sa tête depuis ses premiers jours.

Va, petit oiseau. Déploie tes ailes.
Vole jusqu’aux cimes, et dans les airs
Tu trouveras le chemin
Qui guidera ton destin
Au sommet de la montagne.
Alors, Brice s’était dirigé vers la chaîne de montagne gigantesque qui traversait l’horizon. Naïvement, peut-être, mais décidé à suivre le chemin qui le guiderait au sommet de la montagne. Quelque chose en lui, son instinct peut-être, lui disait que là se trouvait son destin.
Brice porta sa main à son pendentif, comme pour se redonner du courage. Mais sa main se referma dans le vide. Son pendentif avait disparu.
Non ! Impossible ! Tout ce qui lui restait de sa véritable famille, sa mère ou peut-être son père qui le protégeait au travers de son bijou. Disparu ! Envolé !
Il fallait qu’il le retrouve ! Il ne pouvait pas continuer sa route jusqu’au sommet de la montagne enneigée sans son pendentif !
Brice fit marche arrière et scruta chaque centimètre carré du chemin qu’il avait emprunté dans la forêt. Il souleva chaque rocher qu’il trouvait, ôta chaque tronc sur son passage.
Soudain, de rage, il lança une branche d’arbre qui retomba sur quelque chose de mou. Deux yeux bleus se matérialisèrent dans les arbres, puis quatre, huit,… Des dizaines d’yeux l’entouraient à présent. Ce qu’il avait pris pour des souches d’arbres enneigées se déplacèrent, l’enfermant dans un cercle menaçant.
Les pokémons avaient bien l’intention de protéger leur territoire ! Brice se mit à courir dans la neige, poursuivi par la horde de pokémons hostiles. Glissant à chaque virage, sa gorge lui brûla à mesure que l’air froid rentrait dans ses poumons.
Tout à coup, son pied se prit dans une racine et il chuta au sol. Emporté par la neige, il dévala un pan de colline et termina sa course au bord d’un lac. Si la situation n’avait pas été aussi dramatique, il se serait extasié devant la beauté du lac sous les rayons de la lune.
Il essaya de se relever, mais sa cheville endolorie l’empêcha de bouger. Les pokémons l’avaient rattrapé et l’entouraient à nouveau. Devant lui, un mur de monstres dangereux. Derrière lui, le lac à perte de vue. Il était piégé, c’en était fini de sa misérable vie.
Alors, une douce mélodie s’éleva depuis le centre du lac. Quelque chose flottait au-dessus de la surface de l’eau, au loin. Comme une boule de lumière. Les pokémons s’étaient arrêtés nets.
Soudain, un rayon de glace traversa le ciel et les pokémons brisèrent leur rang en s’enfuyant dans la forêt.
Brice se laissa retomber au sol. Un petit être rose, qui ressemblait fortement à un bébé aux cheveux dorés, sortit de sa cachette et avança prudemment vers lui.
— Un Lippouti… murmura Brice en découvrant son sauveur.
Le pokémon sauvage s’approcha de son visage pour vérifier son état de santé. Quelque chose pendait autour de son cou : son pendentif.


