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Le Chevalier au Lion [One-Shot] de Cyana



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Informations

» Auteur : Cyana - Voir le profil
» Créé le 22/08/2018 à 21:43
» Dernière mise à jour le 22/08/2018 à 21:45

» Mots-clés :   Drame   Guerre   Kalos   Mythologie   One-shot

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Le Chevalier au Lion [One-Shot]
Le professeur Maxime Platane, sixième du nom, arpente d’un pas nonchalant son bureau privé, situé au premier étage du Laboratoire Platane. L’édifice est situé sur la Rue Méridionale depuis avant l’époque de la Révolution Industrielle… plusieurs centaines d’années, il ne connaît plus le chiffre exact. Il a été reconverti en laboratoire à l’époque d’Eugène Platane, son aïeul et le fondateur de la lignée des Platane. Sa famille est très connue dans le domaine de la recherche.

Son regard tombe sur la vieille horloge comtoise posée dans un coin de la pièce. Il est bientôt l’heure. Le jeune homme ajuste le col de sa chemise, lisse les plis de sa blouse blanche et passe une main dans ses cheveux pour leur donner un air décoiffé cool.

Son invitée ne va pas tarder à arriver.

Il sort de son bureau et parcourt les couloirs lambrissés de son laboratoire. Il a fait des travaux récemment et admire le nouveau papier-peint rouge avec satisfaction. Maxime aime cette couleur, qui lui rappelle la passion et, surtout sa légende de Kalos préférée.

Celle du Chevalier au Lion.

Il est à la moitié de l’escalier quand la sonnette de sa porte retentit. Les Feunnec, Marisson et Grenousse qui jouent dans le vestibule se figent. Platane tape gentiment dans ses mains.

– Allons, allons, mes petits. Du calme. Ce n’est pas encore l’heure pour vous de rencontrer vos dresseurs. Filez dans le parc !

Les Pokémon obéissent joyeusement et le professeur va ouvrir la porte.

Devant lui, une jeune femme brune souriante lui adresse un signe de la main. Elle porte un casque avec caméra et micro autour du cou et sa besace laisse entrevoir un ordinateur portable dernier cri.

– Bonjour ! lance-t-elle. Je suis Flavie des Éditions d’Illumis. C’est moi qui vous ai sollicité pour l’interview !

Maxime lui tend une main amicale qu’elle serre sans hésitation.

– Je me présente à nouveau, je suis Maxime Platane. Je vous attendais, entrez…

Le jeune homme conduit son invitée jusqu’à la salle de recherche. Il a pris la peine de débarrasser une table et deux chaises des monceaux de livres, de dossiers, de matériel informatique et d’outils Pokémon qui les encombrent en temps normal. Un thermos plein de café, deux mugs et une assiette de biscuits les attendent patiemment. Le professeur et la journaliste s’installent sur les chaises.

– Je vais aller droit au but, dit Flavie en installant son matériel. Comme je vous l’ai expliqué au téléphone, les Éditions d’Illumis veulent réaliser un reportage sur l’Événement Zygarde, qui fête cette année son centenaire.

– J’en ai entendu parler, acquiesce Maxime. La ville d’Illumis est en pleine ébullition quant à la préparation de cet événement. Il promet d’être exceptionnel.

– Il le sera, affirme Flavie. Et mon journal a bien l’intention de tout couvrir !

La jeune femme pose son casque sur sa tête et ajuste le micro.

– Si vous le permettez, je vais enregistrer notre entretien…

– Je n’y vois aucun inconvénient.

– Bien. Alors, c’est parti. Comme vous le savez, les personnes qui ont assisté à ces terribles événements ne sont plus de ce monde depuis longtemps, je cherche donc leurs descendants. Vous étiez le plus facile à trouver.

– Les Platane sont dignes du nom qu’ils portent, il est impossible de les déraciner.

Flavie éclate spontanément de rire. Maxime se penche pour attraper un livre visiblement très ancien qui trône au sommet d’une pile. Sa couverture rouge est un peu gondolée, ses dorures passées et ses pages jaunies par le temps. La journaliste lui lance un regard curieux.

– Qu’est-ce que c’est ?

