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Les douze tableaux de Jaune de MissDibule



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» Auteur : MissDibule - Voir le profil
» Créé le 05/10/2018 à 00:59
» Dernière mise à jour le 06/12/2018 à 00:01

» Mots-clés :   Aventure   Kanto   Mythologie   Présence de personnages du jeu vidéo   Présence de personnages du manga

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I et II – La lionne de Némée et l’iris de Lydre
Jaune cheminait tranquillement la paisible route 6 sur le dos de son fidèle Dodounet, qui semblait aussi content que sa dresseuse de revenir à Kanto. Cependant, le paysage assez monotone n’inspirait pas grand-chose à la jeune peintre. Les arbres, d’un vert uniforme, lui paraissaient tous absolument identiques, à la feuille près. Le chemin était si déblayé qu’y croiser une pierre était tout un événement. Pas un seul brin ne dépassait ni des fourrés ni des hautes herbes. Et le moindre ruisseau était si lisse que c’en était exaspérant !

La jeune femme, qui s’en voulait un peu d’être aussi critique dès le début de son voyage, essaya alors de se persuader que justement, ce n’était que le début et que cela ne pourrait qu’être mieux par la suite. Après tout, la route 6 n’était pas réputée pour être la plus attrayante de Kanto : elle était courte, – comme Jaune le redécouvrait en ce moment même – assez banale et ennuyeuse. De toute façon, Jaune s’était bien doutée en l’empruntant que ce ne serait pas ici qu’elle trouverait l’inspiration qu’elle cherchait tant.

Mais c’était là qu’elle se trompait.

En effet, si le potentiel inspirant de la route 6 laissait à désirer, elle n’en demeurait pas moins la route idéale pour faire une pause : elle était à la fois calme, bien entretenue et ombragée. Ainsi, ce fut pour cette même raison que Jaune croisa sur son chemin une femme – apparemment dresseuse – d’à peu près quarante ans, qui se reposait au bord d’un point d’eau, entourée de ses Pokémon.

La peintre en herbe l’avait tout d’abord aperçue de loin, et son instinct lui avait immédiatement soufflé que cette femme sortait de l’ordinaire, et ce pour plusieurs raisons. Ses Pokémon – dont la moitié lui était inconnue – affichaient tous une certaine majesté, et il suffisait d’un simple coup d’œil à Jaune pour déterminer qu’ils étaient très bien entraînés. Elle traîna notamment longuement son regard sur un félidé gracile à la flamboyante crinière de feu. Qu’est-ce qu’il était beau !

Son extravagante dresseuse n’était pas en reste non plus. Adossée contre arbre, les bras croisés, elle semblait se reposer au bord de l’eau avec son équipe. Sa silhouette svelte était recouverte d’un pantalon bicolore rouge et noir étrangement troué de losanges, et d’un top noir à col roulé sans manches qui laissait voir son nombril. Elle se tenait bien droite, les yeux cachés derrière ses lunettes de soleil à verres rouges, et ses lèvres pulpeuses arboraient un air satisfait. Parfois une légère brise venait secouer ses volumineuses mèches de cheveux ondulées… qui étaient roses.

Jaune resta un moment à contempler cette femme et ses magnifiques Pokémon, jusqu’à ce que la curiosité l’emporte sur la discrétion : elle descendit alors précipitamment de son Dodrio et le fit rentrer dans sa Poké Ball – qu’elle remit à sa ceinture – avant de courir à la rencontre de la mystérieuse femme. Celle-ci, en la voyant arriver, afficha un air à la fois intrigué et amusé, un énigmatique sourire collé sur le visage.

La jeune peintre, qui était d’un naturel très avenant, engagea alors subitement la discussion, fascinée.

— Bonjour ! Je n’ai pas pu m’empêcher de vous observer avec vos Pokémon, et je dois dire qu’ils sont vraiment incroyables.

Le sourire de l’inconnue s’élargit tandis qu’elle redressait ses lunettes sur son nez.

— Merci beaucoup. Et vous êtes ? Je ne crois pas que nous ayons déjà été présentées un jour, répondit-elle, pince-sans-rire.

