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Informations

» Auteur : Gran Alvaro - Voir le profil
» Créé le 24/11/2017 à 14:09
» Dernière mise à jour le 26/11/2017 à 16:16

» Mots-clés :   Amitié   Famille   Johto   Romance   Slice of life

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Chapitre 3 - Vivre libre ou mourir
Bérurier Noir -Vivre libre ou mourir

« La la la la la la la la... OUAAAAAAAAAAAAAIS ! OUAAAAAAAAAAAIS ! OUAAAA... »
Euphorie générale dans le O’Permins, pub irlandais de Mauville où se réunissent les amateurs de sports et de bibines. L'adresse idéale si jamais il vous prenait l'envie de regarder la finale de la Conférence Argentée complètement bourré... Ce soir, c'est différent. Enfin, un peu. Les Greys Skarmories viennent de claquer un but dans les dernières secondes face à la ''redoutable'' équipe des Pineco Forrest. Un fichu match de foot. Devant l'un des quatre écrans plats sur chaque mur d'un lieu qui sent la bonne humeur et le houblon, des gros barbus hurlaient de joie entre deux accolades viriles. Bien évidemment, Paul en était, et le bougre avait du creux. Perso, j'vous avouerais que j'étais pas très très bien là...

« Ouaaaais ! Mec, c'est une soirée de malade ! Tu vivras pas ça deux fois !

-Quoi ?

-J'crois qu'après ça, on peut mourir tranquille !

-Pas de quoi se la péter, les Pineco Forrest sont avant-derniers...

-Quoi ?

-C'est cool ! »

Pas de dialogue possible avec des supporters torchés… Dire que tout avait commencé par une soirée Pokken Tournament chez Paul. Et puis il a reçu une notification comme quoi le bar diffusait Pineco Forrest – Grey Skarmory pour le maintien en P-League One. Ne vous inquiétez pas si vous n'avez rien compris, moi non plus. J'ai juste suivi ce Cyclone sur pattes qui m'avait promis une pinte.

Nous étions trop jeune pour acheter de l'alcool ? Certes, la loi était formelle : « il est interdit de vendre de l'alcool à des jeunes de moins de 18 ans. » Mais quand on voulait quelque chose, il y avait toujours moyen de s'arranger. Dans notre cas, le physique de Paul jouait en notre faveur. Sa pilosité rousse lui donnait un air plus âgé que toutes ces raclures de l'Académie Pokémon qui ne se sentaient plus pisser, ces « petits cons en uniforme à peine déniaisés qui jouaient les Champions », comme disait Papa. Des gosses de riches quoi.

Tout ça pour dire que c'était cool d'avoir à ses côtés un gars qui pourrait regarder un Golemastoc dans les yeux. Mais avec Paul, les avantages pouvaient très vite devenir des inconvénients. Avec sa descente à faire tomber un Tauros, ce con avait commandé quatre pintes de ''Super Potion'', une bière brassée à Acajou, avec 7 ou 8 % d'alcool. Deux pour lui, deux pour moi, une pour chaque mi-temps. Il baragouinait des chants de supporters, bras dessus bras dessous avec une espèce de motard arborant croix svastika sur la gorge. L'un de ces chics types qui semaient la terreur de Parmanie à Céladopole. Lui devait être en « voyage d'affaire »...

Je ne répondrai de rien quand la soirée tournera au vinaigre, et de toute façon, j'étais bien loin de cette cohue. Scotché à mon siège, j'essayais de me donner du courage pour textoter Emilie. Après avoir sifflé un des shooters que les serveurs offraient à l’occasion de la victoire de l’équipe locale, je me suis résigné et fini par envoyer un message à Alice :

[Pztzn il est grv bourré...]
[...Toi aussi non ? ]
[un peu]
[EMILIE CA VA ?]

Alice mit un peu plus de temps à répondre. Enfin, je crois. C'est que je ne l'avais plus trop, la notion du temps. Paul avait disparu aux chiottes et moi je m'affalai sur une table collante de bière. Mon téléphone vibra :

[On en parlera quand t'auras décuvé...]
[Elle m'a répondu qu'elle était malade, et quand je lui ai demandé si elle revenait la semaine pro, elle m'a dit ''je sais pas''...]

