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Pokemonis T.2 : L'embrasement de l'Aura de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 25/04/2018 à 09:24
» Dernière mise à jour le 25/04/2018 à 09:24

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Action   Aventure   Présence de Pokémon inventés   Science fiction

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Chapitre 30 : Tension à son paroxysme
Six



Selon Kahsmel, ce bal dans le manoir Argoin serait le dernier auquel j’assisterai. J’aurai dès lors apprécié qu’il soit… comment dire… plus vivant ? Il n’y avait que la moitié des G-Man habituels, et la plupart s’étaient réunis en groupes fermés, où chacun chuchotait de son côté en prenant bien garde que personne ne les écoutait. Et impossible pour moi de me faufiler dans l’un des groupes de discussion. La raison était simple : je n’étais « encartée » chez personne après seulement trois bals. Tout le monde donc devait penser que j’étais une espionne d’un autre groupe.

L’atmosphère était très malsaine. Quasiment personne ne mangeait, buvait, et encore moins dansait, et la musique qui était jouée semblait l’être à minima, pour la pure forme. Les G-Man se regardaient entre eux, les yeux plein de soupçons, quand ce n’était pas carrément des yeux de haine. Certains, je l’avais remarqué, étaient dirigés vers moi. À coup sûr ceux de membres de Lance, qui ne devaient pas me pardonner la mort de Tilveta Psuhyox, ou encore mon rôle de défenseure des opprimés en tant que Burning Feline.

Si Lord Psuhyox n’était pas là, il y avait bien sa femme. Je ne pouvais m’empêcher de me sentir mal à l’aise pour elle en la regardant. Elle avait l’air si misérable, devant encore se demander où était passée sa fille aînée, sans savoir qu’elle avait trouvé la mort. Sa fille cadette, Malwen, était avec elle, et le regard le plus meurtrier qui m’était adressé venait d’elle. Elle était forcément au courant que j’avais tué sa sœur, ce qui signifiait qu’elle faisait elle aussi partie de Lance, à l’inverse de ses parents. Lady Meika leur avait sans doute ordonné à tous de ne rien me faire ou me dire à ce sujet, mais ça ne leur plaisait pas. Il désirait le sang en retour du sang, et avec toute cette hostilité qui convergeait vers moi, j’avais l’impression que j’allais me faire attaquer d’une seconde à l’autre.

Bref, ce n'était pas ce soir que j’allais m’amuser. Je ne voyais même pas Rohban. Avec tout ce qu’il avait vécu récemment, c’était compréhensible qu’il ne soit pas venu, mais j’étais quand même inquiète. Et si Lady Meika l’avait tué en dépit de sa promesse ? La fille du Grand Maître se trouvait au centre de la réception. Elle était celle qui contrastait le plus dans cette pièce à l’atmosphère pesante en parlant à beaucoup de monde, en souriant largement, en rigolant même, parfaitement à son aise, comme si elle se nourrissait de la suspicion ambiante. Elle semblait s’amuser de tout ça, et ce n’était pas vraiment l’attitude de quelqu’un qui fomentait une révolution pour plus de justice et d’égalité. Non, décidément, je n’aimais pas Meika Irlesquo.

Mais qui j’aimais ou non n’avait aucune importance. Je n’étais qu’une messagère. J’avais une dette envers Kashmel pour m’avoir sauvée des Nettoyeurs, et un marché passé avec lui. Je devais accomplir ce pourquoi il m’avait formé. De toute façon, qui était-je pour comprendre quoi que ce soit à la politique et aux alliances ? Il y a encore peu de temps, j’étais une esclave et une voleuse anonyme de la ville-basse. Tâchant de marcher discrètement, j’avançai vers Lady Meika, mais évidement, tous les G-Man de son groupe se tournèrent peu à peu vers moi et me toisèrent avec la plus grande répulsion. Étaient-ils tous des membres de Lance ? Ça commençait à faire beaucoup…

- Lady Meika, fis-je en m’inclinant comme une noble dame.

Meika mit bien dix secondes avant de daigner se tourner vers moi. Elle me regarda de son habituel regard de haut, avant de lever la main pour faire signe aux autres G-Man de nous laisser, ce qu’ils firent à l’instant. Oui, ils devaient tous être à ses ordres au sein de Lance. Ils ne prenaient même plus la peine de cacher leur allégeance maintenant. C’était comme si Meika avait déjà pris le contrôle absolu au sein de l’Ordre.