Jaune, sans rien perdre de son allant, se présenta au contraire avec enthousiasme.

— Non, en effet, confirma-t-elle en riant. Je m’appelle Jaune. Jaune de la Forêt de Jade ! Enchantée de vous rencontrer !

— Tout le plaisir est pour moi, Jaune. Je suis Malva.

— Pour tout vous dire, Malva, je suis peintre. Et je dois dire que vos Pokémon m’ont sacrément tapé dans l’œil ! Cela vous ennuierait que je les observe un moment ? Je brûle de les représenter ! demanda Jaune de but en blanc.

— Vous… brûlez ? répéta la dresseuse, de plus en plus amusée. Une peintre qui brûle ? Cela tombe bien, mes Pokémon sont tous de type Feu ! Je suis spécialisée dans ce type. Venez avec moi, je vais vous les présenter, si vous le voulez.

— Avec joie !

Jaune écouta alors avec entrain Malva lui parler de ses quatre Pokémon. Tout d’abord, il y avait sa Chartor, une tortue de feu aux yeux fermés et à la carapace fumante. Jaune connaissait déjà cette espèce de Pokémon, qu’elle avait déjà croisée à Hoenn. Ensuite, Malva lui montra fièrement sa Flambusard, un grand oiseau rouge, noir et bleu pastel aux petits yeux perçants. Jaune se souvenait également avoir aperçu une fois ou deux ce Pokémon lors son séjour à Kalos, où il était apparemment plutôt commun.

— À vrai dire, je suis en plein milieu d’un voyage, expliqua Malva à Jaune. Je dois me rendre à Cramois’île, mais le chemin est si long que des pauses sont nécessaires, autant pour moi que pour cette brave bête.

À ces mots, elle caressa l’encolure du Pokémon oiseau qui s’ébroua, ravi.

— Vous avez bien raison, approuva Jaune. Il faut préserver les Pokémon. Moi non plus je n’aime pas trop fatiguer mon pauvre Chenipou en me soulevant trop longtemps dans les airs !

— Chenipou ? répéta Malva, sans comprendre.

— Oh, c’est… C’est mon Papilusion, expliqua Jaune. C’est le surnom que je lui ai donné.

— Je vois. C’est adorable, commenta simplement Malva d’un air détaché.

— Merci !

Malva continua ensuite la présentation de ses Pokémon à Jaune, qui avait hâte d’en savoir plus sur le gracieux félin qui dormait paisiblement au milieu des hautes herbes. Mais la dresseuse du type Feu préféra d’abord montrer sa Lugulabre à Jaune. Malva lui expliqua que cette espèce provenait d’Unys. Lugulabre était un étrange Pokémon semblable à un chandelier possédé et illuminé de flammes bleues. Cependant, Jaune aimait bien son air facétieux.

Puis vint le moment que Jaune attendait avec impatience : la présentation de la Némélios de Malva, car c’était ainsi que se nommait l’espèce à laquelle appartenait ce félin marron au regard azuré, originaire de Kalos. Selon Malva, les Némélios possédaient tous une crinière rouge et jaune, mais celle des mâles avait la forme d’un soleil, tandis que celle des femelles était plus classique.

— Cette merveille, c’est Némée, ma Némélios. C’était mon tout premier Pokémon, déclara fièrement Malva tout en caressant la lionne endormie. Quand je l’ai obtenue, je n’étais qu’une petite fille, et elle n’était qu’une petite Hélionceau. On en a parcouru du chemin, toutes les deux.

Jaune ne répondit rien, profitant simplement du touchant spectacle de la complicité entre Malva et Némée. Celle-ci s’était réveillée et frottait sa tête contre celle de sa dresseuse agenouillée, qui la remerciait par de multiples caresses. Jaune ne s’était pas trompée : Malva n’était pas ordinaire.

Puis la quadragénaire aux cheveux roses se redressa et s’adressa à elle.

— Voilà, c’était une présentation succincte de mes Pokémon. J’espère qu’elle vous a plu.