Il s’était passé une semaine depuis cette embrouille avec Greg Terry, et je ne savais pas trop comment gérer la situation. Alice m'avait filé le numéro d'Emilie, et sachant qu'elle mettait des heures à répondre à mon amie, je cogitais depuis des jours sur la façon de lancer la conversation par message. Je m'en bouffais l'ongle du pouce.

Me connaissant cette manie lorsque j'angoissais, Paul a décidé d'agir avant que je n'atteigne l'os. On avait peut-être fini au pub, mais sur l'instant, j'étais quand même ravi d'être aussi bourré. Je disais ça parce que cette situation ne devait certainement pas durer. Je voyais mon pote arriver en titubant, une autre pinte à la main. Je ricanais grassement. Quand il percuta un type, je me marrais encore plus. Lorsque cela eu pour conséquence de faire renverser sa bière à un chauve qui le dépassait d'une tête, j'explosai de rire.

Gros silence dans l'O'Permins.

Sur le bras du mastodonte, un tatouage de Smogogo signifiait que nous avions à faire à un cadre du gang des loubards de Parmanie. C'était la merde et je n'arrivais pas à réaliser à quel point, tant mon cerveau imbibé était d'alcool. BOUM ! Grosse droite dans la poire ! Personne pour s'opposer aux quatre motards qui faisaient face à Paul ! Me précipitant vers mon pote, je lui fis savoir que c'était le moment de se barrer en courant et nous nous sommes retrouvés en dehors du bar. Mais c'était sans compter sur ces tarés qui nous avaient poursuivi. Les cheveux roux de mon meilleur ami se retrouvèrent empoignés par une main qui jeta un Carrington sonné, un cocard sur l'oeil, au pied du gros type qui l'avait frappé.

« …T'as pas de bol mon gars, je voulais donner l'exemple et sur toi que ça tombe!

-...'Culé.

Le lombard reprit Paul par les cheveux.

-J’ai pas entendu espèce de fils de… AAAARH »

Paul avait frappé un mec du gang de Parmanie dans les burnes... Paul; avait; frappé; un; mec. du. gang. de. Parmanie. dans. les. burnes. Paul avait frappé un mec du gang de Parmanie dans les burnes ! Putain de... ! Le gros lard le lâcha mais...

« Euuuurgh…. Ursaring !

-Graaaah !

Le chauve avait l'air aussi enragé que l'oursonne. Et je voyais ma vie défiler.

-Tu veux la jouer comme ça enfant de putain ? Okay mais après j’m’occupe de tes miches ! Grolem ! »

C'était la pagaille sur la terrasse. Les serveurs commençaient à peine à ranger les chaises que celles-ci valdinguaient parce qu'un ours tambourinait sur l'Armure rocheuse d'un Pokémon avec des statistiques défensives élevées. Purée, l'ivresse me donnait les mêmes raisonnements que Mathieu. Ursaring utilisait Mania sans que son maître ne lui en donnât l'ordre. J'étais persuadé qu'on allait finir en cellule de dégrisement.

« Ouais ma fifille, Mania c'est bieeeeen ! »

Paul, ivre mort, semblait cependant être persuadé d'avoir le contrôle total sur un Pokémon qu'il n'a jamais pu sortir sans endommager de dégât matériel aux alentours. Elle avait quand même de la gueule, cette femelle Ursaring, avec ses cicatrices sur le bide !
Bon sang ! Dans d'autres circonstances, Paul aurait pu être accepté parmi les motards rien qu'avec ce Pokémon !

« Grolem, attaque Ampleeeeeur ! »

Oh bordel de... Cette attaque n'avait guère ébranlé le monstre de Paul, mais m'avait fichu le cul par- terre.
Histoire d'être en sécurité, je m'étais réfugié derrière une table de la terrasse. Le boucan me faisait légèrement flipper, mais ça n'empêchait pas une foule de fumeurs immobiles d'admirer le spectacle. Paul jubilait intérieurement simplement parce qu'il avait un public : le second souffle du dresseur dos au mur...

« C'est un Pokémon qui a fait la Ligue, connard... Baragouinait Paul avec orgueil.

-Mon Grolem peut éclater ta face de pédale !! Explosion ! »

AAAAAAAAH ! Ça y est, on va crever parce qu'il n'a pas pu s'empêcher de faire le con alors qu'on devait juste boire un verre et regarder un match de foot ! Mais quel Sablaireau je vous jure ! Je m'étais couvert la tête mais rien n'arriva... En regardant au-dessus de ma table, je vis un autre colosse avec des rouflaquettes débouler de l'intérieur du pub.