– Je doute, malheureusement, vous être personnellement d’une quelconque utilité dans votre enquête. Vous le savez sûrement, mais mon ancêtre, Augustin Platane, qui fut un acteur majeur dans cette terrible affaire, est mort bien avant ma naissance. Toutefois, ce livre peut tout arranger.

La journaliste s’empare délicatement du vieil ouvrage, qui ne possède pas de titre. Elle le pose devant elle et l’ouvre. Après les quelques pages vierges de chaque début de livre, elle arrive à la page où le nom de l’auteur est inscrit. Ses yeux s’écarquillent quand elle le lit.

– Mais… ce nom… Je le reconnais… C’est une personne qui a assisté aux événements, aussi !

– Tout à fait. Elle a écrit ce livre qui relate très précisément tous les tenants et aboutissements de l’Événement Zygarde, sous forme romancée. Chaque acteur de cette tragédie en a reçu un exemplaire. Voici celui de ma famille.

Flavie feuillette le livre avec un respect tout neuf, manipulant les pages avec respect. Ses yeux brillent d’admiration et de convoitise.

– C’est formidable ! s’exclame-t-elle, émerveillée. Vous croyez… que je pourrais vous emprunter ce livre pour le lire ?

– J’ai anticipé votre demande, sourit Maxime. C’est pour ça que j’ai scanné l’intégralité du livre et vous l’ai mis sur support portable. Voici la clé.

– Merci beaucoup !

Flavie s’empresse de ranger la précieuse clé dans une des poches de sa veste, qu’elle ferme soigneusement. Elle referme délicatement le vieil ouvrage et le rend à Maxime. Ce dernier le pose devant lui et caresse la couverture abîmée du bout des doigts avec tendresse.

Ce livre a toujours été son préféré. Il illustre parfaitement tout ce qu’il pense de la riche histoire de Kalos.

La tragédie persistante malgré un passé glorieux.

Une tristesse insondable sous une apparence ordonnée et magnifique.

Un désir désespéré de se raccrocher à ce passé si flamboyant, par peur d’un futur inconnu.

Malgré toute la pureté et la bonne volonté de la majorité des héros qui ont bercé l’histoire de Kalos, rares sont les légendes qui se terminent bien…

Maxime sent son cœur se serrer et chasse ces pensées moroses de son esprit.

– Si cette personne a écrit ce livre, dit-il, c’était par volonté de montrer que le véritable héros de cette histoire était en fait celui qu’on considère aujourd’hui, à tort, comme le méchant.

Flavie fronce les sourcils.

– Mais… lâche-t-elle, je ne comprends pas… Lysandre a causé des dégâts immenses à Illumis, il y a eu tellement de victimes… Il a même failli causer la fin du monde ! Comment pourrait-il être considéré comme un héros ?

– Me permettez-vous de vous raconter une histoire ?

– Je suis tout ouïe.

La journaliste prend un biscuit. Maxime se rejette en arrière sur sa chaise, la tête levée vers le plafond.

– L’histoire que je veux vous raconter est celle du Chevalier au Lion… commence-t-il.

– Je ne la connais pas.

– Je n’en doute pas un instant. Mais vous allez comprendre…

Le professeur s’éclaircit la gorge et entame son récit.

.
.

Il était une fois, dans un temps plus ou moins reculé, un noble chevalier. Il vivait à Illumis, à une époque faste pour Kalos. Les communications entre régions étaient excellentes, le commerce et le tourisme florissants… Chaque jour, de nouvelles technologies améliorant le quotidien des gens étaient mises sur le marché. Les dresseurs étaient puissants et faisaient avancer la région à pas de géants.

À cette époque, ce chevalier était jeune, plein de rêves et d’ambitions. Il était fils d’un puissant de Kalos, de ceux qui font avancer le monde, et il ne faisait aucun doute qu’il suivrait les traces de son père. Il possédait un Némélios dont il avait fait son étendard.

Il est difficile de lister toutes les qualités du chevalier au lion. Je me contenterai de citer la plus importante, celle qui guida ses actions tout au long de sa vie.

C’était la bonté. Une bonté prodigieuse, brillante, infinie. Elle ne souffrait d’aucune ombre ni conditions. C’était une bonté inspirante, qui lui conférait un grand charisme. De fait, le chevalier attirait à lui des foules d’admirateurs.

