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Pokemonis T.2 : L'embrasement de l'Aura de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 09/12/2018 à 08:51
» Dernière mise à jour le 09/12/2018 à 12:23

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Action   Aventure   Présence de Pokémon inventés   Science fiction

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Chapitre 46 : Le pouvoir dans l'ombre
Kashmel



Quand Meika, Furaïjin et moi remontâmes au rez-de-chaussée du manoir, notre petite dizaine de G-Man restants qui avaient réussi à nous rejoindre nous attendaient, anxieux voir désespérés, mais leurs visages s’illuminèrent quand ils virent le Phénix posé sur mon bras droit.

- Ohhh ! S’exclama Lord Balthese. Le voici donc ? Nous avons tous senti son réveil, mais… Vous êtes sûr que nous courons aucun danger ici, Lord Kashmel ?

- Sûr de sûr, Breon, dis-je. Tant que nous sommes proches de lui, nous ne risquons rien.

- Et ceux qui ont retenu les Nettoyeurs dans la ville basse ? Demanda un Lord Raktalin affligé. Nous les avons sentis mourir d’ici, et dans d’atroces souffrances ! Ma femme… Ma femme était là-bas !

Meika et Furaïjin baissèrent les yeux, l’air honteux, et leur attitude de faiblesse m’agaça. Il n’y avait pas à avoir honte de ce que nous faisons, ni des moyens que nous employons. Cela dit, je me rappelai qu’Adéas Raktalin avait perdu son fils Jald récemment, exécuté par l’Empire. Comme il avait perdu le dernier membre de sa famille en la personne de sa femme, je me devais de faire un peu preuve de sympathie… même si elle était factice.

- Ton épouse a choisi dignement de se sacrifier pour retenir notre ennemi, déclarai-je en lui mettant ma main sur l’épaule. Elle n’aurait pas survécu, Phénix ou non. Mais maintenant qu’il est réveillé et en notre possession, grâce à son sacrifice, nous allons pouvoir la venger, elle et tous les autres martyrs tombés pour la cause.

Oui, c’était joliment dit. La colère dans les yeux de Raktalin était toujours présente, mais bien dirigée vers l’Empire à présent. J’aurai peut-être dû lui laisser tuer Six, tiens. Il aurait été ravi et reconnaissant de le faire, vu que c’était elle qui avait capturé son fils pour le livrer à la justice de Jugeros. J’englobai mes G-Man du regard. Outre la famille Balthese au grand complet avec ses quatre membres, il y avait les jeunes Dalrin Voshturein et Védric Kushkan. Viliane, la mère de Védric, se tenait aux côtés d’un Adéas Raktalin éploré. Savelia Fushard, la fille - déjà vieille - de ce grand nigaud de Lord Fushard était là également. Enfin, silencieuse dans un coin de la pièce, se trouvait la jeune Malwen Psuhyox. À part les Balthese, tous avaient perdu un ou plusieurs membres de leur famille. Ils avaient envie d’en découdre, je le sentais dans l’Aura. Maintenant que j’avais le Phénix, tous étaient sûrs de notre victoire. Ces dix là, ainsi que Meika et Gilthis, seront donc les premiers des nouveaux G-Man. Nous serons treize. Un chiffre fort.

- Les Nettoyeurs sont à nos portes, Grand Maître, m’annonça Lady Viliane. On s’est réfugié à l’intérieur du manoir dès que nous avons vu Scalpuraï arriver, avec de nombreux Pokemon.

- Daecheron doit être affolé, fis-je en souriant. Il a sans aucun doute senti le réveil du Phénix lui aussi, et a envoyé son chien enragé nous déloger. Mais peu importe qu’il soit là, et peu importe combien ils sont. Nous sommes invincibles, à présent.

L’assurance et le désir d’écraser les Pokemon que dégageait l’Aura environnante de mes fidèles me combla. Toutefois, l’un d’entre eux ne semblait pas partager cette communion. Je sentis que la jeune Malwen était troublée, et qu’elle n’avait visiblement aucune envie de prendre part au combat. Je m’approchai d’elle, et mis ma main sur son épaule. Alors qu’elle fixait le sol d’un air absent, elle sursauta soudainement et me regarda avec un air craintif.

- Tout va bien, jeune fille ? Je te sens apeurée et confuse.

- N-non… Je veux dire… oui, Grand Maître, je viens bien.