- Eh bien, si ce n’est pas ma jeune amie Lady Sixtine ? Que me voulez-vous ?

- Déjà, vous présenter mes plus sincères condoléances pour la perte de madame votre mère. C’est une tragique disparition qui nous affecte tous…

À en juger par son visage, Meika devait se retenir de pouffer de rire devant le ton robotique avec lequel j’avais déblatéré ces mondanités.

- Vous n’êtes pas bien douée pour feindre le protocole, très chère, me dit-elle en baissant sensiblement la voix.

- Et vous pas bien douée pour feindre le chagrin.

- J’aurai un peu essayé si j’étais réellement chagrinée… Que voulez-vous ? Vous vous êtes enfin décidée à me rejoindre ?

- Où est Rohban ? Demandai-je sans prêter attention à sa question.

Meika fit un vague geste de la main, comme si on venait de lui demander où se trouvait une mouche qui volait dans la pièce.

- Parti je ne sais où.

- Parti ?

- Parti, répéta Meika.

- Vous ne l’avez pas… Vous aviez dit…

- Je n’ai pas rompu ma promesse, se défendit Meika. Il a quitté le manoir peu après la mort de notre mère. Ce pauvre garçon a toujours été facilement impressionnable, et est lâche de nature. Sans doute ne sait-il pas remis de la tentative d’assassinat de Tilveta, ou peut-être pense-t-il que c’était un membre de Lance qui a tué notre mère.

- Est-ce le cas ? Voulus-je savoir.

- Bien que cela ne vous regarde en rien, je peux vous assurer que je n’ai jamais rien ordonné de tel. Donc ? Pourquoi êtes-vous encore ici, Sixtine ? Vous devez vous douter que Lance passera bientôt à l’action. Tous les G-Man qui ne seront pas des nôtres seront alors nos ennemis, qui qu’ils soient. Vous avez choisi votre camp ?

- Je ne choisis rien, répondis-je. Je ne suis qu’une messagère.

Je lui tendis la lettre que Kashmel m’avait demandé de lui remettre. Intriguée, Meika l’ouvrit et la lu attentivement. J’examinai avec grande attention ses réactions. Elle fut d’abord fébrile, heureuse, contrariée, puis ses yeux s’écarquillèrent avec la plus grande stupéfaction. Son regard faisait des bonds entre moi-même et la lettre, et alors, elle froissa le papier, et éclata de rire. Un rire qui était tout sauf discret, et qui fit se retourner nombre de G-Man aux alentours, qui regardèrent Meika avec inquiétude ou stupéfaction. Moi-même, qui étais à ses côtés, fut quelque peu gênée, mais Meika n’en avait visiblement rien à faire. Les larmes aux yeux suite à son fou-rire, elle me regardait désormais comme si je venais de lui réciter une blague hilarante… ou que j’en étais une moi-même.

- Eh bien… ça par exemple… Je me dois de vous remercier, Lady Sixtine. Je n’ai plus autant rigolé depuis des années !

- Qu’est-ce que Ka… mon maître vous a écris ? Voulus-je savoir.

- S’il ne vous l’a pas dit lui-même, je n’ai pas à le faire. Transmettez-lui juste que je suis d’accord, et que l’on se rencontrera à l’endroit convenu. Et ce avec mes plus profonds respects.

Je ne comprenais pas trop. Ça voulait donc dire qu’on était officiellement alliés désormais ? Lady Meika ne m’en dit pas plus, et se retira au plus vite, en faisant signe à ses partisans de la suivre. Elle paraissait véritablement fébrile, ses yeux luisant d’un enthousiasme à peine contenu. Kashmel lui avait visiblement écrit quelque chose qui lui plaisait. Probablement qu’elle connaissait l’existence de son oncle déchu ; était-elle donc surprise et ravie de pouvoir faire alliance avec lui pour purger l’Ordre ? Et pourquoi Kashmel ne voulait rien me dire sur ce qui se préparait ? Étais-je donc uniquement bonne à transmettre les messages en espionnant pour lui ?

