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Calendrier de l'Avent 2018 de Comité de lecture



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» Auteur : Comité de lecture - Voir le profil
» Créé le 13/12/2018 à 18:12
» Dernière mise à jour le 13/12/2018 à 18:12

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Jour 13: Jusqu'à ce que la mort nous réunisse, par ShiroiRyu
Flocensia, une ville-état. Une ville si grande, si belle, si majestueuse, si impressionnante … mais si isolée. Vivant en autarcie complète, coupée du monde par d’immenses montagnes verglacées, il était tout simplement impossible de s’y rendre provenant de l’extérieur … et nul ne pouvait y échapper de l’intérieur. Couplé à tout cela, un blizzard permanent balayait les rares environs de la ville, empêchant même les habitants d’y voir quelque chose.

Dans cette ville, deux familles majeures s’affrontaient sans cesse. La première était celle des Kaimorsand. Plus riche que sa rivale majeure, elle possédait une bonne partie des bâtiments de la ville, gérant à l’échelle de tout Flocensia ou presque l’économie de celle-ci. De l’autre côté, la famille Lokhaire gérait tout l’aspect politique. Dès qu’il y avait un problème social, elle était là pour régler les conflits. Avec des membres efficaces, d’une grande beauté et appréciés, le seul conflit qu’elle n’arrivait pas à résoudre était celui millénaire avec la famille Kaimorsand.

Si les adultes continuaient de se battre en permanence, il en était de même pour les enfants. Et de nombreuses échauffourées faisaient souvent l’oeuvre de discussions parmi les citoyens de Flocensia. Si bon nombre d’entre eux étaient simplement issus de familles mineures qui oeuvraient plus ou moins pour les deux plus grandes, d’autres étaient des habitants on ne peut plus normaux.

« Ben alors, Lédia, tu en mets du temps, tiens, prends ma main ! »

Dans ce climat de conflit permanent, seuls deux enfants se réunissaient en cachette pour jouer ensemble. Deux enfants d’une douzaine. La fille unique du seigneur des Lokhaire, Lédia, était de toute beauté, comme sa famille. De longs cheveux couleur azur et argenté, une taille fine dont émanait une grâce indéniable, il était difficile de pouvoir regarder dans ses yeux saphir plus de quelques secondes avant de détourner le regard.

Toujours parée des plus beaux atours, elle semblait comme intouchable et nul ne pouvait espérer obtenir sa main sans un dot des plus conséquents … Pour autant, malgré cette beauté qui irradiait d’elle, elle restait une jeune fille des plus simples, semblant sourire, rire et vouloir jouer avec les autres enfants, ce qui n’était pas possible vu que ses proches, que ça soit sa famille, ses cousins et autres, évitaient à tout prix de la laisser ne serait-ce que se rapprocher d’un élément dangereux et disgracieux, que cela soit un objet du décor dans les ruelles … ou alors tout simplement d’une personne.

« Je suis désolée, c’est que … tu es sûr que c’est assez stable, Wélan ? »

À contrario, Wélan portait bien les attributs de la famille Kaimorsand. Souvent paré de vêtements plus utiles que chic, il avait un visage plutôt boudiné, ayant clairement un surplus pondéral qu’il était difficile à ignorer. L’enfant aux cheveux blancs avait des yeux dorés, peut-être la seule chose que l’on pouvait considérer de beau chez lui. Pour autant, contrairement à ses frères et sœurs, il possédait plus un côté espiègle que manipulateur, comme le serait un membre de sa famille.

Le plus important était néanmoins sa capacité à aimer se mettre en danger inutilement, quitte à se faire quelques blessures stupides propres à sa jeunesse. Malgré son physique bedonnant, l’enfant semblait des plus sportifs, appréciant l’escalade, la course et toutes ces choses qui étaient bonnes pour se dépenser, comme s’il possédait une réserve d’énergie inépuisable et intarissable. Ce qui semblait être encore le cas aujourd’hui.

Wélan était juché sur une caisse en bois, elle-même déposée sur une autre caisse plus grosse et ainsi de suite. Il y avait bien deux mètres de hauteur entre lui et la jeune fille, l’enfant venant s’accroupir en tendant sa main. A côté de Lédia, deux petites créatures oranges, ressemblant à des demi-losange sur pattes et aux yeux bleus, sautaient sur place, poussant des petits cris inquiets.

« Mais non, vous en faites pas, vous devriez avoir confiance en moi et… oh ! Tu tiens bien fermement hein ? »

« O… Oui, Wélan. Tu … Tu peux tirer. »

Et c’était ce qu’il était en train de faire, tirant de toutes ses forces pour tenter d’emmener la jeune fille à ses côtés. Pour autant, à force de sueur ou alors était-ce à cause du froid, la caisse était glissante et le jeune garçon poussa un cri de surprise en sentant que ses pieds quittaient la caisse. Mais sur le coup, il pivota sur lui-même, tombant au sol lourdement de tout son poids.

« Aie, aie, aie … Lédia, est-ce que ça va ? »

« Plus de peur que de mal, Wélan mais euh … C’est devenu une habitude, non ? »

Elle disait cela en rigolant, rougissant faiblement puisqu’elle était sur le ventre du jeune garçon. Ce n’était pas la première fois qu’ils tombaient à cause des excentricités de Wélans mais cela ne semblait pas déranger Lédia alors que Wélan disait d’une voix un peu intimidée :

« Je ne vais pas te faire croire que c’est fait exprès alors que ça ne l’est pas, je peux te le promettre, hahaha ! Enfin, promis juré, même ! »

« Je le sais bien, même si tu trouves toujours le moyen de nous faire avoir quelques blessures, hihihi ! »

« Désolé, désolé. Surtout que je sais à quel point tes parents n’apprécient pas que tu sois sale. »

« Mes parents m’empêchent de respirer, c’est vraiment embêtant des fois. J’aimerais vraiment pouvoir souffler de temps en temps. »

« À qui le dis-tu, Lédia. Je n’ai vraiment pas envie que l’on s’amuse en secret tous les deux mais si on ne fait pas ça... »

« Qui sait ce que les adultes et les autres vont penser de nous. Je ne veux même pas y réfléchir ! »

« Et dire que tout ça, c’est grâce à vous deux ! » s’exclama l’enfant ventripotent en se tournant vers les deux Stalgamin. Les deux pokémon se frottaient l’un contre l’autre, amoureusement alors que Lédia soupirait de joie :

« La petite poursuite, le choc et surtout moi qui fût projetée en arrière. »

Hahaha ! Il rigole légèrement, rouge de gêne une nouvelle fois. En même temps, ils ont peut-être le même âge mais pas du tout la même carrure. Enfin bon, le simple fait de poursuivre son pokemon qui avait été attiré par l’odeur de celui de Lédia, une Stalgamin femelle, cela en disait long.

Il avait alors bafouiller quelques excuses avant de comprendre de qui il s’agissait. Néanmoins, cela ne l’avait pas empêché de faire un grand sourire qui se voulait rassurant, lui demandant si elle allait bien. Il avait alors fait connaissance, Wélan ayant compris que Lédia était une habituée des « fuites » et cela malgré ce que disaient ses proches.

« Ils disent que les Kaimorsand veulent la mort de notre famille des Lokhaire pour asseoir la domination sur Flocensia. »

« Je ne peux pas te mentir en te disant que personne ne parle de ça. C’est dans beaucoup de bouches mais en même temps, c’est rien de concret. »

« Si nos familles apprenaient à notre sujet, qu’est-ce qui se passerait, Wélan ? »

« Je crois que nous ne pourrions plus nous voir, Lédia. Tu sais, tu es comme une bouffée d’air pure pour moi. Comme je suis obligé de suivre leurs cours pour gérer l’économie au sou près, je n’ai pas le temps de souffler. »

« Tu sais bien que je comprends à quel point c’est difficile. Si tu es là avec moi, je peux enfin me reposer et être moi-même. J’ai envie d’être libre ! »

« Comme moi, je suis certain que tu aimerais sortir de cette ville, hein ? »

« Ooooh ! Tu crois que c’est possible ? » demanda la jeune fille avec de grands yeux saphir ouverts, émerveillée à cette idée, son visage proche de celui du jeune garçon.

« Bien entendu ! Brrr, c’est moi ou alors, il commence à faire sacrément froid ? On devrait peut-être plutôt penser à rentrer, non ? »

ll devait trouver une excuse pour se séparer d’elle car à défaut d’avoir froid, il avait de plus en plus chaud aux joues. Car oui, depuis qu’ils étaient tombés, elle ne semblait pas se décider à quitter cette place si chaleureuse et imposante qu’était le ventre de Wélan.

« Je n’ai pas vraiment froid, moi… et puis, tu as vu nos pokémon ? Ils ne veulent pas se séparer tout de suite, non ? »

« Je sais bien, Lédia. Je le sais ... »

Il ne termina pas sa phrase puisqu’elle venait de le couper dans son élan, l’embrassant sans aucune hésitation. Clignant des yeux plusieurs fois, se demandant si tout cela était réel, il resta parfaitement immobile jusqu’à ce qu’elle stoppe le baiser, quelques secondes après.

