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Les Apôtres d'Erubin de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 26/01/2020 à 10:26
» Dernière mise à jour le 27/09/2021 à 18:04

» Mots-clés :   Amitié   Aventure   Drame   Mythologie   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 20 : L'imagination et l'ambition
Cloîtré depuis des heures dans la grande bibliothèque du manoir Divalina, Funerol arrivait à peine à réfléchir à ce qu'il lisait, tant la présence des centaines autres ouvrages disposaient ci et là lui faisait de l’œil. Funerol avait toujours été un homme de lettres, aimant lire, et particulièrement studieux. Il ne pouvait imaginer entreprendre quelque chose sans connaître tout de la question. Aussi, la première chose qu'il avait faite après avoir officiellement rejoint les Gardiens de l'Innocence, avait été de demander au Premier Apôtre comment il pouvait se renseigner plus à leur sujet, sur leur histoire et leurs récits. Erable l'avait amené ici, où tous les écrits concernant les Gardiens, Erubin, ainsi que leurs ennemis étaient rassemblés. Plus de sept cents ans d'histoire.

Évidement, ses deux amis étaient repartis de leur côté. Oswald s'était embarqué trois ouvrages pour lire chez lui, et Dan, en homme d'action qu'il était, était peu réceptif à la lecture. Mais ils avaient tous deux leur propre travail, bien sûr. Contrairement à Funerol, dont l'association pouvait très bien fonctionner sans lui, ils ne pouvaient délaisser longtemps leurs tâches d'avocat et de Pokemon Ranger. Et les Apôtres le comprenaient très bien. Beaucoup d'autres Gardiens n'étaient là qu'à temps partiel.

Du coup, Funerol se faisait un peu l'effet d'un glandeur. Cela faisait plus de cinq mois qu'il flânait à Safrania chez Leonora, délaissant le Vert de la Planète, et maintenant il s'engageait dans une autre association. Ça ne pourrait pas durer. Même si le Vert de la Planète était solide et autonome – surtout après sa victoire contre N.W.C – Funerol ne pouvait pas la laisser tomber trop longtemps. Il n'en avait pas le droit. Et comme le lui avait dit Erable, défendre la nature et les Pokemon était déjà en soi une action pour l'innocence. Il est évident que les Apôtres comptait sur lui pour qu'il leur apporte des fonds et des contacts, pas pour ses piètres compétences en combat. Pour affronter directement les Agents de la Corruption, quelqu'un comme Dan serait bien plus qualifié.

Il abandonna donc sa lecture des mémoires du Premier Apôtre Willian Tarclase de 1685. De toute façon, il avait déjà lu ce qui s'était passé sous son commandement dans les mémoires de son successeur. Et puis au pire, il n'avait pas besoin de toutes cette bibliothèque. Dame Cosmunia était là depuis le début des Gardiens, et sa mémoire était parfaite, parait-il. Elle pouvait donc raconter tout ce qu'on voulait. La seule chose qu'elle ignorait était l'emplacement de la Pierre des Larmes, si d'aventure cet artefect existait. Et Funerol doutait de trouver cela dans un livre ici.

Après ces quelques heures à lire ci et là, Funerol pensait en savoir suffisamment sur l'organisation pour son premier jour. Il se leva, s'étira et alla ranger le livre dans son emplacement, avec dans l'idée de reprendre contact au plus vite avec sa secrétaire et ses collaborateurs des différents sièges du Vert de la Planète. Mais alors qu'il s'apprêtait à sortir, une silhouette s'interposa entre lui et la porte.

- Je l'ai enfin trouvé... Le Light Slayer, le Maître du Dépit... Gelbzoranim !

Funerol resta un moment déboussolé, plus par l'apparence de la personne en face de lui que par ses paroles étranges. C'était une jeune femme d'environ une vingtaine d'années, aux cheveux décolorés, coiffée en un embranchement complexe de couettes qui semblaient se multiplier. Elle devait avoir une longueur de cheveux hallucinante pour arriver à ce résultat là. Mais ce n'était pas tout. Sa tenue semblait être une armure complète en cuir, colorée en divers endroit. Elle avait, tatoué sur le front, le symbole du yin et du yang, et enfin, elle s'était accrochée une sorte de bandeau sur le visage, qui dissimulait son œil droit, tandis que celui de gauche était un puits profond d'un bleu très sombre.