— Absolument, j’ai adoré ! Merci beaucoup.

— Mais de rien.

— Némée est vraiment impressionnante, elle m’inspire beaucoup, avoua Jaune. J’aimerais vraiment la dessiner, mais pour ça il faudrait que je dessine en l’ayant sous les yeux un petit moment. Or je sais que vous êtes en déplacement et je ne voudrais pas abuser de votre gentillesse, après tout je vous ai déjà pris un peu de votre temps…

— Oh ce n’était rien, cela m’a fait très plaisir, affirma Malva. Il y a bien longtemps que je ne m’étais pas amusée ainsi. Vous êtes très distrayante, Jaune.
Jaune ne savait pas exactement comment interpréter cette remarque. Elle décida finalement de la prendre comme un compliment.

— Cela dit, c’est vrai que le temps file, reprit-elle en regardant sa montre. Je ne sais pas si…

Mais elle n’eut pas le loisir de finir sa phrase : tout à coup, un filet sorti de nulle part emprisonna Némée, qui, surprise, ne parvint pas à l’éviter. Les deux femmes sursautèrent. Voyant Némée qui se débattait furieusement pour se libérer, Malva voulut voler à son secours, mais brusquement le filet, comme mu par une force invisible, tira violemment Némée hors de sa portée, dans un buisson environnant. Un buisson dont sortirent trois sinistres hommes que Jaune reconnut immédiatement grâce à leurs uniformes sombres, qui n’avaient que peu changé en deux décennies.

— Vous êtes de la Team Rocket ! s’écria-t-elle.

Soudainement, les réminiscences de toutes les batailles qu’elle avait livrées contre cette organisation malfaisante lui revinrent en mémoire. Toutes les fois où elle s’était battue pour protéger Kanto, aux côtés de Rouge, Verte et Bleu, puis plus tard aux côtés d’Or, Argent et Cristal. Elle revécut instantanément sa rencontre avec Giovanni en personne, boss de la Team mais également père d’Argent et ancien champion de sa ville natale, Jadielle.

Et même si elle ne les avait affrontés qu’une seule fois, elle se souvenait également de ces trois individus. Jaune ne le savait pas, mais ils se prénommaient Ken, Ryô et Harry et prétendaient former un « trio d’élite ».

— Eh oui, nous n’avons pas disparu ! La Team Rocket a toujours été là ! Et son Trio d’élite court toujours, sous les ordres de notre charismatique chef, M. Giovanni ! commença Ken.

— Combien de fois faudra-t-il que les détenteurs de Pokédex s’opposent à vous avant que vous ne compreniez que votre organisation n’est pas la bienvenue à Kanto ? demanda Jaune, le regard brillant de colère. Relâchez tout de suite Némée !

— Oh, mais c’est qu’elle menaçante, la petite ! railla Harry, qui resserra aussitôt son emprise sur le bout du filet qui permettait de traîner la pauvre Némélios, toujours furieuse. La Team Rocket, pas la bienvenue à Kanto ? Qui a décidé ça ? On fait autant partie de l’histoire de Kanto que toi, petite blonde.

— Attendez, vous deux… Cette fille… Elle faisait partie de ceux qui nous ont dissous la première fois ! Vous vous souvenez, elle avait fait rater notre opération sur l’Océane ! Elle a même failli nous écrabouiller le bateau sur la tête avec son Rattatac fêlé ! intervint soudainement Ryô.

Les deux autres semblèrent eux aussi, comme Jaune il y a quelques instants, se remémorer brutalement ce pan de leur passé. Le Trio la fixa alors d’un regard noir.

— On va te faire payer l’affront que tu nous as fait subir ! la menaça Ryô.

— On peut enfin se venger ! renchérit Harry.

— À l’attaque ! conclut Ken.

— J’en ai assez entendu ! hurla alors subitement Malva, que Jaune avait presque oubliée. Je me fiche bien de vos histoires. Je ne sais pas pourquoi vous avez décidé de m’enlever ma Némée et je m’en moque tout autant, mais ce que je peux vous assurer, c’est que vous vous êtes attaqués à la mauvaise personne !