« Je n’ai pas envie … de partir, Wélan. »

« Euh ben euh …. ben euh… quelques minutes de plus alors. »

Il n’était pas du genre à se plaindre. Surtout en vue de ce qui s’était passé. Un bref regard sur la jeune demoiselle sur lui et il comprenait que non, elle n’avait pas fait ça par erreur. Elle l’avait bien embrassé en son âme et conscience.

Et d’ailleurs, en jetant un œil aux deux pokémon, ces derniers semblaient ravis que leurs maîtres réagissent de la même manière qu’eux. Ahlala … Et avec cette neige qui tombait peu à peu sur eux, ils allaient vraiment avoir froid.

« On fera vraiment mieux d’y aller maintenant, Lédia. »

« Je sais bien mais … je ne veux pas. »

« Nous ne sommes pas encore des adultes, Lédia. Quand ça sera le cas, ils ne pourront pas nous empêcher de nous revoir quand nous le désirons ! »

« Tu crois vraiment … qu’ils vont accepter ça ? »

« Ils n’auront pas le choix, hahaha ! En tant que futur chef de la famille des Kaimorsand et toi des Lokhaire, ils seront bien obligés d’accepter. »

« Un premier pas vers la paix … hihihi … où nous n’aurons jamais à craindre d’aller dans la rue. Cela serait vraiment merveilleux. »

Et c’est bien pour ça qu’il en parle ! Car il espère vraiment réaliser un tel projet. Il sait bien que la famille de Lédia est plus … dispensable que la sienne. Oui, c’est le terme utilisé par les adultes de sa famille. Ils sont plus là pour faire bonne mesure et bonne figure.

Ils n’ont pas la puissance et les capacités pour mettre à mal sa propre famille, c’est pourquoi ils s’opposent principalement par des mots, rarement par des actes bien que ça existe. S’il épouse Lédia, elle sera en sécurité et surtout, ils pourraient former une seule famille réunie. Cette idée lui a traversé l’esprit bien avant le baiser offert par Lédia mais maintenant… Elle est revenue avec plus de volonté qu’auparavant !

« Nous allons nous séparer, Lédia. On se retrouvera dans quelques jours ? Au même endroit que d’habitude, qu’est-ce que tu en dis ? »

« D’accord, d’accord ! Je vais … euh tenter de parler discrètement de tout ça à mes parents. Pour voir si … c’est possible de faire la paix. »

« Je ne me fais pas trop d’illusions mais je vais tenter aussi. Au revoir, Lédia. »

Il ne sait pas trop ce qu’il doit faire. Il a ses mains sur celles de Lédia, la regardant doucement et tendrement dans les yeux. Les Stalgamin les observent avec insistance, comme pour attendre quelque chose. C’est lui l’homme !

Et donc pour ça, il doit agir en tant que tel. Voilà qu’il rapproche son visage de celui de Lédia qui a aussitôt fermé les yeux, tendant les lèvres avec visiblement une certaine impatience. Il l’embrasse un peu plus longuement et de façon plus appuyée avant de se séparer d’elle, chacun prenant son Stalgamin dans ses mains avant de s’en aller de son côté.

« S’acoquiner avec ces porcs de Kaimorsand ?! JAMAIS MA FILLE ! »

« Mais père, je suis certaine que si nous leur tendons la main, ils... »

« Nous prendront le bras tout entier, oui ! Ils sont ainsi et ça ne date pas d’hier ! Il en est tout simplement hors de question ! Fin de la discussion ! On va plutôt parler de choses plus importantes ! Où est-ce que tu étais encore ?! »

« Mais mais mais … J’étais en train de te demander quelque chose et …

« Je t’ai déjà répondu ! A toi de me répondre ! Ce n’est pas la première fois que tu échappes à la surveillance des personnes que j’ai mises à ta disposition ! »

« Je ne faisais que jouer avec ma Stalgamin. Elle a l’habitude de fuir, c’est tout ! Mais père, je suis vraiment certaine que si nous leur tendons la main, ils... »

« Combien de fois je vais devoir me répéter ?! Il en est hors de question ! Avec leurs pokémon grotesques, comme ces Mammochons, pour transporter leurs marchandises, qu’est-ce que tu veux espérer d’eux ? »

« Je suis certaine que … Mère, s’il vous plaît, aidez-moi. »

« Ma fille, je suis d’accord avec ton père. Tu es beaucoup trop jeune. Tu es l’héritière de notre famille, tu sais très bien que je ne peux plus avoir d’autres descendants. Il faut que tu fasses attention à ne plus être seule dorénavant. »

Mais ce n’était même pas le sujet dont elle voulait parler ! Pourquoi est-ce que personne ne voulait l’écouter ? Elle regarda ses deux parents. Ils devaient avoir la quarantaine ou alors en étaient très proches. Tous les deux d’une extrême beauté, sa mère possédant des cheveux bleus, son père des chevaux blancs, elle avait hérité la grâce naturelle de sa famille et la chevelure de ses deux parents. Elle commença à renifler bruyamment, bredouillant :

« Pourquoi est-ce que personne ne veut m’écouter ? »

« Ce n’est pas que l’on ne veut pas, ma fille. Mais tu es bien trop naïve pour croire que ces personnes sont aptes à la discussion. Ils n’ont que l’argent à la bouche, ne cherche qu’à faire du profit au détriment des citoyens et à posséder le monopole de tout ce qui se trouve dans notre magnifique ville. »

« Mais je suis certaine qu’ils ne sont pas tous comme ça ! »

« Tu es vraiment trop candide, ma fille. Ils sont perfides et manipulateurs. Nous te le promettons. Nous ne faisons que cela pour ton bien. »

Sa mère veut se montrer douce et rassurante. Elle passa une main dans la chevelure de la jeune fille, cherchant à la rassurer avec une extrême tendresse, comme à son habitude. Elle n’a pas à s’en faire, loin de là. Ils vont veiller sur elle, comme toujours. Ils doivent rester unis s’ils veulent pouvoir survivre face à ces abominations qui composent cette famille rivale de la leur depuis maintenant des siècles.

« Père ? Puis-je vous parler d’une affaire sérieuse ? »

« Tu veux enfin monter ta propre entreprise ? A ton âge, il serait enfin temps que tu t’éveilles. Enfin bon, mieux vaut tard que jamais. »

« Non, non. Je voulais vous demander : Quelles sont nos relations avec la famille Lokhaire ? »

« Depuis quand tu t’intéresses à ça ? T’es le genre à ne pas aimer les conflits. C’est étrange que tu me poses une telle question, tu sais ? »

« Oh, simplement que je me disais que cela avait trop duré. Ils ne sont toujours pas prêts à collaborer avec nous, c’est bien ça ? »

« Toujours pas. Ils ne savent pas ce qui est bon pour eux, ces idiots. Ils ne comprennent vraiment rien. C’est dommage mais c’est ainsi. On ne peut rien y faire malheureusement. »

« Quand des personnes sont aussi bornées, il est difficile de les faire plier. Je me demandais : et si nous faisions un geste vers eux ? »

Son père ne chercha même pas à lui répondre, le regardant d’un air suspicieux. Avec sa moustache blanche sur son visage boudiné, il donnait l’impression d’avoir déjà la soixantaine et pourtant … il était bien loin du compte, n’ayant qu’un peu plus d’une trentaine d’années environ. Il semblait attendre la suite des propos de son fils.

« Simplement, leur proposer de travailler ensemble, sans leur faire payer des intérêts ou autres, cela nous permettrait alors de gagner leur confiance. Si nous montrons que nous sommes de bonne volonté, peut-être que nous pourrons nous attirer leurs faveurs. »

« Ce sont des mijaurées. Seulement bons à se plaindre et à se coiffer, il n’y a rien à gagner de leur part, loin de là. Je vois même pas où tu veux nous emmener avec cette conversation. »

« Peut-être que si nous leur montrons que nous ne sommes pas aussi… obtus, ils nous feront confiance. Et imaginez en même temps ce que cela serait d’avoir l’opinion public de notre côté. Cela nous donnerait une meilleure image. »

« Ah ! Cela nous importe peu, mon fils ! Ce que ces gens pensent de nous n’a aucune incidence sur notre économie. Comme nous gérons plus de 95 % des bâtiments de Flocensia, ils sont obligés de venir chez nous et de travailler pour nous ! »

« Je vous demanderais juste d’y réfléchir, père. Je vais me retirer. »

L’homme ventripotent hocha la tête, saluant son fils par là qui décidait alors de s’éloigner sans plus de conversation. L’observant partir, il attendit quelques secondes avant qu’un autre homme ne rentre, aussi épais que le chef de la famille Kaimorsand.

« Surveillez-le moi. Je veux que le moindre de ses mouvements soit connu. Je ne sais pas où il a eu cette idée stupide mais il y a des chances qu’il fasse manipulé. Vraiment… Il ne veut pas comprendre que je fais ça pour lui. J’ai déjà perdu ma femme de cette manière. » soupira l’homme à la moustache touffue alors que l’homme en face s’inclinait avant de partir.