- Euh... Veuillez m'excuser, je n'ai pas bien compris, fit Funerol.

La jeune femme étrange le regardait comme si elle voyait un monstre à trois têtes, mais qu'elle n'avait jamais rien vu d'aussi beau. Quand elle reprit la parole, ce fut avec une gestuelle quasi-théâtrale, comme une actrice pas très crédible.

- Gelbzoranim, ta venue en ces lieux a longtemps été prédite ! Mon Auge Allwisend est infaillible ! Je t'ai attendu près de quatre éternités, pour que le Sceau Infini soit enfin assemblé ! L'heure du châtiment est désormais proche. Ensemble toi et moi, nous ferons sonner les cloches de l'Enfer ! Nous provoquerons un tel siphon de ténèbres et de chaos que même Horrorscor le fourbe ne saurait y résister, mouhahahahaha !

C'était peut-être une sorte de blague, un bizutage pour les nouveaux Gardiens ? Mais l'éclat d'euphorie dans l’œil de cette fille lui fit comprendre qu'elle était sincère.

- Euh... Je crois que vous me confondez avec un autre, mademoiselle. Voyez, je viens juste d'intégrer…

L'étrange jeune femme ne le laissa pas finir. Elle s'avança d'un coup et lui prit les mains, tout en observant intensément son visage, à une distance un peu trop proche du goût de Funerol.

- Light Slayer, ta mémoire cosmique a sans doute été pervertie par les interférences subliminales du monde matériel, mais je te l'assure : tu es Gelbzoranim, celui qui amènera le dépit. Quant à moi, je suis la six-cent quarante-septième détentrice de l'Auge Allwisend, l’Oeil Omniscient. Nous sommes les éternels partenaires qui étions et serons ! C'est la combinaison de nos pouvoirs qui provoqueront l'effondrement des frontières matérielles pour que nous parvenions enfin au Ewigen Glorreicher Tag !

- Ah ? Fit bêtement Funerol.

Cette fille se fichait-elle de lui, ou bien était-elle dérangée ? Alors que Funerol cherchait un moyen de lui fausser compagnie, une voix sèche et semble-t-il désabusée intervint :

- Leslia, cesse d'importuner le monsieur avec tes âneries.

C'était la comtesse Divalina qui venait d'arriver. Funerol était toujours étonné comment cette femme, assez petite et plus toute jeune, parvenait à dégager cette autorité et ce charisme naturel.

- Mais, Honorable Mère, il s'agit de Gelbzoranim ! Protesta la dénommée Leslia. Son apparence a changé depuis la dernière fois, mais mon Auge Allwisend ne saurait se tromper.

- Bien sûr, bien sûr... Tu lui raconteras tout ça en détail une autre fois. Il vient juste d'arriver, il a pas mal de choses nouvelles à intégrer, et n'a certainement pas besoin de cogiter à tes sottises métaphysiques.

Leslia fit la moue, mais n'osa pas désobéir à la maîtresse des lieux. Toutefois, avant de se retirer, elle serra très fort les mains de Funerol et le regarda comme un amant qu'elle venait de retrouver après des années.

- Tu ne souffriras plus longtemps de mon absence, Gelbzoranim, lui assura-t-elle. Les échos du Jugement Dernier feront vibrer notre union éternelle et retrouvée !

Et sur ce, elle fila hors de la bibliothèque en sautillant avec légèreté. Funerol la regarda partir avec ébahissement, tandis que la comtesse Divalina s'approcha en secouant la tête.

- Veuillez excuser ma fille, monsieur Funerol. Elle a toujours vécu dans son propre monde, à imaginer des choses farfelues, à donner des noms bizarres aux gens... Vous n'êtes pas le premier et ne serait certainement pas le dernier.

- Je... je vois. Vous voulez dire, qu'elle aurait une sorte de... retard mental ?

- Je ne saurai le dire. Ça peut être une réelle maladie mentale, comme ça pourrait être un trouble psychologique, ou encore simplement une façon pour elle de se « donner un genre », comme disent les jeunes. Elle s'est toujours pensée spéciale, à détenir je ne sais quel pouvoir ou œil mystique. Peut-être est-ce un trouble en lien avec... la spécificité de ma famille.

- Vous voulez parler de vos Doppelganger ?

