Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

Les dresseurs de demain de Shaam



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Shaam - Voir le profil
» Créé le 18/08/2018 à 21:44
» Dernière mise à jour le 18/08/2018 à 21:44

» Mots-clés :   Action   Aventure   Hoenn   Humour

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
23 - L'effet Newman
Dubois arriva au deuxième étage et constata que quelques murs étaient endommagés.
Il entendit des coups provenant du fond d’un couloir. Dubois pressa le pas et trouva Donphan à l’intérieur d’un bureau, aux prises avec le directeur de l’académie. Le vieil homme était accroupi derrière son bureau et suait comme un Makuhita sur un tapis roulant.

- Cliff !

Tortank sortit de sa Pokéball et se dressa face à Donphan. Tandis que ce dernier toisait son imminent adversaire, Dubois aida le directeur à évacuer la pièce.

- Vous en avez mis du temps pour arriver ! grommela le directeur. Bon Dieu, pour les stationnements en deuxième position, vous débarquez comme des Nosférapti, mais quand il s’agit de la sécurité des…
- Je ne suis pas de la police. De toute manière, vous avez des Pokémon pour vous défendre, non ?
- Ça fait plus d’un an que je n’ai pas fait de combat ! En plus contre cette bête enragée, non merci !
- Je m’en occupe, allez au rez-de-chaussée, le personnel et les élèves sont là-bas.
- Vous êtes drôle vous, je fais quoi si je tombe sur une autre de ces bestioles ? Vous avez entendu les secousses dans le bâtiment ?
- Ce Donphan est le dernier Pokémon qui traine, la voie est libre, magnez-vous !
- Je vous ferai savoir que je suis le directeur de cet établissement, hein, alors vous changez de ton !
- Ça m’est égal, vous n’avez aucune autorité sur moi. Allez !

Le directeur s’éloigna en pestant. Dubois soupira et regarda Donphan.

- Bon, qu’est-ce qu’on va faire de toi.

Le pachyderme gratta le sol et entama une attaque Bélier.

- Tu vas droit au but, hein. Cliff, Casse-Brique !

Tortank frappa Donphan sur le crâne mais l’éléphant n’en tint pas compte et percuta la tortue des mers contre un placard, lequel tomba avec tous les dossiers qui s’éparpillèrent par terre. Dubois serra les dents. « Oups… »

- Ressaisis-toi ! Attaque Saumure !

Cliff pointa ses canons en bas et tira un puissant jet d’eau qui obligea Donphan à reculer.

- Il faut qu’on sorte de ce bureau, je ne veux pas me faire gronder davantage par le vieux grincheux…

Donphan se roula en boule et se mit à tourner comme une roue d’un véhicule en pleine accélération.

- Bon sang il ne nous laisse pas deux secondes pour respirer… et on ne peut pas simplement esquiver. Tu peux tenir le coup, Cliff ?

Cliff hocha la tête alors que Donphan arrivait. Il l’attrapa à bout de bras et le contint jusqu’à ce que l’éléphant cessa de tourner puis le projeta en hauteur. Donphan heurta le plafond, occasionnant quelques fissures au passage. Il retomba aussitôt vers Tortank en libérant une lueur blanche.

- Attention, c’est un Tacle Lourd ! cria Dubois.

Tortank se protégea en croisant les avant-bras mais sentit quand même le choc. Donphan retomba sur une table de réunion qu’il écrasa. Cliff agita ses bras, récupérant encore du choc. Dubois s'étonna. « Il a dégusté à ce point? »
Le Pokémon Armure barrit et rassembla de l’énergie autour de son front. Dubois déglutit.

- Fracass'Tête ?! C’est pas un Donphan c’est un Tyranocif !!

Dubois regarda autour de lui, paniqué. « Cliff commence à prendre cher, quelques coups de plus et je frôle le KO… mais si Cliff esquive le mur entier sera rasé... et cette brute sait que je cherche à minimiser les dégâts matériels. Pas le choix !! »

- Cliff, utilise Mur de Fer !

Une lueur grise couvrit le corps de Tortank. La tortue des mers concentra l'énergie au maximum dans ses bras et s’apprêta à recevoir le choc. Donphan se lança dans un barrissement strident.

- Maintenant !

Tortank écarquilla les yeux en recevant la charge de Donphan mais parvint à retenir le mastodonte à bout de bras métallisés. En dépit de l’avantage du type, Tortank fut repoussé en arrière – sans lâcher prise pour autant.

- Balance-le dans le couloir, Cliff !

Tortank souleva Donphan et le lança hors de la pièce. Le Pokémon et son dresseur sortirent à leur tour. Dubois regarda la créature face à lui qui grattait le sol avec sa patte avant tout en respirant bruyamment. « Cette combativité, cette ténacité… hmmm… »
Il réajusta sa casquette gavroche.

- J’en ai assez de subir ses attaques, c’est à nous d’imposer notre rythme.

Tortank acquiesça d’un cri.

~~~

Les policiers commencèrent à se diriger vers les escaliers, comme s’ils n’avaient pas entendu le message d’Edgar. Visiblement, personne ne le prenait au sérieux, mis à part Guillaume et Jawad, lesquels réfléchissaient encore à ce que leur ami venait de leur demander.

- Guillaume, qu’est-ce qu’on fait ? dit Jawad.
- Je, euh… balbutia Guillaume.

Jawad vit les policiers passer à côté de lui, ne lui accordant que quelques regards brefs mais intimidants. Guillaume tremblait comme une feuille. Jawad baissa la tête, pas du genre à s’opposer aux adultes – d’autant plus qu’il s’agissait d’agents de la loi, mais tourmenté par la requête de son ami. « Comment comptes-tu devenir le gardien de Holon si tu ne peux pas affronter cette situation ? Fais quelque-chose, allez, espèce de… »

- ATTENDEZ !

Les policiers et Jawad se retournèrent vers Guillaume, lequel sortit son Grodrive. Le fantôme-ballon était un peu dégonflé et flottait avec difficulté.

- Si vous vous mêlez de ce combat, je vais le faire exploser !!

Jawad écarquilla les yeux. Les policiers ainsi que les professeurs s’échangèrent des regards interloqués. Guillaume était parfaitement conscient de la folie qu’il commettait.
D’habitude c’était le sage bonhomme qui tâchait de ne pas causer d’embarras à ses parents. Il s’était même rendu une fois dans un poste de police pour remettre un portefeuille trouvé par terre. Guillaume était voué à devenir un citoyen honnête et sans histoires, mais là il expérimentait pour la première fois la rébellion incomprise et le frisson de la transgression. Néanmoins, avec ses jambes qui flageolaient et les larmes qui perlaient de ses yeux, le blondinet n’était pas très convaincant. L’un des policiers s’avança et sortit un Raichu.

- Essaie un peu pour voir, petit.

Guillaume suait et haletait comme s’il endurait tout le stress du monde. A côté de lui, Jawad restait immobile, sans rien dire, serrant les dents et les poings. « Mais qu’est-ce que tu attends, gros crétin ? Tu ne vas pas soutenir tes amis ?! »
En fait il craignait qu’une confrontation avec la police n’entache son casier judiciaire ou se solde par un séjour en prison qui l’empêcherait de retourner chez sa famille à Holon. De plus il n’arrivait pas à saisir tout à fait pourquoi il était si important pour Edgar de voir Andy.

- Garamonde ! s’exclama le professeur Harper. Tu t’entends parler un peu ? Et toi Narshe, tu n’essaies pas de raisonner ton camarade ?

Jawad ferma les yeux. « Tais-toi, sombre idiot !! »

- On n’a pas de temps à perdre, dit le policier. Poing Eclair.

Raichu bondit vers Grodrive en brandissant son poing électrisé. Guillaume n’arriva pas à prononcer un ordre, tellement sa défaite paraissait certaine. L’attaque du rongeur atteignit alors Pingoléon, lequel venait de s’interposer en face de Grodrive. Guillaume se tourna vers Jawad et afficha un grand sourire, ému par l’intervention de son ami, sans toutefois songer aux conséquences potentielles.
Pingoléon et Grodrive firent face à Raichu, déterminés. Pour autant il était clair pour tout le monde que les deux Pokémon n’allaient pas tenir trente secondes.

- Ça va chauffer pour vos fesses au tribunal, grommela le policier, soyez-en surs. Raichu…
- ARRÊTEZ !

Guillaume et Jawad se retournèrent vers le professeur Montelli. Le vieil homme posa ses mains sur leurs épaules.

- Ça suffit les enfants, vous en avez fait plus qu’assez pour votre camarade.
- Mais monsieur… commença Guillaume.
- Ne faites pas souffrir vos Pokémon davantage. Je comprends votre dévotion mais Newman ne voudrait pas que vous ayez des problèmes à cause de lui. Monsieur…

Montelli alla à la rencontre du policier. Jawad eut un soupir nasal, soulagé par cette intervention. Il se mordilla les lèvres. « Ca t’arrange bien, Jawad. Edgar, lui, serait déjà en plein combat… »
Guillaume se résigna à obéir à son professeur mais garda une mine renfrognée. Les deux dresseurs rappelèrent leurs Pokémon puis remarquèrent que le policier en face venait de faire de même, tout en discutant avec Montelli. Il hocha la tête et retourna auprès des autres officiers.

- Écoutez, passez à travers chaque étage et cherchez chaque classe, chaque couloir. Je veux que vous trouviez tous les élèves qui restent. Neutralisez tout Pokémon hostile que vous croisez. Allez, grouillez !

Les hommes s’exécutèrent et foncèrent vers les escaliers, dépassant Guillaume et Jawad sans leur accorder un regard. Les deux jeunes hommes tous s’en étonnèrent et accoururent auprès de Montelli.

- Monsieur !
- Monsieur Montelli…
- Reposez-vous, les jeunes. Il est temps que cette situation regrettable s’achève. Allez soigner vos Pokémon au Centre.
- Non, on va attendre Edgar ici, dit Jawad.
- … Comme vous le sentez.

Montelli se dirigea vers ses collègues. Épuisés, Guillaume et Jawad s’assirent aux premières marches des escaliers.

- Quelle incroyable journée… souffla Guillaume.
- C’est clair, ça dépasse tout ce qu’on a traversé au cours du voyage.