Les jours passèrent et les deux enfants réussirent à se retrouver, en cachette, comme auparavant. A la discrétion de tous et de toutes, voilà qu’ils s’étreignaient, Wélan faisant un petit sourire à Lédia avant de lui dire de fermer les yeux :

« J’ai une surprise pour toi. »

Elle s’exécuta, sentant les doigts gonflés de Wélan se poser sur son cou, passer derrière celui-ci pour arriver dans sa nuque. Lorsqu’elle pût rouvrir ses yeux, elle remarqua le collier argenté au niveau de son cou, mais surtout une larme cristallisée qui pendait. Magnifique ouvrage, il était d’une qualité indéniable et d’une beauté remarquable.

« Mais co… pourquoi ? Je... »

« Bon anniversaire à toi, Lédia. » déclara simplement Wélan dans un léger sourire, gêné mais plus qu’heureux alors qu’elle balbutiait :

« Mais je ne t’ai pas… enfin, tu n’es… comment tu le sais ? »

« Eh bien, ça parle beaucoup de tout ça, hein ? Je veux dire, dans les rues, dans les magasins et tout. Donc, je voulais faire quelque chose de vraiment spécial. »

« C’est juste… splendide. » finit-elle par dire avant de se jeter à son cou. Malgré la corpulence du jeune garçon, il recula sous la surprise, la réceptionnant avant qu’elle ne l’embrasse maintes fois sur le visage. « Je te promets de le garder pour le restant de ma vie ! »

« Et plus encore, hahaha. C’est ma façon à moi de me faire pardonner. Mon père n’a même pas voulu m’écouter. »

« Je veux bien te croire. Il en est de même pour les miens. » murmura la jeune fille, un voile de tristesse parcourant ses yeux en larmes, remplaçant celles de joie par quelques pleurs bien réels, propres à leur situation.

« Je ne sais pas pourquoi… on ne peut pas être heureux comme nos pokémons. Quand tu les regardes, ils sont si… joyeux. »

« Héhéhé. Tu as remarqué à quel point ils se font des baisers plus appuyés maintenant ? Comme s’ils avaient moins honte de leur amour. »

Il rigola en même temps qu’elle. Il n’avait pas le coeur à faire autre chose qu’à la garder auprès de lui. Doucement mais sûrement, sa main caressa les cheveux de la jeune fille avant qu’il ne vienne la serrer contre son corps.

« Je suis vraiment gros… désolé. » dit-il, comme si pour la première fois, il voyait le problème de son organisme. Elle releva son visage pour voir le sien, chuchotant :

« Ça en fait plus à aimer. Tu es très bien comme ça. Et si as un tel physique, c’est tout simplement parce qu’il faut de la place pour ton coeur. Tu tiens plus du Polagriffe ou du Blizzaroi que des Kaimorse, je tiens à te le dire. »

« Héhéhé, le Kaimorse est le symbole de notre famille principale. Mais oui, il est vrai qu’on a aussi les Polagriffe et les Blizzaroi. »

« Et de mon côté, les Lokhlass, les Sorbouboul et les Lippoutou. Tiens, tu as jamais remarqué, les symboles pokémon de nos familles s’opposent complètement. »

« Oui, d’un côté, nous avons les pokémon assez mastoc et des vôtres, vous avez les pokémon super mignons et tout. »

« Mais en même temps, tu aurais largement ta place parmi nous. »

« Je ne suis pas si certain que ça, hahaha. Mais ne t’en fait pas, un jour, la question ne se posera plus. Toi comme moi, nous formons une seule et unique famille. »

« Que… Euh … Nous… déjà ? Tu es sérieux ? » dit-elle en bafouillant, le rouge montant sur la globalité de son visage alors qu’il hochait doucement la tête :

« Je suis plus que sérieux. Mon père m’a souvent raconté que lui et ma mère se sont rencontrés très jeunes et qu’il lui avait fait sa demande. Mais euh … C’est vrai qu’en même temps, comment dire, toi et moi, nous allons peut-être très vite, hahaha. C’est quand même assez exceptionnel, tu ne crois pas ? »

« On prendra le temps qu’il faudra mais tu m’en fais la promesse ? »

« Oh, ne t’en fait pas, elle est déjà faite … mais elle sera officielle quand je me tiendrais devant tes parents et les miens, pour qu’ils comprennent. Il faut juste que tu sois patiente, est-ce que tu peux l’être ? »

« Hihihi ! Bien sûr que oui ! J’ai eu le plus beau cadeau de toutes ces dernières années ! Rien ne pourra jamais remplacer ce collier ! Merci ! »

« Par contre, en situation moins joyeuse, je ne vais pas pouvoir rester plus longtemps. Je sens que ma famille me surveille et si je mets beaucoup trop de temps, ils vont commencer à limiter mes mouvements. Je vais devoir y aller dès maintenant et... »

« Ne t’en fait pas, je comprends parfaitement. » coupa t-elle tout en l’embrassant, récupérant sa petite Stalgamin alors que Wélan faisait de même de son côté.

Quelques instants plus tard, il était au beau milieu d’une ruelle, recouvrant son corps d’un épais manteau de fourrure bleu. Il se frotta les bras, frissonnant un peu avant de lever les yeux vers le ciel, déclarant :

« Brrr, j’ai l’impression que ça ne s’améliore pas, niveau temps. Le blizzard va être encore plus rude cette année. C’est bientôt le jour des fêtes. Dommage que tout le monde soit séparé à chaque fois. Une fête immense serait tout simplement géniale ! »

Peut-être qu’en parlant de cela à son père, encore une fois, il pouvait espérer réussir à le convaincre ? Une fête où toutes les familles majeures et mineures étaient réunies. Avec des festivités et tout ! Des danses, de la nourriture et tout le reste ! Il était certain que ça conviendrait à tout le monde ! Il devait y croire !

Et il avait bien fait ! Difficile d’imaginer tout ceci mais son père avait accepté ! Une fête allait avoir lieu ! Oh, pas exactement comme il l’espérait mais c’était une bonne chose ! Il devait se dépêcher de la … ah ben non. Elle était déjà sûrement au courant.

Il devait aider aux préparations, il devait se donner à fond pour tout ça ! Une fête gigantesque et immense ! Oh … Euh … Par contre, il avait été mis au courant : Les familles seront toutes là mais ça ne veut pas dire qu’elles seront côte à côte.

Non, ça sera juste une réunion des différentes familles mais ça ne veut pas dire qu’elles vont faire copine-copine comme si de rien n’était. BAH ! Rien que le fait qu’elles puissent se supporter pendant quelques heures, c’était déjà génial.

Et puis même, il était juste heureux, si heureux de savoir que tout allait se passer ainsi ! La fête ! Ça allait être la meilleure des fêtes ! Il n’osait pas revoir Lédia jusqu’à ce jour fatidique ! Oui … Il n’osait pas du tout ! Même si son pokémon réclamait sa petite amie, hey ! Il fallait se montrer un peu patient !

Mais voilà, il trépignait presque sur place jusqu’au jour fatidique, son père n’ayant pas cherché à lui demander ce qui se passait. Des lumières tout autour de lui, des pokémon maniant le temps pour éviter que le blizzard ne vienne s’abattre sur la zone, des tables, des feux de joie, des arbres immenses, des décorations !

« Père, vous avez vraiment mis tous les moyens pour cette fête ! »

« Eh bien, il faut quand même en mettre plein la vue aux autres familles, non ? »

« Hahaha, vous avez raison ! S’ouvrir aux autres mais leur montrer quand même qui est au-dessus des autres, c’est normal ! »

Il n’était pas totalement d’accord avec les dires de son père mais il n’allait pas le contredire pendant les festivités. Le jeune garçon aux cheveux blancs jetait juste un œil furtif. Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, il y avait beaucoup de monde qui provenait des familles oeuvrant pour celle de Lédia.

« C’est super… tout ce monde. »

Il répétait ça simplement pour lui-même avant de dire à son père qu’il allait juste voir un peu autour pour profiter de tout ce spectacle. Son père lui demanda de faire attention quand même, l’enfant signalant que oui.

« Les pokémon sont l’expression de nos sentiments cachés envers autrui. »

Hein quoi ? Il se tourna vers une personne qui lui était totalement inconnue. Pourtant, d’après sa tenue et son allure, il savait à qui il avait affaire. C’était une famille entièrement féminine, puisqu’il s’agissait d’une membre des Lippoutou.