***
— Tu as vu ça ?
— Ça a disparu aussi vite que c’est apparu !
— Qu’est-ce que c’était ?
— Je n’ai jamais vu ça de ma vie…
Les deux adolescents scrutèrent le ciel derrière eux à la recherche de la colonne d’énergie noire qui s’était dressée dans la montagne de l’autre côté de la vallée. Le ciel était redevenu bleu et tranquille, alors qu’un vent chaud s’était levé.
Aidés de Flobio qui assurait leurs arrières en cas de glissade, les deux amis étaient suspendus dans le vide. Accrochés à une corde enroulée autour de leur taille, ils avaient gravi quasiment l’entièreté de la pente rocheuse qui se dressait au milieu de leur chemin. Ils avaient grimpé très lentement, sans se soucier des pokémons qui devaient se terrer dans les tanières creusées dans la roche autour d’eux.
— On ferait mieux de continuer, je vais finir par manquer de force, pressa Flora.
Brice reprit son ascension non sans rester alerte et tira derrière lui afin d’aider Flora à atteindre le sommet de la pente. Il disparut sur le plateau alors que Flora se hissait difficilement à son tour sur le sol terreux.
— C’est pas vrai ! s’exclama Brice.
Flora arriva enfin à rejoindre le plateau à quatre pattes. Devant lui, Brice se tenait debout face à un gigantesque champ de fleurs. Ce que Flora découvrit lui glaça le sang. C’était un véritable champ de cendres qui les entourait et disparaissait à perte de vue sur le plateau de la montagne.
Brice s’accroupit au milieu du champ et ramassa une fleur noire qui s’éparpilla entre ses doigts au touché. Il tenait à présent l’explication de la pénurie : le champ avait été dévasté. Pour une raison inconnue, les Gloupti qui gardaient l’endroit avaient failli à leur mission, laissant derrière eux un champ de fleurs mortes.
— Non, c’est impossible…
— On dirait qu’il y a eu un combat terrible qui a tout décimé, s’effara Flora.
— Ça ne peut pas être vrai…
— Il doit bien en rester quelques-unes intactes.
Brice poussa un hurlement de rage, et Flora recula d’un pas. Jamais elle n’aurait pensé que le coordinateur adoré de tous pourrait perdre autant son sang-froid. Agenouillé dans les cendres, Brice se tenait le visage entre les mains.
Flora prit les choses en main : elle fit apparaître son Charmillon qu’elle envoya en éclaireur à la recherche de fleurs qui auraient survécu à la catastrophe inconnue.
— Ne t’en fais pas, je te promets qu’on va en trouver.
Brice ne lui répondit pas et se releva d’un coup. Quelque chose avait attiré son attention.
— Tu en vois des intactes ?
Mais il ne s’agissait pas des fleurs. Au centre du champ dévasté, un magnifique pokémon félin au pelage blanc et à la queue noire les fixait de ses yeux rouges sans bouger. Partant du côté de son crâne, une faux aiguisée s’élevait au-dessus de sa tête.
— Waw, il est magnifique ! s’émerveilla Flora en amorçant un pas vers lui.
— Ne t’approche pas !
Brice lui barra la route d’un mouvement de bras.
— Il s’agit d’un Absol.
N’ayant jamais entendu le nom de ce pokémon, Flora le scanna à l’aide de son Pokédex.
— « Absol arrive à capter précisément le moindre changement dans l’air ou sur terre et peut ainsi prédire les catastrophes naturelles », lut Flora. « Il vit dans un milieu montagneux aride et protège les champs. »
Flora décrocha son regard de son appareil et examina le pokémon qui restait immobile au milieu des fleurs mortes.
— Tu crois que ce qui a détruit ce champ est lié à lui ?
— Je n’en sais rien.
— Tu crois que c’est lui que tu as vu en bas, tout à l’heure ?
— Aucune idée.
— Il n’a pas l’air très menaçant, tu ne penses pas ?
— Évitons de l’approcher.
Brice se déplaça latéralement sans quitter le regard du pokémon. L’Absol sauvage ne changea pas sa position, comme s’il était fixé dans le sol, mais ses yeux les suivirent à la trace. Flora eut un mauvais pressentiment et préféra suivre Brice qui s’éloignait prudemment de la zone protégée par le pokémon, jusqu’à ce qu’il fût assez loin pour disparaître de leur vue.
Le champ de fleurs mortes s’étendait sur des centaines de mètres alentours. Aucune n’avait survécu à la catastrophe inconnue, et plus le temps passait, plus le soleil descendait à l’horizon, éloignant rapidement leur chance de trouver de quoi soigner la tante de Brice.
Alors que le soleil disparaissait dans la chaîne de montagne, baignant le champ de cendres d’une lueur orangée, Charmillon revint de ses recherches en battant des ailes de manière excitée.
— On dirait que mon Charmillon a trouvé quelque chose !
Les deux coordinateurs suivirent l’énorme papillon à la trace. Après quelques minutes de course effrénée, le papillon se posa sur un petit rocher au milieu du champ et montra une boule verte au sol.
Brice s’accroupit et retourna la boule verte pour voir son visage.
— Un Gloupti ! Il a l’air très mal en point.
En effet, le pokémon respirait lentement et, les yeux plissés, semblait souffrir de douleurs internes.
— Au vu de sa peau mal entretenue et de son état de fatigue, je dirais qu’il git ici depuis plusieurs jours, observa Brice.
— Pauvre petit Gloupti ! Où sont les autres membres de sa horde ? Où sont les Gloupti qui sont censés protéger ce champ ? Pourquoi l’ont-ils abandonné ?
— Il a dû se passer quelque chose de si dangereux que la horde a préféré sauver l’équilibre du groupe plutôt que de sauver les individus les plus faibles.
Brice prit le pokémon dans ses bras, mais le Gloupti semblait avoir une dernière ressource d’énergie qu’il employa à se dégager de l’emprise du coordinateur. Le Gloupti retomba au sol et rampa difficilement loin d’eux.
— Gloupti, laisse-nous t’aider.
Brice essaya de le prendre à nouveau dans ses bras, mais le pokémon sauvage semblait décidé à poursuivre sa route douloureuse.
— On dirait qu’il veut rejoindre ce mur de rochers, remarqua Flora.
— Probablement l’endroit où se trouve sa tanière.
— Et donc ses amis qui pourraient lui venir en aide ! Brice, il faut l’aider.
L’adolescent acquiesça et s’agenouilla auprès du pokémon blessé.
— Gloupti, j’aimerais pouvoir t’accompagner jusqu’à ta tanière, dit-il d’une voix douce. J’imagine que c’est là que tu essaies de te rendre pour retrouver tes amis. Laisse-moi t’aider, je t’en prie.
Le pokémon le dévisagea, méfiant.
— Tu sais, en ce moment, quelqu’un qui m’est cher est aussi en souffrance. Pour elle, je ne peux plus rien, malheureusement. Mais j’ai appris tout petit qu’il ne fallait pas avoir peur de venir en aide aux plus faibles, surtout dans les moments de détresse.
Il fit apparaître son Lippouti. Dans un premier temps, le Gloupti mal-en-point recula de peur. Mais Lippouti avança prudemment vers lui et l’apaisa en lui envoyant une douce brise froide qui le soulagea de ses douleurs.
— Ce Lippouti m’a sauvé la vie, par le passé. Laisse-moi te sauver la tienne aujourd’hui.
Brice avança délicatement ses mains vers le Gloupti sauvage qui se laissa faire. Il avait gagné sa confiance. Sans perdre de temps, Brice prit le pokémon dans ses bras et, suivi de Flora, se mit en route pour la tanière des Gloupti.

*
Au-dessus de sa tête défilaient des milliers d’orbes lumineuses, baignant les alentours d’une magnifique lumière blanche divine.
Les néons lumineux du couloir de l’hôpital défilaient sous ses yeux tandis que l’on poussait le brancard dans une salle blanche.
Il était complètement nu au centre de sa chambre d’enfant. Sur son ventre reposait un œuf, un gros œuf d’un noir si pur qu’aucune lumière ne se reflétait sur sa paroi.
On plaça le jeune garçon sur une surface dure sans se soucier de sa tenue de piscine. On lui planta une aiguille dans le bras, on lui fourra un ballon sur le visage. Quelqu’un amena une pression suffocante sur son thorax.
Timmy savait ce qu’il lui arrivait, il avait vécu cette scène tellement de fois qu’il connaissait les détails par cœur : c’était l’heure d’assister à sa mort.
Le massage cardiaque était inutile, le cœur de Timmy ne répondait plus à aucun stimulus.
D’un pas décidé, Timmy sortit de sa chambre et pénétra dans un très long couloir au bout duquel une lumière tamisée l’attendait.
Il fallait passer au matériel d’urgence si l’on voulait sauver sa vie. Quelqu’un cria, un signal sonore continu retentissait.
De l’autre côté du tunnel, ses parents l’attendaient devant une tombe creusée dans un jardin resplendissant de roses blanches. Autour de lui, une chaîne de montagne l’encerclait : le Mont Chimnée, il l’avait reconnu. Le soleil brillait au zénith dans un ciel azur apaisant. Il se coucha tranquillement dans sa tombe, aux côtés d’un Goélise endormi.
On donna l’ordre de cesser toute activité et de rompre le contact avec le corps du jeune garçon.
Il ne sentit pas l’œuf quitter la paume de ses mains. L’œuf noir vibra en suspension dans les airs avant de se briser et de libérer une colonne d’énergie ténébreuse qui sépara l’espace en deux parties. Une petite boule verte tournoya autour de la colonne d’énergie. Le sol se déroba sous ses pieds. Son corps raide s’éleva dans les airs. Il était au centre de la colonne obscure, le corps traversé par cette énergie dévastatrice. Il n’était ni ici, ni là. Ni vivant, ni mort.
On plaqua les électrochocs sur sa poitrine et le courant traversa sa cage thoracique. Son corps se raidit un instant, puis retomba mollement.
La colonne d’énergie avait disparu, était rentré en lui, lui déchirait l’intérieur. Il chutait à présent, suivant le tracé de la colonne de lumière. L’elfe vert tournoyait autour de lui. Il allait s’écraser au sol. Il allait mourir.
Timmy reprit possession de son corps. Il vit l’image trouble d’une personne sous un masque en tissu l’observer d’un regard angoissé, puis perdit connaissance.