Pendant de nombreuses années, le chevalier travailla dur pour le bien de Kalos. Il développa son entreprise pour créer des outils toujours plus utiles à la communauté. Il se déplaça sur des lieux de drame pour apporter son aide et son soutien. Il devint un bienfaiteur, adulé de tous.

Pourtant, malgré toute l’admiration qu’il suscitait, le chevalier était seul. Il avait de nombreux amis, mais ceux-ci n’étaient pas à ses côtés. Cette solitude, de plus en plus profonde au fil des ans, s’accompagna simultanément d’une grande déception envers les humains. En effet, il remarqua rapidement que les gens qu’il aidait s’enfermaient dans la fainéantise. Ils estimaient que l’aide apportée par le chevalier était normale et devait se poursuivre. Il essuya même, à son grand désarroi, des insultes, des moqueries et des reproches. Sa bonté se retournait contre lui.

Ces événements opérèrent un profond changement dans le caractère du noble chevalier. Il regarda autour de lui ne vit alors plus que le négatif dans ce monde. Il réalisa que les populations ne vivaient qu’en profitant et abusant des ressources du monde. Malheureusement, ces ressources étant limités, il songea au futur et un scénario catastrophique s’imposa à lui. Il vit une guerre, une guerre atroce où les êtres vivants s’affronteraient pour contrôler argent et énergie. Le chevalier essaya d’enrayer cette spirale infernale, mais le monde était trop vaste.

Tous ses efforts furent vains.

Et il était, chaque jour qui passait, toujours plus seul.

Toutes ses illusions avaient volé en éclat. Inutile de développer le désespoir, le chagrin et la colère qui furent les siens. Le chevalier perdit toute sa noblesse et sa bonté devint colère. Il ne resta plus qu’un homme amer, déçu par la vie et par les gens, désespéré face à un monde qui se gangrenait.

Et il décida de faire renaître ce monde.

Plus que tout, le chevalier craignait la guerre. Mieux que quiconque, il connaissait en les ravages, la désolation, le désespoir qu’elle engendre. Il voulait éviter cela, principalement pour le bien des Pokémon qu’il respectait plus que les hommes. Le but du chevalier devint la destruction, une élimination préventive de la population, et ce afin de purifier le monde. Il estimait que les gens ne pouvaient être changés et donc, que tous ne pouvaient pas être sauvés. Il fonda une organisation afin de parvenir à son but, et sélectionna des élus, parmi la population, dignes d’être sauvés.

Le chevalier disposait d’argent, d’énergie, de ressources. Son charisme lui permit de trouver nombre de fidèles qui adhérèrent à sa cause. Il chercha, à travers tout Kalos, les noyaux et les cellules de Zygarde, le Pokémon Équilibre, dans le but de se servir de son immense puissance pour parvenir à ses fins.

Personne n’imaginait que le chevalier, qui souriait toujours en apparence, pouvait manigancer un tel plan de destruction. Il ne fut pas inquiété et son plan vint à son terme avec peu d’accroc. Seuls, un groupe d’enfants qui veillait sur un des noyaux de Zygarde, eut des démêlées avec l’organisation du chevalier. Mais, même eux ne comprirent pas ce qui se tramait.

Et un jour, le chevalier lança la phase finale de son plan de destruction du monde. Il profita de la liesse et du relâchement due à une grande manifestation sportive pour s’emparer du joyau d’Illumis, sa Tour Prismatique. Il réveilla Zygarde, excitant sa colère contre l’humanité égoïste, afin que celui-ci se déchaîne sur le monde. Les choses semblaient marcher aussi bien qu’il l’avait prévu.

Il réalisa pourtant bientôt que non.

D’autres héros firent leur apparition, le genre qu’on croit banal, qu’on ne remarque jamais. Ces héros se dressèrent face au chevalier et tentèrent d’apaiser autant sa colère que celle de Zygarde. Grâce à leur amitié et leur courage, le soutien d’anciens alliés du chevalier qui avaient compris leur erreur, ils sauvèrent la ville d’Illumis.

Zygarde fut apaisé, mais pas le chevalier.

Ce dernier sombra dans la folie. Il voyait le monde continuer à se déliter, ceux qu’il croyait ses amis l’abandonner, Zygarde lui retirer son aide. Il perdit le contrôle de ses actes et déclencha le compte à rebours de la fin du monde.