« C’est vous qui allez danser pour la fête de ce soir ? »

« Eh bien… Oui ! Mais je crois bien que tes yeux ne seront pas rivés sur nous. »

« Hein ? Comment ça ? Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? » demanda Wélan avec interrogation alors que la femme a la peau complètement noire lui souriait doucement avant de se rapprocher de lui, chuchotant :

« Ton pokémon ne me porte aucun intérêt. Il ne cherche même pas daigner à me regarder. Ce qui veut dire qu’il attend quelqu’un d’autre et qui a une grande importance pour toi. »

« Oh … Euh, je ne vois pas de quoi vous voulez parler. »

Oui, il valait quand même mieux éviter de le crier sur tous les toits au sujet de lui et Lédia. Mais en même temps, alors que ses yeux se détournaient de la personne en face de lui, ils s’arrêtèrent pour se poser sur une seule. En même temps qu’il accomplissait ce geste, plusieurs murmures se firent entendre :

« C’est vraiment la digne héritière des Lokhaire. Elle est si belle à son âge. »

« Il est dit que ses parents ne lui ont pas encore trouvé de parti. C’est dommage. »

« Hahaha, tu crois vrament avoir une chance avec elle ? Il vaut mieux que tu arrêtes tout de suite. C’est tout simplement beau de rêver mais quand même. »

« Hey, tu es pas obligé de le crier aussi fort quoi ! C’est pas sympathique de ta part, je tiens à te le signaler hein ! Et puis, qui sait ! J’ai peut-être mes chances sans que toi tu t’en rendes compte hein ? Tu aurais l’air malin si ça devait arriver ! »

« Tiens, elle nous regarde ! Oh, elle nous fait un sourire ! Hey ! »

Il était vrai que Lédia avait tourné le visage vers les badauds mais son regard était porté derrière eux, bien loin. Il fallait dire que malgré la situation, le jeune garçon ne cherchait pas trop à se faire remarquer. En même temps, il avait juste la bouche à moitié ouverte, son Stalgamin gigotant dans ses bras.

« Hmmm, je vois, je vois. Pourquoi pas ? Il semblerait que tes intentions soient pures. »

« Euh ben euh … quoi, mada… mademoiselle ? »

Il détourna le regard de Lédia, n’ayant plus le loisir de l’admirer alors que la femme de la famille des Lippoutou était maintenant partie avec un sourire amusé aux lèvres. Bon sang, quelle allure il devait avoir !

Il ne pouvait pas se présenter ainsi ! Enfin, si ! Il avait un costume très chic, cousu sur mesure ! Une magnifique veste bleue avec des boutons de manchette dorés, des boutons de même matériau pour fermer la dite-veste. Le pantalon en toile était un peu tiré par ses grosses cuisses mais là encore, il avait opté pour un bleu ciel en couleur.

Et il ne fallait pas oublier du tout la petite canne en bois. Un vrai travail d’orfèvre de la part de la famille des Blizzaroi. Ah … Il y avait même le bout taillé pour représenter un Kaimorse. Il avait bien noté quelques filles de son âge le courtiser mais … pfiou. Il ne se sentait pas d’humeur à aller converser avec elles.

« Que cette fête soit la première d’une longue série oeuvrant à la paix dans cette belle ville de Flocensia ! Que chacun boit, mange et danse ! »

Malgré les regards suspicieux entre les différentes familles, voilà qu’après quelques minutes, peu à peu, l’ambiance commençait à être beaucoup moins pesante. Une ambiance dont allait profiter très vite le jeune garçon aux cheveux blancs, s’éclipsant pendant une pause entre deux repas pour aller dans un coin discret.

Quelques minutes plus tard, c’était au tour d’une jeune demoiselle aux cheveux bleus et argentés de disparaître de table à son tour, l’air de rien. Bien entendu, elle ne chercha pas à prendre la même direction que l’autre enfant, mais rapidement, elle quittait une ruelle pour en rejoindre une autre jusqu’à ce que deux bras s’ouvrent pour lui permettre de s’y engouffrer. Elle leva son visage vers le propriétaire, ses yeux saphir s’illuminant à cette vue :

« Tu m’as tellement manqué, Wélan ! »

« Je ne peux que déclarer la même chose de mon côté, gente damoiselle Lédia. »

« Hein ? Que … C’est quoi ce langage de ta part ? Est-ce que tu te moques de moi ? »

« Oh, euh bien sûr que non, en fait, c’était juste pour tenter de te complimenter sur ta tenue autrement que par un « tu es très jolie » ! Je trouvais que ça te donnait un air noble et princier. Enfin, digne d’une princesse. »

« Mais tu es très bien aussi dans ta tenue, Wélan, tu sais ? Cet habit te va comme un gant ! Tu es vraiment très beau ! Oups. »

Elle rigola légèrement en comprenant qu’elle venait justement d’utiliser la réplique que lui-même avait évitée soigneusement. Mais il ne vient pas lui en tenir ombrage, C’est même tout le contraire ! Toujours le sourire aux lèvres, il murmure :

« Comment est-ce que tu vas ? »

« Je vais mieux maintenant. Tu as vu ? J’ai encore le collier que tu m’as offert, hihihi ! »

« Tant mieux, non ? Il te va si bien, avec cette tenue, tu es vraiment ravissante. Tu as remarqué ? Tout se passe super bien ! »

« Oui ! Je suis certaine que si on continue à faire des petits évènements nous réunissant tous ensemble, nous pourrons trouver la paix un jour ! »

« Héhéhé… Ah, je voudrais bien passer plus de temps avec toi mais si… on prend trop de temps, ils vont se poser des questions et ça serait bête de tout gâcher, non ? »

« Je suis tout à fait d’accord avec toi. Seulement, avant de partir... »

Elle fermait les yeux, attendant quelque chose de sa part. Comprenant après quelques secondes, il vient alors l’embrasser doucement, puis lorsque leurs lèvres se séparèrent, ils repartirent chacun de leur côté, lui en premier, par mesure de précaution.

« Ouch ! Oh pardon ! Désolée, désolée ! »

Lédia était tombée au sol, ayant percuté quelqu’un d’autre. Bredouillant quelques excuses, elle passa une main sur son cou, remarquant que son collier était tombé. La personne en face d’elle lui tendit l’objet dans un petit sourire. Elle portait une longue crête rouge en arrière, des habits bleu foncés et tenait le collier dans sa main droite.

« Faites donc attention à vous, mademoiselle Lédia. Vous avez fait tomber ceci. »

« Oh merci ! Merci tellement ! Je ne sais pas ce que j’aurais fait sans ce collier ! Il est si important... tellement important. Merci messire ! »

Et elle était partie comme si de rien n’était, toute guillerette. L’homme la regarda s’éloigner, dans un sourire, murmurant :

« Mais il n’y a pas de quoi, mademoiselle Lédia. »

Et la fête battait son plein à nouveau. Les heures s’étaient écoulées mais rien de grave ne s’était passé. Il y avait bien quelques disputes à cause de deux ou trois personnes un peu éméchées mais les familles n’étaient pas en cause.

Pour l’enfant aux cheveux blancs, c’était une réussite. Il avait juste jeté un dernier regard à la jeune fille, lui faisant un petit sourire avant que les familles ne se séparent. Il n’avait aucune idée de ce qui l’attendait demain mais il était certain d’une chose, leur ville allait changer pour le mieux, dorénavant.

« Qu’est-ce que ça veut dire ?! POURQUOI EST-ELLE MALADE ?! »

« Je… Je ne sais pas ! On dirait qu’elle a été empoisonnée mais par quoi ? »

« La nourriture ? La boisson ? Je suis certain que ce sont ces foutus membres de la famille Kaimorsand qui sont responsables ! Cette fois-ci, c’en est trop ! »

Elle avait du mal à respirer. Elle haletait faiblement, le corps en sueur tandis que ses yeux étaient fermés. À son chevet, ses parents étaient présents ainsi que de nombreux médecins. Déjà, le père de Lédia se tournait vers un autre homme :

« Vous deviez vérifier chaque nourriture et boisson qu’elle prenait ! Goûter à chaque plat pour être sûr qu’il ne soit pas empoisonné ! »

« Mais c’est ce que nous avons fait, maître. Vous l’avez même vu de vos propres yeux. »

« Père, ce … n’est rien. C’est juste une… vilaine… maladie qui partira. »

« Oui, ma fille. Ça va aller mieux. VOUS AUTRES ! Trouvez un remède et le plus vite possible ! S’il faut, n’hésitez pas à capturer un membre ou deux de Kaimorsand pour les faire parler ! »

« Mais si nous agissons de la sorte, nous rentrerons dans leurs jeux. »

« IL S’AGIT DE LA VIE DE MA FILLE ! »

Impossible de le calmer. Il cherchait pourtant à rassurer la jeune enfant couchée dans le lit, haletante alors qu’elle se sentait défaillir. Il fallait aller mieux… pour Wélan. Il allait s’inquiéter si elle restait trop longtemps au lit. Elle ne voulait pas le rendre encore plus inquiet que ses parents.

« Père, que se passe t-il en ville ? » demanda l’enfant boudiné en voyant une certaine effervescence, son père étant songeur.

« La famille Lokhaire a montré son véritable visage aujourd’hui. De nombreux membres de notre famille ont été agressés par ces derniers. »

« Hein ? Mais pour quelle raison ? Ils n’ont jamais agi de la sorte auparavant ! »

« Je n’en sais rien mais nous n’allons pas laisser cela impunis. Il en est hors de question ! »

« Père, attendez un peu avant d’agir sur le coup de la colère. Après cette fête, je suis certain qu’il doit s’agir d’une erreur ou d’un cas isolé. »

Il fallait trouver une explication ! Il le fallait… Et pour cela, il ne fallait rien montrer à son père. Il s’inclina devant lui, signalant qu’il allait disposer. Dix minutes plus tard, il était déjà dans les ruelles, camouflé par une capuche assez épaisse comme ses habits. Même s’il avait du ventre, avec la tenue là, il était assez discret.