~~~

Armaldo arriva en courant et donna de larges coups de griffes. Scorplane et Mangriff les évitèrent avec adresse. Edgar hocha la tête.

- Steve, Griffe Acier !

Scorplane fit luire ses pinces et se lança dans l’attaque. Armaldo leva le bras gauche et bloqua les pinces de Scorplane avec sa griffe, mais celui-ci répliqua avec une cinglante Queue de Poison.

- Bon réflexe, dit Edgar.

Mangriff arriva pour attaquer à son tour mais Armaldo le rembarra d’un coup de queue. Les Pokémon d’Edgar reprirent leurs distances.

- Vibraqua, Oskar ! ordonna Andy.

Armaldo conjura une sphère d’eau au-dessus de lui et l’envoya vers Scorplane. Au moment où ce dernier allait s’échapper, Armaldo remua le bras et la Vibraqua changea de trajectoire pour se diriger vers Mangriff.

- Attention ! cria Edgar.

Mangriff sauta au dessus de la Vibraqua et se mit à courir pour la semer. Armaldo arrêta sa sphère avant qu’elle n’explose contre un mur. Edgar grimaça. « Félix n’a pas d’attaques spéciales, et il se blessera s’il l’explose avec une attaque physique… »

- Dard Venin, Steve, vers la sphère ! cria Edgar en pointant le projectile du doigt.

Steve s’exécuta. Les dards atteignirent la Vibraqua, mais sans affecter réellement sa contenance.

- Bon bah… Éboulement !

Steve créa de l’énergie grise autour de lui et la transforma en cinq rochers. Le scorpion envoya la salve en laissant un moment d’intervalle entre chacun des rochers. Armaldo bougea sa sphère, évitant ainsi le premier rocher qui détruisit une chaise sur son chemin. Scorplane tenta aussi bien que mal de mouvoir son attaque à la manière d’Armaldo. Les second et troisième rochers ratèrent la Vibraqua, celle-ci en plein mouvement, et menacèrent de percuter Andy qui se sauva.

- Oups, désolé ! fit Edgar.

Andy ne répondit rien. Armaldo envoya sa Vibraqua vers Mangriff, lequel observait ce duel étrange. Le chat-furet s’apprêta à s’échapper.

- Félix, attends ! Fais-moi confiance, et reste à ta place ! Au pire attaque avec Eclategriffe, ok ? Steve !

Mangriff serra les crocs, prêt à recevoir la bombe aqueuse. La Vibraqua arriva en face de lui, et explosa, transpercée par les deux rochers restants. Andy hocha la tête. « Usage particulier d’Éboulement, il a gardé les deux derniers rochers pour intercepter plutôt que d’attaquer, et s’est servi de Mangriff comme appât pour attirer la Vibraqua… pas mal, pas mal du tout… »

- Steve, YOU ROCK ! exalta Edgar.

Steve sautilla en ricanant.

- Si Scorplane n’avait pas été assez rapide, dit Andy, Mangriff aurait pris cher.
- Je ne te cacherai pas que j’ai eu chaud. Mais je ne peux pas continuer à subir ton attaque.

Andy resta silencieux un moment, songeur.

- Qu’est-ce que tu as ? demanda Edgar.
- … Combien tu as eu, à ta note générale ?
- Hein ? Pourquoi ?
- Réponds à ma question.
- … 15,91.

Andy eut un petit rire.

- T’as bien bossé, c’est cool…
- C’est quoi le rapport ? Tu as eu combien, toi ?
- 12,28.

Edgar écarquilla les yeux.

- Sérieux mec ?!
- Oui, sérieux. On m’a retranché des points parce que je suis trop turbulent.
- Attends, il n’y pas de règle qui donne autant d’importance à l’attitude de l’élève, même la note de discipline ne peut pas affecter la note générale à ce point…
- EXACTEMENT ! Tu comprends, maintenant ? Ma seule satisfaction c’était la tronche des profs quand j’enchainais les 15 et les 17, et maintenant ils claquent des doigts et tout ça part en fumée ?!

Edgar réfléchit un moment et fronça les sourcils.

- C’est… totalement arbitraire ! Je… je ne sais pas qui a fait ça, mais je parie que le directeur n’est pas au courant. Alors, c’est pour ça… pourtant tu étais travailleur comme élève, et eux… ils ont piétiné tout tes efforts ?!

Andy écarquilla les yeux en voyant Edgar sur le point de… pleurer ?

- Mais, d’où est-ce que tu chiales, là ??
- Mais parce que je m’en veux !!

Andy redoubla d’étonnement.

- Qu’est-ce que tu racontes ?!
- Depuis toutes ces années, j’ai toujours vu que ça n’allait pas avec toi, mais je n’ai jamais bougé le petit doigt pour te parler !
- Que… je n’ai pas besoin de ta pitié !
- Bougre d’idiot ! Ca te tuerait de t’ouvrir à quelqu’un ?
- A quoi bon, pour s’apitoyer les uns sur les autres, non merci.

Edgar renifla sa morve et s’essuya les yeux.

- Pourtant si j’arrive à te tenir tête en ce moment, c’est grâce au support des autres. Il y a trois mois je n’aurais pas tenu deux minutes face à toi.
- Foutaises.
- Non. J’ai l’impression d’avoir gaspillé un temps précieux. C’est une sensation horrible.
- Mais pourquoi ça te travaille autant ? Pourquoi tu te sens responsable ??
- Parce qu’on ne peut pas compter sur les profs de l’académie pour comprendre les problèmes d’un élève. Et les autres élèves sont pour la plupart trop cons, trop cruels et indifférents – évidemment, on est juste des gosses. Moi on se foutait de ma gueule parce que j’avais un Psykokwak, alors que d’autres avaient des Gobou et des Machoc. Aucun prof n’a cherché à me montrer que je pouvais en faire un Pokémon puissant. On se moquait de moi quand je disais que je voulais avoir une équipe au top.
- Moi je respectais ce but. Enfin je te l’ai jamais dis…
- Merci. Il a fallu attendre le voyage itinérant pour que je reçoive de l’aide. Les adultes à l’école ne se soucient pas de nous, pour eux on est juste des réceptacles pour le programme de chaque année. Et visiblement, tes parents à toi, je ne les connais pas mais je suppose qu’ils ne sont pas très présents pour toi.

Andy s’aventura à parler.

- Toujours au boulot, voyages d’affaires par ci, par là… et on n’est même pas riches, putain…

Edgar hocha la tête. Il réalisa qu’il venait de réussir à faire parler Andy.

- Je comprends. Et ton prof de voyage itinérant, du peu que j’ai vu de lui, il n’était pas méchant avec toi, mais je suis sûr que tu refusais de te confier à lui.

Andy ferma les yeux, touché dans le mille. Une sensation étrange envahit son corps.

- Je me sens responsable, parce que… à part moi, il n’y a personne d’autre.

Edgar fouilla dans sa poche et en sortit le lecteur mp3 rouge et noir. Andy s’étonna.

- Je l’ai trouvé par terre pendant que je te cherchais en ville.

Le brun s’approcha du garçon aux cheveux ébouriffés, sans tenir compte d’Armaldo, en tendant l’objet. Andy prit son lecteur.

- J’y ai ajouté des chansons. J’espère que ça te plaira.
- Mer… ci…

Edgar recula alors qu’Andy regardait son lecteur sans savoir quoi en faire. Il le fourra dans sa poche et secoua la tête.

- Ne va pas croire qu’on va arrêter ce combat juste pour ça !
- Je me doute.