*
Le hall d’entrée du commissariat était si bondé qu’il pensa que l’entièreté de la criminalité de Hoenn se trouvait dans ce bâtiment. Jamais il n’avait vu un nombre d’agents de la police réunis au même endroit et dans un tel état d’effervescence. À peine Sofian avait mis un pied dans le commissariat qu’il se fit bousculer par un agent et faillit tomber à la renverse contre un second. Sa mère l’aida à reprendre ses esprits alors que l’agent Jenny criait des ordres dans tous les sens sans se soucier d’attendre des réponses.
— Là !
Nathalie avait repéré sa fille dans le brouhaha. Sarah était assise sur une chaise en métal soudée au mur du fond, et suivait des yeux les policiers autour d’elle, comme si elle était tout aussi impliquée dans leur agitation.
Sofian et sa mère se frayèrent un chemin dans la foule et Nathalie se jeta dans les bras de sa fille.
— Mew soit loué, on est arrivé à temps ! s’exclama-t-elle.
Mais Sarah ne lui rendit pas son étreinte. En effet, ses mains étaient ligotées dans une paire de menottes.
— Qu’est-ce que tu as fait, s’horrifia Sofian.
— La seule chose qui me permettra d’être en accord avec moi-même, répondit-elle en soutenant le regard.
— Tu vas terminer ta vie en prison, Sarah ! s’emporta son frère. C’est ça qui va t’aider à fermer l’œil de la nuit ? La prison ?!
— Si je suis toujours vivante au moment de mon incarcération…
— De quoi tu parles ?
Sarah tourna la tête vers un poste de télévision. Soudain, l’excitation des policiers trouva un sens.
Dans la petite télévision accrochée au mur, des images de Vermilava défilaient sous leurs yeux tandis qu’une journaliste parlait à l’écran, son discours masqué par les cris des policiers. Sofian reconnut la chaîne de montagne du Mont Chimnée ainsi que la colonne d’énergie noire qu’il avait vue en quittant sa chambre. Un policier augmenta le volume de la télévision et le silence se fit dans le hall.
…à la suite de cette étrange colonne d’énergie, disait la journaliste, mais aucun spécialiste abordé par les autorités n’est en mesure d’en déclarer ni l’origine ni la consistance. Comme vous pouvez le voir sur ces images, un Absol aurait été repéré sur les lieux une heure avant l’incident, ce qui n’est pas de bon augure. Le centre météorologique de Cimetronelle est formel, les vents aux alentours du Mont Chimnée ont dépassé des limites jamais égalées par le passé et tout indique qu’une catastrophe naturelle de grande ampleur va s’abattre sur la vallée du Mont Chimnée. D’après les météorologues, il pourrait s’agir d’une tempête aux vents allant jusqu’à mille kilomètres par heure, ou d’une véritable tornade dans le pire des cas, menaçant les seize mille trois cents habitants de Vermilava. D’après les scientifiques, la cité ardente pourrait être touchée par ces vents violents d’ici vingt-quatre heures, ce qui provoquerait des dégâts matériels ainsi qu’humains. Les hautes autorités de Hoenn prient les habitants de Vermilava de ne pas céder à la panique. La mairesse et championne de la ville, Adriane Flayme, est en ce moment en réunion d’urgence dans le cadre de la Loi Catastrophe Naturelle qui indique…
La télévision s’éteignit alors que des protestations se soulevèrent.
— Chers collègues, j’en appelle au calme ! hurla l’agent Jenny qui ne contrôlait plus l’agitation de son personnel.
Mais ses propos disparurent dans le chahut des policiers angoissés.
— Qu’est-ce que ça veut dire ? s’horrifia Nathalie.
— Cette colonne d’énergie, marmonna Sofian, je ne sais pas ce que c’était, mais on dirait bien qu’elle va nous causer du souci.
— Il faut absolument que vous quittiez Vermilava.
Sofian et Nathalie dévisagèrent Sarah et ses menottes.
— Pourquoi il a fallu que tu te rendes à la police ?
— Ne vous en faites pas, ça va aller pour moi. Je…
Mais elle s’interrompit : un policier venait de monter sur une table pour se faire entendre.
— Et comment comptez-vous mettre en place le Plan d’Urgence après avoir diminué nos effectifs et le budget alloué au matériel ?! s’écria-t-il envers l’agent Jenny.
— Cher collègue, calmez-vous ! somma cette-dernière. Nous allons faire tout ce que nous…
— COMMENT ?! Ça fait des mois qu’on vous prévient que cette situation pourrait arriver ! On n’a même pas un seul hélicoptère de disponible pour évacuer l’hôpital et le centre pokémon…
— Ni assez de fourgons pour les prisonniers en garde à vue… !
— …serons nous qui, encore une fois, allons subir…
— …une véritable honte ! Si les habitants…
— ASSEZ !!!
Le sol trembla violemment et Sofian s’accrocha à sa sœur pour ne pas chuter. Un gigantesque Camérupt venait de faire son apparition dans le hall du commissariat. Debout sur son dos, Adriane toisa les fonctionnaires. Un silence respectueux se fit.
— Le Conseil du Plan d’Urgence vient de me donner les pouvoirs absolus pour gérer cette crise, annonça-t-elle calmement. Nous allons prendre les problèmes un à un et y faire face avec dignité. Agent Jenny, convoquez les personnes ressources pour une réunion de crise dans votre bureau. Faites parvenir aux journalistes la liste des conseils à annoncer aux citoyens : tout le monde doit être devant cette situation à cette heure. Et faites évacuer tous les lieux publics.
L’agent Jenny répéta ses ordres aux policiers qui se rangèrent derrière l’organisation de leur supérieure. Une policière releva Sarah de son siège et l’entraîna vers les cellules de garde à vue.
— Non, attendez !
Sofian poursuivit la policière, mais Nathalie tenta de l’en empêcher.
— Maman, s’ils enferment Sarah et que la tornade passe sur le commissariat,… commença Sofian sans pouvoir terminer sa phrase.
Mais sa mère était tout aussi décontenancée que lui.
— Attendez, je peux vous aider pour votre problème d’hélicoptère ! lança Sarah dans un dernier espoir. Je sais comment sauver les malades de l’hôpital et du centre pokémon !
Adriane descendit de son pokémon et empêcha d’un geste ferme la policière de poursuivre son chemin vers les cellules. Elle dévisagea Sarah, puis Sofian.
— Emmenez-les dans le bureau pour la réunion de crise, ordonna-t-elle.
— Madame Flayme, vous êtes sûre que c’est une bonne idée ?
— Toute idée est bonne à prendre pour sauver Vermilava de la destruction.

