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Egaré de Lief97



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» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 27/05/2019 à 10:57
» Dernière mise à jour le 11/06/2019 à 21:13

» Mots-clés :   Action   Guerre   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Suspense

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Chapitre 11 : L'ermite, l'étranger et le dragon
« Se faire pardonner le bien que l'on a fait est un art difficile autant que nécessaire ; le bienfaiteur n'a pas de plus acre adversaire que l'orgueil des ingrats qu'irrite le bienfait. » Henri-Frédéric Amiel.


***


Une véritable petite foule se pressa autour du nouveau venu. Ou, en tout cas, observa les choses, bien qu’à une distance respectable du vieil ermite. Appuyé sur un long bâton, il semblait essoufflé et harassé par son voyage. Darren, avant de lui poser les questions qui les taraudaient tous, l’invita, lui et son xatu en lévitation, dans une tente en toile à proximité. Ève laissa joyeusement tomber son rôle de sentinelle, et dispersa la foule en intimant sévèrement les bandits de reprendre leurs tâches.

Elle réussit à diviser les spectateurs et à noyer leur curiosité en prétextant qu’il n’était qu’un marcheur affaibli passé là par hasard. Cela sembla calmer les ardeurs de certains, même si le xatu était une preuve évidente qu’il n’était pas n’importe qui.

— Ça va jaser, aujourd’hui, soupira Ève en s’imaginant les rumeurs enfler sur leur campement.

Elle emboîta le pas au vieil ermite et suivit Darren qui le guidait en lui offrant son bras comme soutien. Il savait parfois se comporter en vrai gentleman, malgré ses airs bourrus et distants. Ève se promit de faire une remarque à ce sujet, quand l’atmosphère s’y prêterait un peu mieux.

Ils entrèrent dans la tente. L’endroit était assez peu encombré : une table, des chaises, une couchette à même le sol, et quelques caisses par-ci par-là. Ève comprit rapidement qu’il s’agissait de celle de Karyl : il était vrai qu’il avait demandé à être placé en périphérie du camp, pour pouvoir intervenir rapidement en cas d’attaque. Son pouvoir de Mutant était unique, après tout.

Jusqu’à ce que Lyco revienne, il était leur plus puissante arme.

Il paraissait pourtant absent, à ce moment. Ève referma la tente derrière elle et se laissa tomber sur une caisse en soufflant.

— Asseyez-vous, dit Darren en aidant l’homme à s’installer près de la table.
— Mes reins ont bien souffert pendant ces quelques jours, s’excusa l’ermite avec un petit rire.

Il ne tarda pas à prendre place. Le xatu immobile resta en lévitation, à quelques centimètres du sol, dans un coin de la tente. On aurait dit une statue, à ceci près que ses yeux brillants d’intelligence observaient furtivement chaque personne autour de lui. Ève lui fit un signe de la main amical, mais ne releva aucun indice qui montrait qu’il l’avait notifié.

Darren s’assit à son tour sur une chaise, face à l’ermite.

— Qu’êtes-vous venu faire ici ? Vous avez fait le voyage à pied depuis le Vallon du Silence ? C’est très imprudent, à votre âge.
— Oh, je le sais ! répondit l’ermite, soulagé de pouvoir enfin se reposer. Mais Xatu me protège mieux qu’une troupe de voyageurs, ne vous en faites pas pour moi.

Darren ne répondit pas, stupéfait. Il devait essayer de s’imaginer comment on pouvait, à plus de quatre-vingts ans, marcher pendant des jours à travers les plaines arides et parvenir à destination en bonne santé.

— Pourquoi êtes-vous venu ici ? s’enquit Ève avec curiosité. Vous avez entendu les rumeurs sur ce camp ?
— Oh, oui. Xatu m’a transmis des pensées issues de l’esprit des gens de la Cité des Toiles. J’ai appris votre projet depuis bien longtemps déjà. Je me suis décidé à venir en renfort.
— En renfort ?

Le ton de la jeune femme fit rire le vieil homme.

— Je suis incapable de porter une arme, je sais ! Mais Xatu et mes conseils ne peuvent pas vous faire de mal, n’est-ce pas ?
— Je vous préparerai une tente confortable, déclara Darren en sortant de son mutisme. Vous serez plus à votre aise.
— Je suis habitué à vivre à la dure, vous savez. Un sol plat et un feu sont tout ce dont j’ai besoin. Mais parlez-moi donc du plus intéressant…

Il se pencha en avant en s’appuyant sur sa canne, intrigué et amusé.