Andy ferma les yeux et grimaça. « Putain pourquoi est-ce que j’ai envie de CHIALER ?!! »

~~~

- Attaque Aqua Jet ! dit Dubois.

Cliff fonça comme une torpille, entouré d’eau. Donphan électrisa ses défenses et le repoussa.

- Malin… Casse Brique !

Tortank frappa avec le tranchant de la patte. Donphan sentit le coup mais y résista et prépara une nouvelle attaque Crocs Eclair.

- Encore !

Cette fois Donphan céda et se retrouva plaqué au sol. L’électricité sur ses défenses se dissipa.

- Maintenant Saumure !

Tortank tira de l’eau par ses canons vers le haut. L’eau se rassembla en une immense sphère qui s’abattit aussitôt sur Donphan. Le pachyderme apprécia très mal la douche glaciale. Il recula en arrière et créa une sphère d’énergie argentée devant lui. Dubois mit un moment à deviner l’attaque.
- Pouvoir Antique, hein ? Dégage-moi ça avec Casse Brique.

Tortank éclata le projectile lumineux qui se dissipa dans toutes les directions. Donphan apparut alors, en plein Bélier.

- Mur de Fer ! cria immédiatement Dubois.

En un instant, Cliff prit une teinte métallisée et stoppa Donphan avec la paume de son bras gauche. L’éléphant était épaté.

- Content de voir que tu as un sens tactique mais il n’est pas très développé…

Owen haussa les sourcils à la pensée qui venait de lui traverser l’esprit. Il fouilla dans la poche intérieure de son trench-coat et sortit une Hyperball.

« L’idée d’en porter toujours une sur moi va enfin servir à quelque chose. Edgar a capturé un Mangriff… et Nadine un Heledelle. Et moi je n’ai rien capturé depuis que j’avais leur âge. »

- Tu comprends ce que ça veut dire ?

Pour seule réponse, Donphan lâcha un grognement hostile.

- Je ne sais pas par quoi tu es passé mais tu as causé assez de dégâts ici.

Donphan tenta une attaque Roulade.

- Je pourrais essayer Tour Rapide mais je risquerais de me faire écraser dans un jeu de toupies géantes… Aqua Jet, en haut !

Tortank se propulsa, passa au dessus de Donphan et atterrit plus loin. Dubois s’adossa au mur pour éviter le Pokémon Sol. Celui-ci cessa sa Roulade, constatant que l’ennemi n’était plus en face de lui.

- Psykoud’boul, allez !

Alors que Donphan se retournait derrière lui, Tortank le percuta en plein flanc gauche.

- Et Pistolet à O !

Cliff mitrailla Donphan de plusieurs jets d’eau petits mais concentrés. Donphan ferma les yeux et recula, agacé par l’assaut. Il chargea en avant avec Crocs Eclair mais Tortank avait disparu.

- Tu vois, CA s’est de la diversion ! Cliff !

Tortank fondit sur Donphan d’en haut dans un fulgurant Aqua Jet.

Donphan SE RELEVA.

Dubois enleva sa casquette gavroche et s’épongea le front. L’homme regarda le Pokémon droit dans les yeux.

- Tu veux devenir encore plus fort, c’est ça ? Je peux t’aider à réaliser ton potentiel.

Dubois brandit son Hyperball. Donphan s’étonna un instant puis reprit son air hostile.

- Si tu restes ici, les humains vont venir et t’enfermer dans un asile pour Pokémon. Tu comprends ça ? Cliff, explique-lui.

En effet, Tortank avait un vocabulaire plutôt riche et une connaissance étendue du monde des hommes. Il parla à Donphan dans la langue des Pokémon, sans recevoir de réponse toutefois.

- Alors ?

Donphan électrisa ses défenses et attaqua.

- Futile. Luminocanon.

Tortank se mit à quatre pattes et tira deux tirs d’énergie très concentrés que Donphan encaissa avec son armure. Pour autant Donphan resta debout, luttant pour résister aussi longtemps que possible. En voyant la ténacité de son adversaire, Tortank renforça son attaque, laquelle ricochait partout dans le couloir.

- Cliff, stop.

Tortank cessa son attaque, révélant Donphan encore debout, mais aux portes du KO. Dubois s’approcha de lui en sortant une Super Potion de la poche de son trench-coat. Il aspergea le contenu sur le corps de Donphan, sous le regard vigilant de Tortank. L’éléphant reprit des couleurs et regarda l’humain. Dubois s’accroupit et tendit son Hyperball.

- On continue ou on arrête, c’est ton choix.

Donphan fixa la sphère un long moment puis regarda l’homme en face de lui. Ses yeux étaient différents de ceux des hommes qu’il avait croisés auparavant. Dubois soutint le regard du Pokémon avec fermeté et patience. Le Pokémon grogna, toucha l’Hyperball de sa trompe et fut happé dedans. Dubois se releva en regardant la sphère jaune, noire et blanche.

« Avec ma mutation à Sinnoh, on peut dire que je suis pour le changement en ce moment. Heureusement que la loi du dressage permet de garder un Pokémon capturé, quelles que soient les circonstances… »

~~~

- Griffe Acier !

Armaldo se déchaina autour de lui, sans parvenir à atteindre Mangriff ou Scorplane.

- Incapables de prendre un coup et rester debout, ils sont obligés de fuir comme des Rattata… grommela Andy.
- Andy…
- QUOI ?

Edgar mit un moment à dire ce qu’il avait à dire :

- Le seul vrai ami que tu t’es fait à l’académie… c’était Cody, n’est-ce pas ?

Andy s’étonna.

- Qu… tu te rappelles de lui ??
- Oui, ça me sautait aux yeux comment tu souriais quand il était avec toi.

Le regard agressif d’Andy se démonta.

- J’aurais tout entendu aujourd’hui…
- Evidemment on l’a vite oublié quand il a changé d’école. Je ne sais pas ce qu’il lui est arrivé. Tu le sais, toi ?
- Ta gueule… grommela Andy.
- D’accord, d’accord, sujet sensible, j’arrête. Ecoute, je ne peux pas arrêter les policiers qui vont arriver, mais je peux t’aider après, quand tu en auras fini de tout ça.
- Tu veux faire ami-ami et ça ne te dérange pas de savoir que je vais aller en prison ?
- Bah tu veux quoi, t’aider à s’échapper ici pour aller se réfugier dans une autre région ?
- Euh…
- On est juste des gamins, on ne peut pas faire grand-chose à part des combats Pokémon. Tu as fait une grosse connerie, la société va te punir et moi je ne peux rien faire. En même temps tu l’as cherché. Mais ce que je peux faire, c’est t’aider à surpasser tout ça quand tu auras purgé ta peine. En supposant que tu n’instigues pas une rébellion en taule.
- ……………….
- On peut accomplir de grandes choses grâce aux autres. Monsieur Dubois m’a montré les erreurs que j’étais trop con pour réaliser, Jawad et Guillaume m’ont poussé à fixer un but précis et travailler dur pour y arriver, et Nadine m’a appris que tout le monde est capable de faire preuve d’une force exemplaire.

Andy se remémora son combat contre Noémie.

- Tu pourrais devenir tellement plus fort, si tu accordais une place aux autres dans ta vie.
- Putain mais tu dégoulines de guimauve…
- Très bien. Evidement que tu ne vas pas me croire, sur la base de mes mots seuls. Mais je vais te le démontrer tout de suite. Steve, Aiguisage !

Scorplane se frotta les pinces. Mangriff se tint prêt à intervenir à tout moment.

- Genre ça va faire une différence ! ricana Andy. Oskar, Plaie-Croix !
- Plaie-Croix !

Andy écarquilla les yeux. Armaldo attaqua en croisant les griffes du haut vers le bas, tandis que Scorplane fit de même mais de bas en haut. Griffes et pinces se croisèrent au milieu de leurs trajectoires respectives dans un fracas d’énergie qui repoussa les deux Pokémon. Andy ne cacha pas sa surprise.

- Les keufs vont venir te botter le cul, et tu l’auras bien mérité ! déclara Edgar.
- Quoi, parce que j’ai mérité ce changement de note insensé ?!
- PARCE QUE LÂCHER DES POKEMON ENRAGES DANS L’ÉCOLE NE RÉSOUT RIEN, TRIPLE CRÉTIN !!!

Andy eut un mouvement de recul.

- Tout le monde n’est pas concerné par tes problèmes, tu as mis en danger des personnes qui ne t’ont rien fait ! Si ça se trouve il y a des blessés !
- C’est leur faute de ne pas être assez forts.
- Arrête avec tes rationalisations de merde.
- Je suis déçu Newman, j’ai cru un moment que tu étais de mon côté…
- Je ne suis du côté de personne, je cherche juste à comprendre les choses par moi-même et faire ce que je peux.
- Toujours une réponse à tout, TOI !

Andy commença à fulminer. Edgar lui-même était étonné par son propre sens de la répartie. « Comme quoi, on ne sait jamais de quoi on est vraiment capable… »

- Tu n’as plus de contrôle sur cette conversation ni même l’issue de ce combat, tu commences à perdre les nerfs…
- LA FERME !! TRANCHE !

Armaldo se rua vers Mangriff.

- Détection !

Mangriff bondit en arrière avec aisance. Armaldo frappa l’air.

- LUMINOCANON !!

Armaldo tira le rayon argenté.

- Couvre Félix, Steve !

Scorplane se plaça devant Mangriff, tendit les bras puis ouvrit les pinces et reçut le rayon de plein fouet.

- Félix…

Félix prit appui sur le dos courbé de Scorplane, ce dernier endurant le Luminocanon, et bondit au dessus du Luminocanon.

- Griffe Ombre !!

Alors qu’il retombait vers Armaldo, Mangriff rassembla l’énergie spectrale dans ses bras.

- Pfff ! Oskar !

Oskar leva la tête et dirigea son rayon vers Mangriff qui disparut dans la déferlante minérale. Pour autant Edgar ne montra aucune réaction. Andy plissa les yeux et remarqua l’énergie du rayon en train de s’éparpiller dans tous les sens. Mangriff émergea du Luminocanon dans une furie de coups de griffes. Le chat-furet continua à frapper le rayon avec frénésie jusqu’au point où il le dissipa entièrement. Il atterrit sur la tête d’Armaldo, ce dernier trop étonné pour réagir.