Elle avait déclamé ces paroles avec une telle force dans la voix que le temps sembla se figer un court instant : plus personne ne bougeait ni ne parlait. Même Némée avait cessé de se débattre. Mais les trois criminels reprirent bien vite leurs esprits. Ken, Ryô et Harry libérèrent respectivement de leurs Poké Balls un Lippoutou, un Ectoplasma et un Girafarig, prêts à en découdre.

Jaune ne se mit également en position de combat pour prêter main-forte à Malva, mais celle-ci tendit sa main vers elle et déclara gravement :

— Ne te mêle pas de ça, Jaune. Ces hommes s’en sont pris à ma Némée, et je dois leur régler leur compte personnellement.

Le regard incandescent qu’elle lui lança en prononçant ces mots acheva de persuader Jaune de la laisser faire. En effet, les prunelles orange de Malva brûlaient d’une rage volcanique. Sa rutilante crinière semblait s’être hérissée de colère sur sa tête. Haletante, presque suffocante, elle envoya ses trois autres Pokémon au combat. Elle leur donnait des ordres en rugissant d’un ton bestial. Son corps ondulait au rythme de l’action, comme si elle prenait elle-même part au combat, dévoilant ses crocs d’un sourire carnassier dès que l’ennemi était acculé.

Ses bras fouettaient l’air tandis qu’elle mugissait, comme si elle eût voulu balafrer de ses propres griffes écarlates ceux qui avaient osé s’en prendre à son petit. Elle se mouvait avec rapidité, mais dans le moindre de ses gestes se cachait une indescriptible grâce féline. Sa flamboyante rage se déployait dans tout son être, à la fois éminemment sauvage et mystérieusement élégante. Jaune était subjuguée devant la beauté primitive de cette scène explosive.

Ce n’était pas la simple colère d’une dresseuse à qui l’on avait volé son Pokémon. C’était la lutte acharnée et désespérée d’une lionne à qui l’on avait arraché sa progéniture, et qui braverait jusqu’aux flammes de l’Enfer pour la sauver. Jaune contemplait avec fascination la fureur maternelle de Malva, qui se confondait avec la vivacité et la chaleur des flammes de ses compagnons, combattant fièrement pour récupérer l’une des leurs.

Sans surprise, le Trio d’élite de la Team Rocket se trouva rapidement démuni face à l’ire de ces bêtes farouchement résolues. Chacune de leurs attaques fut vaine, et un à un, leurs Pokémon furent vaincus, engloutis par les flammes vengeresses de Malva. Jaune espérait qu’ils s’en remettraient… Elle ne supportait pas de voir un Pokémon souffrir, même si elle comprenait parfaitement les sentiments de Malva. Elle aurait bien offert de les soigner grâce à son don de guérison, mais elle n’en eut pas l’occasion : terrassés mais surtout terrorisés par cette lionne enragée, les trois sbires déguerpirent sans demander leur reste. Jaune songea qu’ils n’allaient pas oublier leur cuisante défaite de sitôt.

Malva, morte d’inquiétude pour sa Némélios qui gisait au sol, toujours prisonnière du filet, se précipita à son chevet :

— Némée ! Tu vas bien ? demanda-t-elle fébrilement à son Pokémon, tandis qu’elle l’enlaçait à travers la maille. Qu’est-ce que j’ai eu peur !

Le félin de feu émit un petit cri pour rassurer sa dresseuse, qui la câlina davantage en retour.

— Hé, il faudrait peut-être penser à la libérer, maintenant ! plaisanta soudainement une voix joviale, qui n’appartenait ni à Malva, ni à Jaune.

Surprises, les deux femmes se retournèrent à temps pour voir une jeune trentenaire descendre du dos de son impressionnant Pokémon. Elle avait la peau mate, un visage rond, un large sourire et d’immenses yeux bordeaux pétillant de malice. Sa très longue chevelure, d’un beau noir violacé, était retenue par une queue-de-Ponyta très sophistiquée qui laissait néanmoins quelques mèches rebelles lui encadrer le visage. Elle était vêtue d’une tunique beige et rose décorée d’un très gros nœud papillon rose sur la hanche gauche et d’un legging blanc à liséré jaune. Elle semblait très joyeuse.