— Comment se porte ce cher Karyl ?

Ève haussa les sourcils ; elle avait oublié qu’il le connaissait. C’était lui qui l’avait fait changer de camp, en lui prouvant qu’il était le pantin de Mervald, et en le convainquant de rejoindre les pillards et Lyco. Elle avait tendance à considérer cet ermite comme un vieillard farfelu, mais sans lui, ils n’auraient jamais pu avoir le Mutant à leurs côtés.

Ni éliminer Molch.

Ni préparer toute cette attaque.

— Je suis curieux, continua l’ermite. Il est toujours à vos côtés ?
— Bien sûr, répondit Darren.
— On est dans sa tente, renchérit Ève. Pas sûr qu’il soit d’humeur à nous voir chez lui, d’ailleurs…

Un pan de toile s’écarta pour laisser passer le propriétaire des lieux, avec un timing presque trop parfait. Ce dernier s’assombrit en reconnaissant le vieillard et en dévisageant les quatre squatteurs. Il entra et grommela :

— Les autres parlaient d’un vieux et d’un xatu, c’est donc bien vous…
— Un plaisir de te revoir aussi, Karyl Braun.

L’ermite semblait particulièrement guilleret. Son interlocuteur, lui, était plus gêné qu’autre chose. Peut-être parce que ce vieillard était celui qui avait vu à travers ses faiblesses, et l’avait remis sur le droit chemin. Karyl lui était redevable, mais semblait avoir du mal à l’admettre. Le Mutant s’installa sur une caisse sous le regard moqueur d’Ève, alors que Darren reprenait les choses en main :

— Je suppose que vous comprendrez vite ce que nous prévoyons de faire, vu que votre xatu vous transmets nos… pensées.
— Je sais déjà tout. Ainsi donc, ce cher Lyco est parti dans le sud ? J’espère qu’il reviendra vite.

Ève frissonna et jeta un regard en biais à ce xatu de malheur. Il avait maintenant le regard vide. Nul doute qu’il les sondait, ou qu’il analysait d’autres choses qui échappaient au commun des mortels. Les Type Psy étaient véritablement effrayants.

— Effrayant, mais pas méchant, jeune fille, lança l’ermite sans même se retourner vers Ève.

La jeune femme se leva d’un bond, dans l’incompréhension générale, et grogna, agacée :

— Demandez à votre piaf d’arrêter de fouiller dans ma tête, pitié. C’est insupportable.
— Xatu…

Le pokémon ailé croassa timidement et se posa au sol, avant de rabattre ses ailes sur son corps étrange. Il paraissait presque vexé, mais son regard était plus vif. Il avait cessé ses manigances psychiques, enfin.

— J’aimerais savoir autre chose, demanda soudain l’ermite.
— Oui ?
— Avez-vous des nouvelles du Condamné, depuis sa fuite de l’Arène ?

Les pillards s’échangèrent des regards, mais le chef répondit vite par la négative.

— Nous n’en avons pas entendu parler depuis. Pourquoi cette question ?
— Disons que je m’inquiète à ce sujet, répondit évasivement l’ermite. Je connais plus ou moins bien sa nature, et je suis aussi venu au cas où il réapparaîtrait… mais c’est sans doute plus de la curiosité qu’autre chose.

Darren sentit bien que c’était un sujet que le vieil homme voulait éviter. Ève lança :

— Bon, pépé ! Bienvenue dans le coin, alors. Vous avez un nom, où on doit se contenter de vous appeler « l’ermite » ?

L’ermite se tourna vers elle, avec un grand sourire dans sa barbe grise. Elle croisa son œil unique et jeta à peine un regard à la balafre qui fermait l’autre.

— Oh, pardonnez mon impolitesse. Appelez-moi Gust.



***


Le vent soufflait puissamment sur les dunes, provoquant parfois comme des tornades miniatures de sable. Des pokémons habitués à ces conditions jouaient, au loin, au sommet des buttes. Sablaireaux, sapereaux ou même balbutos profitaient ensemble de la force de la nature pour se dégourdir les pattes ou prendre un peu de hauteur.

Ici, ils étaient à l’abri, loin du regard et des crocs des hommes.

