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R. de Deadlier



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» Auteur : Deadlier - Voir le profil
» Créé le 15/10/2017 à 20:01
» Dernière mise à jour le 26/01/2018 à 18:24

» Mots-clés :   Action   Alola   Aventure   Organisation criminelle   Présence de personnages du jeu vidéo

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Lettre 1 : Posez moi la question
Mon fils,

Je suppose que tu ne t’attendais pas à recevoir une lettre de ma part. Rassure-toi, j’étais aussi surpris que toi quand m’est venue l’idée de t’écrire. Je pensai que les ponts resteraient coupés de façon définitive entre nous. Et pourtant, j’ai enfin retrouvé l’envie et le courage de faire face. De te faire face. J’ai erré pendant des années en ignorant les messages et les appels de toutes mes relations, toi y compris. Alors je ne m’attends pas à ce que tu reçoives cette lettre avec le sourire. Ni même à ce que tu la lises en fait. Mais si jamais tu venais à le faire, sache que je suis un homme changé, renouvelé. J’ai retrouvé confiance en moi grâce à une expérience inattendue que j’ai traversé il y a deux ans.
Tu vas me poser la question : En quoi ça m’intéresse ? Ce à quoi je répondrais : Je n’en sais rien. Mais je veux te montrer ce que j’ai traversé, ce que j’ai enduré. Voici donc le début de mon récit.

Comment commencer cette histoire ? Je sais. Par une annonce. Celle qui, à l’époque, m’avait fait croire que j’allais enfin tout oublier, repartir à zéro, et trouver la réponse à la tonne de problèmes qui me minaient l’esprit.


- Les passagers qui descendront à Mêle-Mêle sont priés de préparer leurs affaires, nous approchons de notre destination.

La voix pleine d’entrain de l’annonce me tira de mes pensées. Mêle-Mêle. C’était là que je devais me rendre. Et je n’aurai pas beaucoup de problèmes à rassembler mes affaires. Je me levai avec difficulté de mon lit, fourbu d’avoir encore essayé de dormir pendant plusieurs heures, en vain. L’insomnie me hantait depuis maintenant plusieurs semaines, et ce n’était toujours pas aujourd’hui que j’arriverais à la vaincre.
Je regardai autour de moi, ma chambre était toujours aussi exigüe. J’en poussai un soupir de frustration. Après avoir connu les hôtels les plus opulents et les casinos les plus riches, j’en étais réduit à voyager dans une cabine pour citoyen de troisième zone. Je n’étais pas claustrophobe, mais ce genre d’endroit devait spécifiquement être conçu pour vous faire développer cette phobie.

Mon premier réflexe fut de me diriger vers le miroir pour voir la tête que j’avais. La même que tous les jours à dire vrai. Une tête de déterré, marquée par des cernes énormes. Mes cheveux étaient en pétards, et ma barbe mal rasée embroussaillait mon visage. Je détestais cette barbe. Tout comme mon visage. Mais je m’y étais habitué, depuis le temps. Je n’avais pas la motivation pour régler ce problème de toute façon. Comme pour régler beaucoup d’autres problèmes en fait.
Qui étais-je au juste ? Difficile question. Mon nom, je faisais tout pour l’oublier et le faire oublier. Ma vie n’était plus rien. Moi-même je n’étais rien. Je me contentai d’errer de région en région en fonction des occasions. Désormais je m’identifiai uniquement au pseudonyme de R., comme un vestige, souvenir de mon passé. Pitoyable, tu vas te dire hein ? Efface ce sourire narquois de ton visage, je le vois d’ici.

Je pris mon fidèle chapeau borsalino en main, et souffla la poussière qui l’encombrait avant de le visser sur mon crâne. Il m’allait bien, il faut dire qu’il avait été fait sur mesure. Et puis, il dissimulait ma coiffure, en plus d’assombrir mon regard. Ainsi on ne voyait pas mes cernes. J’étais désormais plus présentable. Pourquoi vouloir l'être au juste ? Aucune idée en fait. Sans doute un dernier moyen de se raccrocher à mon ancienne vie.