- Poing GLACE !

Mangriff asséna un coup de poing givré digne d’un Tartard en plein dans le crâne d’Armaldo.

- Steve !

Scorplane sourit. Il avait stocké le Luminocanon dans ses pinces, lesquelles brillaient tout en dégageant de la fumée. Andy était épaté.

- Griffe Acier !

Steve fondit sur Armaldo et le larda de multiples coups accompagnés d’un rire vicieux. Le Pokémon Plaque recula en arrière, endolori et dépassé, découvrant la virulence d’une attaque qu’il utilisait depuis toujours. Andy se tapa le front et éclata de rire.

- Mais c’est que tu assures, quand tu t’y mets sérieusement ! Haha, il t’a bien dressé ton prof !
- … Félix, Griffe Ombre !

Mangriff rejoignit Scorplane dans son assaut. Les deux Pokémon se déplacèrent à toute vitesse autour d’Armaldo tout en le rouant de coups, sans lui laisser le temps de réagir. Andy ne riait plus. Il inspira.

- CENTRIFUGIFLE !!!

Armaldo tourna sur lui-même à une vitesse déconcertante. Scorplane reçut alors un cinglant coup de queue qui l’envoya s’écraser contre un mur. Armaldo continua sa rotation furieuse et frappa Mangriff mais ce dernier disparut. Une nuée de Mangriff apparurent face au grand fossile.

- Reflet ?! s’étonna Andy.

Armaldo continua à s’agiter en balançant des coups de bras et de queue, dissipant plusieurs clones au passage. Un moment plus tard, il cessa sa rotation et chancela. Il restait encore quelques clones. Andy serra les dents. « Voilà pourquoi je n’aime pas utiliser cette attaque… »

- Griffe Acier !

Les Mangriff sautèrent sur Armaldo. Les clones le traversèrent et disparurent, tandis que le vrai porta son attaque avec succès.

- Avec Mur de Fer suivie de Surpuissance ou Hydroqueue, tu m’aurais eu depuis longtemps. Et ne pense même pas à blâmer ton professeur.
- Ne te la joue pas prof de Combat Direct, j’ai encore ça pour te botter le cul. LAME DE ROC !

Armaldo leva les bras et conjura de longues lames rocheuses. Edgar déglutit.

- Félix, Détection ! Steve, euh… colle-lui au cul ! s’exclama Edgar en pointant Armaldo du doigt.

Félix évita les projectiles avec habilité. Steve prit de l’élan et plana rapidement vers Armaldo pour se blottir contre l’une de ses jambes. Les lames de roc s’écrasèrent au sol dans un bruyant fracas. Edgar se couvrit derrière un bureau pour éviter les débris. Andy était protégé par le grand corps de son Pokémon. Edgar hocha la tête. « S’il était calme, il aurait manipulé les lames de roc comme la Vibraqua de tout à l’heure. Il perd son sens tactique, je dois en profiter ! »

Edgar sortit de sa cachette, constatant les fissures au sol. Armaldo tenta de chasser Scorplane en agitant sa jambe. Voyant un coup de griffe arriver vers lui, le scorpion lâcha prise et s’éloigna.

- Tranche !

Steve bloqua le coup avec ses pinces. Il grimaça sous le poids du coup mais parvint à rester debout.

- Voyons si ton Rapion de foire peut résister à une deuxième Tranche !

Armaldo leva son bras libre et abattit sa griffe sur Scorplane, lequel bloqua l’attaque de sa pince gauche. Steve s’enfonça dans le sol sous la force du coup mais resta debout. Andy s’avoua étonné.

- Oskar, enterre-le dans le carrelage !

Armaldo poussa plus fort, jouant de son poids pour faire flancher Scorplane.
Pour seule réaction, Scorplane ricana.
Andy haussa les sourcils. Edgar sourit.

- Ton Luminocanon de tout à l’heure est encore stocké dans les pinces de Steve. Scorplane est un Pokémon taillé pour la défense, il a converti ton attaque en l’équivalent d’un Mur de Fer.
- Qu…
- STEVE !!

Steve fléchit les genoux et frappa le sol de sa queue pour sauter en haut, repoussant ainsi les griffes d’Armaldo.

- Heavyy METAL CLAW !!

Steve frappa Oskar sans retenue aucune.

- Et Queue Poison !

Steve se retourna et gifla Armaldo d’un coup de queue. Le scorpion reprit ses distances en planant au sol. Mais Edgar n’avait pas fini.

- Félix !

Mangriff courba son dos et hérissa ses poils tout en poussant un sinistre miaulement.

- Griffe Ombre !

Mangriff sauta sur Armaldo et se déchaîna sur lui à coups de larges griffes d’énergie sombre. Andy vit rouge.

- HGNNNN PLAIE-CROIX !!!

Armaldo fit luire ses bras et frappa en X, créant la grande croix d’énergie. Mangriff se dédoubla in extremis et atterrit au sol, laissant son Reflet se faire trancher.

- Plaie-Croix, Steve !

Scorplane attaqua avec sa Plaie-Croix qui était clairement moins impressionnante. Armaldo bloqua le coup sans grande peine en croisant ses bras. Il s’aperçut alors que Scorplane venait de disparaitre.

- Attention Oskar !! cria Andy.

Mangriff et Scorplane venaient de se positionner des deux côtés d’Armaldo. Ils sautèrent en même temps.

- Allez ! cria Edgar en frappant dans le vide. Griffe Acier et Griffe Ombre !!

Scorplane et Mangriff arrivèrent côte à côte et frappèrent Armaldo. Le grand Pokémon recula et faillit tomber en arrière.

- Tu vois Andy ? cria Edgar. Voilà la force que j’ai bâtie grâce à mes amis !
- Vibraqua…

Une sphère d’eau apparut au dessus de Scorplane et Mangriff et s’abattit sur eux. Les deux Pokémon se tétanisèrent, sonnés par la douche glaciale. Edgar remarqua le regard sombre d’Andy.

- Lame de Roc.

Armaldo créa cette fois-ci une dizaine d’épées de roche et les envoya vers le duo. Edgar comprit alors qu’il avait un choix douloureux à faire.

- Steve ! Couvre Félix !

Scorplane reprit ses esprits et se plaça devant Mangriff. Le temps que ce dernier réalise ce qui allait se passer, Scorplane se couvrit la tête et le corps avec ses pinces et reçut les lames de roc. Mangriff assista, bouche bée, à son coéquipier en train de subir l’assaut.

Edgar serra les dents. « Désolé de te faire souffrir pour régler mon problème… »
La dernière Lame de Roc explosa contre Scorplane, lequel resta debout un moment avant de s’effondrer raide KO.
Armaldo était plus qu’exténué et seule sa détermination le maintenait debout. Lui et Andy constatèrent que Mangriff n’était plus là.

- CLOSE COMBAT !!!

Félix surgit près d’Armaldo et se lança dans une furie de coups enragés, déterminé à venger son confrère.

- Oskar, Plaie-Croix !!

Armaldo n’arriva pas à bouger. Andy serra les dents.

- Griffe Acier !
- … Ténacité !!

Une lueur rouge couvrit le corps d’Armaldo.

~~~

Au même moment, les policiers avaient fini de parcourir tous les étages de l’académie et s’étaient rassemblés avant de monter au dernier étage.

- Il y a un combat qui se déroule là-haut, dit le chef de l’équipe. Vu le vacarme c’est pas des Rondoudou. On débarque et on neutralise tous les Pokémon qu’on trouve, sans quartier.
- Oui !
- Compris !

~~~

Armaldo encaissa la Griffe Acier de Mangriff sans broncher, en fixant le petit Pokémon d’un regard furieux.

- Poing Glace !

Mangriff ramena son bras en arrière, celui-ci chargé d’énergie glaciale. Armaldo cria et para le coup de Mangriff d’un coup de griffe. Andy s’en étonna et réalisa qu’il n’avait pas tenté d’ordonner une riposte. « Oskar devrait être KO, pourquoi il résiste encore ? Son adversaire le pousse à se dépasser à ce point ?! »
L’effet de la Ténacité se dissipa et le corps d’Armaldo libéra de la vapeur. « Jamais un adversaire de mon âge ne m’aura poussé aussi loin dans mes derniers retranchements. Newman… »

~~~

Les policiers finirent de dévaler les escaliers et inspectèrent rapidement les pièces à proximité. Le chef remarqua le couloir menant au studio où se trouvaient Edgar et Andy.

~~~

Mangriff était également à bout de forces et haletait. Andy ouvrit la bouche en voyant Oskar se démener encore pour bouger. Il plissa les yeux et serra le lecteur mp3 dans sa poche. Oskar brandit son bras face à Mangriff, ce dernier sur le point de s’écrouler.

- Félix, tiens bon ! cria Edgar. Tu dois gagner, pour Steve !

Le regard de Félix s’illumina.

- Oskar, attaque Tranche ! cria Andy.
- CLOSE COMBAT !

Félix rassembla tout ce qui lui restait de force dans son poing. Oskar frappa vers le bas…

Félix évita de peu la griffe qui alla transpercer le sol.

Le chat-furet sauta, son bras luisant tendu en arrière, et frappa le torse d’Oskar, avec un coup si dantesque qu’il souleva le grand Pokémon préhistorique au dessus du sol.