« Qu’est-ce qui se passe par ici ? Ça en fait du bruit. » dit-il en attrapant le premier homme qu’il rencontrait sur son chemin, un Polagriffe maintenant contre ses puissantes griffes un homme qui devait faire partie de la famille Lokhaire.

« J’en sais trop rien personnellement. C’est que des rumeurs mais il paraîtrait que la famille Lokhaire cherche les meilleurs médecins de la ville. »

« Les médecins ? Mais pour quelle raison ? » demanda le jeune garçon, commençant à avoir une boule dans le ventre, comme s’il avait un mauvais pressentiment.

« Paraîtrait que l’héritière des Lokhaire est gravement malade. On ne sait pas trop mais les membres de la famille Lokhaire hurlent à l’empoisonnement par rapport à la fête. Mais c’est étrange vu que personne d’autre n’a été touché et que même si la famille Kaimorsand, ce n’est pas vraiment ce qu’on peut appeler une famille ayant une bonne réputation, ils ne s’abaisseraient jamais à ce genre de choses, surtout pas sur une enfant. »

« Mer… Merci beaucoup. En espérant qu’elle aille mieux. »

« Y a pas de… ah ben mince. Il est passé où ? » demanda l’homme alors que Wélan n’était déjà plus là, ayant rangé sa cape avec capuche.

Lédia était malade ! Gravement malade ! Il devait trouver une solution pour l’aider ! Trouver le meilleur médecin ! Mais… il n’avait aucune idée. Un empoisonnement ? Étant proche de son père, il savait bien qu’il ne s’abaisserait pas à cela.

Mais le plus important était de trouver le médecin ! Peut-être qu’en parlant à son père, il saurait où en trouver un ? Oui ! Si son père avait accepté cette fête, ça voulait dire qu’il était d’accord pour les aider ! Ça serait le plus merveilleux des gestes !

« Je suis désolé mais je ne peux pas, mon fils. »

« Mais mais mais… pourquoi ? Vous devriez penser à tous les avantages qui pourraient en découler, non ? Réfléchissez-y et... »

« Non, ce n’est pas que je ne VEUX pas mais que je ne PEUX pas… Je vais te demander justement d’y penser plus concrètement. Je ne voulais pas que tu le saches mais tu as bien remarqué que la famille Lokhaire nous tient pour responsables de cette histoire. Si nous trouvons ce médecin pour soigner leur fille, ils nous seront redevables à vie mais ils ont leur fierté et ne n’abaisserons jamais à ça. »

« Pour leur enfant, de nombreux parents seraient prêts à tout. S’il vous... »

« Leur trouver une solution reviendrait à créer des suspicions à notre égard. Comment sommes-nous capables de la soigner en trouvant le médecin qui correspond ? Ils vont alors penser que c’était un plan ingénieux pour… Pourquoi est-ce que tu me regardes ainsi ? »

« Père, est-ce que vous êtes responsable de cette maladie sur Lé… la fille des Lokhaire ? »

« Moi ? Nullement ! Je suis bien trop occupé à devoir gérer l’économie de cette ville pour en venir à de telles bassesses, mon fils. Mais pourquoi est-ce que tu me poses une telle question ? Est-ce que tu es en train d’insinuer que... »

« Non, père, je suis désolé. Je suis juste chamboulé… Simplement, m’imaginer qu’une fille de mon âge puisse être la cible d’un empoisonnement. Qu’est-ce qui se serait passé si cela devait m’arriver ? Est-ce que vous auriez agi de la même manière ? »

« La question ne devrait même pas se poser. Je crois que ça serait bien pire. »

« Voilà. Il faut donc comprendre ces gens et … les aider, du mieux qu’on le peut. »

« Je verrais ce que je peux faire, mon fils, mais ne porte pas tes espoirs trop haut. »

C’était pourtant la seule chose à laquelle il pouvait se rattacher. Quittant la pièce, il devait absolument trouver un moyen de la sauver ! N’importe quelle méthode ! Il devait… Il y avait sûrement une solution. Quelque chose … S’il savait le mal qu’elle avait, peut-être que…

« Je vais y arriver. La solution est toute prête, j’en suis certain. Allez, Wélan. »

Un peu de courage ! Peut-être que dans les livres, il y aurait une réponse ? Peut-être qu’en tendant l’oreille pour les rumeurs ? Le temps était compté ! Il fallait communiquer avec un maximum de gens ! Quitte à ce que ça soit les personnes des familles ennemies ! Non, ce n’était pas des ennemis ! Il ne devait pas voir ça comme ça !

« Hein ? Qu’est-ce qu’un gamin des Kaimorsand veut savoir ?! »

« Mais je… je veux aider ! Je vous le promets ! »

« Disparais de ma vue, vaurien ! C’est de votre faute ! J’en suis certain ! T’as de la chance qu’on nous regarde, sinon, je serais déjà en train de tout faire pour te dépecer ! »

Les gens étaient devenus fous. Il n’y avait pas d’autres explications. Le climat de fête avait totalement disparu alors que les citoyens lambdas, ceux qui ne faisaient partie d’aucune famille majeure ou rattachée à ces dernières, commençaient à se séparer en deux groupes.

Deux groupes bien distincts … comme les familles majeures. Ce n’était pas ça ! Ce n’était pas ça qu’il désirait avec elle ! Pourquoi ? Pourquoi ? Les femmes de la famille Lippoutou ! Il savait qu’elles étaient capables de grande choses ! Avec leur pokémon et tout ! Et il avait fini enfin par réussir à mettre la main sur l’une d’entre elles, la femme le regardant avec de la tristesse dans les yeux :

« Les rouages du destin sont déjà en marche, jeune garçon. Malheureusement, tu ne peux éviter la tragédie qui s’annonce. »

« Je le peux et je le ferais ! Je vais vous montrer ! »

« Trop tard, il est bien trop tard. Le poison qui coule dans les veines de l’héritière va se répandre dans toute la ville. »

« Poison ! Vous êtes donc au courant ! Prévenez alors les parents de Lédia ! Je vous en prie ! Il faut la sauver absolument ! »

« Est-ce que tu aimes vraiment cette fille ? Alors que vos deux familles ne pourront jamais trouver la paix ? Est-ce que tu es certain de tes sentiments ? »

« Sûr et certain. Je… Je suis … amoureux d’elle. »

« Alors même la mort ne pourra pas vous empêcher de vous retrouver, qu’importe ce que vous subirez tous les deux. »

« M… Mort ? Mais mais mais… je ne veux pas qu’elle... »

La femme de la famille des Lippoutou fit un geste de la main avant de disparaître de son champ de vision. Son pokemon devait être dans les environs sans qu’il ne l’ait remarqué. Et lui ? Il était désemparé, son Stalgamin tremblant autant que lui en sanglotant.

« C’est pas possible, c’est juste un cauchemar. Je vais me réveiller de ce cauchemar. »

C’était juste un mauvais rêve. Un rêve dont il devait sortir avant qu’il ne soit trop tard. Un rêve horrible et affreux. Un rêve qu’il détestait plus que tout. Un rêve horrible ! Alors quand est-ce que tout cela allait se terminer ? Quand donc !

« S’il vous plaît, sauvez-la… c’est tout ce que je demande. » implora t-il, tombant à genoux, alors que le blizzard permanent recouvrait ses épaules si imposantes et pourtant si fragiles à cet instant même. Il n’y avait donc … aucune issue ?

Elle était devenue encore plus pâle, amaigrie, ses cheveux étaient devenus cassants mais son visage était toujours aussi beau. Elle respirait à peine mais pourtant, elle tâtonnait avec difficulté quelque chose au niveau de son cou, gémissant :

« Co… Collier… Où… est mon collier... »

« Il est là, maîtresse. C’est un bien joli collier, non ? Mais… »

« Cadeau… amoureux… cadeau... »

Elle avait le sourire aux lèvres alors que la servante lui tendait son collier, doucement mais sûrement. Pour autant, dès l’instant où elle plaça le collier contre son cou, elle poussa un cri déchirant, commençant à cracher du sang alors que déjà la porte s’ouvrait à la volée, d’autres servantes, alertées par les cris, demandant ce qui se passe.

« Je… Je ne sais pas ! Elle m’a montré le collier et je lui ai donné. Elle disait que c’était un cadeau de son amoureux et ... »

« POUSSEZ-VOUS ! POUSSEZ-VOUS ! Collier ?! Comment ça ?! D’où vient-il ?! »

« AAAAAAAH ! Pa… Papa, j’ai mal, j’ai si mal… »

« Retirez-lui ce collier ! ET VITE ! Ma fille, arrête tes bêtises ! »

« Rendez-moi… mon collier ! Cadeau … C’est mon cadeau… d’amoureux ! »

Cadeau d’amoureux ?! Le père força sa fille à retirer ses mains, ce qui n’était pas bien difficile en vu de l’état de l’enfant, regardant l’objet. Il était magnifique, allant parfaitement avec sa fille. Celui ou celle qui avait offert ce cadeau connaissait parfaitement les goûts de Lédia. Aussitôt, le doute s’installa dans ses yeux et il tendit l’objet.