Pokémon #201c
S’il n’avait pas été aussi pâle et relié à autant de machines par de nombreux câbles, on aurait dit que Timmy était plongé dans un sommeil paisible. Étendu de ton son long sur le lit d’hôpital, inerte, le jeune garçon n’était maintenu en vie que par les machines qui émettaient toutes sortes de signaux sonores autour de lui.
En la voyant approcher du lit, Tarsal et Arcko sortirent de leur somnolence et vinrent chercher du réconfort auprès d’elle. Annick les caressa tendrement en observant son ami inconscient. Magnéti lui lança un regard depuis le plafond près duquel il flottait et préféra rester en retrait.
— Ça va aller, les amis, rassura Annick. Je vous promets que Timmy va aller mieux.
Mais la jeune coordinatrice sentit en elle le poids de la culpabilité : elle-même ne croyait pas à ses propres mots. L’état de Timmy ne s’était jamais autant aggravé.
C’était comme si son corps avait eu une réaction physique face à l’apparition de la colonne d’énergie dans la montagne. Comme si cette énergie, en se dressant jusqu’au ciel, avait quitté le corps de Timmy. Comme si l’un ne pouvait exister en même temps que l’autre. Depuis, la colonne d’énergie avait disparu, mais Timmy ne s’était pas réveillé.
Annick s’installa sur un fauteuil près du lit de son ami et se perdit dans ses souvenirs. Car ce n’était pas la première fois qu’elle affrontait ce genre de phénomène. En réalité, une telle énergie s’était déjà dressée de la même manière dans le passé, exactement au même endroit. Elle ne se souvenait plus des détails, car elle n’avait que sept ans à l’époque, mais un petit garçon avait fait les frais de la catastrophe à l’époque, ce qui avait été un traumatisme pour la famille, d’après ce qu’on lui avait raconté. Et si Timmy était lié à cet incident ? Après tout, il avait sept ans lui aussi quand sa maladie s’était déclarée. Et si, finalement, Timmy était ce petit garçon qui, à l’époque, avait subi les foudres de cette colonne d’énergie ? Et si la voir réapparaître aujourd’hui était le signe que la boucle était bouclée ? Et si les prophéties mettant en scène sa mort dans ses rêves allaient se révéler aujourd’hui ?
Annick se raidit dans son siège en arrivant à sa conclusion : le phénomène étrange qui avait eu lieu dans le passé et s’était répété aujourd’hui avait bel et bien un lien avec la maladie de Timmy. Mais lequel ?
— Timmy, je t’en prie, réveille-toi, supplia-t-elle silencieusement en lui prenant la main.

*
— Ne perdons pas de temps, et commençons. Je veux connaître toutes les possibilités d’évacuation de nos concitoyens, ordonna Adriane. Agent Jenny ?
— Malheureusement, peu d’options s’offrent à nous. La sortie à l’est via le Sentier Sinuroc pour rejoindre le téléphérique n’est pas praticable depuis la destruction de ce-dernier par l’attaque de la Team Magma. La route de campagne à l’est qui descend vers le Tunnel Mérazon est impraticable car elle se situe exactement en direction de la tempête qui est en train de se former. Il ne nous reste que la gare ferroviaire.
— C’est un début. En combien de temps peut-on évacuer nos concitoyens via le train.
— Malheureusement, je ne me réjouirais pas trop vite à votre place, répondit un fonctionnaire qui avait été invité à la réunion de crise. Nous avons une des plus petites gares de la région, par conséquent…
— Allez droit au but, Monsieur, somma Adriane.
— Bien, je ne vais donc pas tourner autour du pot. Nous n’avons la possibilité d’avoir qu’un seul train à quai à la fois. Ce qui signifie que pour qu’un train puisse entrer dans la gare, il faut que le précédent l’ait déjà quittée. Ce qui donne un temps de latence de vingt minutes.
— Quelle est la capacité de nos trains en termes de places ?
— Nos trains possèdent trois cents places assises. En admettant que nous entassions nos concitoyens qui resteraient debout, cinq cents tout au plus. Dix minutes pour faire embarquer tout le monde, dix autres minutes pour organiser la sécurité et faire en sorte qu’il n’y ait pas d’incidents, dix autres pour préparer un nouveau groupe de cinq cents personnes sur les quais.
— Conclusion ?
— En comptant large, nous pouvons évacuer cinq cents personnes toutes les heures via le train. D’après les informations, la tempête, voire la tornade, frappera Vermilava dans vingt-deux heures.
— Mettons vingt heures, pour être sûrs.
— Très bien. Les trains auront donc évacué dix mille citoyens d’ici le passage de la tornade.
— En comptant large, rappela l’agent Jenny.
— Ce qui nous laisse un peu plus de six mille habitants à protéger, compta le fonctionnaire.
— Dont cent septante-trois personnes hospitalisées, intervint l’infirmière Joëlle, et une trentaine de pokémons en cours de soin.
— Combien d’entre eux sont alités et ne peuvent pas être déplacés ? interrogea Adriane.
L’infirmière Joëlle farfouilla dans ses dossiers sous l’œil impatient des membres de la réunion de crise.
— Dix-sept.
— Ce qui signifie que l’on peut déplacer cent cinquante-six patients ? calcula Adriane.
— Oui mais, comment ? Je vous rappelle que nous n’avons aucun autre moyen de locomotion que nos fourgons et que l’option de quitter la ville par la route est à exclure, rappela l’agent Jenny.
— Les hélicoptères médicaux ? Ce qui nous permettrait d’évacuer les patients par les airs jusqu’à l’hôpital de Clémenti-Ville qui est le plus proche ?
— Nous n’avons pas eu le budget pour réparer nos appareils défectueux et les deux qui restent n’ont pas un assez gros réservoir pour faire un trajet en-dehors de Vermilava.
— Comment allons-nous faire ? s’inquiéta l’infirmière Joëlle en perdant son calme.
Adriane leva une main afin de faire taire les chuchotements paniqués des fonctionnaires. Elle se tourna pour la première fois vers Sofian et Sarah qui s’étaient faits tout petits.
— Vous avez intérêt à ce que votre idée soit assez réaliste que pour être prise en compte, leur dit-elle.
Sarah déglutit.
— Lorsque les Team Aqua et Magma se sont affrontées au sommet du Mont Chimnée il y a trois semaines, dit-elle d’une voix peu assurée, ils ont quitté les lieux à bord d’hélicoptères militaires. Ceux de la Team Magma ont la capacité d’accueillir dix passagers, sans compter le pilote et le copilote. Ils ont des réservoirs permettant de tenir des distances équivalentes à deux fois l’aller-retour Vermilava – Clémenti-Ville. Un aller-retour prendrait une heure. Le temps de remplir le réservoir prend une demi-heure. Ce qui nous amène à sauver vingt patients en deux heures et demi, trois pour compter large. En quinze heures, vos cent cinquante patients seront en sécurité à Clémenti-Ville.
— Madame Flayme, il s’agit de propos tenus par une criminelle appartenant à la Team Magma, interpella l’agent Jenny.
Adriane évalua du regard les deux camps opposés.
— Vous avez dit que la Team Magma avait quitté les lieux à bord de leurs hélicoptères, fit-elle remarquer. En quoi ces informations peuvent nous aider ?
— Comment pensez-vous que j’ai réussi à m’enfuir de la Team Magma ? Je peux vous amener à l’hélicoptère qui m’a servi à quitter leur bande.
— Sarah… marmonna Sofian.
Mais sa sœur l’empêcha de parler d’un signe tête. Dans ses souvenirs, ils s’étaient crashés avec le dernier hélicoptère qui n’était plus en état de voler. Qu’était-elle en train de manigancer ?
— Combien de temps pour rejoindre cet hélicoptère ? questionna Adriane.
— Quatre heures maximum. Il est au sommet du Sentier Sinuroc, accessible uniquement à pied.
— Ce qui nous laisserait seize heures pour évacuer les patients…
Adriane considéra cette information.
— Madame Flayme, restons réalistes, urgea l’agent Jenny.
Adriane ferma les yeux afin de se concentrer. Enfin, elle prit sa décision :
— Que tous les agents soient mobilisés pour organiser l’évacuation de nos concitoyens. Je veux que le premier groupe de cinq cents citoyens soit prêt pour démarrer à la gare dans une heure. Infirmière Joëlle, préparez vos patients. Pour toutes les personnes qui ne veulent pas quitter Vermilava, ou qui ne peuvent pas, accompagnez-les dans les souterrains du centre pokémon : ils ont été approuvés par le Plan d’Urgence. Ils ne peuvent malheureusement contenir qu’une centaine de personnes, donc essayez toujours de convaincre les citoyens à accepter l’évacuation. Quant à moi, je vais me rendre sur le Sentier Sinuroc avec Madame Match afin de voir ce qu’il en est de cet hélicoptère.
Tout le monde approuva, hormis l’agent Jenny qui hésita.
— Libérez Madame Match.
Sous la pression de sa supérieure, l’agent Jenny s’exécuta et Sarah fut libérée de sa paire de menottes. Elle échangea un regard satisfait avec Sofian. Avait-elle proposé son aide simplement dans le but de revenir sur sa décision de se rendre à la police ?
Adriane ouvrit la marche et sortit du bureau tandis que les fonctionnaires partaient chacun de leur côté pour mettre à exécution leur plan d’évacuation.
— Sarah ! Sofian !
Leur mère venait de les rejoindre à peine étaient-ils revenus dans le hall du commissariat.
— Où est-ce que vous allez ?
Adriane leur laissa un instant afin de tenir leur mère au courant, et cette-dernière s’effondra en larmes.
— Mais… le Sentier Sinuroc, c’est exactement l’endroit d’où est en train de naître cette tempête ! s’exclama-t-elle.
— Maman, je n’ai pas d’autres choix que d’aider la police si je veux prouver que je mérite ma place dans la société, répondit Sarah au bord des larmes.
Nathalie soupira, les bras ballants. Elle se tourna vers son fils.
— Tellement de choses ont changé depuis que je t’ai demandé de ne pas retrouver ta sœur lorsque nous avons emménagé à Hoenn. S’il-te-plait Sofian, oublie ce que je t’ai dit et protège-la.
— On va se protéger l’un l’autre, promis.
Les trois Match se prirent dans les bras brièvement avant qu’Adriane les interrompît.
— Amenez-moi à cet hélicoptère.