Edgar lui-même était étonné par la prouesse de son Pokémon. L’image de Mangriff dans les airs, face à Armaldo qui retombait, allait rester gravée dans son esprit comme l’un des moments clés des de son parcours de dresseur. Andy quant à lui était ébahi, admiratif et terrassé. Il regarda son Pokémon s’écraser lourdement au sol dans un bruit assourdissant.

Andy s’accroupit près d’Oskar et posa sa main sur la tête du Pokémon inconscient. Il le rappela dans sa Pokéball d’une main tremblante. Il avait réalisé plus tôt que ce combat n’avait plus de raison d’être, mais n’osait pas l’admettre en y mettant fin par lui-même. Avec son Pokémon le plus fort mis KO, Edgar venait de le battre sur tous les fronts.

Edgar prit Mangriff dans ses bras et le caressa.

- Désolé de t’avoir impliqué dans cette situation, mon grand. Tu as été fantastique.

Félix frotta sa joue contre celle d’Edgar. Le brun rappela son Pokémon et se releva.
Andy tomba à genoux, tremblant, et laissa enfin libre cours à ses larmes. Edgar s’approcha de lui et le prit dans ses bras.

- Je… je veux revoir Cody…
- Moi aussi. Je t’aiderai à le retrouver.

Les policiers entrèrent dans la pièce, armés de leurs pistolets et Pokéball, puis se regardèrent entre eux, abasourdis. On leur avait promis un fou furieux et ils venaient de tomber sur un gamin vulnérable. Ils encerclèrent les deux jeunes hommes.

- Levez-vous doucement et révélez vos mains.
- C’est bon, dit Edgar, tout est fini.

~~~

Les policiers retournèrent au hall principal de l’académie, ramenant avec eux Andy, ce dernier menotté et accompagné d’Edgar. Certains des professeurs présents accoururent.

- Espèce de sale petit vandale ! Qu’est-ce que tu croyais accomplir…
- Ne commencez PAS ! somma Edgar.

Le professeur qui avait parlé eut un mouvement de recul.

- Calmez-vous monsieur, dit un policier.
- Tout est sous contrôle maintenant, ajouta un autre.

Andy aperçut Noémie parmi les élèves et sourit. Elle accourut et marcha à côté de lui, la police ne voulant pas s’arrêter pour elle. Nadine regarda Noémie d’un air peiné.
Andy eut un petit ricanement.

- Tu es encore là, dit-il.
- Je… je suis désolée, Andy !
- Désolée pour quoi ? T’as rien fait.
- J’ai passé le voyage avec toi mais j’ai pas essayé de voir à quel point… tu allais mal…
- Aucune importance, oublie-moi.
- Tu étais son camarade de voyage itinérant ? dit un policier. On vous posera quelques questions tout à l’heure.
- Quoi, mais euh… j’ai rien fait, moi !

Andy éclata de rire.

- Au revoir, Noémie. Dis à Fleuret que je suis désolé.

Noémie s’arrêta de marcher, comprenant qu’il n’y avait plus rien à se dire, tandis que les policiers continuèrent leur chemin vers la sortie.

- Je veux parler à mes amis, dit Edgar à l’un des policiers.
- Je reste avec toi, tu devras nous raconter ce qui s’est passé là-haut.
- Pas de problème, j’en ai pour quelques minutes.

Edgar s’approcha de ses amis, suivi du policier. Nadine prit les mains d’Edgar dans les siennes.

- Ca va ? Tu as tiré les choses au clair ?
- C’était... intense. Je te raconterai.

Jawad posa sa main sur l’épaule d’Edgar qui lui sourit. Guillaume avait les yeux humides.

- Les flics ont mis une plombe à se pointer… je vous en dois une.
- En fait c’est plus monsieur Montelli qui nous a aidé, acquiesça Jawad.
- J’étais mort de trouille ! geignit Guillaume.
- Ca ira pour l’interrogatoire ? dit Nadine.
- C’est loin d’être mon premier souci…

Edgar sortit son téléphone portable de sa poche et constata les multiples appels en absence et autres sms. Ne voulant pas de distraction pendant le combat, il avait mis son téléphone en mode avion.

- Oh mon Dieu… maman va piquer une de ces crises…
- Tout le monde est au courant, dit Guillaume, des reporters sont présents à l’entrée de l’académie, d’ailleurs j’ai pas envie de passer à la télé !
- J’approuve, ajouta Nadine, on ferait mieux de faire profil bas…
- Et vos parents ? demanda Edgar. Vous leur avez expliqué ce bordel ?
- Déjà fait, dit Jawad. Enfin sauf les miens…
- Le directeur est dehors, il se prend les reporters en plein dans la gueule en ce moment, ajouta Guillaume.
- Doit-on vraiment le tenir responsable… songea Nadine.

Dubois entra dans le hall de l’académie et approcha vers les élèves.

- Monsieur Dubois ! s’exclama Edgar.
- Vous êtes là ?! ajouta Nadine.
- Les jeunes… ce ne sont pas les meilleures circonstances pour se revoir, mais bon…
- Comment ça se fait que vous soyez ici ?
- Leur prof a eu le cran de me demander cette faveur, dit le professeur en pointant vers Guillaume et Jawad. Mais ça en valait la peine.
- On s’en doutait, dit Jawad. Merci beaucoup à vous.
- Ca ne fait rien, allons. Et puis, cette petite aventure m’a été bénéfique…

Dubois sortit son Hyperball. Edgar et Guillaume s’émerveillèrent devant la sphère jaune et noire.

- C’est la première fois que je vois une Hyperball d’aussi près ! s’exclama Edgar. Comme c’est trop badass…
- Vous avez capturé le Métalosse ?? demanda Guillaume.
- Non, le Donphan plutôt.
- Cooool…
- Félicitations ! sourit Edgar.
- Merci. Ecoutez les jeunes, aujourd’hui vous avez fait face à une situation qui sort totalement du cadre scolaire. Je ne sais pas trop comment vous vous êtes débrouillés mais sachez qu’en tant que dresseurs, vous devez toujours être prêts pour des affrontements inattendus. Le monde est plein de danger et votre parcours ne fait que commencer. Inutile de dire que dans le futur je ne serai probablement pas là pour prêter un coup de main.

Les quatre élèves hochèrent la tête. Le téléphone d’Edgar sonna.

- Oulala…

~~~

Edgar dut se livrer à un interrogatoire où il expliqua tout aux policiers, lesquels s’étonnèrent de son récit. Il n’aurait jamais imaginé qu’il allait se retrouver si tôt dans sa vie dans une salle d’interrogation comme dans les séries télé. Il tenta tant bien que mal d’expliquer les motivations d’Andy, tout en sachant que ça n’allait probablement pas atténuer la gravité de ses actes. Les officiers ne savaient pas trop s’il fallait le gronder pour son intervention ou l’en féliciter. Finalement, ils décidèrent de faire un geste d’appréciation en le raccompagnant au Centre Pokémon puis jusqu’à chez lui.

Edgar franchit la porte de sa maison, pas du tout prêt.

- Papa, maman… sœurette…

Sa mère le prit dans ses bras tandis que son père lui caressa les cheveux. Sa sœur Ashley se contenta de lui sourire.