La silhouette qui s’était postée sur un rocher pour les observer resta immobile. Là où les hommes n’étaient pas, il lui paraissait que tout allait toujours pour le mieux.

Encapuchonné des pieds à la tête, rien ne laissait voir son visage, ni même sa peau. Cet étrange personnage n’appréciait guère la lumière. Il lui avait déjà fallu des semaines pour réussir à garder une forme humanoïde. Mais il avait bien du mal à conserver un visage humain ; ils possédaient trop d’émotions, et trop de muscles complexes pour être imités à la perfection.

En le voyant, d’autres s’étaient facilement rendu compte qu’il n’avait rien d’un humain, et il avait été attaqué à maintes reprises. Puis contraint de les tuer en retour.

Dans ces moments-là, il avait pris conscience de la bêtise et de la faiblesse physique de l’homme. Si ce dernier avait dominé et détruit le monde, c’était grâce à son ingéniosité. Il avait parfois en sa possession des armes incroyables, capables de détruire tout en tenant parfois dans une main. Mais sans arme, il ne valait rien.

L’étranger n’éprouvait aucune admiration pour la race humaine. Juste un profond dégoût, doublé d’une haine sourde. Une haine dont il ignorait l’origine. Il avait l’impression d’avoir été implanté dans un corps inconnu, à cause d’une étrange expérience faite de la main de l’homme aux cheveux d’or. Celui qui se prétendait maître des humains.

Il voulait savoir qui il était réellement. Pour ça, il fallait trouver ce maître. Le faire parler.

L’étranger pivota vers l’horizon. La ville n’était pas encore en vue. C’était pourtant la bonne direction. Mais ce désert semblait sans fin. À chaque pas, les particules radioactives issues d’une guerre lointaine émanaient du sable ; l’étranger le sentait. Les hommes paraissaient aveugles à ce sujet ; sans doute à cause de leurs sens si peu développés.

La silhouette reprit sa route, lentement mais sûrement, déterminée à retrouver l’homme aux cheveux d’or. Bientôt, l’étranger aurait peut-être des réponses.

Venait-il bel et bien d’un autre monde, comme il le pressentait ? Qu’était-il ? Qu’avait-il été, avant de revenir à la vie dans ce corps frêle et fragile ?

Il marcha. Sans s’arrêter. Sans prendre de pause. Il marcha, comme il l’avait fait pendant tout ce temps passé à errer. Il n’avait pas conscience du temps qui passait. Pour lui, le temps n’avait guère d’importance : sauf en ce qui concernait le cycle jour-nuit. Il adorait la nuit. Il était plus fort, plus rapide. Et capable de se déchaîner contre n’importe qui.

La jour, il était faible. Il devait rester discret, ne pas combattre, ne pas attirer l’attention sur son corps difforme drapé dans ces capes brunes. Il devait…

Des sons inhabituels le firent s’arrêter. Il releva la tête.

La ville.

Elle était là, sereine, éclairée par les rayons du soleil couchant. Il la reconnut immédiatement.

— L’Arène, dit-il dans un râle étrange.

C’était dans ce grand bâtiment en cercle qu’il avait été enfermé si longtemps. C’était là qu’il avait été ramené à la vie. Là qu’habitait l’homme aux cheveux d’or.

Ignorant l’agitation qui baignait dans la ville, les murs qui se montaient et les forts qui avaient maintenant poussés entre les maisons et les bidonvilles, l’étranger reprit sa route, droit vers l’Arène.

Son objectif était enfin à sa portée.



***


Lacrya et Lyco abritèrent leurs sacs dans un creux rocheux, à mi-hauteur d’une petite falaise facile à escalader. La jeune femme avait vite repéré l’endroit. C’était facile d’accès, et pouvait servir de point de vue pour Plume pendant qu’ils s’occuperaient d’investir le repaire de la bande de Kesner.

Lyco se dressa sur une hauteur de la falaise et observa l’horizon coloré de rouge et d’orange. Le crépuscule tombait. Au loin, un lougaroc hurla. Son cri se répercuta sur la roche et sembla faire vibrer la falaise. Lacrya se tendit, et patienta près des sacs en attendant le retour du garçon.

Bien vite, il redescendit, mettant à l’épreuve ses muscles nouvellement renforcés par la Némélia 1.

— Leur repaire a l’air d’être encerclé par des falaises comme celle-là. Je vois des trous creusés un peu partout, ils doivent avoir plusieurs grottes et abris.
— Tu as vu des guetteurs ?
— Pas depuis ici.