Je soupirai en tâchant de contenir ma frustration. Je n’avais que quatorze ans, et je venais à peine de découvrir l’univers G-Man. Kashmel m’avait déjà appris beaucoup de choses. Je devais faire preuve de patience. Oui, sûrement. Une fois qu’il aura débuté sa révolution, je pourrai lui montrer ce que je vaux et l’utilité qui est la mienne. Que ce soit à lui, ou à Meika elle-même. Je voulais servir à quelque chose. Je voulais participer à tout ce qui allait se passer, car même si j’étais dans le bain G-Man depuis peu, j’avais l’impression que tout cela me concernait aussi.

En quittant la pièce avec ses suivants, Meika avait amené avec elle plusieurs G-Man, et il en restait donc très peu dans la salle, une vingtaine tout au plus. Je ne vis ni Lord Gilthis, ni ma mère déguisé ; si c’était bien elle. Apparement, ce ne serait toujours pas ce soir que je pourrai obtenir des réponses sur mes origines. Je n’étais là que depuis cinq minutes, mais ça ne servait à rien de m’appesantir plus longtemps. Je me retournai d’un coup pour me diriger vers la sortie, quand je percutai quelqu’un derrière moi.

- Mille pardons, mon seigneur, fis-je automatiquement.

- Ce n’est rien, ce n’est rien…

La voix, aiguë et chantante, ne me disait rien. Le visage non plus. C’était un jeune homme qui devait avoir dans les dix-huit ans, les cheveux châtains flamboyants, presque roux. Il avait des yeux magnifiques qui étaient un mélange de brun noisette et de vert émeraude, et un visage bien fait. Sa tenue ne faisait pas très « G-Man » par contre. On aurait dit un uniforme militaire agrémenté d’une cape noire. Sobre, mais impressionnant à la fois. Le seul objet qu’il portait était un pendentif vert et jaune au cou. Son sourire semblait bienveillant, mais il y avait quelque chose d’indescriptible dans son visage qui me faisait frissonner malgré moi.

- Oh, mais vous êtes Lady Sixtine ! S’exclama l’inconnu. Je n’ai pas encore eu l’honneur de vous rencontrer. Les nouvelles têtes sont tellement rares ici pourtant…

- Pardonnez-moi, messire, mais comme vous dites, je suis nouvelle. Je crains de ne pas avoir l’honneur de vous connaître.

- Appelez-moi Sulin.

Sulin ? Que ce soit un prénom ou un nom de maison, je n’avais retenu aucun G-Man avec ce nom là, et pourtant, dieu sait que Diplôtom me les avait fait apprendre par cœur ! Le dénommé Sulin dut voir mon trouble, car il ajouta :

- Je ne viens qu’assez rarement dans le Quartier G-Man. Ne vous inquiétez pas de ne pas me connaître. J’aime rester plutôt discret. Je vis au palais impérial.

- Ah… bon ?

Ni Kashmel ni Stuon ne m’avaient parlé d’un G-Man qui se trouvait au plus près de l’Empereur. C’était quoi, un genre d’ambassadeur qui faisait le lien entre l’Ordre et le trône impérial ?

- Parfois, je reviens ici à l’improviste, espérant surprendre ce cher Grand Maître Bradavan, sourit Sulin. Mais il n’est pas là ce soir. D’ailleurs, il n’y a pas grand monde.

- Oui… répondis-je. La présence des terroristes de Lance en notre sein nous affecte tous, et il y a peu, la femme du Grand Maître est décédée. Nous n’avons plus trop la tête à festoyer.

Ne sachant pas du tout si ce Lord Sulin était un partisan du Grand Maître ou un de Lance, je devais jouer le jeu avec lui. Mais si j’avais à parier, je dirai que quelqu’un qui habite dans le palais de l’Empereur avait peu de chance d’être un révolutionnaire…

- Ah oui, tout cela est bien malheureux, regretta Sulin. Mais de tels troubles doivent apporter un peu de piment dans ce coin de la ville où la monotonie et la routine règnent en maître, vous ne pensez pas ?

Je restai interdite, ne comprenant pas ce qu’il voulait dire. Il continua avec un sourire.

- C’est comme ce qui se passe la nuit parfois. J’ai entendu parler de ce mystérieux Burning Feline qui apparaissait pour combattre le crime sous toutes ses formes. Je trouve ça absolument grisant !

Se moquait-il de moi ? Car s’il était de Lance, forcément qu’il devait savoir que Burning Feline, c’était moi. Mais s’il n’était pas de Lance, comment pouvait-il se réjouir de tout ce qui se passait actuellement, avec pour seule raison que ça « rompait la monotonie » ?