*
Le soleil commençait à disparaître derrière les montagnes à l’horizon lorsqu’ils décidèrent qu’ils avaient assez cherché. Aucune des tanières qu’ils avaient trouvées ne comportait un seul Gloupti. C’était comme si la horde de pokémons avait totalement disparu de la circulation. Comme si la chose qui avait détruit le champ de fleurs médicinales s’était aussi débarrassée des pokémons protecteurs.
— Qu’est-ce qu’on fait à présent ?
Brice soupira. Il n’avait pas l’air de savoir plus qu’elle ce qui était le mieux à faire maintenant qu’ils avaient compris qu’il n’y aurait aucune plante encore en bon état pour créer le médicament de sa tante.
Brice s’agenouilla auprès du Gloupti mal en point qu’ils avaient recueillis.
— Je suis désolé de ne pas avoir pu t’aider à retrouver ta famille et tes amis, Gloupti, lui dit-il avec douleur. Je te promets de t’amener auprès d’une personne qui pourra te soigner. Acceptes-tu de m’accompagner ?
Gloupti approuva et ne présenta aucune résistance à pénétrer dans l’une de ses pokéballs.
— Ça veut dire que l’on redescend sur Vermilava ? s’interrogea Flora. Et les médicaments de ta tante ?
— Mon dernier espoir est que Gloupti puisse lui venir en aide, avoua-t-il. S’il protégeait ce champ de fleurs, peut-être sait-il comment l’aider à diminuer la douleur.
Un silence s’installa, tandis qu’un vent frais se levait dans les alentours.
— Le téléphérique est plus loin dans cette direction, mais je ne pense pas qu’il soit judicieux que nous nous remettions en route alors que le soleil est en train de se coucher, dit Brice.
— J’ai bien fait d’apporter de quoi dormir à la belle étoile !
— On ferait mieux de déplier ma tente aussi, quelque chose me dit que ce vent va nous apporter de la pluie pendant la nuit…
Les deux coordinateurs laissèrent leurs sacs à dos glisser hors de leurs épaules. Flora observa Brice attentivement : son ami faisait de son possible pour cacher sa tristesse. Comment pouvait-elle se sentir aussi heureuse de passer la nuit en tête à tête avec lui alors qu’il se sentait aussi misérable de ne pas être dans la capacité de trouver des médicaments pour sa tante.
— Je suis sincèrement désolée pour ta tante.
— Ouais, moi aussi…