Lacrya se retourna et siffla faiblement en direction de leur partenaire à plumes, qui planait en cercle à quelques mètres au-dessus d’eux. Il descendit en piqué et se posa avec force sur son bras tendu. Sans qu’il ne lui paraisse plus lourd du tout.

— Écoute, Plume, expliqua Lacrya. On va attaquer les trafiquants, juste à côté. Toi, restes discrètement ici, compris ? Protège nos sacs, et attends qu’on revienne.

L’oiseau hocha son bec acéré et se jucha sur l’un d’eux, l’air obéissant. Lyco parut satisfait, et les deux compagnons descendirent de la falaise pour rejoindre le sol sec et crevassé typique de la région.

Bhataïs était à une bonne heure de marche de leur position, à l’est. Ils avaient suivi les empreintes laissées par la bande de Kesner pour les trouver, et ça n’avait pas été difficile. Ils ne s’attendaient pas à une quelconque résistance, et encore moins à un assaut nocturne. L’absence de guetteurs le prouvait.

— Il faudra briser les armes à feu en priorité, rappela Lyco. Ce sera notre premier objectif. Faire un maximum de dégâts à leur arsenal, possiblement sans se faire repérer.
— Et si c’est le cas ?
— … Alors il faudra improviser. Tout dépendra de leur nombre, de leur vitesse de réaction, et de leurs armes. S’ils utilisent des pokémons, il faudra redoubler de prudence. On se repliera si c’est trop risqué.

Lacrya hocha la tête. Ils étaient sur la même longueur d’ondes.

Elle craignait toutefois, après y avoir longuement réfléchi, qu’humilier Kesner pourrait aggraver la situation à Bhataïs. Kesner n’aurait d’autre moyen de se venger d’une attaque qu’on pillant de plus belle la ville voisine. Elle avait donc convenu avec Lyco qu’ils n’avaient pas besoin de mettre à terre tous les trafiquants : mais plutôt de tuer leur commerce.

Ils avaient pour objectifs, après avoir mis à mal leurs armes à feu, de s’en prendre aux marchandises et de voler leurs pokémons. Avec ça, le groupe aurait bien du mal à survivre, et encore plus à attaquer Bhataïs. Les habitants seraient plus tranquilles de cette façon. Passer Kesner à tabac n’aurait fait qu’attiser la haine et créer un cercle vicieux.

— Allons-y, lança Lyco.

L’obscurité se faisait doucement de plus en plus présente. Le temps de contourner les falaises pour arriver dans le repaire de Kesner, il ferait trop sombre pour qu’ils soient vus par de potentielles sentinelles.

Et Lacrya, elle, se délectait déjà d’être dotée d’une si bonne vision dans le noir. Ses sens étaient aiguisés, et ses gants cloutés prêts à écraser des crosses de mitraillettes s’il le fallait.



***


Lyco et Lacrya n’eurent aucun mal à observer le repaire alors qu’ils s’approchaient.

Installé au fond d’un vallon, entouré de roches vertigineuses que la végétation attaquait timidement, le camp était ouvert sur les plaines sèches qui les entouraient, sans barricades ni murs d’enceinte. Quelques pieux en bois avaient été enfoncés dans le sol et tournés vers l’extérieur, pour dissuader de gros pokémons de passer.

Mais ça n’empêchait ni une meute de grahyénas sauvages d’attaquer le camp, ni Lyco ou Lacrya de s’y faufiler silencieusement.

Levant la tête vers les falaises, Lyco commença à apercevoir les premières grottes creusées. Il entendit le murmure de Lacrya à sa droite :

— Aucun guetteur.
— Bizarre.

Ils apercevaient la lumière de quelques torches disséminées dans les cavités. Mais pas le moindre bruit, pas le moindre homme à l’horizon. Lyco renifla plusieurs fois : pas d’odeur bestiale de pokémon non plus. Si drakkarmin il y avait, il devait sagement dormir au fond de sa pokéball.

Ils passèrent devant des grottes et jetèrent de rapides coups d’œil, n’y trouvant, la plupart du temps, que des couchettes et des meubles en bois.

Ils atteignirent rapidement des cabanons, aperçus depuis un moment, et qui étaient visiblement les seules constructions du repaire.

— Je vais crocheter la serrure, dit Lyco en constatant la présence d’un cadenas sur le premier d’entre eux.
— Je vais voir au fond, pendant ce temps.