- Edgar, mon grand ! Tu n’es pas blessé ?
- Non maman je vais très bien ! C’est mes Pokémon qui ont dégusté, je viens de les soigner au Centre Pokémon.
- Mais pourquoi vos professeurs ne vous ont pas protégé de ces terribles Pokémon ?
- Euuuh c’est un peu moi qui suis allé à l’action… les profs ont fait ce qu’ils ont pu, et puis ils n’étayent pas nombreux, l’académie est peu fréquentée en ce moment.
- Content d’être née cinq ans plus tôt… souffla Ashley.
- Et l’administration n’a rien vu venir ! Dit Jeremy. Heureusement que tu en as fini avec cette académie !
- C’est pas la peine de leur cracher dessus… Bah pourquoi on fait le voyage itinérant, à votre avis ? C’est pour se débrouiller dans des situations comme ça !
- C’est bon tu t’es juste battu avec un camarade de classe, dit Ashley, tu n’as pas affronté des mercenaires ou un Pokémon légendaire !
- Crois-moi Ashley, tu n’aimerais pas te farcir un Armaldo enragé.
- Oh, ah ça oui.
- Ecoute mon chou, dit Delphine, pas de batailles surprises dorénavant, on est bien d’accord ?
- Non, non, promis, j’aurais préféré que ça se passe autrement, crois-moi. J’ai faim, il y a quoi au déjeuner ?

~~~

Edgar passa l’après-midi dans sa chambre, songeant aux évènements du jour et discutant avec ses amis via réseaux sociaux. Le sujet se propageait de plus en plus sur internet. Les vidéos et les articles faisaient rage.

[Bataille titanesque à Mérouville, avec un adolescent comme instigateur]
[Le directeur de l’académie de Mérouville s’explique suite à l’attaque insoupçonnée]
[Vidéo : La police de Mérouville n’arrive pas à franchir l’entrée de l’académie]
[Académie de Mérouville, théâtre de la délinquance déchaînée]
[L’efficacité de la police et de l’éducation remises en question]

- Les gars qui écrivent les titres doivent trouver ça limite orgasmique… soupira Edgar.

[Le plus jeune terroriste de Hoenn lâche des Pokémon hostiles à l’intérieur de l’académie]

- Putain…

Edgar osa s’aventurer sur Twitter. Le hashtag #AttaqueMérouville figurait déjà parmi les plus populaires.

[@Romanesk : Il aurait pas fait ça s’il avait une copine…]
[@MagmaPower44 : Comment a-t-il eu accès à ces Pokémon, déjà ??]
[@caramelia_x : J’espère que la peine pour ce malfrat sera de 15 ans minimum. Rien à foutre que ce soit un gamin]
[@saike_kôsen : Inacceptable !! La prochaine année scolaire je change d’académie à ma fille]

Edgar se leva de sa chaise, furieux.

- Bande de crétins, vous n’avez rien compris !

Edgar reçut un appel de Nadine.

« Edgar ? »
- Oui Nadine ?
« Il y a le ministre de l’éducation qui passe à la télé, il parle de ce qui s’est passé ! »
- Ah ouais ? Je me demande ce qu’il a à dire…
« Va sur le site de Hoennews, ça passe en direct ! »
- Attends…

Edgar se pressa de consulter le site web de la chaîne et trouva le lien vers le reportage. Il cliqua sur le lecteur vidéo et le ministre de l’éducation apparut, en plein discours. C’était un monsieur en costume aux cheveux grisonnants – un fonctionnaire typique.

« Ces actes de délinquance ne peuvent être tolérés. Il va falloir revoir le système disciplinaire ! »

Edgar se remémora sa conversation avec Andy.

- Comme si on avait besoin de ça ! Gros crétin, tu n’as RIEN compris à cette histoire !

« Le ministère de l’éduction va adopter les mesures qui s’imposent pour éviter que ce genre d’incidents ne se répète. »

- Mais on n’est pas tous Andy, tu vas transformer les académies en prisons ou quoi ?

Edgar se rappela alors de son interrogation. « Ces idiots de keufs ne se sont pas donné la peine de communiquer ce que je leur ai raconté… »

« Edgar, est-ce qu’il n’y a pas quelque chose qu’on peut faire ? » dit Nadine au téléphone.
- Je sais pas…
« Il parle de surveillance accrue dans les écoles et de patrouilles dans les quartiers sensibles ! »
- Oui, j’entends ça… je te rappelle !

Edgar raccrocha. Il regarda autour de lui et fit des gestes erratiques.

- Oh putain, oh putain… qu’est-ce que je suis sensé faire ?

Edgar entendit un klaxon de voiture dans la rue mais n’y prêta pas attention. Il commença à faire les cents pas dans sa chambre. Le klaxon se fit plus insistant.

- Y’EN A QUI ESSAIENT DE SE CONCENTRER !!!

Edgar reçut un sms d’un numéro inconnu. « Regarde la voiture noire stationnée devant ta maison. »

- Quoi mais c’est quoi ce délire ?

Il alla au balcon. « C’est qui ? Ca peut pas être la police, ce n’est leur genre de véhicule ni leurs couleurs… »

Edgar fit des yeux ronds en voyant Dubois sortant du véhicule. Le professeur lui fit signe de la main.

- Oh… oh l’enfoiré !

Edgar enfila un blouson léger et sortit de sa chambre. Il dévala les escaliers et se dirigea vers la porte, croisant sa mère au passage.

- Je sors !
- Hein, où ça ? s’étonna Delphine.
- Je t’expliquerai plus tard !

Edgar sortit. Delphine suivit son fils et le vit monter dans la voiture d’un inconnu. Jeremy arriva et fit le même constat. La voiture démarra aussitôt et partit.

- Jeremy, est-ce qu’on vient de kidnapper notre fils ?!
- Je sais pas, si c’est le gouvernement on ne peut rien faire !

~~~

Edgar découvrit la capacité de son professeur à conduire de manière dangereusement efficiente.

- Euh, vous pourriez éviter de doubler tout le monde, ça me fout les jetons…
- Tu te rappelles le premier jour de notre voyage itinérant ?
- Hein ?
- Je t’avais demandé ton but et tu m’avais dis que tu cherchais quelque chose à accomplir…
- Oulala, ne me rappelez pas ça, c’est hyper embarrassant…
- Je crois que le moment est venu de faire ça.

Edgar leva la tête et regarda Owen, lequel souriait.

- Fonce.

Le regard d’Edgar s’illumina. Owen arriva au ministère et stationna promptement. Edgar et son professeur sortirent du véhicule et franchirent la porte d’entrée d’un pas si énergique que l’agent de sécurité ne les interpella pas, croyant qu’ils étaient attendus.

- Ca se passe là-bas. Tu es prêt ?
- Non mais je vais faire de mon mieux.
- Tu as des idées en tête ?
- Ouais bon on verra bien, si je réfléchis maintenant je crois que je vais me chier dessus.
- Je te fais confiance.
- Hm.

L’agent assis à côté de l’entrée de la salle de conférence de presse aperçut les intrus. Il se leva et se dirigea vers eux.

- Eh, vous deux ? Le ministre est en plein discours, vous n’avez pas le droit…

Edgar et Owen ne s’arrêtèrent pas.

- Vous vous croyez où ? On n’est pas dans une épicerie ! Vous êtes qui déjà, parent et élève ?
- Spirituellement, oui, sourit Edgar.
- Edgar, dit Owen, je me charge de lui, va faire ce que tu as à faire.
- Ok. Ne détruisez pas la pièce !
- Je vais essayer.

L’agent s’approcha d’Edgar.

- Petit, tu vas gentiment faire demi-tour, la séance n’est pas ouverte à n’importe qui.
- Dites ça au Donphan face à vous.

L’agent se retourna et vit Donphan en train de le toiser.

- Quoi, mais… vous êtes sérieux ?!

Dubois ne répondit rien. L’agent sortit un Hariyama.

- Forte-Paume !
- Harley, Souplesse !

Hariyama fonça et frappa du plat de sa paume. Donphan passa en dessous du bras de Hariyama et le souleva en l’air avec ses défenses. Hariyama retomba plus loin.

Edgar saisit le poignet de la porte « C’est maintenant ou jamais ! »

Il ouvrit la porte et entra dans la salle de conférence. Une dame à proximité l’aperçut.

- Allons mon petit, on s’est trompé de salle ?
- Vous me prenez pour un attardé ?

La femme recula, ne sachant comment répondre. Edgar remarqua que certains des caméramans s’étaient tournés vers lui.

- Euuh… jeune homme, qu’est-ce que…

Edgar s’approcha du micro et regarda l’assemblée. Le ministre resta bouche bée, incrédule.

- Salut. J’ai quelque chose d’important à vous dire.
- Mais qu’est-ce que c’est que ce numéro ?! s’indigna le ministre.
- Nous sommes dans un pays libre, s’écria un journaliste, laissez-le parler.

Edgar regarda le journaliste et hocha la tête en guise de remerciement. Les autres journalistes brandirent leurs caméras et dictaphones, sentant le scoop. Le jeune homme balaya du regard l’assemblée face à lui. Pas moins d’une soixantaine de personnes. Tous des adultes. Il inspira et approcha son visage du micro.

- Mon nom est Edgar Newman, et… Andy est mon ami.

Tout le monde était intrigué. Edgar hésita un moment, puis se lâcha :

- Et, sérieusement… vous me débectez.

Des « Hon ! » retentirent dans la salle. Les adultes s’échangèrent des regards interloqués.

- Andy est mon camarade de classe, on n’a jamais été très proches mais durant les six années qu’on passées à l’académie de Mérouville, j’ai pu observer son comportement et l’attitude des élèves et professeurs à son égard. Andy c’est le type qui s’énerve pour un rien, toujours prêt à se battre… mais ce n’était pas un tyran, il ne profitait pas de son caractère intimidant pour terroriser les autres élèves, pourtant il aurait pu le faire facilement. Et pour les profs… beaucoup le méprisaient à cause des excellentes notes qu’il avait malgré son insolence. Ils ne supportaient pas de ne pas l’avoir sous contrôle.

Edgar s’arrêta un moment. L’audience était captivée. Il essaya tant bien que mal de ne pas penser au fait qu’il était filmé en direct, chose qui le faisait suer et trembler.

~~~

Jeremy, le père d’Edgar, bondit de son fauteuil.

- Dorothée ! DOROTHEE !!!

Dorothée arriva en trombe, affolée.

- Chéri mais enfin qu’est-ce qui se passe ?
- Re-re-regarde, regarde !!

Jeremy pointa la télévision du doigt. Edgar passait en direct sur Hoennews.

- Quoi, mais, Edgar ?! S’exclama Dorothée. Le nôtre ?!!

~~~

Jawad prit son téléphone et répondit à l’appel.

- Oui, Guillaume ?
« MEC ! tu vas pas croire ce qui se passe en ce moment même ! »
- …. Rayquaza est apparu dans le ciel ?
« J’aurais préféré mais c’est encore plus fou que ça ! Regarde Delca-TV ! »
- Ok, ok… je te jure, si tu me déçois…
« Vieux, je donnerais cher pour être avec toi et voir la gueule que tu vas faire ! »

Jawad zappa les chaînes de télé et atteignit Delca-TV. Il écarquilla les yeux et étouffa un cri.