La comtesse lui jeta un coup d’œil surpris, avant d'afficher un sourire impressionné.

- Vous avez déjà beaucoup lu, apparemment.

- Un de vos ancêtres était Premier Apôtre et a rédigé pas moins de quatre ouvrages entreposés ici. Il m'aurait été difficile de ne pas tomber dessus. Les explications sur ces êtres étaient assez sommaires, mais je trouve ça réellement fascinant !

En effet, Funerol avait appris que tous les membres de la famille Divalina possédait une caractéristique des plus inhabituelles : celle de pouvoir invoquer de leur ombre une sorte de double, entièrement fait de ténèbres, et capable de prendre une apparence matérielle. Ce pouvoir remonterait au fondateur de la lignée Divalina, mais personne ne semble en connaître la raison. Était-il un G-Man ? Ou possédait-il un Pokemon spécial capable d'un tel prodige et qui lui a donné ce pouvoir ?

Quoi qu'il en fut, cette capacité a été transmise jusqu'à aujourd'hui à tous ses descendants. Dans la plupart des cas, les Doppelganger ne servaient que de familiers, tout juste bon à aider leur maître dans les tâches quotidiennes, mais certains Divalina s'en étaient servis comme arme. Apparemment, la puissance et les capacités des Doppelganger variaient selon le Divalina qui était leur maître.

- Il est vrai que Leslia possède un Doppelganger plus puissant que la moyenne, dit la comtesse. Peut-être a-t-elle eu la grosse tête à cause de ça, et s'est mise à s'imaginer des choses qu'elle a finie par croire elle-même. J'avais espoir qu'elle s'arrange en grandissant, mais plus ça va, plus ça a l'air de s'aggraver. Je ne sais plus quoi faire d'elle. C'est d'autant plus un problème que ce sera sûrement elle qui me succédera à la tête de la famille... et de mon poste d'Apôtre d'Erubin.

- C'est votre seule enfant ? Demanda Funerol.

- Non, c'est ma fille cadette. Mon aînée, Musmelian, n'est nullement intéressée par les Gardiens de l'Innocence, par la direction de la famille, ni même par les Doppelganger. Elle en possède bien un, mais qu'elle n'utilise quasiment jamais, et qui de fait a fini par devenir inutile au point qu'il en a oublié toute puissance ; qui n'était en plus déjà pas bien grande de base. À l'inverse, Leslia manie le sien avec une aisance peu commune, ce qui la rend naturellement plus digne de prendre la tête des Divalina et de les représenter au sein des Gardiens. Elle est déjà partie en mission plus d'une fois, et est toujours revenue avec un succès certain.

- Votre fille fait partie des Gardiens ? S'étonna Funerol.

- Depuis des années, oui. Pensez-vous : il s'agissait d'intégrer une organisation clandestine vénérant un Pokemon mythologique et combattant une caste d'ennemis terrifiant avec des pouvoirs souvent surnaturels... Elle a bien évidement sauté sur l'occasion alors qu'elle n'avait que quinze ans. Et ça n'a fait que renforcer son imagination incontrôlable et son ego excentrique.

La comtesse se massa le front, l'air tourmentée.

- Elle n'a pas un mauvais fond pourtant, mais à cause de son comportement plus que bizarre, elle n'a quasiment aucun ami ici. J'espère que durant votre séjour ici, vous pourrez passer outre sa bizarrerie et nouer de bonnes relations avec elle malgré tout.

- Je... je ferai de mon mieux, madame la comtesse.

Funerol ne voyait après tout pas d’inconvénient à ce que Leslia Divalina l'appelle Gelbzoranim si elle le voulait. Cela étant, il vaudrait mieux qu'elle oublie vite la partie concernant cette « union éternelle et retrouvée » entre eux, sous peine qu'une certaine championne d’arène de Kanto ne débarque ici illico presto pour commettre un meurtre.


***


Quand Vaslot rentra dans la base Rocket de Céladopole sous le casino, il avait bien rôdé son histoire justifiant la tragique disparition du sbire Edor ; une histoire qui bien sûr lui imputait l'entière responsabilité, et donnait à Vaslot le rôle du brave supérieur qui avait tout tenté pour sauver son subordonné, en vain. Il avait même créer des preuves en ce sens avant de partir d'Almia. Vaslot était quelqu'un de méticuleux, surtout dans ses mensonges. Mais il fut presque déçu : le chef de section Byz paraissait avoir oublié jusqu'à l'existence d'Edor et avisa Vaslot, dès qu'il arriva, de quelque chose de bien plus important.