- Quand bien même, j’espère que tout cela s’arrêtera bientôt, répondis-je avec prudence. La confiance entre les G-Man et l’Empire s’en trouve minée, et les fondations même de notre Ordre sont menacées.

Sulin ricana doucement.

- Les fondations ? Cela fait longtemps qu’elles s’effritent de l’intérieur. Elles vont s’écrouler un jour ou l’autre, et je parie que ce sera très bientôt.

- Ex-excusez-moi ? Fis-je, ébahie.

Ce gars était-il carrément en train de parler de la chute de l’Ordre à voix haute devant un autre G-Man ?!

- Ne prenez pas cet air si surpris, enfin, lui reprocha Sulin. Vous vous efforcez admirablement de nous rapprocher de cette échéance, Lady Sixtine.

Il se rapprocha pour me susurrer à l’oreille :

- Tu es un petit chaton des plus amusants. Continue donc de me divertir…

Je ne pus même pas trouver quoi répliquer tant mon cerveau marchait au ralenti. Cet homme, qui qu’il soit, me donnait des frissons. Il ricana ostensiblement et retourna à son chemin. Je le perdis de vue pendant une demi-seconde, puis je ne le vis plus, comme s’il venait tout simplement de… s’évaporer. Et le pire, c’était que personne autour de nous, tous les autres G-Man qui se trouvaient dans le salon, ne semblaient avoir remarqué la présence et la disparition tout aussi rapide de Sulin. Affolée, je me dépêchais de quitter le manoir Argoin. Il m’avait appelé « chaton ». Ce n’était sans doute pas un hasard, il devait connaître le Pokemon avec qui je partageais mon ADN. Mais quelque chose me disait que cet homme flippant n’était pas un membre de Lance pour autant…


***


Immotist




J’étais enfin de retour dans la vie souterraine. Il n’y avait que ça où je me sentais à l’aise, en intriguant, manipulant, réunissant des informations, payant des pots-de-vin… C’était mon domaine, ce dans quoi j’excellais le plus, et qui m’avait permis de faire fortune jadis. Aujourd’hui, ma fortune n’était plus rien, et je devais mettre mes talents au service de ce fichu G-Man bâtard mal dégrossi. J’avais retrouvé mon corps grâce à lui, et pris ma vengeance sur mon traître de fils. Le marché impliquait donc que je mette désormais mes ressources au service de sa future révolution. Et je n’osais pas trahir Kashmel Irlesquo. Pas par morale bien sûr - j’en étais absolument dépourvu - mais par peur. Je savais que cet humain n’aurait de cesse de me retrouver et de m’éliminer si jamais je m’avisais de lui faire faux bond.

Pour le meilleur et pour le pire, j’étais lié aux rebelles, désormais. Plus qu’un G-Man déchu voulant faire chuter l’Ordre, Kashmel était avant tout un Paxen, ceux qui voulaient détruire l’Empire Pokemonis, abolir l’esclavage des humains et établir une stricte égalité entre races. Ils existaient depuis bien un siècle, ces fous, et pourtant dernièrement, ils n’avaient cessé de faire parler d’eux. Ils avaient bien sûr tué le Seigneur Xanthos lui-même lors de la bataille de Balmeros il y a deux ans, et il y a quelques jours de cela, ils avaient réussi à repousser une armée impériale qui avait attaqué leur base, et ce en éliminant le célèbre colonel Tranchodon, connu pour son chromatisme et sa sauvagerie sans borne.

Les rumeurs ne parlaient que de ça depuis trois jours. Le Général Légionair, commandant en chef des armées de l’Empire et l’une des cinq Etoiles Impériales, que l’on disait invaincu, avait été mis en échec par les Paxen, qui avait éliminé son célèbre et terrifiant second. Le bon peuple de la capitale avait été sonné par ces nouvelles. Il n’arrivait pas y croire, alors que la propagande impériale s’était toujours évertuée à faire passer les Paxen pour des terroristes et agitateurs incompétents.

Il y a quelques années, je n’aurai pas parié un seul jail sur les Paxen. Mais aujourd’hui, qui pouvait le dire ? Après tout ce qu’ils avaient réussi à faire alors qu’ils étaient en nette infériorité numérique et matérielle, peut-être avaient-ils leurs chances, finalement. Si Kashmel réussissait son coup de faire s’écrouler l’Ordre G-Man, ça allait désordonner l’Empire en son cœur même. Et parfois, il ne suffisait que d’une petite poussée sur un seul domino pour que tout un édifice ne s’écroule.