« QU'EST-CE QUE C'EST QUE CE BORDEL QUE VOUS FICHEZ DANS MON BAR ! TOI ET TOI, VOUS ÊTES BLACKLISTES ! »

    Le cri m'avait semblé arrêter l'attaque, le combat, et le temps lui-même.

« Nattie, tu me prends en photo ces trois-là, je les veux sur le Mur, déclara la voix autoritaire qui avait repris son calme.

    J'entendis deux bruits de flash, et un troisième qui m'aveugla. Nous venions d'être bannis à vie du paradis de la bière, l'O'Permins. En regardant du côté de Paul, je vis un Tartard, debout devant un Grolem et un Ursaring gisant au sol, le motard de Parmanie ronflant à-même le sol, et Paul qui lançait un regard noir à François Kerbrac, le patron de bar le plus fou de Johto.

-Gamin, reprit François en relevant mon pote, je ne veux pas de ça dans mon bar. Va boire ta bière à Doublonville, Acajou ou Oliville mais ne refous plus jamais les pieds ici. Fais passer le mot à la loque cachée derrière sa table. »

    Fébrile, je sorti de ma cachette et je tirai Paul par le bras. Il eût la lucidité de rappeler son Ursaring sans cesser de défier le patron du regard. Plus pété que moi, j'ai été obligé d'aider mon camarade de beuverie à marcher jusqu'à la sortie de Mauville. J'avais enfin réalisé ce qu'il s'était passé : le talent Moiteur de Tartard nous avait évité le pire, et le niveau ce Pokémon devait être tel qu'il a collé une rouste à Ursaring comme à Grolem avant d'hypnotiser le motard.

On était vite arrivé à la sortie de Mauville. A l'embranchement de la Route 31, je trouvai Paul un poil barbouillé...

« J'vais creveeeeer ! Gallardo, aide-moi à dégueuler...

-Rêve, on est pote mais de là à foutre mes doigts dans ta glotte parce que tu t'es saoulé comme un Cochignon...

    Posé sur une pierre, le visage pâle de Paul était surplombé d'un petit panneau en bois indiquait « Route 31, direction Ville-Griotte ». Heureusement que je le connaissais bien, puisqu'il était à peine lisible. Il n'y avait donc plus qu'à sortir mon Ténéfix.

-Fix, utilise Flash pour nous éclairer.

-Ténéfix !

-Waaaaaaah, cria Paul, tu veux m'aveugler Gallardo ou quoi !!

-Regarde-toi sérieux, elle dirait quoi ta meuf ? »

    Évidemment, il n’était pas encore avec mais c'était tout comme. Ce grand nigaud disparaissait les heures de pause et réapparaissait deux heures plus tard avec un sourire jusqu'aux oreilles. Il m'obligeait à animer une table où Matt ne faisait aucun effort pour faire la conversation avec Alice qui décrétait ne pas sortir un mot tant que – je cite « [m]on geek ne se décoincerait pas avec les filles ». Je n'y pouvais rien si je traînais avec un nerd lunatique ! Qu'elle lui parle de stratégie ou de Draco Kights, elle ! Maintenant que nous passions nos déjeuners à trois, l'ambiance était au plus bas. Alice ne s'empêchait plus d'afficher un visage fermé que je lui connaissais d'avant l'absence d'Emilie. D'une certaine manière, elle n'avait plus que moi à materner. M'est d'avis que ses soucis personnels ressortaient un peu plus...

    Pendant que je réfléchissais, Paul s'était caché derrière un buisson duquel j'entendis un énorme « Bwaaarlgh »... On pouvait enfin rentrer chez lui. Une longue marche au milieu des sombres conifères de la Route 31.

« Tu sais Gallardo, lança-t-il après un inhabituel silence de cinq minutes, t'es un peu comme un frère pour moi.

-Arrête Paul...

-Si si si ! Et j'dis pas ça parce que je suis bourré ! Enfin si un peu mais... Tu es toujours là quand je veux te voir, quand je fais mes conneries et t'es mon seul vrai ami dans le fond...

-Merci... Hésitai-je, touché.

Qu'est-ce qu'il me faisait ? Je...

-Je sais que je traîne souvent avec Julianne en ce moment mais je suis à fond sur cette gonzesse tu comprends ? Bien sûr que j'lâche pas les potes, et puis si quelqu'un t'emmerde, je lâche mon Ursaring et on t'emmerdera plus !