- On va avoir une descente des poulets dans notre entrepôt Rue, Despero.

Vaslot activa ses méninges pour tenter de se souvenir.

- C'est l'un de nos deux centres de stockage d'héroïne non ?

- Ouais, et ça craindrait qu'il soit fermé.

- Y'a donc encore des flics qu'on n'a pas achetés dans cette ville ? S'étonna le jeune homme.

- C'est justement l'un d'eux qui nous a prévenu dès qu'il a su. Mais il ne peut ni empêcher la perquisition, ni la retarder. Le procureur nous fait juste les gros bras pour nous rappeler qui commande ici, et qu'il nous laisse faire nos affaires selon son bon vouloir... et le montant des pots-de-vin que nous lui versons.

- Ce serait pour exiger une augmentation ?

- Ça, ou parce qu'il s'est fait remonter les bretelles par les Dignitaires, qui ont de moins en moins la main sur Céladopole. Enfin bref, faut planquer la marchandise au plus vite et tout nettoyer. L'Agent 003 ne veut pas d'incident maintenant, alors que Madame Boss et son fils l'Agent 001 viennent en visite dans trois jours. Parait qu'il vient juste d'avoir des jumeaux avec sa nouvelle femme. Il va les présenter à l'Agent 003, et tout...

Vaslot se fichait pas mal des marmots du champion de Jadielle, mais valait mieux en effet pour lui qu'il n'y ait pas de souci quand il serait là. 003 ne manquerait pas sinon de faire retomber la responsabilité sur Byz, qui à son tour la ferait retomber sur Vaslot, son meilleur élément. Comme partout ailleurs dans une grande organisation, le jeu des fusibles sautables prévalait. Il était même probable que Byz sache que Vaslot ne pourrait rien arranger à cela, et compte donc le sacrifier à l'avance. Sauf que Vaslot était quelqu'un d'astucieux.

- Je m'en occupe, lui assura Vaslot. S'il n'y a pas de gros bonnets parmi eux, je tâcherai de les acheter pour qu'ils... soient légèrement retenus.

- J'éviterai à ta place, gamin. Le proc s'est payé les services d'un ténor du barreau de Safrania, qui sera présent pour constater que tout se déroule dans les réglés.

- On peut payer cet avocat bien plus que ne l'a fait le proc.

- Sans doute oui, mais pas celui-là. Il est réputé pour être aussi blanc que neige. C'est le gus qui a fait tomber N.W.C l'année dernière.

Vaslot haussa les sourcils mais acquiesça sans rien dire de plus. Byz n'était pas censé savoir que Vaslot avait collaboré indirectement avec cet avocat, en lui transmettant, à lui et à Funerol, le dossier sur Buildstrong et ses liens avec N.W.C. Oswald Brenwark, c'était son nom. Bien sûr, il devait ignorer qui était Vaslot, mais ce dernier pourrait s'en servir. Si Brenwark ne pouvait pas être acheté, peut-être respecterait-il une dette ? Il y avait aussi des chances qu'il ait lui aussi été contacté par ces fameux Gardiens de l'Innocence.

Vaslot se rendit donc sur place avec quelques sbires en civil. Si l'affaire ne pouvait pas être réglé à l'amiable, il se servirait de son Hypnomade pour hypnotiser les flics et l'avocat, et leur faire croire qu'ils n'avaient rien trouvé. Et si vraiment tout partait en couille, ils avaient amené leurs armes. Quand Vaslot arriva, les Rockets à l'intérieur de l'entrepôt s'activaient déjà à transférer toute la drogue dans une autre planque, mais ils n'auront jamais fini à temps. Aussi, quand Oswald Brenwark se présenta devant l'entrepôt avec son escorte d'une dizaine de policiers, Vaslot alla à sa rencontre, l'air innocent et sympathique.

- Messieurs. Puis-je vous aider ?

Brenwark ne répondit pas à son sourire. Vaslot savait bien juger les gens, et il pouvait dire que ce gars était l'archétype du mec chiant et droit. Il sortit une feuille de papier qu'il mit devant les yeux de Vaslot.