J’enfilai mon manteau noir et le fermais bien, avant de relever mon col. Je ne voulais pas qu’on me regarde. Je ne voulais pas qu’on me voit. J’étais sans doute oublié depuis longtemps, mais franchement, ça n’avait aucune importance.
Je pris en main mon seul et unique bagage, ma mallette, et me décida à enfin sortir de la cabine.

- Nous arrivons en vue de Mêle-Mêle, le Ferry espère que vous avez passé un agréable voyage en notre compagnie.

Ben voyons, tu croyais que j’allais recommander ton tas de rouille à qui que ce soit peut-être ? Ils pouvaient dire ça avec la voix la plus joyeuse du monde, ça n’en restait pas moins un voyage pénible de quelques heures après déjà presque une journée entière d’avion.
En voyant la foule de jeunes vacanciers courir autour de moi pour venir se pencher à la rambarde du navire et observer le paysage, j’en vins à me demander si je n’étais pas un peu trop ronchon. Sans doute, mais quelle importance au final. Je n’étais pas là pour des vacances moi. Je me mis en retrait en attendant que le Ferry se décide enfin à accoster au port. Que c’était long, ils prenaient leur temps pour montrer leur coque en ruine ou quoi ?
Une fois que le bateau eut enfin accosté et abaissé sa passerelle, je me dirigeai vers la sortie. Je laissai tous les joyeux idiots qui allaient se faire dorer la couenne avant de descendre à mon tour. Je ne saluai même pas l’hôtesse qui me dit au revoir à la sortie du bateau. Je me contentai de l’ignorer pour rejoindre le sol le plus vite possible.

A peine un pied posé sur le port, je sortis machinalement mon Pokématos pour le consulter. Je le trimballai depuis plusieurs années maintenant. Un peu comme mes vêtements, c’était une trace de mon ancienne vie que je ne m’étais pas résolu à jeter. Je n’avais aucun message, évidemment. Pourquoi regarder et s’attendre à ce qu’on m’appelle alors que j’avais passé mon temps à ignorer tous ceux qui avaient tenté de me joindre ?
C’est tout en rangeant mon Pokématos que je commençai à me diriger vers la sortie du quai.

- Un instant monsieur, veuillez passer par le guichet de douane pour régulariser votre arrivée, s’il vous plait, me dit un homme en uniforme.

- Je n’ai pas le temps, lui grommelai-je à la figure sans même m’arrêter.

- Faites-ça vite fait et vous pourrez profiter de notre beau soleil au plus vite, me dit-il avec un sourire bien niais.

- J’ai vraiment l’air d’être un attardé venu se dorer la cellulite sur vos plages ? assénai-je, énervé.

Je commençai déjà à détester cette région. Alola disposait, d’après ce qu’on disait, d’un écosystème et d’une culture proprement unique. Aussi, et pour les protéger, ils contrôlaient toutes les arrivées dans leurs archipels afin d’éviter la venue de personnes peu recommandables comme des braconniers, des criminels ou des personnes louches. Comme moi.
Je me rendis donc au bâtiment que m’indiquait l’homme afin d’en finir avec toutes ces procédures. Quelle perte de temps, au plus vite j’aurai fini ce que j’avais à faire ici, au plus vite je serai reparti de cette région.
Quand je rentrai à l’intérieur, je vis bien les regards qu’on me jetait. Habillé tout en noir, avec un manteau long et un borsalino, je dépareillai sérieusement en comparaison avec les touristes. Peu importe, j’étais peut être à la dérive mais j’avais encore ma dignité. Jamais je ne m’habillerai d’une façon aussi pouilleuse qu’avec un t-shirt ou un short. Et d’ailleurs, j’espère que tu ne le feras jamais toi-même, je ne t’ai pas élevé comme ça. Et ne dis pas que je ne t’ai pas élevé du tout.