— Ce n’est pas dans mes habitudes d’obéir à quelqu’un qui débarque de nulle part sans même se présenter, rétorqua froidement Malva, qui s’était relevée pour toiser la nouvelle venue.

La voix de la brûlante dresseuse était glaciale. Jaune n’aurait pas voulu être à la place de la jeune femme. Cette dernière, bien loin de s’offusquer, répondit avec enthousiasme :

— Hihi, vous avez raison, j’ai oublié de me présenter, quelle tête en l’air je fais ! J’étais tellement absorbée par votre incroyable combat que j’en ai oublié tout le reste. Rectifions ça tout de suite : je m’appelle Iris, je suis une spécialiste des Pokémon Dragon. Là d’où je viens, je suis championne d’arène ! déclara-t-elle fièrement.

— Je préfère cela. Je suis Malva, spécialiste du type Feu. Enchantée.

— Enchantée !

— Quant à moi, je m’appelle Jaune. Ravie de vous rencontrer ! se présenta à son tour la jeune artiste.

Iris se tourna alors vers elle en souriant et lui rendit la formule de politesse.

— Bien, et si l’on libérait cette pauvre bête, maintenant que les présentations sont faites ? Elle serait mieux à l’air libre, souligna à nouveau Iris.

— J’en avais bien l’intention… Je ne faisais que m’assurer que Némée allait bien. Ces sinistres individus étaient de vraies brutes, répliqua Malva.

— En effet, j’ai vu ça. J’aurais réagi de la même manière à votre place. Vous avez combattu de manière incroyable ! J’ai voulu vous aider, mais le temps que je descende, vous en aviez déjà terminé !

— C’est bien aimable à vous, répondit la dresseuse aux cheveux roses tandis qu’elle sectionnait tant bien que mal les mailles du filet grâce à la lime à ongles qu’elle venait de récupérer dans son sac à main, qu’elle avait posé près d’un arbre.

Elle aurait bien voulu brûler les liens, mais malheureusement ces bandits avaient été assez malins pour ignifuger le filet. Un acte plutôt sage compte tenu que le Pokémon qu’ils voulaient capturer était de type Feu.

— Et voilà, Némée, te voilà à nouveau libre comme l’air ! annonça triomphalement Malva lorsqu’elle eût fini de couper le cordage. Elle serra à nouveau son Pokémon dans ses bras, soulagée.

— Tout est bien qui finit bien, commenta Iris en contemplant la scène, attendrie. Jaune ne pouvait qu’être d’accord avec elle.

— Dites, Malva… Votre match m’a vraiment fait forte impression. Vous voudriez bien vous mesurer à Lydre et moi avec Némée ? reprit subitement Iris.

Lydre était le surnom du Pokémon qui transportait Iris sur son dos. Elle leur expliqua qu’il s’agissait d’un Trioxhydre. Le Pokémon, assez grand, possédait un corps reptilien aux écailles bleues, pourvu de six fines ailes noires. Son long cou était recouvert de duvet noir, et tout son corps était strié sur la longueur de deux bandes violettes. Il arborait une crête de la même couleur sur sa tête. Ou plutôt, sur sa « véritable » tête, car au bout de ce qui aurait dû être ses pattes se trouvaient deux autres têtes au faciès similaire. Ses trois paires d’yeux aux iris mauves brillaient d’un éclat menaçant. Jaune le trouvait à la fois monstrueux et majestueux, ce qui la subjuguait.

Malva considéra un instant la proposition, les pupilles rivées sur le Pokémon Dragon, puis déclara finalement :

— Ce n’est pas l’envie qui m’en manque, malheureusement je dois décliner l’offre. Comme je le disais à Jaune avant que tout cela ne commence, je suis attendue quelque part, et cet incident m’a déjà mise en retard. Donc non, désolée, je ne peux pas. Mais peut-être aurons-nous un jour l’occasion de nous affronter ?