« Faites-le étudier par nos experts ! Le plus vite possible ! Lédia, qui t’as offert ce collier ? Dis-le moi maintenant ! »

« N… Non ! C’est… C’est pas lui ! Je le dirais pas ! »

« Ma fille, je t’en supplie, il faut que tu le dises. C’est le seul moyen de te sauver. »

« N… Non. Si je le dis, vous… allez croire… que c’est lui ! »

« C’est la famille Kaimorsand ! J’en suis certain ! C’est un membre de cette foutue famille ! Ils ont osé faire du mal à ma fille ! Ils vont le payer ! »

Et il n’y avait pas besoin d’attendre les résultats de ce collier pour comprendre ça ! Pourtant, quelques heures plus tard, au chevet de sa fille dont l’état avait empiré, la laissant à peine consciente, les parents écoutaient le bilan :

« Vous aviez raison, maître. Ce collier est empoisonné mais deux substances différentes ont été notées. Il semblerait que le poison ne faisait effet que si elles étaient mélangées. »

Substance ? Poison ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Elle sent la petite Stalgamin contre elle, cherchant à la rassurer alors qu’elle ne peut qu’écouter, sans pouvoir parler. Le collier ? Il était empoisonné ? Mais … depuis quand ?

« D’où vient ce poison ? On peut trouver leurs origines ? »

« Ils ne peuvent provenir que de ce fichu clan d’assassins. Les Dimoret. C’est bien leur genre mais rien qui ne prouve qu’ils ont été acheté par les Kaimorsand. Ils vendent leurs services au plus offrant et ... »

« Ce sont les seuls à avoir les moyens de payer leurs services ! Ce sont eux les responsables ! Ce sont eux qui ont fait ça ! Nous allons utiliser les mêmes moyens qu’eux ! »

« Ah… Euh… Pa… Papa, je… Pas… Kaimorsand… Collier... »

Elle voulait tendre la main vers le collier, le récupérer, mais elle n’y arrivait plus. C’était à peine si elle soufflait quelques mots. Sa main retomba sur le lit, ses dernières pensées étant pour une seule et unique personne. Elle était certaine… que ce n’était pas lui mais… elle ne pouvait pas le prouver. Et dans les yeux saphir de la Stalgamin, le doute avait fini par s’immiscer et s’installer.

Elle était partie… définitivement. Mais il n’y avait aucune cérémonie officielle, aucune déclaration, non, cela avait été le déclenchement d’une vague de répression de la part de la famille Lokhaire et de celles qui l’accompagnait. Qu’importe la ruelle, qu’importe le bâtiment, dès l’instant où un individu affilié à la famille Kaimorsand était repéré, une chasse à l’homme était alors lancée.

Mais en agissant ainsi, ne faisant guère de différence entre les innocents et les coupables, si tant soit peu il y en avait, la famille Lokhaire perdait de son crédit. Mais surtout, elle qui cherchait à mettre la main sur le clan des Dimoret, se heurtait violemment à un mur. Malheureusement pour elle, peu à peu, sa présence au sein de la politique de la ville disparaissait, comme le nombre de ses représentants.

« Viens par là… Tu es bien… la petite Stalgamin de Lédia, n’est-ce pas ? »

Un jeune garçon était à genoux devant une créature conique aux yeux bleus. A côté de lui, une autre était présente, collée à son genou. La Stalgamin semblait dépourvue de vie dans le regard, s’étant enfuie après la mort de sa maîtresse. Et à voir le regard du garçon en face d’elle, elle comprenait qu’il était dans le même état d’esprit qu’elle.

« Tu vas venir avec nous, d’accord ? Je… Je… Je suis vraiment désolé. »

Il explosa en sanglots, la Stalgamin restant parfaitement de marbre alors que l’autre venait pleurer à son tour, comme son maître. Ce dernier était comme incontrôlable, pleurant de plus bel alors que rien n’était fait pour l’empêcher de pleurer, encore et encore. Après cinq bonnes minutes, il passa une main sur son nez, reniflant un bon coup en bredouillant quelques mots, disant qu’il était désolé de la considérer comme un souvenir de Lédia. Il… ne voulait pas penser ainsi mais c’était pourtant le cas et rien n’était fait pour empêcher ça. Le destin lui avait montré qu’il n’y avait aucune possibilité.

Et huit années s’étaient écoulées. Huit longues années où le jeune homme la ville de Flocensia avaient tous les deux dépéris. La famille Lokhaire n’existait plus, complètement anéantie par ses propres agissements et les réactions de la ville à leur encontre. Avec la mort de Lédia, tout avait changé.

La famille Lokhaire n’avait plus hésité à utiliser de la force et de la violence pour arriver à ses fins. Les autres familles, même celles proches d’elle, avaient alors subi ses foudres. Mais tout cela n’était pas resté impuni. Non, la famille Lokhaire avait été déchue de ses nombreux postes dans la politique de la ville, avant de finir assassinée dans ce que les gens avaient alors décidé d’appeler « La nuit de la neige rouge » en vue du sang qui avait coulé ce jour-là. Mais tout cela faisait maintenant déjà quelques années.

« Vous… venez tous les deux ? Ça va être l’heure de se recueillir. »

Il ne parlait plus à deux Stalgamin mais à deux autres pokémon. Un Oniglali et une Momartik. Oui, les deux pokemon avaient évolué avec le temps et étaient visiblement très amoureux. Sur le coup, il avait été jaloux … mais maintenant, il était heureux pour eux.

Ils méritaient d’être heureux contrairement à lui. Oui, sa famille, elle aussi, commençait à péricliter depuis qu’elle avait obtenu les pleins pouvoirs. Et de son côté ? Il avait fondu comme neige au soleil. Dans sa famille, ils étaient généralement obèses et le mot était faible mais dans son cas précis, il avait perdu tellement de poids depuis sa mort.

Il ne pouvait pas s’empêcher d’y penser. Il ne pouvait pas s’empêcher d’y penser. Comment était-ce possible autrement ? Chaque heure, chaque jour, chaque mois, chaque année, il repensait à elle. Elle était gravée dans sa mémoire et son père se désespérait de le voir se marier. Lui à son âge, était déjà en couple depuis cinq ans.

« Père, les citoyens de Flocensia ne sont guère contents des nouvelles directives et taxes que vous venez de mettre en place. »

« BAH ! Qu’ils se plaignent ! Nous sommes la famille qui vient les nourrir, leur offrir du travail et un toit. Nous possédons tous les bâtiments, toutes les architectures et tout l’équipement nécessaire dans Flocensia. S’ils ne sont pas contents, ils n’ont qu’à finir comme ces parias de Lokhaire ! »

« Père, ils ne sont plus là. Ça ne sert plus à rien de remuer le couteau dans la plaie. Nous n’avons rien à y gagner en réagissant de la sorte. »

« BAH ! C’est ce que tu dis, Wélan. Cette famille était une plaie jusqu’au bout. Dire que ta mère m’a quitté pour l’un de ces types là-has. »

« Vous m’aviez dit que ma mère était morte quand je n’avais que deux ans. » demanda lentement Wélan, comme s’il venait d’apprendre quelque chose qu’il n’aurait jamais dû savoir normalement.

« Bah ! C’est du passé de toute façon. Et ta mère n’était qu’une traînée qui était manipulée par de belles paroles de leur part. On n’obtient que ce que l’on mérite en venant me contrarier. Bon, tu n’as pas du travail au lieu ? »

« Si, je vais y aller dès maintenant. Je vais tenter de calmer un peu la foule. »

Son regard s’était assombri alors qu’il quittait la pièce, les deux pokémon le regardant avec attention. Autant son Oniglali s’inquiétait, autant le Momarik l’observait de ses yeux dorés, avec une certaine froideur. Ses yeux se posèrent sur la porte dont il était sorti comme pour la fixer avant de se mettre à le suivre.

« Vous êtes… la dame de la famille des Lippoutou ! Attendez un peu ! Vous allez avoir horriblement froid ! Et votre visage, est-ce que vous mangez correctement ? Vous… Je croyais que tout le monde était mort dans les familles oeuvrant avec celles de … »

« Ne m’approchez pas, s’il vous plaît. Je suis déjà condamnée, rongée par la maladie. »

C’est vrai qu’elle avait une très mauvaise mine. En se dirigeant vers le cimetière de la ville, là où se trouvait la tombe Lédia. Ironiquement, c’était la seule de sa famille à avoir le droit à un tel traitement, tous les autres … qui étaient morts après étaient dans un caveau. Pour autant, ce n’était pas le moment de penser à ça.