Il me fallut près d’une demi-heure pour venir à bout de l’administration de Mêle-Mêle. Décidément, de ce côté-là du monde ou de l’autre, c’était toujours aussi abominable de suivre les procédures.

Une fois ces soucis réglés, je me mis enfin en route. Je devais trouver le professeur Euphorbe au plus vite. Alola, comme toutes les régions, faisait superviser l’étude de sa faune par un professeur Pokémon. Pour beaucoup de gens, il s’agissait donc d’une personne respectable, qui définissait comment s’occuper des Pokémon et apprenait aux gens à en prendre soin. Des illuminés du même type que Chen ou Orme, en somme. Tu sais ce que j’en pense moi de ce genre d’imbéciles idéalistes ?

Je me rends compte que la réponse est dans la question, je ne fais qu’un voyage, tiens. Pour moi ce sont de doux rêveurs qui ne comprennent rien au potentiel des Pokémon.
Mais je dois bien avouer qu’à ce moment-là, j’étais encore en plein doute. Beaucoup d’évènements dans ma vie m’avaient amenés à remettre en cause toutes les certitudes que j’avais sur les Pokémon, leur utilisation et même leur dressage. Moi qui avais pourtant été un des meilleurs dresseurs que Kanto n’ait jamais porté. Et je cherchai aujourd’hui le professeur Euphorbe car je m’intéressai à cette coutume étrange qu’était le Tour des Îles.

De ce que j’en avais appris, les habitants d’Alola voyaient dans le tour des îles un genre de rite initiatique permettant aux plus jeunes de se lier à leurs Pokémon et de se découvrir eux mêmes. Et j’en avais besoin. De me découvrir. Ou plutôt de me redécouvrir.
J’avais hésité à reprendre le chemin des arènes comme je l’avais fait jadis, mais je n’aurai jamais pu, j’étais trop marqué par ce genre de choses, et trop repéré par les autres champions d’arènes depuis que j’avais participé au Pokémon World Tournament.
Pour ma remise à zéro, ma remise en question, je devais aller à un endroit où on ne me jugerait pas pour mon passé. Et Alola, à l’autre bout du monde et de mon histoire me paraissait l’endroit tout indiqué.

D’après mes informations, Euphorbe vivait dans une bicoque à l’écart d’Ekaeka, sur une plage miteuse. Pourquoi avait-il choisi de s’éloigner des habitants ? Je n’en savais rien. Et je m’en moquais royalement. Je voulais juste qu’il m’indique la marche à suivre pour participer au Tour des Îles et riens de plus. Je n’étais pas ici pour me faire des amis ou pour me demander pourquoi l’imbécile local avait choisi de se rendre inaccessible pour ses compatriotes.

Il me fallut près d’une demi-heure de marche pour enfin atteindre son laboratoire Pokémon. Ou devrais-je plutôt dire sa cabane Pokémon. Je n’avais jamais vu de laboratoire aussi ridicule. C’était vraiment une simple cabane en bois construire à la va vite sur la plage, sans aucun gout architectural. Si ça ne tenait qu’à moi, je la raserai aussitôt. Mais bon, je ne pouvais pas laisser parler mes simples envies ou mes pulsions primaires. Et surtout je n’allais pas commencer à transgresser la loi à peine arrivé. Surtout pour une chose aussi futile.

Je m’approchai de la porte close, et pris une bonne inspiration avant de toquer. Curieusement, j’étais stressé. Et je ne savais pas pourquoi. Un soupçon d’excitation avant d’entamer une nouvelle aventure, ou simplement l’idée de demander service à un professeur Pokémon ? Peut-être un mélange des deux, maintenant que j’y pense. Personne ne vint m’ouvrir alors je frappai de nouveau. Une fois. Deux fois. Trois fois. Toujours rien. Etait-il sourd ?
Je me mis à chercher une sonnette providentielle, mais bien évidemment, ce taudis n’en était pas équipé. Je commençai à me dire que c’était vraiment une idée horrible que d’être venu ici. Surtout si au final j’étais venu pour rien. Je frappai avec plus d’ardeur, comme si j’allais pouvoir passer mes nerfs sur cette pauvre porte. Dans un élan de frustration, je me surpris même à crier.