Juché sur un Zygarde de pierre, bouillonnant d’une énergie malsaine, il fonça tout droit sur Flusselles. Son objectif était de jeter sa créature contre le cadran solaire de la ville, lui aussi étant une source d’énergie formidable… et très dangereuse. La collision de deux champs d’énergie aussi puissant causerait un cataclysme sans précédent. La fin du monde. Il ne voyait plus les choses clairement.

Les héros, accompagnés des meilleurs dresseurs de Kalos, se dressèrent une fois de plus contre lui. Parmi eux, on pouvait compter les champions de la région, deux Maîtres de Ligue, ainsi qu’un grand professeur. Ils firent tout ce qu’ils pouvaient pour arrêter le chevalier et sa monstrueuse créature.

Leur dévouement et leur courage toucha Zygarde. Le Pokémon Équilibre décida de se ranger du côté de ces humains qui mettaient leur vie en jeu, sans condition, pour sauver le monde. Il dévoila au monde la plus pure et parfaite de ses incarnations et utilisa son pouvoir pour détruire la grotesque créature de pierre qui tentait de l’imiter. Celle-ci fut réduite en poussière sous la puissance de la Nature elle-même.

Le monde fut sauvé.

Le chevalier au lion, quant à lui, disparut.

.
.

Maxime se tait et prend une gorgée de café. Son récit est terminé, il n’attend plus que les réactions de la journaliste. Celle-ci esquisse un sourire un peu gêné.

– Ce chevalier… C’était Lysandre, n’est-ce pas ? Vous m’avez raconté l’histoire de l’Événement Zygarde.

– Tout juste.

– Je ne voyais pas les choses comme ça.

– Lisez le livre. Tout est expliqué en détail. La personne qui l’a écrit était particulièrement proche de Lysandre. Ses actes ne sont pas justifiés, mais trouvent une explication.

Flavie soupire.

– Je ne sais pas comment expliquer ce sentiment... Mais mon cœur se serre quand je réfléchis à cette histoire. C’est tellement tragique.

Maxime esquisse un petit sourire triste.

– L’histoire de Kalos est tragique, souligne-t-il. C’est ce que m’a toujours dit une amie de mon grand-père, paix à son âme. Elle disait que c’était comme un récit mythologique. Entre les guerres sans fin, les rois déchus, les amours brisées ou, comme Lysandre, de nobles chevaliers qui sombrent dans les ténèbres… En dépit de sa gloire et de sa magnificence, les légendes de Kalos se terminent toujours mal.

– Je vois.

Visiblement secouée, Flavie boit une gorgée de café, désormais froid.

– Et ce chevalier… Enfin, je veux dire, Lysandre… reprend-elle. Vous dîtes à la fin de votre récit qu’il a disparu. Qu’est-il devenu, finalement ?

– Personne ne le sait, avoue Maxime. On a jamais retrouvé son corps, mais il n’a jamais non plus refait surface. Son sort nous est totalement inconnu. Mais bon, cent ans après, il ne fait aucun doute qu’il est définitivement décédé.

– Oui, probablement…

La journaliste éteint son casque et le repousse en arrière. Il se loge autour de son cou, comme d’ordinaire. Elle coupe l’enregistrement.

– Je pense que j’ai entendu tout ce que je voulais entendre. Je vous remercie pour le récit, et pour la copie du livre. Je vais l’étudier avec soin.

– Mais c’était un plaisir. J’adore raconter des histoires !

– Et vous le faites particulièrement bien.

Flavie se lève, imitée par Maxime. Tous deux se serrent la main.

– Je vous remercie de m’avoir accordé de votre temps, dit la jeune femme. Je vais probablement vous recontacter, j’aurais sûrement des questions à propos de ce livre.

– Je me tiens à votre disposition.

– Merci encore.

Le professeur escorte son invitée jusqu’à la porte et la regarde partir, satisfait. Il lève les yeux vers le ciel, où la menaçante couverture nuageuse laisse entendre qu’il va bientôt pleuvoir.

– Augustin Platane… dit-il. J’espère que, de là où tu es, tu es fier de moi. Comme moi, je suis fier de toi. Et j’espère que ton ami Lysandre a aussi trouvé la paix, désormais. Il le mérite.

Après un dernier sourire adressé au ciel, le jeune homme rentre dans son laboratoire. Il a encore du travail.