- Tu n’as plus rien à craindre maintenant. Notre victoire n’est qu’une question de temps. Tiens-toi derrière-moi ; tu n’auras rien à faire d’autre que de me regarder écraser les Pokemon.

Malwen acquiesça faiblement. Pendant un court instant, je fus pris de pitié pour cette enfant. Elle devait avoir l’âge de Six, et sa vie avait basculé du jour au lendemain. Sa grande sœur qu’elle admirait avait été tuée, sans que Meika n’envisage de la venger alors que sa meurtrière était connue. Puis elle avait été forcée de se retourner contre ses parents et de les abandonner à la mort. C’était sans doute trop d’un coup pour une gamine de son âge. Mais ce sentiment de faiblesse me quitta bien vite. Cette fille était la dernière des Psuhyox, et devait, tout comme moi, avoir en elle du sang du grand Sacha. Qu’importe son âge ; elle n’avait pas à faire preuve de faiblesse.

- Sois digne de ton nom, enfant, lui dis-je en me retournant. Sois en digne alors que c’est aujourd’hui que notre Ordre va renaître.

Je me présentai devant la porte du manoir, d’où je pouvais clairement sentir les très nombreuses Auras des Pokemon qui m’attendaient dehors, dont plus particulièrement celle de Scalpuraï.

- Restez derrière-moi, et laissez-moi faire, ordonnai-je à mes troupes.

Puis, en souriant, je défonçai la lourde porte ouvragée de mon pied, et m’avança tranquillement sur les marches du manoir. Devant moi, il y avait bien deux cents Pokemon, plus quelques dizaines dans les cieux, qui m’observaient et me visaient. Quand ils me virent arriver, tous se mirent en position d’attaque. Scalpuraï, à leur tête, leva le bras pour leur dire de se retenir, et s’avança vers moi.

- Comme nous nous retrouvons, Kashmel Irlesquo, me dit le Trigarde. Tu as provoqué un beau merdier, et je t’en sais gré, car il a été assez important pour que Sa Majesté me dépêche à ta rencontre.

- Il n’est pas encore assez gros, s’il n’a envoyé que toi, répliquai-je. Mais qu’à cela ne tienne : je vais vite faire en sorte qu’il m’envoie tes deux autres potes et toutes les Etoiles Impériales.

Scalpuraï eut un ricanement métallique.

- C’est cet oiseau en feu sur le bras qui te pousse à une telle confiance insolente ? Il parait qu’il pompe l’Aura environnante pour toi. J’aimerais bien tester ça tout seul ; un beau duel endiablé comme notre dernier… Mais je vais devoir m’excuser d’avance : Sa Majesté m’a ordonné de t’arrêter au plus vite. Je dois donc utiliser tout ce que j’ai contre toi. Ne m’en veux pas.

Scalpuraï claqua des doigts, et aussitôt des dizaines d’attaques de statut fondirent sur moi. Cage-Eclair, Grincement, Toxik… tout ce qui pouvait m’affaiblir autant que possible avant que Scalpuraï et ses gros bras n’attaquent. Je ne fis bien sûr aucun geste pour bouger ou se protéger, et les G-Man derrière moi crièrent mon nom, terrifiés. Mais quand les attaques furent terminées, j’étais toujours debout, n’ayant pas bougé d’un cil, n’ayant même pas cligné des yeux.

- Je vais t’apprendre quelque chose, Pokemon ignare, dis-je tranquillement à un Scalpuraï momentanément pétrifié. L’Aura est dans tout et partout. Elle se trouve aussi dans les attaques Pokemon. Plus un Pokemon est puissant dans l’Aura, plus ses attaques le seront. Et inversement : si l’Aura d’une attaque est plus faible que sa cible, alors elle n’aura que peu d’effet. Proportionnément parlant, le Phénix m’accorde en ce moment même environ… disons… l’Aura de centaines de Pokemon lambdas. Vos piètres attaques ne me feront rien. Les miennes, en revanche…

Laissant ma phrase en suspens, j’aspirai un surplus d’Aura en provenance du Phénix, qui malgré sa taille encore réduite, semblait en être une réserve sans fond. Je manquai d’en perdre la raison et de vouloir me baigner à volonté dans cette mer d’Aura, de ne faire plus qu’un avec elle. Mais il fallait me retenir. C’était bien pour cela que Sacha avait voulu un de ses descendants pour manier le Phénix ; un G-Man lambda, un minimum avide de puissance, aurait eu tôt fait de perdre le contrôle et de s’autodétruire avec toute cette Aura… ou de détruire le monde.