- Il y a quelqu’un ? Ouvrez, bon sang !

Rien, toujours rien. Bon, alors je faisais quoi ? Après tout ça, demi-tour et je rentrai chez moi ? Hors de question. Tant pis, je le réveillerai coûte que coûte cet imbécile. Je mis ma mallette au sol et l’ouvrit. J’en contemplai le contenu : cinq Poké Ball disposées dans un écrin de velours, avec un sixième emplacement vide. Mes fidèles guerriers qui m’accompagnaient partout. Eux aussi allaient frapper à la porte, mais avec beaucoup plus de…conviction.

- Alola l’ami, pas la peine de s’exciter. Qu’est-ce qu’il se passe ? m’interrompit une voix nasillarde.

Je me retournai dans l’espoir d’enfin voir ce foutu professeur. Manque de chance, je tombai sur un vieux décati au visage presque aussi cerné que le mien. Sauf que lui avait une tenue bien plus négligée que la mienne. Un restant d’uniforme noir usé jusqu’à la moelle et dont je n’arrivais même pas à lire l’écusson. Le tout révélant un t-shirt rouge et un drôle de collier. Je soupirai en regardant ses cheveux grisonnants coiffés à l’arrache, tandis que je me décidai enfin à lui répondre.

- Je fais du porte à porte pour des produits cosmétiques, ça ne se voit pas ? lui dis-je de façon très agressive.

- Vu ta tenue, t’as surtout l’air d’un type très louche…qu’est-ce qui te prend de t’habiller comme ça à Alola l’ami ? dit-il sans même relever ma pique.

- Alors, premièrement, je ne suis pas votre ami, et deuxièmement ce que je fais ne vous regarde pas.

Mise au point directe. Sa tête ne me revenait pas et son apparence me semblait trop familière pour ne pas m’irriter. En fait pour une raison qui m’échappait, j’avais l’impression qu’un truc en lui me ressemblait. Mais quoi ? Si tu penses à la coiffure, retires ça tout de suite de ton esprit. Ou j’arrête d’écrire.

- Si tu cherches le professeur Euphorbe, il est absent. Il est parti en voyage. Et moi…boah…je dois garder sa maison. Alors je passe jeter un œil de temps en temps.

- Absent ? Comment ça absent ? Il revient quand ? dis-je, agacé.

- Aucune idée. Il est parti relever le défi des arènes de Kanto, c’est qu’il ne tient pas en place, tu sais ?

La douce ironie. Je sentai la colère monter en moi alors que je comprenais que cet imbécile de professeur Euphorbe et moi avions fait le trajet inverse. Il était parti pour Kanto et moi venu ici. J’allais finir par croire que le destin était contre moi. Cherchant à reprendre mon calme, je me disais qu’avec un minimum de bon sens, il avait laissé quelqu’un pour le remplacer en son absence, peut-être ce type.

- Je cherche des informations sur le Tour des Îles, tu peux me renseigner, qui que tu sois ?

- Je m’appelle Danh. Et je sais deux ou trois choses sur le Tour, ouais…mais c’est pas moi qui m’en occupe. Trop gonflant. Sur ce, à plus, dit-il en tournant les talons.

J’écarquillai les yeux en voyant mon interlocuteur commencer à s’éloigner sans plus de procès. Non mais pour qui se prenait-il celui là ? Je résistais à l’envie de lui exprimer ma plus grande véhémence, et tentai une approche plus…diplomatique.

- Est-ce que je pourrais au moins savoir à qui m’adresser pour qu’on me renseigne alors ? demandais-je.

- Tu pourrais. Mais je ne te le dirai pas. C’est trop tard pour devenir poli, rétorqua-t-il sans se retourner.