-Oui bon, le lâcher d'Ursaring j'ai déjà assez cotisé... Au fait, comment ça se passe avec Julianne ? Tu ne m'as encore rien dit finalement.

-Baaah... On se voit, elle me parle de ses cours, je lui parle des miens. Elle a lu plein de livres, écouté plein de musiques et vu plein de films, du coup j'essaye de rattraper mon retard. Tu connais Zabirdshi Point ?

-Zabriskie Point ?

-Ouais, quelque chose comme ça. C'est l'histoire de deux hippies qui s'enfuient dans le désert en volant un avion. C'est un peu bizarre, surtout la fin, mais si c'est ce qu'elle aime, faut que je m'intéresse tu vois... »

Sans que je ne m’expliquât pourquoi, je n'étais qu'à moitié d'accord. A vrai dire, je n'aimais pas l'emprise qu'avait mannequin intello sur mon pote. Toutefois, je ne me sentais pas capable de lui dire et je me tus le long du chemin.

Nous arrivâmes vers une heure du matin devant la maison de Paul. Sa mère était infirmière de nuit, ce qui lui avait donné l'idée de s'organiser cette soirée console qui aura inévitablement viré vers une ambiance « bar-bière-foot ». On avait déplié le lit de camp sur lequel je devais dormir, après quoi il s'est endormi aussi sec. De mon côté, je fumais une dernière clope à la fenêtre avant de me coucher à mon tour.

C'était sans compter sur une fringale bien des familles. J'étais chez Paul comme chez moi -voire mieux - alors je me fis un sandwich au beurre de cacahuètes. Assis sur la table de cuisine, il me vint à l'esprit qu'on ne pouvait pas inviter plus de trois personnes chez mon ami : la cuisine était exiguë, la salle à manger n'était pas en capacité d'accueillir une grande tablée et il m'arrivait souvent de me cogner dans la douche.

J'eus soudainement envie de visiter les lieux, histoire d'imaginer quelle vie menait vraiment Paul avec sa mère. Rien d'extraordinaire, si ce n'est des magazines de football mêlés à de vieux numéros de « Femmes de Johto » sur un meuble récupéré, une assiette avec des croûtes de pizza sur la table basse, des cadres un peu kitsch et beaucoup de photos de famille. Petit Paul à la mer avec maman et son frère Syd, petit Paul déguisé en Maître Peter pour la fête de l'école à 8 ans, petit Paul un peu flou mais assurément édenté dans un cadre fabriqué à l'école maternel sur lequel était écrit « Bonne fête Maman », petit Paul qui jouait dans une piscine gonflable avec Rémoraid... Il n'avait peut-être pas connu son père mais sa mère s'assurait que son fils reçoive autant d'amour que pourraient en donner un papa et une maman. Songer à cela sur mon lit de camp me déprima un peu.

Le réveil de 10h23 me fit comme un Bec Vrillé dans le crâne. Paul avait déjà la brosse à dents dans la gueule et me bougea de mon plumard de fortune avec son talon.

« Elle vient à quelle heure ta mère ? Demanda le gaillard, la bouche pleine.

-Ma m… Oh pu… Je pue la clope ?

-Un peu ouais ! File à la douche ma vieille ! »

Et vers 10 heures et 56 minutes…. Tut tuuuuut tuuuuuut !

« C’est la dernière fois que je viens te chercher, je te préviens ! Vous avez encore fait la bringue mais ce n’est pas avec des cernes pareilles que tu vas avoir ton diplôme ! J’ai bien regardé tes notes sur la plateforme internet du lycée et je vois que tes soirées sur l’ordi portent ses fruits, félicitations ! Oh bon sang, c’est mon jour de repos et tu me stresses mais à un point… Sans compter cette réunion de famille pour laquelle bien sûr je n’ai rien à mettre… »

Dix minutes de trajet où assis à la place du mort, je subissais un flot de paroles sans que je ne puisse mettre DJ Ben à la radio. Derrière, Paul scrutait son téléphone en permanence quand il ne composait pas un message. Inutile de préciser qu’il ne semblait pas plus frais que moi, surtout avec son coquard. Heureusement que nos cours commençaient à 13h30… Nous avions deux heures à tuer, et nous les tuerions séparément. Comme tous les jours depuis une semaine. Ça devenait lourd.