Je n’en pris donc qu’une parcelle, pour lancer une attaque Lame de Roc sur les troupes adverses. Mais ce qu’il en résulta dépassa largement mes estimations. Les pics de roches qui sortirent du sol faisaient trois mètres de haut, et quand ils furent lâchés sur l’armée impériale, près du quart du Quartier G-Man fut détruit. Le choc provoqua un séisme et de multiples fissures. Les Pokemon qui ne furent pas transpercés ou écrasés par les lames de roc chutèrent dans des trous ou furent ensevelis. En une vingtaine de seconde, je vais de tuer près de deux cents Pokémon, en une seule attaque. Ce fut largement suffisant pour que les survivants, notamment les Pokemon Vol, battent en retraite à toute vitesse.

- Oups, fis-je en constatant les dégâts. Je pensais vraiment m’être contrôlé pourtant…

Naturellement, quand je me retournai vers eux, mes G-Man, ébahis, s’inclinèrent à l’unisson comme si Arceus le Père s’était présenté devant eux.

- Mon Seigneur, fit Savelia Fushard avec vénération, votre puissance est sans limite !

- Ce n’était rien comparé à ce que le Phénix peut m’offrir, renchéris-je. Et lui-même n’est qu’à un stade primaire de son développement. Quand il sera à sa taille maximale, je disposerai d’un pouvoir qui me permettrait de recréer ce monde.

Furaïjin passa devant l’air béat des G-Man pour venir se poser sur mon épaule, à sa place habituelle, près du Phénix.

- Tu as eu Scalpuraï ? Me demanda-t-il.

- Non. Je sens encore son Aura. Il a survécu et pris la fuite. Mais c’est sans importance. Il est condamné, comme tous les impériaux de cette cité.

Puis je m’adressai au Phénix, qui continuait à aspirer l’Aura à partir d’un certain diamètre. Il était temps d’accélérer tout cela.

- Si nous commencions ? Toute l’Aura de la capitale est à ta disposition. Prends-là. Grossis, et accomplis la volonté de ton créateur !

À mon commandement mental, le Phénix écarta ses ailes de feu, et nous pûmes tous sentir et même voir les flux d’Aura autour de lui accélérer, tandis qu’il en aspirait de plus en plus, et plus loin. Le sol du Quartier G-Man, déjà bien endommagé par mon attaque, trembla à nouveau, tandis qu’il se vidait de son Aura, et que le Phénix augmentait de taille et de volume. Il quitta mon bras, qui était devenu trop petit pour lui. En moins d’une minute, il faisait la taille d’une maison, assez pour que je puisse grimper sur son dos. Les G-Man, en transe mais aussi terrifiés, n’avaient pas bougé. Je tendis une main vers Meika, l’invitant à me rejoindre.

- Viens ma fille. Tiens-toi avec moi pour regarder cette ville maudite périr.

Hésitante et intimidée, Meika avança quand même et grimpa avec prudence sur l’oiseau de feu, avant que ce dernier ne quitte le sol.

- Restez ici, ordonnai-je aux dix autres G-Man. Il n’y aura bientôt plus que ce lieu qui sera épargné par le Phénix. Tant que vous resterez juste en dessous de lui, vous ne serez pas affectés. Si quelqu’un tente de m’approcher, tuez-le.

Et sans un dernier regard pour eux, je levai les mains en l’air tandis que le Phénix s’éleva au-dessus de la capitale, tel un prédicateur annonça la fin du monde.

- Maintenant… viens, Aura souillée ! Ne fais plus qu’un avec moi, et je saurai te redonner ta pureté. Abandonne cet empire corrompu de Pokemon cruels, et viens à moi. Par la volonté de Sacha Ketchum, le Héros Arc-en-ciel, je te l’ordonne : fais de moi le G-Man ultime, celui qui sauvera et régentera ce monde !


***

Six




Tout en m’échappant incognito du manoir Irlesquo par derrière, je ne pus que sentir avec effroi l’Aura se déchaîner dehors. Kashmel devait faire face à l’armée impériale, et s’en donner à cœur joie. Avant que je ne quitte le manoir, un tremblement de terre manqua de faire s’écrouler les multiples plafonds sur moi. Plus que les conséquences de ce combat, c’était la sensation de l’Aura de Kashmel qui me paralysait presque de peur. Il rayonnait comme un soleil, et tenter ne serait-ce que de pointer mon sixième sens de G-Man sur lui aurait pu me faire tomber dans les pommes. La puissance qu’il dégageait était totalement irréaliste. Même si je l’avais voulu, je n’aurai pu rien faire contre lui.