- EDGAR NEWMAN ?!
« T’as vu ?? A ce train là il va faire carrière en politique ! »
- Je te rappelle après, il faut écouter ce qu’il dit !
« Ouais ok ! »

Jawad raccrocha et se pencha vers l’écran.

~~~

Edgar reprit son discours.

- Mais ce n’est pas ça qui explique ses méfaits d’aujourd’hui. En fait…

Edgar inspira, s’apprêtant à lâcher la bombe.

- La problème réside avec la note qu’il a eue avec son diplôme. Dans l’administration on s’est arrangés pour lui retirer des points de sa note globale sans aucune justification valable. Il aurait du avoir au moins 17, mais on lui a donné 12,28. La note de discipline n’est pas suffisante pour faire baisser sa note générale à ce point. Andy est turbulent certes, mais c’est aussi un élève studieux. Evidemment, il ne peut pas consulter les feuilles des examens qu’il a passés et faire vérifier la véracité des notes qu’on lui a données par une partie indépendante. Donc il n’a rien pu faire contre cette injustice. Et donc… il a décidé de se venger.

Edgar s’arrêta un moment pour laisser l’audience digérer la gravité de la révélation. Le ministre rougit comme une tomate.

- Et avant que quelqu’un ne m’arrête, je tien à préciser que non, je ne suis pas DU TOUT d’accord avec ce qu’Andy a fait, je considère que son attaque ne résout aucun problème et ne fait qu’en poser plus.

~~~

- Cody ? Cody ! Tu viens m’aider à déplacer ses paquets, oui ?

La mère de Cody dirigea vers le salon. Le jeune homme blond était debout devant la télévision et ne montrait aucune réaction.

- Quoi, qu’est-ce que tu as ? T’as pas l’habitude de voir les news…

Elle s’approcha de son fils et le trouva en train de pleurer.

- Cody ? C’est qui ce garçon, tu le connais ? Cody ?!

~~~

Robert Fleuret regardait également la diffusion, seul dans son appartement. Il pleurait à chaudes larmes, à la fois brisé par le sort d’Andy et touché par l’intervention d’Edgar.

- Quel idiot, Robert, espèce d’immonde idiot… si seulement j’avais su m’y prendre avec Andy, on n’en serait pas arrivés là…

~~~

Noémie revenait d’une séance de toilettage de ses Pokémon. Elle compta l’argent qui lui restait dans son porte-monnaie. « Ca m’a coûté la peau des fesses mais il fallait bien les détendre après ce terrible combat… pffff mon argent de poche est encore loin, je ne peux rien m’offrir en attendant et j’ai pas envie de me mettre aux petits boulots... »

Noémie remarqua quelques personnes rassemblées devant la vitre d’un un magasin d’électroménager. Elle passa à côté de la petite foule qui semblait regarder des écrans de télévision à l’intérieur du magasin.

- J’arrive pas à croire qu’un gamin ait organisé cette attaque…
- Est-ce que nos enfants sont en sécurité ? Et s’il y a d’autres individus comme lui ?

Noémie soupira. « Bon sang, tous les parents vont devenir paranoïaques comme pas possible. Merci, Andy… »

- Et ce petit là, est-ce qu’il a au moins une autorisation pour venir parler, il a interrompu le ministre…

« Hein ?? » S’étonna Noémie.

Elle se fraya une place entre les téléspectateurs de rue, plissa et les yeux pour bien voir ce qui se passait sur les écrans de télé et aperçut Edgar en train de parler. Elle en lâcha presque son sac à main.

- NEWMAN ???
- Vous le connaissez ? Demanda un monsieur.
- Un peu que je le connais, c’est un camarade de classe !

Les personnes autour de Noémie s’étonnèrent. La blonde entra à l’intérieur du magasin, décidée à voir ça de près. Les employés et visiteurs étaient également intrigués par cette intervention inattendue et regardaient avec attention.

- Ce garçon ne finira jamais de m’épater… marmonna Noémie.

~~~

Dubois rappela Donphan. L’Hariyama était plus essoufflé que blessé.

- Ce gamin est en train d’expliquer quelque chose d’important. Tout le monde veut l’entendre, même le ministre ne l’interrompt pas. Désolé d’avoir été agressif avec vous, mais si on vous reproche quoi que ce soit, je suis prêt à en assumer la responsabilité.

L’agent regarda Dubois, interloqué, puis rappela Hariyama en soupirant.

~~~

- Mais ton ami a des liens avec la scène clandestine ! s’exclama quelqu’un dans l’assemblée. C’est un criminel !
- Et alors, tu m’as écouté ou tu viens de te réveiller ? Je ne défends pas ses actes, j’explique le contexte qui l’a poussé à agir ainsi !

L’homme se recroquevilla. Edgar était terrifié par sa propre insolence et suait abondamment. Mais il devait continuer.

- Andy mérite d’être puni, mais tant qu’on ne s’est pas interrogés sur les raisons qui l’ont poussé à faire ce qu’il a fait, on n’aura rien résolu.

Edgar remarqua quelques hochements de tête dans l’assemblée.

- Je veux dire, vous êtes des adultes, beaucoup d’entre vous ont des enfants, non ? Est-ce que vous savez réellement ce qui leur arrive à l’école ? Peut-être qu’ils sont des souffre-douleurs qui ont trop honte de vous en parler ? Peut-être qu’ils essaient de la drogue dans les toilettes ?

Dubois entra discrètement dans la salle, suivi de l’agent de sécurité.

- Vous croyez que tout est sous contrôle, que les choses désagréables n’arrivent qu’aux enfants des autres, pas les vôtres. Les parents d’Andy étaient trop occupés pour essayer de voir si quelque chose n’allait pas, les profs étaient trop épuisés par leur taf pour essayer de s’approcher Andy…

Il baissa la tête, cachant un regard sombre.

- Et nous, ses camarades de classe, on était trop rebutés par son tempérament pour l’approcher, et on avait déjà assez d’amis entre nous. On a notre part de responsabilité aussi. Si on s’y était pris de la bonne manière, il n’aurait pas fini comme ça.

Tout le monde semblait réfléchir sur ces paroles. Edgar réalisa qu’il ne savait plus quoi dire. Son esprit bloquait. Il commença à paniquer.

« Non idiot, ne t’arrête en si bon chemin, pense, pense à quelque chose ! Alleeeez… »

- … Quand j’étais petit, en rentrant de l’école je passais à côté d’un clochard. Son nom était… Frank Modigliani.

Regards interloqués chez l’assemblée.

- Je lui donnais un peu de mon argent de poche, et lui jouait de sa guitare et chantait. Mais en tant qu’enfant je n’ai rien pu faire pour lui. Il est mort quelque temps après, dans l’indifférence, sans que des proches ou amis n’assistent à son enterrement. Pour honorer sa mémoire, j’ai donné son nom à mon Pokémon académique.

Edgar baissa la tête, tentant de repousser ses larmes.

- Je n’ai jamais compris pourquoi des cas comme Frank existaient… et je ne veux pas qu’Andy finisse isolé comme lui.

Quelques personnes craquèrent.

- Vous ne vous préoccupez pas des cas difficiles comme Andy et vous les laissez empirer. Vous continuez tranquillement vos vies individuelles en sachant qu’il y a des sans-abris, des dépressifs, des gens dégoûtés de la vie à cause de jobs merdiques ou de relations toxiques. Et moi, je suis sensé grandir pour devenir un adulte comme VOUS ?!

Ce dernier mot résonna dans la salle. L’audience était époustouflée. Dubois lui-même perdit son flegme.

- Je préfère mourir dès demain plutôt que de devenir un adulte merdique comme vous !!!

S’ensuivit un silence de mort. Personne n’osait prononcer un mot. Edgar souffla, épuisé par son discours. Le front suant et la gorge sèche, il s’empara d’une bouteille d’eau à côté du micro et s’offrit quelques gorgées. Il souffla, rassemblant ses pensées et laissant planer un moment de suspense.

- Qu’est-ce qu’on aura appris du cas Andy Belmont ? Qu’est-ce qu’il cherchait à exprimer à travers son acte, aussi inacceptable soit-il ? Vous parlez déjà de mesures disciplinaires… vous allez punir les autres pour un problème qui n’a rien à voir avec eux ! Mais n’est-ce pas la même chose que ce qu’a fait Andy ?

Edgar regarda les adultes.

- J’ai affronté Andy dans un combat pour qu’il m’explique pourquoi il a lancé cette attaque. En tant que dresseurs, on a pu se comprendre à travers notre combat. Je suis venu ici pour partager avec vous le dialogue que j’ai eu avec lui. Mais ce qui est fait est fait. Il y a surement d’autres Andy ailleurs, des élèves isolés qui cumulent l’angoisse et la frustration comme une bombe à retardement. C’est notre job à tous de leur tendre la main, avant qu’ils n’explosent. C’est en cherchant à se comprendre les uns les autres qu’on pourra avancer. Certainement pas avec l’indignation et l’oppression. Je n’ai plus rien à ajouter. Merci de m’avoir écouté jusqu’au bout.

Edgar s’éloigna de la scène et sortit de la salle, suivi de Dubois. Certains des journalistes les suivirent mais Dubois les repoussa d’un geste du bras.

Edgar sortit du ministère en vitesse, ayant consommé toute son audace et ne voulant pas faire face aux questions de la presse. Il trouva Nadine qui l’attendait dehors. Elle le serra dans ses bras.