***

8 décembre 2000

Le petit garçon ôta son pendentif de son cou et le compara au symbole taillé dans la pierre sur la devanture du bâtiment qui se dressait devant lui, au sommet d’une volée d’escaliers en marbres. Un hexagone bleu clair en forme de montagnes enneigées avait été dessiné dans la pierre, exactement de la même forme que la plaque métallique qu’il portait à son cou depuis sa naissance. S’il retrouvait le symbole de son pendentif sur la façade de ce bâtiment, alors c’était l’endroit où il allait trouver des réponses à ses questions.
Brice pénétra dans le bâtiment glacial où un vent hivernal traversait la salle. Il se trouvait au milieu d’un terrain de combat entouré de gradins. Un homme était occupé à passer la serpillère de l’autre côté de la salle.
— Excusez-moi.
L’homme se retourna et examina le petit enfant dans son pyjama et ses baskets pleines de boues.
— Tu es perdu, mon petit ?
Brice préféra éviter d’attirer l’attention sur sa fugue et décida de mener la discussion.
— Est-ce que vous pouvez me renseigner sur cet objet.
Il lui montra son pendentif.
— Vous savez ce que ce symbole signifie ? demanda-t-il naïvement.
L’homme éclata d’un rire franc.
— Mais enfin, c’est le badge de l’arène, voyons ! répondit-il entre deux crises de rire.
Cela faisait deux jours qu’il avait quitté l’orphelinat et qu’il avait survécu seul dans la nature grâce à son ami le Lippouti. Voir cet homme se moquer autant de lui le fit fulminer de colère. Son Lippouti utilisa ses pouvoirs psychiques afin de le dissuader à attaquer son interlocuteur. Brice reprit ses esprits.
— C’est quoi un badge d’arène ?
L’homme perdit tout à coup son amusement. Quelque chose indiquait sur son visage qu’il commençait à trouver la situation suspecte.
— Comment as-tu eu ce badge ? lui demanda-t-il.
Brice hésita, mais s’il voulait des réponses à ses questions, il allait devoir donner quelques informations.
— Ce sont mes parents qui me l’ont laissé à ma naissance.
— Et qui sont tes parents ?
Là, cet homme était allé trop loin. De toute manière, Brice n’avait aucune idée de la véritable réponse à cette question. C’était précisément la raison pour laquelle il était entré dans ce bâtiment : retrouver la trace de ses parents et comprendre ses origines.
— Quel est ton nom ? demanda l’homme en s’approchant prudemment de lui.
— Je… je suis désolé, je crois que je me suis trompé d’endroit…
Brice fit un mouvement de recul, mais l’homme le saisit par le poignet.
— Attends un peu, toi...
— Laisse-le !
Une grande et élégante femme aux longs cheveux noirs venait de faire son apparition dans la salle de combat. Sous ses ordres, l’homme relâcha son emprise sur Brice et quitta les lieux sans un mot.

Brice avait été installé dans un petit canapé confortable et ils s’étaient vus offrir, son Lippouti et lui, un chocolat chaud qui leur fit récupérer quelques forces.
— Tu es le petit garçon qui s’est échappé de l’orphelinat, dit la femme après l’avoir longuement examiné.
Son pyjama ne trompait personne, le logo de sa prison était cousu sur la poche de son pantalon en coton.
— Tout le monde te recherche, sais-tu ?
Brice choisit ne pas répondre et se concentrer sur son chocolat chaud. Quoi qu’il fût venu chercher ici, cela avait été une énorme erreur, et il préférait repartir sans ses réponses. Il amorça un mouvement afin de quitter son fauteuil mais un éclair rouge fit apparaître un Farfuret qui lui bloqua la route.
— Une dame est venue me parler de toi, Brice.
Comment connaissait-elle son nom ? Il ne l’avait pourtant jamais rencontrée de sa courte vie ! Il se détendit et patienta pour qu’elle lui révélât ses secrets.
— Une dame est venue me trouver il y a cinq ans au sujet de mon badge d’arène. Elle cherchait à savoir si une personne s’était déjà présentée à moi avec le pendentif que tu portes autour du cou. Elle cherchait un bébé. Celui de sa sœur.
Brice apporta sa main à son pendentif. Alors comme ça, sa famille avait essayé de le retrouver après l’avoir abandonné ?
— Apparemment, elle n’a jamais réussi à trouver son neveu, constata la championne en examinant à son tour le badge sur la poitrine de Brice.
— Ma maman… ?
— Elle est décédée à ta naissance, répondit-elle froidement.
Quelque chose se brisa en lui, comme l’espoir d’un jour accéder à un foyer familial.
— Ta tante a suivi les directives de ta maman et t’a ramenée chez elle, dans sa région natale, afin de t’éloigner de ton père qui présentait une menace pour toi.
— Je ne comprends pas…
— Moi non plus, je ne fais que te raconter le récit que m’a tenu ta tante. Malheureusement, elle a dû te faire adopter par un jeune couple car ton père avait retrouvé votre trace. Elle a attendu qu’il abandonne ses recherches pour essayer de te récupérer, mais apparemment, le jeune couple t’avait laissé dans un orphelinat et avait disparu.
— Rien ne fait sens…
— Je suis bien d’accord avec toi.
— Pourquoi votre badge… ?
— Ce badge appartenait à ta mère. Elle te l’a légué avant de perdre la vie. C’est la raison pour laquelle ta tante est venue me trouver. Elle était persuadée que tu avais hérité de l’intelligence de ta mère et que tu aurais cherché à comprendre pourquoi tu possédais ce badge. Il t’aurait amené à moi. Je constate qu’elle avait bien deviné.
— Merci, pour le chocolat chaud.
— Où comptes-tu aller ?
La championne s’était levée à son tour et le menaçait de toute sa hauteur. Lippouti se plaça entre eux, prêt à défendre son nouvel ami.
— Je… vais… euh…
Le Farfuret revint dans la pièce avec un enveloppe qu’il tendit à Brice.
— Ta tante m’a remis cette lettre dans l’espoir qu’un jeune garçon aux yeux bleus glaciaux vienne à ma rencontre. Tu es sa parfaite description. Tiens. Elle contient toutes les indications pour la retrouver.
Le cœur de Brice bondit dans sa poitrine. Tout n’était pas perdu. Il avait encore une chance de retrouver un membre de sa famille, un qui ne lui voulait pas de mal. Mais qui l’avait tout de même abandonné…
Il prit la lettre dans ses mains hésitantes.
— Je vais prévenir la police de ta présence dans mon arène.
Brice recula d’un pas, horrifié.
— Tu es un enfant errant qui s’est enfui de l’orphelinat.
— Mais… Comment vais-je retrouver ma tante si on me renferme à nouveau ?
— En faisant en sorte de ne pas être enfermé.
Et la championne quitta la pièce. Le Farfuret s’installa à la place de sa maîtresse et semblait ne pas lui être hostile. D’un coup d’œil, Brice remarqua que la porte de sortie était restée entrouverte. Il fit un pas en gardant le pokémon adverse dans son champ de vision, mais le Farfuret ne lui prêta aucune attention. Brice s’enfuit de l’arène en courant.