Aussi donc, étant à court d’option, j’avais décidé de suivre le conseil de Gilthis, et de me rencontrer son fameux maître qui serait caché dans le Palais Impérial. Si Gilthis disait vrai, cet individu avait à lui seul provoquait tous les troubles qui ont secoué l’Ordre G-Man depuis des années, jusqu’à la situation que l’on connait aujourd’hui. Si toute la capitale, voire le monde, menaçait de disparaître sous l’action de Kashmel, je voulais voir cette personne et lui demander pourquoi. En fonction de sa réponse, je pourrai être amenée à la tuer également.

Je rentrai sans problème au Palais Impérial. Personne ne se préoccupa de moi, tant c’était le foutoir. L’Empereur devait avoir ordonné une mobilisation générale, car les militaires étaient partout, à donner ordres et contre-ordres dans un chaos des plus total. L’évacuation des habitants de la Citadelle - les Pokemon les plus importants de l’Empire - était également en cours, et l’affolement était à son comble. Tous pouvaient voir, de loin, l’oiseau de feu au-dessus de la ville qui grossissait de plus en plus. Je savais que j’avais peu de temps avant qu’on entre dans la zone d’attraction du Phénix. Il me fallait me dépêcher.

De retour à la base des Nettoyeurs, je tombai sur deux Pokemon restés là pour la garder. Je leur fis croire que j’étais là sur ordre de Scalpuraï, et ils ne posèrent aucune question. Ils me demandèrent toutefois ce qui se passait au dehors, ainsi que des nouvelles du maître et de Lady Mizulia. Moi-même, je n’en savais rien. Ma mère était peut-être morte, et Maître Scalpuraï aussi. Avec l’Aura qui était sens dessus dessous à cause du Phénix, j’étais incapable de capter leurs présences.

Je m’enfermai dans le bureau de mon maître. J’y étais allée souvent, à chaque fois que Scalpuraï nous convoquait pour les ordres de mission. Soixante pour cent de la pièce était en argent massif, avec diverses armes blanches exposées ci et là. Je cherchai ce dont Gilthis m’avait parlé : une « espèce d’épée en argent pur ». Des épées, il y en avait pas mal, et de toutes sorte, mais il n’y avait qu’une seule « espèce d’épée ». Elle avait une allure étrange, car sa garde était de travers, et possédait une espèce de gâchette, lui donnant l’allure d’un canon. C’était une sorte de fusion entre une épée et ces fameuses armes dont les humains se servaient autrefois, les pistolets. Et cette arme semblait très vieille, mais vu comment Scalpuraï l’avait exposée dans son bureau, elle devait avoir une certaine importance pour lui.

Comme Gilthis l’avait dit, je la tournai trois fois dans le sens des aiguilles d’une montre. Comme il ne se passa rien, je me demandai si l’agent double G-Man ne s’était pas payé ma tête. Mais en examinant attentivement le mur en dessous de l’épée, je pus voir une minuscule cavité qui n’était pas là toute à l’heure. Il y avait effectivement un passage derrière, mais je n’arrivai pas à le sentir dans l’Aura. Et ce n’était pas du fait du Phénix ; l’Aura était brouillée derrière ce mur, comme si quelque chose la rendait aveugle.

N’ayant pas la patience de trouver comment ouvrir le passage, j’utilisai ma force et mes flammes de Félinferno pour défoncer le mur. De toute manière, d’une façon ou d’une autre, je ne remettrai plus les pieds ici. Mais avant de m’enfuir ou de périr, je voulais avoir des réponses. Je m’engouffrai donc dans un tunnel obscur qui descendait assez profondément. Comme je ne pouvais pas m’aider de l’Aura pour me repérer ici, j’étais clairement mal à l’aise. Je m’étais un peu trop habitué à la seconde vision que me procurait l’Aura. En avançant lentement et prudemment, plein de questions m’assaillirent. L’Empereur était-il au courant de l’existence d’un tel passage ? Est-ce que Scalpuraï, tout comme Gilthis, jouait lui aussi double jeu en servant un autre maître ?