La femme de la famille des Lippoutou avait des brûlures causées par le blizzard, des plaies sur le corps, comme si son corps refusait de la soigner, mais aussi quelques boutons sur les bras. Ses habits tenaient plus de la guenille qu’autre chose. Et pourtant, sans aucune hésitation, il posait ses mains sur ses bras avant de dire :

« Qu’est-ce que vous racontez là ! Je vais vous trouver un endroit où vous soigner et... »

« Vous êtes vraiment… différent de votre père, n’est-ce pas ? De votre famille… Vous êtes ouvert aux autres. Vous n’êtes pas bouffi par l’orgueil, dévoré par l’avidité, vous n’avez pas ce regard qui considère les autres comme de simples objets. Pourquoi est-ce que le destin a t-il décidé de vous faire subir ça ? »

« Ne vous inquiétez pas, mademoiselle. Vous en avez déjà fait assez pour moi, je vous promets que je vais vous soigner et ... »

« Non. Il est trop tard. Je le sens au plus profond de mon être. Mon corps est trop affecté pour cela mais vous… vous… pourquoi vous… Non, je vois. Vous ne l’avez toujours pas oubliée, n’est-ce pas ? Vous pensez encore à elle... »

« À chaque jour, à chaque heure, à chaque minute, je… je sais que pour mon père et les autres, pour tout le monde, ce n’était qu’une amourette de passage. Je n’ai jamais osé le révéler à quiconque… car elle était déjà partie… bien trop tôt mais… mais… je vous jure, je l’aimais vraiment ! Vraiment ! »

« Je le sais… je n’ai plus de force mais… je peux encore lire dans ton coeur et dans celui de tes pokémon. La peur, la haine, la colère, la rage, l’ambition, l’avarice, le pouvoir, il y a tellement de choses néfastes dans ce monde… et malheureusement, Flocensia en est envahie maintenant. Il est trop tard… beaucoup trop tard… mais… et si tout cela peut bien se terminer, alors qui sait… peut-être que… Non, il me faut vous dire ceci. Une dernière chose… pour que tout puisse enfin se finir. Ce soir, rendez-vous à cette adresse. Vous y apprendrez la vérité… et je suis… vraiment désolée pour tout ce qui va se passer. Je… suis… dé… so… lée... »

Elle s’était écroulée dans ses bras, sans même prévenir. Mais il avait compris qu’il s’agissait de son dernier soupir. Qu’importe s’il allait avoir froid, il retira son propre manteau en fourrure bleu, épais et imposant, pour le déposer sur le corps de la femme avant de la soulever, pour la mettre dans un coin à l’abri des regard.

Il ne se faisait plus d’illusions. Il savait pertinemment que dans quelques heures, elle allait être trouvée et dépouillée. La ville de Flocensia avait perdu de son éclat le jour où la famille Lokhaire avait disparu de sa surface. Maintenant, il devait respecter la dernière volonté de cette femme… dont il ne connaissait même pas le nom.

L’adresse donnée était celle d’un hangar assez éloigné de la ville. Il avait tout de suite compris qu’il se trouvait dans les quartiers mal-famés et … au final, il n’était pas préparé car dès qu’il arriva là-bas, deux hommes en habits noirs se présentèrent à lui :

« Tu t’es perdu, mon petit ? Tu veux que l’on te ramè... Quoi ? »

« Vaut mieux pas le toucher, tu as vu de qui il s’agit ? Il est sûrement là pour le rendez-vous. Bon, tu peux passer mais tu fais gaffe à tes pokémons. Tu sais où ça se trouve hein ? »

Il hocha la tête positivement, sans répondre, comme pour bien montrer qu’il allait garder le silence. Il n’avait aucune idée de ce qui se passait exactement mais il allait faire comme si c’était le cas. Heureusement, on ne vient pas l’interroger plus qu’il n’en faut et il pouvait avancer. Mais pour se rendre où ?

C’est lorsque la Momartik lui tira doucement le manche qu’il cligna des yeux. Son père… C’était bien son père qu’il voyait là-bas. Est-ce qu’il… non. Il ne devait pas. Son père n’était pas au courant et … avec leur dernière discussion, il valait mieux rester discret.

Et ce fût la Momartik qui vint le tirer encore une fois par la manche, l’emmenant dans un endroit où il était sûr et certain de ne pas être vu. Il ne savait pas du tout comment elle était capable d’une telle chose mais… il n’allait pas s’en plaindre. Il chuchota :

« Tu sais, quand tu es là, j’ai l’impression d’avoir Lédia à mes côtés... »

Il avait ce petit sourire tendre aux lèvres. Il savait bien que ça ne pouvait pas être Lédia mais… il pensait aux propos de la femme de la famille des Lippoutou. Chaque pokemon possède une partie de l’âme de son maître ou sa maîtresse. Est-ce que ça voulait dire que… Il regarda plus longuement la Momartik, celle-ci restant parfaitement de glace en le fixant.

« Alors, satisfait ? Faudrait peut-être commencer à envisager de nous payer hein ? »

« Vous savez très bien que ça sera fait dans les plus brefs délais. Simplement, les citoyens commencent à se faire de plus en plus réticents. Ils n’acceptent pas les nouveaux tarifs. »

« On a éliminé vos adversaires comme le désirez depuis le début. Et vous avez toujours été un… partenaire très plaisant. Néanmoins, au bout d’un moment, le plaisir passe après le travail, si vous voyez ce que je veux dire. »

« Vous aurez votre argent, si je suis venu, c’est pour vous le confirmer, tss. »

« Et attention à qui vous vous adressez. Si vous êtes là, à cette position, c’est grâce à nous, compris ? Vous ne voudriez pas que tout le monde sache à ce sujet, hein ? »

« Le message est bien passé. Vous n’avez pas besoin d’en parler plus. »

« Oh, mais peut-être que si… Déjà avec votre ex-femme, vous avez décidé de vous en débarrasser quand elle vous a abandonné pour un autre homme. Il faut dire qu’entre vos actions et vos fréquentations, c’est à dire nous, hahaha, vous n’étiez pas des plus recommandables hein ? »

« Taisez-vous ! Ne vous avisez plus de parler à nouveau d’elle ! »

« Oh, mais c’est qu’il montre les défenses, le vilain Kaimorse, hein ? Oui, on peut arrêter de parler d’elle … et plutôt parler de la fille des Lokhaire, hein ? Faut vraiment être le dernier des tordus pour vouloir éliminer le premier amour de son enfant en prétextant accepter son idée de fête et en utilisant le cadeau qu’il lui avait offert. Quel père irait jusqu’à surveiller le moindre fait et geste de son fils ? Un peu de poison sur les doigts, un autre sur le collier et le tour était joué ! »

« Les Lokhaire sont des manipulateurs et des menteurs. Avec de belles paroles, ils pensaient le corrompre mais j’ai réussi à les arrêter à temps ! »

« Mais qui tentait vous de convaincre par de si belles paroles ? Vous-même ? Hahaha. C’est bon, on se reverra avec le reste du payement. Mais s’il faut commencer à travailler pour éliminer toutes les personnes qui vous détestent, la liste s’allonge de jour en jour. »

Aucune réponse de la part de son père. Et lui dans tout ça ? Ses yeux fixaient le sol alors qu’il restait caché. Il… Il… n’arrivait pas à le croire. Son père… Son propre père… il avait tué sa mère. Il avait tué Lédia. Il…

« Je… S’il te plaît, tu peux... »

Il avait bredouillé et bafouillé quelques mots à la Momartik. Celle-ci l’avait alors étudié de ses yeux dorés avant de finalement accepter sa demande. Quelques heures plus tard, dans le bureau de son père, il se tenait là, les mains dans le dos.

« Père, pouvons-nous parler tous les deux, je vous prie ? »

« Hmmm ? Je suis désolé, Wélan mais je n’ai pas de temps à perdre aujourd’hui. Alors, des taxes, des taxes, il nous faut des taxes. »

« Père, je n’ai qu’une seule question à vous poser. »

« Alors, pose-là et vite ! Tu vois bien que je suis occupé, non ?! Bon sang, les taxer sur quoi ? Les légumes ? C’est déjà assez haut. Y a bien un moyen de gagner encore plus. »

« Qu’est-ce que cela a fait de tuer une enfant de douze ans, père ? D’ordonner sa mort alors qu’elle ne voulait que vivre en paix dans cette ville vérolée ? Père, qu’est-ce que cela fait de toujours chercher à éliminer ceux qui ne sont pas d’accord avec votre point de vue ? »

Il s’était rapproché lentement mais sûrement de son père, celui-ci s’étant arrêté dans ses réflexions, se tournant vers Wélan, le regard froncé.

« Où est-ce que tu as appris toutes ces choses ? Ah, ces foutus membres des Dimoret. Je savais bien qu’ils me poseraient des problèmes. Tu es encore bien trop immature pour comprendre tous les enjeux de la situation. Quitte mon bureau et je ferais comme si nous n’avions jamais eu cette conversation. »

« Pour mieux me planter dans le dos, n’est-ce pas, père ? Pourquoi avez-vous posé votre main sur la dague courbée qui est sur votre bureau ? »

« Et pourquoi est-ce que tu tiens une épée courte faite de glace dans ton dos hein ? »

Le jeune homme n’avait alors pas cherché à répondre avant de se jeter sur son père. Mais ce dernier avait placé son pied au niveau du ventre de Wélan, le frappant avec violence dans ce dernier pour le projeter au sol.