— Oh je vois… C’est dommage, mais vous avez raison, répondit Iris, un peu déçue.

— Bon eh bien, ce fut riche en émotions. Je ne risque pas d’oublier cette journée de sitôt, cela est certain. Mais il est malheureusement l’heure pour moi de prendre congé, reprit Malva.

Elle commença alors à rentrer ses Pokémon dans ses Poké Balls, à l’exception de sa Flambusard, qui lui permettait de voyager. Alors qu’elle s’apprêtait à faire rentrer Némée dans sa Ball, Jaune intervint :

— Attendez ! Avant que vous ne partiez, je pourrais vous prendre en photo, Némée et vous ? Je n’ai pas abandonné l’idée de faire un tableau de vous deux !

— Ma foi, pourquoi pas, accepta-t-elle. Je serais curieuse de voir le résultat !

Jaune immortalisa ainsi Malva et Némée, la splendide Némélios, grâce à son appareil photo dernier cri, qui lui avait été offert par son amie Violette, une photographe qui était également championne d’arène à Kalos. Jaune fit à Malva la promesse de lui montrer le tableau lorsqu’il serait terminé. Puis la dresseuse spécialiste du type Feu s’envola, non sans assurer à Jaune et Iris que ce fut quel plaisir cela fut pour elle de les rencontrer.

Jaune resta donc seule avec Iris, qui semblait un peu désappointée. La jeune artiste eut alors une idée pour lui remonter le moral :

— Ça ne vaut sans doute pas un match contre Malva, mais... Ça vous dirait de vous battre contre moi, en un contre un ?

Les yeux d’Iris s’illuminèrent alors :

— Oh oui ! Avec plaisir ! Et je t’en prie, tutoie-moi ! On a le même âge, après tout !

Jaune hocha la tête et réfléchit au Pokémon qu’elle pourrait envoyer contre le monstre d’Iris. Finalement, elle porta son choix sur Chenipou, sans trop savoir pourquoi. Elle lança alors sa Poké Ball en l’air, ce qui libéra son Papilusion. Le Pokémon poussa un petit cri lorsqu’il apparut dans un éclair blanc. Iris eut l’air surpris en voyant Chenipou. Jaune ne s’en soucia pas : elle avait l’habitude que les gens sous-estiment ses Pokémon à cause de leur apparence chétive.

— Au fait, je préfère te prévenir : j’ai un style de combat assez particulier, l’avertit la blonde.

— Ah oui ? J’ai hâte de voir ça alors ! Lydre, utilise Déflagration ! ordonna-t-elle à son Pokémon.

Elle jouait directement sur l’avantage de type. Réactive, Jaune demanda immédiatement à Chenipou d’esquiver la gigantesque étoile enflammée projetée par la gueule de Lydre. Puis Iris enchaîna avec l’attaque Dracosouffle, que Jaune contra grâce à l’Ultrason de son Papilusion. Les deux ondes s’entrechoquèrent avec violence, mais ni l’une ni l’autre n’atteignit sa cible.

— Lydre ! Utilise Vibrobscur !

— Protège-toi avec Abri !

Lydre envoya une dévastatrice onde noire sur Chenipou, qui créa au dernier moment une barrière sphérique tout autour de lui pour s’abriter.

— Enchaîne avec Dracosouffle ! Il ne pourra pas réutiliser Abri aussi vite ! cria Iris à son Pokémon.

— Bats des ailes pour disperser l’attaque !

Une fois de plus, l’assaut de Lydre fut vain : son puissant souffle bleuté fut réduit à néant par les puissantes bourrasques provoquées par les ailes du Papilusion.

Iris, qui commençait à perdre patience, décida de passer à la vitesse supérieure :

— Saisis-toi de lui puis utilise Déflagration à nouveau ! Ne le laisse pas s’échapper !

Le dragon bleu aux iris perçantes fondit alors sur le petit papillon violet et enserra ses ailes de ses deux têtes annexes. Il commença alors à préparer son souffle de feu, mais Jaune ne comptait pas le laisser faire :

— Chenipou ! Poudre Dodo !