Au bout du tunnel, après quelque minutes de marche, il y avait carrément un bâtiment-à-l’intérieur-du-bâtiment, une sorte de sanctuaire en pierre qui trônait au milieu du vide, un immense gouffre qui devait descendre jusqu’aux profondeurs de la terre, et datait de l’époque d’avant même la construction du Palais Impérial. Je sentis qu’à l’intérieur, l’Aura n’était plus brouillée, mais elle avait une allure des plus étranges. Il y avait quelque chose ou quelqu’un, à l’intérieur, qui faisait que l’Aura autour de lui ressemblait à un tourbillon strié d’interférence. C’était une Aura que je n’avais jamais senti, et dont je ne pouvais pas appréhender, comme si elle échappait naturellement à ma compréhension.

Résolue, j’entrai dans le sanctuaire, et je faillis trébucher sur un tapis fait d’une sorte de fourrure exotique. Je fronçai les sourcils et balayai la pièce d’un air pressant, cherchant les mystères qui s’y dissimulaient. Elle n’avait qu’une sortie : celle par laquelle j’étais entrée. Un petit feu brûlait en son centre, éclairant faiblement des murs ornés de vieux tableaux aux couleurs délavées.

Malgré son ambiance étrange, la pièce était ordinaire. En fait, elle possédait un aspect douillet, comme un bureau ou une tanière. Il y avait pas mal d’objets et ornements étranges ci et là, dont certains dataient visiblement d’une époque lointaine. C’était la chambre d’un collectionneur, un endroit où conserver des souvenirs du passé. Alors que je commençai à examiner les différents objets pour tenter de trouver quelque chose, de préférence des réponses à mes questions, une voix suave me fit sursauter comme jamais.

- Tiens, mais ne serait-ce pas mon petit chaton ?

La voix m’était familière, de même que le qualificatif. Un fauteuil, devant le petit foyer qui brûlait, pivota lentement, révélant une personne assise dessus. Je fus d’autant plus surprise que je ne l’avais absolument pas senti dans l’Aura, comme si sa présence m’était dissimulée. Comme si, à l’intérieur de ce maelstrom inconnu, l’individu devant moi s’était fondu dedans. Et bien évidement, je me souvins parfaitement de ce visage juvénile et séduisant, de ces cheveux châtains-roux, de ces yeux noisettes striés de vert, de son habit noir impressionnant, et surtout de son pendentif vert et jaune autour du cou.

- Vous… Lord Sulin ?

- Ravi de constater que tu te rappelles de moi, sourit l’individu.

Comment aurai-je pu l’oublier ? Je l’avais rencontré lors de la dernière fête G-Man à laquelle j’avais assistée, au manoir Argoin. Ce G-Man mystérieux, qui affirmait loger au Palais Impérial, au sourire séduisant mais si dérangeant… et surtout au fameux pendentif dont Kashmel et Stuon m’ont assuré qu’il était celui de la famille Chen… ou qu’il y ressemblait beaucoup.

- Tu as fini par trouver mon antre toute seule ? Me demanda Sulin. Ou bien quelqu’un t’y a aidé ?

- Je… Que faites-vous ici ? Et qui êtes-vous, bon sang ?!

- Allons, quelqu’un qui se fait passer pour une noble lors de festivités G-Man aurait le culot de me reprocher une double identité ? Encore que je ne t’ai aucunement menti, pour le coup.

- Vous n’êtes pas un G-Man, l’accusai-je.

- Non… pas vraiment en effet, mais je n’ai jamais affirmé le contraire. Le Grand Maître Bradavan me connaissait et me tolérait dans le Quartier G-Man. Je m’y rendais parfois, quand j’étais en quête d’amusement. Ces gens étaient tellement dans leur monde que c’en devenait comique.

- Vous êtes le maître de Gilthis ? C’est vous qui avez provoqué tout ce merdier dans l’Ordre ?

- Un merdier ? Quel drôle de mot. Ce n’est pas un merdier, mais une renaissance. N’est-ce pas ce que Kashmel Irlesquo a déclaré ?

- Quel est votre but ? Pourquoi vous faites tout ça ?!

- Désolé, c’est un secret.

Sulin me sourit et me tira la langue, comme un enfant me faisant une blague. Il avait l’air si innocent, mais en même temps, je sentais bien qu’il cachait un visage terrifiant. Cet homme étant dangereux ; toutes les fibres de mon corps, tout mon instinct sauvage me le criaient. Dangereux, et sans aucun doute mauvais. Mais s’il n’était pas un G-Man, il était sans pouvoir. Et de plus, il était désarmé. Je pouvais l’arrêter maintenant, le tuer, qui qu’il soit et quels que soient ses objectifs.