- Oswald Brenwark, avocat à Safrania. J'ai là un mandat du procureur de Céladopole pour une perquisition.

Vaslot fit passer son visage amical de la curiosité à une certaine appréhension.

- Une... perquisition ? Euh, je n'ai rien contre, mais cet entrepôt sert de stockage à deux trois entreprises du BTP du coin. Vous ne trouverez rien d'autres que des palettes, des briques et du béton.

- J'en jugerai moi-même. Ce bâtiment est suspecté d'appartenir à la Team Rocket et de receler des quantités non négligeables de drogues.

Vaslot sourit mentalement. Non pas à cause de ce qu'il venait de dire, mais parce qu'il venait de remarquer l'espèce de broche que l'avocat sur son costume à la poitrine, représentant une flèche entourée de deux ailes. Il avait vu le même symbole en pendentif sur ce vieux, Bigoutet, qui s'était présenté comme l'un des chefs des Gardiens de l'Innocence. Ça voulait donc dire que Brenwark en faisait partie aussi.

- Maître Brenwark, peut-être devrions-nous en parler en tête à tête, proposa Vaslot.

- Je n'en vois nul intérêt, mon garçon, répliqua froidement l'avocat.

Il devait penser que Vaslot allait chercher à l'acheter, mais même sans la piste « Gardiens de l'Innocence », le jeune homme n'aurait jamais essayé avec lui.

- Il y a un intérêt à cela pourtant, répliqua Vaslot. Celui de l'innocence.

Touché, songea Vaslot en voyant la tête de l'avocat. Le Rocket insista en désignant des yeux la broche de Brenwark. Ce dernier fut un moment déconcerté, avant de reprendre son masque de professionnalisme.

- Laissez-moi un instant avec lui, messieurs, ordonna-t-il aux policiers.

Comme la moitié des flics présents recevaient déjà des pots-de-vin de la Team Rocket, et que l'autre moitié était au courant et faisait mine de ne rien voir, aucun d'entre eux ne parut être surpris par cette demande. Sans doute devaient-ils se dire que leur fameux avocat droit dans ses bottes allaient à son tour se faire corrompre. Et c'est très exactement ce que dit Brenwark à Vaslot une fois qu'ils furent seuls.

- Vous avez intérêt de faire vite ; ils vont croire que vous êtes en train de m'acheter. Vous seriez donc un Gardien de l'Innocence ?

- Disons un allié de fait pour l'instant, et peut-être un futur camarade en devenir. Le professeur Erable me connaît. Il m'a même invité à le rencontrer dans ce manoir à Sinnoh qui semble vous servir de base.

Vaslot avait sorti tout ce qu'il savait, mais Brenwark paraissait encore suspicieux.

- Je sais très bien que vous stockez de la drogue ici, et que donc vous devez travailler pour la Team Rocket, mon garçon. Pardonnez-moi si je trouve étrange qu'un Rocket se soucie de l'innocence et du bien commun.

Ne voyant pas l'intérêt de mentir, Vaslot écarta les bras, cherchant à le convaincre par la sincérité.

- Je suis bien un Rocket, et oui, il y a de la drogue dans cet entrepôt. Mais cela ne me met en aucune façon au niveau de ces Agents de la Corruption, que j'ai déjà croisé, et même combattu. Je vous ai même aidé directement il n’y a pas longtemps. Votre nouvelle popularité, c'est à moi que vous la devez, ainsi que la survie de la Forêt de Jade.

Oswald fronça les sourcils, puis il sembla avoir un déclic.

- Les photos de ces expériences illégales à Parmanie, et les preuves reliant Buildstrong à N.W.C...

- C'était moi, oui. J'étais sur place avant la police, et je me doutais que ça vous serait utile pour votre procès. N.W.C était de mèche avec les Agents de la Corruption, cela ne fait aucun doute. C'est pour cette participation que le professeur Erable cherche à me recruter. Pourtant il sait parfaitement que je sers la Team Rocket. Mais lui, il voit sans doute l'intérêt d'avoir des alliés dans ce genre d'organisation implantée partout et qui sait beaucoup de choses.