- J’ai tout vu sur mon téléphone. Je suis fière de toi.
- Merci, Nadine.
- On monte en voiture, dit Dubois, on n’a plus rien à faire ici.

Le trio quitta les lieux. Nadine offrit un mouchoir à Edgar qui s’essuya le front et les joues, épuisé mais soulagé.

~~~

- Ayant atteint l’âge d’émancipation, seize ans, Andy Belmont est jugé pleinement conscient de ses actes.

Le juge lança un regard vers Andy, lequel confrontait le jury en face de lui avec un regard neutre. Pas de colère ou de regret dans ses yeux, juste une résignation calme, presque digne.

- Par contre, les parents du coupable seront civilement tenus responsables des dommages matériels qu’il a causés en lâchant des Pokémon dans l’académie de Mérouville. La réparation de ces dommages ne pouvant être que pécuniaire, les parents d’Andy Belmont devront verser une somme qui leur sera ultérieurement communiquée.

La mère d’Andy se couvrit la bouche. Son père tentait de garder son flegme, mais sa sueur et ses yeux ahuris ne trompaient personne.

- Pourquoi il nous a fait ça, mon Dieu… dit la mère.
- Ceci dit, reprit le juge, Belmont a accepté de coopérer avec la police en indiquant des lieux de déroulement de combats clandestins à Mérouville autres que ceux précédemment identifiés. Il a également témoigné sur les activités illégales pratiquées là-bas, dont on peut citer la prostitution et les rencontres entre braconniers.

Les parents d’Andy regardèrent leur fils d’un air choqué. Ils savaient qu’il trainait beaucoup dehors mais ne soupçonnaient pas que ses escapades allaient aussi loin.

- En vue de sa coopération, la peine de Belmont sera réduite à sept ans de prison ferme, dont la dernière année inclura des travaux d’intérêt général.

Aucune réaction de la part d’Andy, il semblait juste attendre que le procès se termine. La mère d’Andy se couvrit le visage, cachant sa honte et ses larmes, tandis que son mari baissa la tête, endurant cette calamité.

Noémie observait le procès, assise au fond de la salle. Elle avait vu Edgar – lequel était assis aux premiers rangs – mais n’avait pas osé l’approcher et ne comptait pas le faire à la fin de la séance. La jeune fille ne comprenait pas trop pourquoi elle pleurait.

~~~

Edgar, Nadine et Dubois s’étaient retrouvés dans une glacerie. Edgar essayait tant bien que mal de se faire tout petit.

- J’y crois pas, sur les réseaux sociaux, à la télé, ma tronche est partout ! Je vous parle même pas de YouTube et les forums, c’est la frénésie. Maintenant c’est super embarrassant de sortir de chez moi, j’ai envie de m’enferme dans ma chambre tout le reste de l’été…
- Mais tu as fait ce qui te semblait juste, dit Nadine, tu n’as aucun regret.
- Hm. J’aurais quand même voulu devenir une célébrité en tant que dresseur, pas en tant que l’auteur d’une controverse médiatique… on commence déjà à faire des memes sur moi !
- Allons, donne un mois aux médias et ils passeront à autre chose, dit Dubois. Mais ton intervention fera réfléchir beaucoup de têtes et continuera à être discutée pour les années à venir, et ça, tu peux en être fier.

Edgar hocha la tête timidement.

- Monsieur Dubois, dit Nadine, est-ce qu’on pourra vous revoir ?
- Navré Nadine, je pars à Sinnoh au début de la prochaine année scolaire, j’ai été muté là-bas.
- Ah bon ?? s’étonna Edgar.
- Oui, je vais enseigner à l’académie de Vestigion

- Merci pour tout, monsieur. On n’oubliera jamais ce que vous avez fait pour nous.
- Voyons, c’était mon travail. Mon rôle est fini, volez de vos propres ailes maintenant.
- Oui monsieur ! Acquiescèrent Edgar et Nadine en cœur.

Owen sourit, fier de ses élèves.

~~~

Une fois chez lui, Edgar passa la nuit à parcourir internet, découvrant les retombées de son intervention, entre articles de presse...

[Les auteurs du trafic de note doivent être tenus responsables]
[Scandale à Mérouville : Edgar Newman dévoile sa version des faits]
[Brave intervention d’un jeune qui redonne de l’espoir]
[Edgar Newman, avocat du diable ou voix de la raison ?]
[Le directeur de l’académie de Mérouville promet de révéler les responsables du trafic de notes]

Et autres vidéos, publications, tweets et commentaires…

[J’ai pleuré. Un discours plein de bon sens]
[Comment ont-ils pu priver ce jeune homme du fruit de ses efforts ?]
[GG khey]
[Le ministre il s’est chié dessus]
[J’applaudis son sens de l’amitié. C’est très courageux d’avoir improvisé ce discours devant tant de personnes.]
[Ca n’excuse pas les actes d’Andy Belmont mais ça met beaucoup de choses au clair, il y a beaucoup de failles dans le système éducationnel !]

La porte de sa chambre s’ouvrit. Edgar se tourna vers son père.

- Fils, il est 1 heure du matin, c’est le temps de se coucher…
- Je sais, j’en ai pour quelques minutes.
- Ecoute… je ne savais rien de tout ce qui se passait à l’académie, ni même cette histoire avec ce sans-abri...

Edgar détourna le regard, embarrassé.

- Mais je veux te dire que tu as eu aujourd’hui plus de boules que moi durant toute ma vie. Je suis fier de toi.

Edgar haussa les sourcils.

- M’rci.
- Par contre ça va être embêtant que des journalistes viennent frapper à notre porte pour une interview !
- Tu m’étonnes…

~~~

Aéroport de Mérouville. Edgar, Guillaume et Nadine s’apprêtaient à dire au revoir à Jawad qui allait retourner à Holon, sa région natale. Guillaume avait les larmes aux yeux.

- On ne peut pas visiter Holon pour le moment mais promis, dès que c’est envisageable on te fait signe ! sourit Edgar.
- Oui, vous serez les bienvenus.
- N’oublie pas de partager des photos de là-bas !
- Ouais, on veut voir les Aligatueur ! ajouta Guillaume.
- Ou les plages de cristal !

Jawad hocha la tête en souriant. Nadine s’étonna un peu de le voir ému. Les trois garçons se serrèrent dans une triple étreinte et levèrent leurs poings vers le ciel. Jawad se tourna ensuite vers Nadine.

- Je sais qu’Edgar peut compter sur ton support donc je ne vais pas te demander de prendre soin de lui. Par contre garde un œil sur Guillaume, parfois il dit des choses embarrassantes mais il n’a pas de mauvaises intentions !
- Entendu, hihi !
- Hé ! s’exclama le blond.
- Bon. Je dois y aller.
- Porte-toi bien, Jawad, dit Edgar.
- Hm. Au revoir, Edgar, Guillaume, Nadine !

Jawad s’éloigna en tirant sa valise. Edgar et Guillaume continuèrent à agiter leurs bras en guise de salut jusqu’à ce que Jawad disparut dans la foule. Guillaume s’essuya les yeux larmoyants. Edgar le réconforta d’une main sur l’épaule.

- Allez vieux, c’est pas comme si on ne va pas le revoir.
- Je sais, je sais… mais il va me manquer, ce con ! Snif…
- Arrête ou je vais chialer moi aussi ! Tu sais aussi bien que moi que quels que soient les chemins que nous prenons, nous nous croiserons à nouveau.

~~~

Deux gardes menèrent Andy à sa cellule. Un silence morbide régnait dans le couloir. Ils arrivèrent à sa cellule et lui ouvrirent la porte. Andy découvrit son nouveau chez lui : un lit étroit d’un côté, un petit bureau vide de l’autre. Une fenêtre au milieu de la pièce accueillait la lumière du jour.
L’un des gardes enleva les menottes d’Andy et le toisa.

- Ne tente rien, évite les histoires avec les autres détenus et tu pourras voir tes Pokémon dans pas trop longtemps.

Andy ne répondit rien.

- Est-ce que c’est clair ?
- J’peux avoir un bouquin au moins ?

~~~

Dubois stationna, sortit de sa voiture et respira l’air frais au pied du Mont Couronné. Vestigion était une charmante ville riche en végétation, semblable à une version bien plus développée de Clémenti-Ville. Deux enfants passèrent à côté de lui, accompagnés de leurs Pokémon, un Ousticram et un Lixy. Le professeur sourit, ravi à l’idée de découvrir cet environnement nouveau.

- Quel genre de gamins va-t-on me confier…

~~~

Edgar arpenta les rues et avenues de Mérouville d’un pas enthousiaste. Il arriva au croisement où Nadine l’attendait, habillée de sa robe bleue aux motifs de fleur. Ils prirent un bus et arrivèrent à l’université de Mérouville vingt minutes après. En franchissant son immense entrée, les deux bruns se retrouvèrent dans une large allée peuplée de garçons et de filles. Ils observèrent les espaces verts et les bâtiments imposants tout autour. Rien à voir avec la modeste académie où ils avaient grandi. Edgar se tourna vers Nadine.

- Prête pour le premier jour ?
- Avec toi, oui !

Les deux s’avancèrent au milieu des étudiants en souriant, main dans la main, prêts à affronter ce que l’avenir leur réservait.



FIN