Pokémon #201u
La nuit était si épaisse qu’il leur était presque impossible d’avancer sur le sentier Sinuroc. D’épais nuages s’étaient agglomérés dans le ciel tandis qu’un vent agressif tentait de les repousser en arrière. Mais Adriane, Sofian et Sarah avaient réussi à terminer tant bien que mal leur ascension.
Le décor du Mont Chimnée n’avait pas changé depuis leur dernier passage, à une exception près. Les banderoles de sécurité de la police avaient disparu, emportées par le vent et parsemées ci-et-là entre les rochers, et la carcasse de l’hélicoptère de la Team Magma à bord duquel ils avaient failli mourir avait été retirée du flanc de la montagne. Seuls restaient quelques bris de verre qui, soulevés par les coups de vent, venaient leur griffer les vêtements.
— Je peux savoir à quoi tu joues ? murmura Sofian à l’oreille de Sarah. Tu ne pensais tout de même pas qu’on allait utiliser l’hélicoptère défoncé qu’on a laissé derrière nous ?
— Relaxe, petit frère, je sais ce que je fais.
Sofian s’arrêta en chemin. Il n’avait plus entendu sa sœur l’appeler de cette manière depuis près d’une décennie. Quelque chose en lui indiqua que cela lui avait manqué. Mais il ne pouvait se résigner à accepter de tourner la page sur les actes criminels de sa sœur si facilement.
— Bien, nous y sommes, annonça Adriane. Mais je ne vois pas d’hélicoptère.
— Je vous ai dit qu’ils se sont tous enfuis avec, rappela Sarah en sortant une gourde d’eau de son sac à dos.
— Sarah…
Sa sœur avait l’air si décontractée que la championne d’arène commença à trouver la situation suspecte.
— Je vous rappelle que votre aide n’annule en rien votre arrestation, lui dit-elle en portant sa main à une de ses pokéballs. Si tout ceci n’était qu’une tentative pour vous enfuir…
Sarah soupira en levant les yeux au ciel et poursuivit son chemin, mais pas en direction du plateau au sommet du volcan. Elle prit un petit chemin à droite du téléphérique accidenté, un chemin qui n’avait pas attiré l’attention de Sofian lors de son premier passage car d’énormes rochers en cachaient l’accès.
Au bout du chemin vallonné se trouvait un énorme hélicoptère à l’effigie de la Team Magma, caché par des bâches dont Sarah se débarrassa.
— Hélicoptère militaire, moteur RTM 322, dix passagers, réservoir plein, énuméra Sarah en croisant les bras avec fierté.
— Incroyable, s’émerveilla Adriane en faisant le tour de l’énorme engin qui les protégeait du vent violent.
Sofian interrogea sa sœur du regard.
— J’étais prête depuis longtemps à quitter la Team Magma, révéla-t-elle. Tout était prévu pour que je m’enfuie le jour où Monsieur— Max Magma a réveillé le volcan. Cet hélicoptère faisait partie du matériel que je me permettais d’emprunter pour ma fuite.
— J’ai cru que tu ne voulais aider que pour pouvoir te débarrasser de ces menottes, avoua Sofian.
— Tu n’as donc toujours pas confiance en moi, petit frère ?
Sofian hésita.
— Changement de programme, annonça Adriane en revenant de son inspection de l’engin. Je connais ce type d’appareil, et vous avez mal calculé ses capacités. Il a moins de carburant que ce que vous ne pensiez, mais il peut voler deux fois plus vite. Cela va nous permettre de sauver plus vite les patients de Vermilava. On peut donc s’accorder quelques heures de repos en attendant d’avoir plus de luminosité. C’est trop dangereux de voler dans ces montagnes pendant la nuit.
Adriane grimpa dans l’hélicoptère qui leur permettrait de s’abriter du vent. Sofian s’installa sur un siège passager dans l’énorme habitacle tandis que Sarah approcha la championne au niveau du siège du pilote.
— J’aimerais revoir les termes de mon arrestation, demanda-t-elle avec appréhension.
Adriane lui jeta un coup d’œil suspect et attendit qu’elle poursuive.
— Je vous ai prouvé que j’étais de bonne foi et que je voulais sincèrement me repentir. Est-ce que mon comportement pourra peser sur mon jugement et faire en sorte que je ne termine pas mes jours en prison ?
— Vous me demandez de plaider en votre faveur ?
— Je veux sincèrement faire le bien autour de moi. Est-ce que ça ne mérite pas qu’on revoie mon jugement ?
— Qu’en penses-tu Sofian ?
Sofian se redressa sur son siège, mal à l’aise. Il voulait tellement que les choses s’arrangent pour sa sœur, mais ses valeurs étaient trop fortes.
— Son aide n’est pas très spontanée étant donné qu’elle est la seule à savoir piloter cet hélicoptère, fit-il remarquer devant le visage déçu de Sarah.
— Pas très élogieux comme propos, ajouta Adriane envers Sarah. Malheureusement pour elle, si elle comptait nous manipuler de cette manière, elle n’a pas pris en compte un détail, la raison pour laquelle j’ai quitté Hoenn pendant une longue période : mon entraînement militaire où j’ai appris, notamment, le pilotage d’hélicoptères.
Sarah resta clouée sur place.
— Alors, voyons si vous êtes sincère. Aidez-moi jusqu’au bout à évacuer Vermilava, soyez ma copilote jusqu’à ce que le dernier patient soit en sécurité, veillez sur eux jusqu’au moment où ils pourront retourner chez eux, et nous verrons si vous aurez mérité mon soutien.
Sarah examina la proposition un instant.
— Je veux changer. Je veux faire en sorte que toutes ces années au sein de la Team Magma n’aient pas été qu’une suite d’atrocité. Ils m’ont formé au pilotage. Je veux que cela serve la bonne cause. Je veux que cela sauve des vies, pour toutes celles que j’ai détruites. Je vous promets de ne chercher qu’à faire le bien autour de moi à présent.
Elle se tourna vers Sofian.
— Je te le promets, petit frère.
Sofian acquiesça et lui prit la main.
— Je te crois.

*
— Il y a un problème ?
Brice ne lui répondit pas mais fit un signe de la main pour qu’elle le rejoigne silencieusement. Flora termina de déplier son sac de couchage au sol et sortit de la tente. Elle suivit le regard de son ami : l’Absol mystérieux était de retour. Loin dans la nuit, presqu’invisibilisé par les ténèbres, il se tenait debout sur un rocher et les regardait fixement sans cligner des yeux.
— Pourquoi il nous suit comme ça ? Il commence vraiment à me faire peur…
— Rentrons.
Brice l’accompagna dans la tente et il ferma la tirette derrière lui. Le vent fouetta le tissu avec force tandis qu’une pluie fine tapotait le sol autour d’eux. Brice se glissa dans son sac de couchage et Flora l’imita. Le froid avait pris possession de la montagne. Hésitante, elle considéra un instant son ami couché à côté d’elle, les yeux ouverts, puis décida de tenter le coup. Elle se rapprocha prudemment de lui et se colla à son flanc. Brice n’objecta pas. Une chaleur soudaine s’empara de son sac de couchage.
— Tu crois qu’il nous surveille ? demanda-t-elle en chuchotant dans son oreille. Peut-être qu’il pense que c’est nous qui avons détruit le champ ?
— Les Absol communient avec la nature, ils en sont les protecteurs. Si leur instinct leur fait sentir que quelque chose ne va pas, ils se rendent à l’endroit où une catastrophe pourrait se produire. Je pense qu’il est là pour nous avertir de quelque chose.
Inquiète, Flora se blottit davantage contre Brice qui se coucha sur le côté, lui offrant son dos. Elle en profita pour le coller entièrement sans réaction de la part de son ami.
— En tout cas, je me sens protégée avec toi.
Mais Brice ne répondit pas. Il songeait à sa tante, seule dans son lit, attendant avec espoir son retour, ignorant qu’elle n’aurait jamais ses médicaments.