- Sauf que je ne suis pas ici aujourd'hui en tant que Gardien de l'Innocence, mais en tant qu'avocat mandaté par le procureur, répliqua Oswald. Je ne peux pas fermer les yeux sur un tel trafic, quelque soit l'utilité que vous puissiez avoir pour Erable.

- Voyons, Maître Brenwark, vous êtes assez intelligent pour savoir que votre rôle ici est purement politique. Le procureur se sert de vous pour montrer aux Dignitaires qu'il cherche réellement à combattre la Team Rocket en s'entourant d'hommes de grande probité tels que vous. Mais ne vous y trompez pas : celui qui touche le plus de pots-de-vin de notre part à Céladopole, c'est lui. La fermeture de cet entrepôt ne changera rien. Un autre ouvrira une semaine plus tard.

L'air mécontent d'Oswald montra à Vaslot qu'il devait se douter de tout cela. Mais laisser passer une occasion de combattre le crime était profondément contre ses valeurs. Vaslot insista :

- Vous avez une dette envers moi, monsieur Brenwark. Et soyez sûr que si vous me rendez ce petit service aujourd'hui, je vous renverrai la balle un jour. Comme je l'ai dit, la Team Rocket est une source substantielle de renseignements. Des renseignements qui peuvent servir pour les Gardiens de l'Innocence, comme pour la justice civile.

En clair : « fichez-moi la paix cette fois, et je vous enverrai d'autres preuves qui vous feront gagner un autre procès ». Un homme comme Brenwark ne put voir cela autrement que comme une tentative d'achat. Mais tout aussi attaché à la loi qu'il était, Oswald Brenwark était aussi pragmatique. Rendre service à ce jeune Rocket prétendument allié des Gardiens pourraient lui être bien plus utile qu'une saisie de drogue dont tout le mérite reviendrait à ce procureur corrompu.

- Soit, finit par accepter Oswald. Je dirai au procureur que ses informations étaient fausses, et qu'il n'y avait aucune trace de drogue ici. Il pensera que je me suis fait graisser la patte moi aussi, mais il sera sans doute assez intelligent pour ne rien en dire s'il ne veut pas que je me penche sur son propre dossier.

- Voilà qui est sage et intelligent, Maître Brenwark, sourit Vaslot. Je saurai vous rendre la pareille quand vous en aurez besoin.

- Je vérifierai quand même vos dires auprès du professeur Erable. Puis-je avoir votre nom ?

Vaslot s'inclina respectueusement et lui tendit la main.

- Worm. Vaslot Worm. En dépit de nos chemins différents, je pressens que notre collaboration ne nous apportera que des bénéfices, monsieur Brenwark.

L'avocat la serra à contrecœur, devant se dire qu'il devrait bien se la laver ensuite. Après cela, Vaslot serait bien sûr obligé de se rendre auprès des Gardiens de l'Innocence pour les rejoindre officiellement, mais ça ne le dérageait plus. Il pourrait même en tirer un large bénéfice, en ayant des alliés populaires comme Erable ou ce Brenwark. De quoi creuser davantage son petit trou dans le monde souterrain.

En parlant de creuser son trou, il apprécia particulièrement la tête que fit le chef de section Byz quand Vaslot lui dit qu'il s'était débarrassé des policiers et de l'avocat sans faire de vague. Byz savait que son subordonné était compétent et doué, mais il n'avait jamais imaginé qu'il réussirait sur ce coup-là Et ça l’embêtait, car il avait déjà dit à l'Agent 003 que Vaslot serait en charge de cette affaire, justement parce qu'il pensait qu'il se vautrerait lamentablement. Il ne pouvait plus maintenant faire mine que c'était lui qui avait géré.

003 insista pour aller féliciter Vaslot lui-même, lui promettant un bel avenir au sein de l'organisation s'il continuait ainsi. Vaslot lui serra la main avec modestie, tout en étant conscient qu'à côté, Byz le regardait avec un dépit mal dissimulé. Ce cher chef de section était satisfait du travail de Vaslot, mais ne voulait pas pour autant qu'il lui fasse de l'ombre auprès de l'Agent. Vaslot se dit qu'il serait bientôt le moment de faire en sorte de monter en grade, tout en se débarrassant de la concurrence. Dans le monde criminel, et plus particulièrement dans la Team Rocket, c'était « manger ou être mangé ». Et les Gardiens de l'Innocence allaient l'aider dans ce sens.