Et maintenant donc, mon rôle était d’aider à ce que l’édifice en question s’écroule. Ça me plaisait moyennement, car ayant bien réussi à faire prospérer mon petit commerce à travers la corruption impériale, j’ignorai si j’allais pouvoir faire de même sous un règne d’humains amoureux de l’égalité et de la justice. Mais valait mieux ça que d’être bloqué dans un masque à l’intérieur d’une cuisine G-Man, n’est-ce pas ? J’étais Immotist. J’avais plus d’un tour dans mon sac. Je ferai mon petit bonhomme de chemin n’importe où, et je continuerai à amasser argent et influence.

J’avais recommencé à me créer un petit réseau d’espion dans la ville-basse, sur les ruines de ce qu’il fut avant que mon Phamôme ne le reprenne pour son compte, au service des Nettoyeurs. Kashmel avait massacré la plupart des Pokemon qui étaient demeurés aux côtés de mon traître de fils, mais j’avais d’autres contacts. Mon nom n’était certainement pas tombé dans l’oubli en si peu de temps, moi qui avait autrefois l’ensemble de la ville-basse dans le creux de ma main. Par contre bien sûr, cette fois, je tâchais de me faire discret. Ma nouvelle planque était dissimulée dans les souterrains de la cité, de telle sorte que les Nettoyeurs ne viennent pas me rechercher des noises. Assis sur un fauteuil dans un bureau créé à la va-vite, j’écoutai Diplôtom qui me faisait son rapport.

- Nous avons vingt-deux Pokemon dans le secteur ouest de la ville-basse qui pourraient devenir informateurs, à condition d’une juste rétribution. Parmi eux, il y a un soldat impérial, peu regardant sur le règlement et désirant arrondir ses fins de mois. Il connait les rondes que les Nettoyeurs font dans cette partie de la ville-basse.

Kashmel m’avait envoyé le petit Pokemon érudit pour m’aider dans ma tâche. Il était efficace dans ce qu’il faisait, ce Diplôtom, à savoir collecter les renseignements, les classer et théoriser les conséquences. Ça me changeait agréablement des incapables au cerveau vide qui composaient jadis la plupart de mes Pokemon de main.

- Paie-le comme il le désire, ordonnai-je. Il nous le faut chez nous, celui-là. C’est dommage qu’on ne puisse acheter directement un Nettoyeur… Mais j’imagine que la perspective de finir entre les griffes de Scalpuraï en cas de trahison est difficile à contrebalancer. Quoi d’autres ?

- Pas mal de vos guetteurs du quartier de la porte d’entrée nous signalent qu’il y a plus d’humains que d’habitude qui rentrent en ville. Et beaucoup ne semblent pas être des esclaves. Ils poseraient beaucoup de questions, sur ce qui se passe dans la ville haute ou dans la Citadelle.

- Des Paxen dissimulés ?

- Je l’ignore. Ça semble quand même peu probable. La garde de la cité n’est pas incompétente au point de laisser entrer des Paxen.

- Ah ouais ? Pourquoi Kashmel est en ville alors actuellement ?

En fait, les victoires successives des Paxen sur l’Empire n’étaient pas si incroyables que cela, quand on y réfléchissait. Il fallait prendre en compte un facteur essentiel : la plupart des Pokemon de l’armée impériale étaient des incapables. Ils avaient tellement eu le crâne bourré par la propagande impériale qu’ils ne voyaient même pas la menace que représentait véritablement les Paxen.

- Autre chose aussi, poursuivit Diplôtom en lisant ses fiches. Hier soir, un Pokemon tout juste débarqué en ville est entré en contact avec Croâporal.

Je cherchai dans ma mémoire.

- Croâporal… C’est l’ancien lieutenant de l’armée que j’ai débauché il y a deux ans ?

- Oui, monsieur Immotist. Le Pokemon qui l’a rencontré, un Pandarbare, était son ancien supérieur dans l’armée. C’est apparemment un ancien officier de Tranchodon, le colonel qui s’est fait tuer par les Paxen.

- Un déserteur ?