*
Le Goélise avait les yeux fermés. Il semblait dormir, blotti confortablement dans sa tombe. Timmy déposa l’œuf ténébreux sur le côté afin de libérer ses mains pour déplacer le pokémon. Mais le corps de Goélise était raide et lourd, comme un bloc de marbre taillé dans sa forme. Il ne l’avait pas attendu pour mourir.
— C’est ton tour, petit Timmy.
À côté de lui, dans une autre tombe creusée dans le jardin paisible, Klein s’apprêtait à s’allonger. Sa peau était rouge et noire, craquelée, comme fondue. Non, brûlée.
— Ce n’est pas ma faute si vous êtes morts, se défendit Timmy.
Klein éclata d’un rire glaçant.
— C’est ton tour, petit Timmy.
Tout cela n’avait aucun sens et il était épuisé à force d’en chercher. Il s’étendit dans sa tombe. L’œuf noir se craquela, puis libéra une colonne d’énergie noire qui pénétra dans son corps.
Timmy hurla de douleur. C’était comme si l’énergie irradiait chaque cellule de son corps, pénétrait chaque vaisseau sanguin. Quelque chose en lui avait perdu le contrôle de ses membres. Ou plutôt : son corps était à présent contrôlé par cette énergie négative.
Une vieille dame, les cheveux blancs noués, s’agenouilla auprès de lui.
— Tout va bien se passer, Timmy. Ton heure n’est pas venue. Tu es si jeune. Moi, j’ai vécu ma vie.
Timmy la supplia du regard, incapable de prononcer un mot tellement la douleur le contrôlait. Ses veines se teintaient d’une couleur noire, son crâne allait exploser.
— Embrasse mon neveu pour moi.
La vieille dame posa ses mains sur le torse noir de Timmy. Tout à coup, l’énergie le quitta et enroba le corps de la vieille dame qui se transforma en un tas de poussière avant de s’envoler au vent.


Timmy ouvrit les yeux et son corps se convulsa de douleur.
— Infirmiers !! hurla Annick en bondissant hors de son fauteuil.
Tarsal, Arcko et Magnéti se précipitèrent auprès de leur maître alors que celui-ci était devenu incontrôlable.
— Ne bouge pas, tout va bien se passer ! cria un infirmier en entrant dans la chambre.
Il usa de force afin de retirer le tuyau de sa gorge qui l’avait maintenu en vie. Timmy reprit sa respiration douloureusement et serra vigoureusement la main d’Annick, avant de lui adresser d’une voix rauque et cassée :
— Il faut… sauver… la tante… de Brice !

*
Dans un demi-sommeil, Marielle entendit un bruit provenir de la cuisine. Brice était enfin de retour ? Elle était trop faible pour bouger et la douleur était insupportable. Elle préféra retrouver la chaleur paisible du sommeil.
Les trois individus pénétrèrent dans la chambre de la vieille dame.
— Plus qu’à attendre que le gamin revienne de la montagne.
— Puis on le livre à la Team Aqua.
— Et on récupère notre montgolfière.
Jessie, James et Miaouss échangèrent des regards satisfaits.

Pokémon #201e
8 janvier 2001
Une voiture de police traversa la route et il attendit qu’elle ait disparu loin du port avant de sortir de sa cachette. Devant lui, des dizaines de bateaux, péniches et voiliers flottaient agréablement à leur quai d’amarrage.
Brice repéra un marin seul, occupé à nettoyer la coque de son voilier, et l’aborda après avoir vérifié que le port était désert.
— Excusez-moi.
Le vieux marin se tourna vers lui et sembla inquiet par la présence d’en enfant en pyjama sur le port.
— Tout va bien, petit ?
— Je cherche à rejoindre cette adresse, vous pouvez m’y conduire ?
Brice lui fourra la lettre de sa tante sous le nez et l’homme éclata de rire.
— C’est une mauvaise plaisanterie, j’espère ? Tu es tout seul ? Où sont tes parents ?
— Laissez tomber.
Brice s’éloigna sous les conseils de Lippouti. Ce n’était pas le premier à s’être esclaffé après avoir lu l’adresse. Sa tante n’avait laissé qu’une seule indication pour la retrouver : « Tante Marielle, Vermilava ». Pourquoi tout le monde semblait l’idée de se rendre à ce village si ridicule ?
En colère et à bout d’énergie, Brice froissa sa lettre et la jeta dans l’eau en poussant un cri de rage.
— Eh là ! Il est interdit de jeter des détritus dans l’eau du port !
Un officier venait de l’accoster. Il s’était encore fourré dans de beaux draps.
— Tu es le petit qui s’est enfui de l’orphelinat le mois passé ! reconnut l’homme.
— S’il vous plait, non, je… je ne veux pas y retourner !
— Je te comprends.
L’homme dévisagea le logo de l’orphelinat sur le pantalon de pyjama souillé de Brice.
— J’ai moi-même détesté cet endroit quand j’avais ton âge. Le vieux Laporeille est toujours occupé à intoxiquer tout le monde avec sa cuisine infecte ?
Brice pouffa de rire et approuva.
— Qu’est-ce que tu fais ici, sur ce port ? s’inquiéta l’officier.
— S’il-vous-plait, promettez-moi de ne pas me ramener là-bas !
— Où d’autre voudrais-tu aller à ton âge ?
— J’aimerais me rendre à Vermilava.
— Vermilava ?
L’homme paraissait tout aussi étonné que toutes les personnes à qui il avait demandé des renseignements.
— C’est dans la région de Hoenn, ce n’est pas la porte à côté.
— Vous pouvez m’y emmener ?
— À Hoenn ?! C’est de l’autre côté de l’océan, au sud !
Brice se laissa tomber sur une bite d’amarrage, désespéré.
— Mais on dirait que c’est ton jour de chance.
Il lui montra un paquebot au loin qui semblait être sur le départ. Brice lut le nom sur la coque : « Le Cactus ».
— C’est un paquebot de bourges, expliqua l’officier. Il va partir pour un voyage de six mois pour visiter les régions alentours. Devine quelle région il rejoint en premier ?
— Hoenn !
— J’imagine que tu n’as pas l’argent pour participer à cette croisière de riches. Cependant, mon cousin est le chef cuistot de ce paquebot. Et il attend justement tout un camion de provisions pour le voyage. Tu as déjà vu la taille des casseroles dans les cuisines de collectivité ? Assez grandes pour toute une famille de Colhomard prêts à être réduits en bisque.
— Pourquoi voulez-vous m’aider ?
— Parce que je sais que n’importe quel endroit sur la planète sera mieux pour toi qu’un orphelinat.
Brice prit Lippouti dans ses bras en sautant de joie. Il allait retrouver sa tante, sa famille. Il embrassa son pendentif, pensant à sa maman qui devait le surveiller de là-haut.
—Vermilava, me voilà !


Pokémon #201r
À suivre dans : « Le jeune homme aux yeux bleus 2/2 »