Je bondis donc sur lui d’un coup en grognant, faisant sortir mes griffes et nimbant mes mains de flammes sombres. J’allais lui arracher la tête, ou le consumer sur place. Sulin me regarda tranquillement, d’un air vaguement intéressé, en ne faisant rien pour se protéger. Utilisant toute ma force et une partie de mon Aura, j’abattis mes deux mains griffues et enflammées sur sa gorge. Mais… rien ne se passa.

Mes mains étaient bien sur son cou, mais étaient redevenus normales. Plus de feu, plus de griffe. Mon attaque avait été comme annulée, toute ma force avait disparu au contact de cet homme. Je ne sentais même plus mon Aura, comme si j’étais momentanément redevenue une faible humaine. Sulin sourit de mon air de dépit et dit :

- Eh bien, en général, j’apprécie les femmes entreprenantes, mais nous venons seulement de nous rencontrer. Faisons d’abord connaissance, veux-tu ?

Il me frappa le front d’une petite pichenette des doigts, et j’eus l’impression qu’il m’avait troué le crâne. Une force prodigieuse m’envoya en arrière et j’allai me fracasser contre le mur de roche, en détruisant au passage l’un des tableaux exposés.

- Ahhhh, soupira Sulin, c’était le dernier exemplaire connu représentant l’ancien Mont Sélénite de Kanto ! Quel gâchis…

J’avais mal partout, mais je sentis à nouveau l’Aura, ainsi que mes pouvoirs. Ça me rassura. Je ne les avais pas perdus. Mais je ne comprenais toujours pas ce qui s’était passé. Qui était ce type ? Pourquoi était-il si fort ? Et pourquoi mes pouvoirs de G-Man ne lui faisaient rien du tout ?!

- Q-qu’est-ce que vous êtes ? Balbutiai-je.

- Moi ? Je suis un humain, un vrai de vrai. Ça, et deux trois autres petites choses sans importance.

Me remettant debout avec difficulté, je lui lançai cette fois une Aurasphère, une attaque commune à quasiment tous les G-Man. Mais la boule d’Aura s’évanouit au vent dès qu’elle toucha le corps de Sulin. Je n’eus pas le temps de me remettre de cet autre échec inexpliqué ni de tenter autre chose, car je sentis une main froide et tranchante m’agripper l’arrière du crâne et me le plaquer au sol. La personne qui m’avait immobilisé s’inclina devant Sulin à mes côtés, et je reconnus mon maître.

- Eh bien mon ami, tu laisses tes subordonnés fouiner à leur guise maintenant ? Lui demanda Sulin d’un ton mi-sévère mi-moqueur.

- Toutes mes excuses, Lord Chen. J’ignore comment elle vous a trouvé, mais soyez sûr qu’elle sera punie pour cette insolence.

Lord Chen ? Me répétai-je mentalement.

- Bah, peu importe, renchérit Sulin. Cette petite est marrante. Mais dis-moi, tu as l’air bien amoché…

- J’ai été dépêché contre Kashmel sur ordre de Sa Majesté. Mais sa puissance… elle dépasse l’entendement. Je doute, même moi, de pouvoir le vaincre actuellement. Je suis venu m’enquérir de vos ordres.

Malgré ma situation très mauvaise, j’étais surprise par le ton de Scalpuraï. Pour la première fois depuis que je le connaissais, il paraissait… dépassé. Il ne savait pas quoi faire. Mais si Scalpuraï espérait des directives de Sulin, il fut bien déçu. L’humain fit un geste ennuyé de la main.

- Vois ça avec Daecheron. Ces broutilles ne me concernent pas, pas plus que ce Phénix ne peut m’inquiéter.

- Mais… à ce rythme, la capitale risque d’être détruite…

- Qu’est-ce que j’en ai à cirer de cette ville ? Qu’il advienne ce qui doit advenir. Ce petit coup d’éclat de Kashmel n’est qu’une conséquence de l’ordre du détail de mon plan. Que Kashmel détruise la cité et fasse chuter l’Empire, ou qu’il échoue et soit tué, c’est du pareil au même pour moi.

Ça ne semblait pas plaire à Scalpuraï, et il le manifesta en gardant le silence, ce qui arracha un autre sourire à Sulin.

- Douterais-tu de moi ?

- Ça n’a jamais été le cas, et je ne commencerai pas aujourd’hui, répondit le Trigarde. Comme toujours, ma loyauté vous est acquise… Directeur.