« Pauvre petit idiot et ingrat ! J’ai fait ça pour que tu ne sois pas aussi stupide que ta mère mais il s’avère que vous ne comprenez rien à la doctrine de la famille ! C’est ça que d’épouser une femme d’une famille inférieure ! Et voilà le résultat : un déchet que je dois appeler mon fils. Mais tu sais quoi, les déchets, on s’en débarrasse ! ADIEU ! » s’écria son père tout en levant sa dague pour chercher à la nicher dans le corps de Wélan.

Mais avant qu’il ne puisse continuer, un poing de glace traversa son coeur, l’extirpant du carquois de graisse dans lequel il était logé. Une poing protégé par un kimono blanc, souillé par le sang maintenant. L’homme se tourna lentement vers l’être à l’origine de cet acte, une Momartik, avant de s’écrouler au sol, mort.

« Je n’ai… jamais aimé ça… père… Pas du tout. Tout ça, c’est de votre faute. Depuis le début, vous êtes responsable de tout ça. »

Mais c’était fini … et il n’avait aucun remord envers lui. Non, le seul remord qu’il avait, cela avait été de ne pas être aux côtés de Lédia, jour et nuit, comme il lui avait promis. Il s’éloigna, sans un mot, ni un geste vers son père.

La mort du chef de la famille Kaimorsand sonna comme une délivrance pour la ville. On lui avait alors attribué le rôle qui lui était destiné. Il avait aussitôt abaissé les taxes, que ça soit du côté des habitants mais aussi du côté des marchands. Il en était de même pour les membres de la famille Kaimorsand mais aussi les familles inférieures. Le changement était radical et complet. La ville pouvait respirer à nouveau.

Oui… Tout était bien qui finissait bien. Lui-même était assis derrière son bureau, en pleine nuit, la seule lueur étant celle d’une bougie. Des mouvements dans l’ombre, un, deux, trois à l’intérieur, mais bien plus à l’extérieur. Des êtres à la crête rouge, viciés jusqu’au bout des griffes qu’ils possédaient.

« Ben alors, on a oublié que lorsqu’un membre de la famille disparaît, les dettes vont aux autres membres encore en vie ? » déclara l’une des ombres, Wélan ne bougeant pas de sa position, toujours assis sur son fauteuil, dans son bureau.

« Vous étiez attendus, vous tous. Normalement, le moment où nous parlons, ceux qui restent dans votre quartier principal doivent déjà être morts. »

« Qu’est-ce que tu es en train de racon… Hey, attends un peu. »

« C’est quoi cette blessure à la nuque ? On dirait une trace de morsure ! »

« Je ne pourrais jamais vous pardonner… comme je ne pourrais jamais me pardonner. Mais si ma chair et mon sang peuvent la galvaniser, alors, je vais vous emporter avec moi. »

« AAAAAAAAH ! » hurla une voix dehors, avant qu’un corps ne traverse la fenêtre, de nombreux trous dans la chair l’ayant tué. Les trois assassins de la famille des Dimoret se regardèrent avant de voir une être fantomatique voler à travers l’ouverture de la fenêtre brisée. Son masque blanc est taché de sang, comme son kimono avant qu’elle ne disparaisse de la vision des trois assassins.

Nulle description ne pourrait convenir à la boucherie engendrée. Cela n’était pas l’oeuvre d’un pokémon ou d’un humain, mais d’un démon. Un démon engendré par la vengeance et la haine, un démon crée des mains de l’homme, fauchant et balayant ceux qui sont à son origine. Et tout était enfin terminé.

« Voilà… Une bonne chose qui est faite. Flocensia a tellement souffert … mais aujourd’hui, elle peut renaître. Ah… Ah… Ah… Je ne serais pas là pour voir cela. »

Il avait fini par se lever, lentement, très lentement. Son corps lui obéissait à peine, signe que la perte de sang au niveau de la nuque était beaucoup trop importante pour ne pas l’affecter. Pourtant, c’était à peine s’il passait ses doigts sur la plaie, comme s’il avait été mordu par une bête sauvage. Il se dirigea vers la fenêtre, la Momartik se plaçant à côté de lui alors que l’Oniglali faisait de même.

« Je ne voulais pas… que tu sois souillé par tout ça, pardonne-moi. » dit-il à l’encontre de ce dernier, la sphère lévitant au-dessus du sol et aux yeux bleus, faisant un petit mouvement de son être pour signaler qu’il comprenait. « Quant à toi, je suis… prêt pour cela. Il ne reste plu qu’une personne à qui j’en veux pour la mort de Lédia. Je suis prêt. »

Il s’était finalement tourné vers la Momartik, fermant les yeux, acceptant son destin. Il avait une légère pensée pour cette femme de la famille des Lippoutou. Si lui suivait le cours du flot de son avenir, il avait voulu dériver celui de Flocensia. En agissant ainsi, peut-être qu’il y aurait un avenir pour la cité. Un avenir sans lui.

Il sentait le souffle glacé de la Momartik sur son visage. Elle allait retirer son masque et le mordre. La gueule de la Momartik allait mettre un terme à son existence, comme il le désirait. Mais ce n’était pas une gueule qui vint s’abattre sur son cou mais des lèvres tout ce qu’il y avait de plus humaines. Rouvrant les yeux, il croisa le regard de la Momartik, clignant des yeux plusieurs fois avant de murmurer :

« Lédia… C’était bien… toi… Je suis si heureux… Je vais enfin te retrouver... »

Un sourire se dessina sur le visage du jeune homme en même temps que les larmes coulaient sur ses joues. Sa peau commença à prendre une coloration de plus en plus blanche, ses sourcils se mettant à geler comme ses cheveux.

« Ne me quitte plus… plus jamais… je ne pourrais… pas le supporter une nouvelle fois. »

Ses mains vinrent étreindre la Momartik, lentement, très lentement, comme si son corps se refusait à se mouvoir. Puis plus aucun geste. Il ne bougeait plus. Le sang avait totalement disparu de son cou, comme si quelqu’un ou quelque chose l’avait nettoyé.

Le corps de la Momartik disparut des bras du jeune homme, la créature spectrale commençant à bouger lentement ses doigts, façonnant de ses doigts une nouvelle statue de glace, à l’emplacement où elle se trouvait. Une forme féminine, imaginée de toutes pièces par la Momartik. Une magnifique jeune femme aux longs cheveux azur, magnifiée par la glace.

La Momartik se tourna alors vers l’Oniglali, passant par la fenêtre pour disparaître au loin, avec lui, sous les cris de stupeur d’un massacre dans les ruelles. En pénétrant dans le bureau de Wélan, les membres de la famille Kaimorsand ne pouvaient que voir cette statue de glace représentant deux êtres liés pour l’éternité, sans savoir que l’une d’entre elles était un corps fait de chair et de sang à la base.

Après la mort des membres du clan des Dimoret, la paix était définitivement revenue dans Flocensia. La mort de l’héritier des Kaimordsand avait mis un terme définitif à la puissance des familles majeures et dorénavant, il avait été décidé que nulle famille ne régnerait en maîtresse sur la ville.

Les habitants, malgré le blizzard, avaient aussi commencé à creuser la montagne dans les alentours, usant de leurs pokémon. Un monde extérieur s’offrait à eux mais pour cela, il fallait travailler la pierre et la terre. Peu à peu, la ville retrouvait sa grandeur d’antan et brillait de mille feux.

La statue représentant un couple d’amoureux avait été baptisée au nom de Wélan et Lédia. Bien que le premier était facile à deviner en vue de la statue portant exactement son physique, la seconde avait été nommée ainsi à cause du regard que se portaient les deux amants. Quelques voix avaient alors déclaré qu’il y a de cela plus de dix ans, deux enfants jouaient fréquemment ensemble, pensant être cachés aux yeux de la population. Dans leurs yeux brillaient un amour pur et sincère, libéré de toute barrière sociale. Pour les gens du peuple, qui n’étaient affiliés à aucune famille, ces deux enfants étaient la représentation de la chaleur émise par des êtres fusionnels, capable de lutter contre les plus froides températures.

Tout ce monde était observé par deux pokémon. Aux côtés d’une Momartik dont les manches variaient en intégralité entre le gris argenté et le bleu azur, un imposant Oniglali était présent, plus colossal et gros que la normale. Sur son crâne, une pointe dorée était présente pour aller de paire avec ses yeux, son menton ayant une couleur blanche au lieu de noir.

Les deux pokémon se tournèrent l’un vers l’autre, l’Oniglali se penchant un peu en avant pour que la Momartik puisse s’installer et se coucher sur lui. Comme un soupir de bonheur émana de la pokémon avant que les deux pokémon ne disparaissent au loin.