Lacrya s’éclipsa dans son dos, et continua son chemin vers le fond de la combe, cherchant à comprendre où pouvaient bien être les hommes de Kesner.

Elle vit alors une grotte plus vaste que les autres, mais dont l’ouverture était en grande partie bouchée par une barricade en bois recouverte de tissus et de peaux de bêtes. Une lueur orangée en émanait, ainsi que des éclats de voix étouffés. Elle s’approcha, se figea, tendit l’oreille…

Et esquissa un sourire.

Elle fit demi-tour et rejoignit son camarade, qui achevait le cadenas à ce moment-là.

— Alors ? demanda-t-il, curieux.
— Ils font une beuverie. La moitié d’entre eux sont déjà saouls, je parie.

Elle vit les traits du garçon s’adoucir, rassuré.

— Évidemment, une prise pareille ! Ils doivent fêter ça…
— Profitons-en, souffla la jeune femme.

Lyco la laissa découvrir l’intérieur du cabanon : il contenait des caisses entières de munitions. Le garçon crocheta les autres cabanons, et ils ne tardèrent pas à pouvoir faire l’inventaire complet des biens des trafiquants.

Armes à feu, épées, stock de pokéballs, de bois, et provisions. À tous les niveaux, la bande de Kesner semblait tout posséder. En quantités assez incroyables.

— Donc on prend quelques pokémons ? questionna Lyco.
— De sorte à ce que ça ne soit pas trop lourd pour le retour, oui.

La caisse qui contenait les pokéballs pleines n’était pas si remplie que les vides. Lacrya remarqua un sac de toile, qu’elle vida de son contenu, et Lyco y versa les balls — une bonne trentaine, tout de même. La jeune femme prit quelques provisions, et s’empara d’un pistolet léger et compact, bien plus récent que le sien. Lyco en profita pour échanger son poignard émoussé contre un véritable couteau de combat.

Puis vint le moment où Lacrya s’éloigna pour aller chercher des torches et faire un joli feu d’artifice de ces cabanons chargés de bois et de munitions. Lyco mit de côté le sac de pokéballs et trouva de la poudre, qu’il répandit à l’intérieur et tout autour des constructions.

Il entendit un souffle derrière lui, signe que Lacrya revenait. Il se retourna :

— Déjà les torches ? Attention, je n’ai pas…

Il se tut, stupéfait.

Un drakkarmin le fixait à moins de deux mètres, curieux et intrigué. Sa lourde tête rouge, inclinée de côté, le fixait de ses yeux jaunes.

— Tout doux, lâcha le garçon en articulant.

Lentement, il reposa le baril de poudre devant lui et s’en écarta prudemment, les mains en évidence devant lui. Le pokémon ne paraissait pas agressif, mais mieux valait être posé pour éviter un bête incident. Lyco cligna des yeux, et remarqua que le pokémon en question — il aurait parié n’importe quoi que c’était celui qu’ils avaient aperçus à Bhataïs pendant le vol de Kesner — était balafré de partout. Une cicatrice, d’apparence récente, zigzaguait sur son poitrail, et d’autres plus petites écorchaient ses pattes.

Sans parler de la chaîne qui le reliait à un poteau planté à quelques mètres de là, derrière un rocher. Un rocher qui, même dans l’obscurité, était étrangement noir. Probablement autrefois soufflé par un lance-flamme.

— Ils te maltraitent, c’est ça ? comprit soudain Lyco. Kesner, et les autres, ils te font du mal ?

Il parlait lentement, pas trop fort, afin d’être compris. Il savait que les pokémons comprenaient mieux les hommes que l’inverse ; mais il ignorait à quel point. Rarement il avait tenté de communiquer avec eux, même dans ses souvenirs les plus lointains. Il avait été habitué à les chasser et les traiter comme du gibier plus que comme des partenaires.

Le drakkarmin s’approcha d’un pas. La chaîne tinta légèrement. Il souffla par les naseaux, et un air chaud atteignit le garçon. Était-ce de l’approbation ? Ou un signe de nervosité ?

Lyco avança sa main, tendu. Il n’y avait qu’un moyen de savoir si ce drakkarmin pouvait les mener à leur perte, ou, au contraire, leur servir.

Il espérait seulement que dans le pire des cas, il serait assez rapide pour éviter les crocs de la bête.