- Si on veut, mais je crois que le terme « traître » serait plus indiqué. Il a combattu l’armée impériale aux côtés des Paxen, et désormais il recherche des preuves d’implications de l’Empereur contre le Seigneur Xanthos.

Je réfléchis. Kashmel et Stuon nous avaient effectivement révélé que Daecheron avait piégé Xanthos lors de la bataille de Balmeros, et que c’était grâce à cela que les Paxen ont pu l’éliminer. Si jamais ça se vérifiait et que ça venait à se savoir dans l’armée, ça provoquerait sans doute un schisme entre ceux qui vénéraient toujours Xanthos, et les partisans les plus durs de l’Empereur. Cet officier Pandarbare était probablement de la première catégorie.

- Je vais le rencontrer, dis-je enfin. Fais en sorte de nous arranger un rendez-vous.

Diplôtom acquiesça, et preuve de son efficacité, le Pandarbare arriva dans mon bureau deux heures plus tard. Il portait une armure impériale, mais tout signe de son précédent grade avait disparu.

- Bienvenu dans mon humble planque, cher monsieur. Il parait que vous connaissez un bon ami à moi, Crôaporal ?

- Oui, et je n’aurai pas imaginé qu’il se fasse acheter par une crapule comme vous, grogna le grand Pokemon patibulaire. Comme quoi, je ne l’ai pas si bien formé que je le pensais…

- Tout le monde a un prix, mon ami, surtout quand on est lassé de notre employeur actuel, des conditions de travail, et tout… Je crois que c’est votre cas ? Ou alors vous ne vous vous faufileriez pas discrètement dans la cité sans rejoindre auparavant la caserne locale.

- Vous êtes un Paxen ? Me demanda Pandarbare sans détour.

- Hum… fis-je mine de réfléchir. Pas vraiment. Disons que je rends service à certaines connaissances qui elles le sont. Et vous ?

- Ne m’insultez pas, grogna Pandarbare. Je suis commandant dans l’armée impériale !

- Vous étiez, rectifiai-je. Mais vous ne ressemblez pas à un Pokemon qui déserte pour cause de défaite, je vous l’accorde. Alors donc… qu’a pu bien faire le colonel Tranchodon qui vous ai poussé à vous renier ?

Pandarbare garda le silence un moment, avant de répondre par une autre question :

- Le chef Paxen m’a dit que Kashmel et Furaïjin se trouvaient actuellement dans la cité. Vous savez quelque chose ?

- C’est possible. Mais je suis garant de leurs secrets et de leur sécurité. Qui me dit que vous n’êtes pas un espion impérial ?

- J’ai aidé les Paxen à combattre mes propres camarades lors du siège de Jartobylon ! Grogna l’ancien commandant. J’ai parlé avec Astrun, le leader des Paxen, son partenaire le célèbre Cernerable, et même la meurtrière du Seigneur Xanthos, Ludmila Chen ! Je peux le prouver en répétant leurs paroles.

Je fis fonctionner mon cerveau spectral à toute vitesse. Ça m’étonnerait effectivement que ce type soit un espion. Kashmel me remercierait peut-être de lui avoir amené. Mais je n’étais pas très sûr que Kashmel suivait les directives centrales des Paxen, en réalité. Il valait mieux que je garde ce Pokemon près de moi pour le moment, et que je bénéficie de ses services.

- Voilà ce qu’on va faire, mon ami, dis-je enfin. Vous allez travailler quelques temps pour moi. Nous nous efforçons de construire un réseau qui va nous servir à un gros coup qui est en train de se jouer. On cumule les infos, on étend notre influence, et si possible on retourne certains Pokemon. Si vous vous en sortez bien, je ferai en sorte de vous introduire auprès de Lord Kashmel.

- J’ai dit que je n’étais pas un Paxen, protesta Pandarbare. Je ne veux pas combattre l’Empire tant que je n’aurai pas de réponses à mes questions.

- C’est pas vraiment l’Empire en lui-même, notre cible. C’est l’Ordre G-Man. Vous avez une attache particulière envers ces humains costumés ?

Pandarbare se renfrogna.

- Pas le moins du monde.

- À la bonne heure alors ! Faisons du bon travail vous et moi, cher ami. Et vous trouverez ce que vous êtes venu cherchez. C’est toujours en remuant fortement la soupe que les réponses nous éclaboussent la figure…