Le Pokémon obéit et projeta ses spores sur le museau du monstre bleu, qui s’endormit aussitôt. Ne pouvant plus battre des ailes pour voler, il retomba lourdement sur le sol, libérant par la même occasion son emprise sur Chenipou.

— C’était bien joué… reconnut Iris. Je crois que j’ai perdu. Tu as maintenant le champ libre pour neutraliser Lydre.

— Exactement, mais pas de la façon dont tu l’imagines ! lui répondit Jaune avec un énigmatique sourire, auquel Iris répondit par un regard intrigué.

Elle prenait beaucoup de plaisir durant ce match. Elle n’avait pas ressenti une telle émotion depuis ce fameux tournoi, il y a vingt ans de cela…

— C’est l’heure du coup de grâce, Chenipou ! Utilise Sécrétion ! Saucissonne-le bien serré !

Le petit Pokémon projeta alors depuis les airs sa brillante toile blanche sur le Trioxhydre endormi qu’elle enferma presque entièrement dans un cocon collant, empêchant ainsi le Pokémon de faire le moindre geste. Chenipou musela également Lydre avec du fil supplémentaire, pour qu’il ne puisse pas se débarrasser de la toile grâce à ses capacités.

Devant ce spectacle, Iris ne put se retenir de rire :

— Ha ha ! En effet, la manière dont tu te bats est étonnante. Tu ne te bats pas, en fait. Ton style consiste plutôt à neutraliser l’adversaire sans blesser ni son Pokémon ni le tien, c’est bien ça ?

Jaune fit oui de la tête. Même si elle avait fait de la peinture sa vocation, Jaune n’avait jamais cessé de perfectionner sa technique de combat pacifiste, qui lui permettait de ne jamais voir un Pokémon souffrir inutilement.

— En tout cas, bravo, tu nous as battus, Lydre et moi ! C’était un beau combat, j’aime beaucoup ta manière de combattre, la complimenta Iris.

— Merci ! Je dois dire que Lydre est coriace ! L’affronter était très excitant. Je crois d’ailleurs que ça m’a donné l’inspiration pour une future peinture… avoua Jaune.

— Une peinture ? Oh c’est vrai, tu as dit quelque chose de ce genre tout à l’heure, comme quoi tu voulais faire un tableau de Malva et Némée ! Alors comme ça tu es peintre ?

Jaune acquiesça, et commença à exposer son projet à Iris, qui l’écouta avec attention. Quand elle eût fini son explication passionnée, son interlocutrice rit de plus belle et déclara :

— Ha ha, c’est un beau projet que tu as là ! En tout cas, l’idée de nous voir, Lydre et moi, immortalisés sur une peinture me plaît bien. Je me disais justement que c’était le bon moment pour faire une pause déjeuner. Tu veux te joindre à moi ? Comme ça tu pourras observer Lydre autant que tu veux pour pouvoir le dessiner !

— Avec joie ! Merci beaucoup !

— Est-ce que tu pourrais juste, hum… Tu sais… Libérer mon Pokémon ? lui demanda l’éleveuse de dragons en riant. Je crois qu’il risque d’avoir peur s’il se réveille dans cet état…

Jaune éclata de rire et accéda à la requête de sa nouvelle amie. Elle fit appel à Rattinou, son Rattatac, qui grignota en un éclair le fil de soie grâce à ses crocs surpuissants qui avaient jadis coupé l’Océane en deux. Il avait alors fallu le reconstruire… C’était d’ailleurs à cette occasion que Jaune s’était mesurée pour la première fois au trio d’élite de la Team Rocket.

Puis Jaune et Iris déjeunèrent ensemble. Elles passèrent un agréable moment. Elles firent connaissance, et discutèrent de tout et de rien. Enfin, Jaune, pour clore en beauté cette matinée mouvementée, entama le croquis de son futur tableau, à l’ombre des monotones arbres verts de la route 6, qui venaient d’être témoins d’événements pour le moins impressionnants.