Je serrai les dents, puis n’y tenant plus, je pris une Poké Ball dans ma mallette toujours ouverte et la lança devant moi pour invoquer mon fidèle Persian. Ce Pokémon était mon partenaire le plus proche et ma plus grande fierté. Et il n’avait pas son pareil pour délier les langues des personnes les plus récalcitrantes. On ne pourra pas dire qu’il ne l’avait pas cherché.

- Faisons ça autrement…dis-moi ce qui m’intéresse de ton plein gré ou je te l’arracherai de force, assénai-je sans plus de procès.

Alors qu’il se retournait enfin, il observa mon chat avec son air mi-intrigué mi-blasé, puis me regarda à mon tour. Puis, il réagit en sortant une Poké Ball de l’intérieur de sa veste.

- Ah d’accord je comprends. Tu veux un combat Pokémon en fait ? D’accord…si tu me bats, je te dirais ce que tu veux savoir.

Mais non, je ne voulais pas…il faisait exprès de ne rien comprendre ou quoi ? Enfin, c’était mieux que rien, je suppose. Il n’avait pas l’air très fort, je l’écraserai vite fait sans la moindre difficulté. Je pris une grande inspiration puis répondit à l’affirmative à sa demande de combat. De son côté, il soupira comme si tout ça le gonflait au plus au point, et lança sa Poké Ball avec nonchalance pour appeler un Escroco.

- Finissons-en au plus vite, que je puisse rentrer chez moi, dit-il.

- Au plus vite ? Est-ce que tu me prendrais pour un faible ? dis-je avec agacement.

- Je ne devrais pas ?

Il avait beau être toujours aussi impassible et blasé, je sentais une pointe de provocation et d’amusement dans sa voix. Il se jouait de moi, et ça m’agaçait. Fortement. Il était plus que grand temps que je remette ce misérable à sa place. Il allait comprendre que face à moi, il n’était qu’un dresseur de troisième zone.

- Persian, lacère-le avec Combo-Griffes, vas-y ! Ordonnai-je avec vigueur.

Persian se rua sur l’Escroco qui se protégeait du mieux qu’il le pouvait des assauts furieux du Pokémon félin. Danh ne donna pas d’ordre, se contentant d’observer, tandis que son propre Escroco ne semblait pas souffrir plus que ça de mon attaque. Pourtant il ne devait pas être si bien entrainé que ça, il n’était même pas à sa forme finale. Donc rien d’insurmontable.

- C’est tout ce que tu peux faire.. ? Franchement, je commence à m’ennuyer. Escroco, utilises Mâchouille, dit-il sans aucun entrain.

-Persian, évite et lance une Machination.

Danh afficha un coin de sourire à son visage impassible. Je n’aimais pas ça, que manigançait-il cet imbécile ? J’essayais de scruter son visage à la recherche d’une réponse mais ne trouva rien. C’est un miaulement de Persian qui me fit me reconcentrer sur le combat. Son fichu crocodile avait enfin réussi à mordre mon Pokémon. Mais ça ne suffirait pas. Il allait gouter à ma toute puissance.

- Persian, utilise maintenant Tranche pour te dégager, et débarrasse m’en avec Vibraqua.

Persian lacéra la face de l’Escroco qui lâcha, puis il recula et lança une puissante onde d’eau sur le Pokémon sol qui, pour le coup, sembla bien souffrir. C’est ce que je pensai, il m’avait laissé montrer ma force sans réagir, il n’y connaissait rien. Pire que ça, il était venu s’exposer en s’acharnant à m’attaquer comme un demeuré. Ce combat n’allait plus durer très longtemps. Une dernière attaque devrait suffire pour en terminer.
Alors que je donnais l’ordre à Persian d’achever mon adversaire, Danh soupira fortement, ce qui m’irrita au plus haut point.

- Une attaque eau sur un type sol, que c’est original. Quel courage franchement… dit-il.

Bon, là c’était la goutte de trop. Je sais, je réagissais alors de façon trop instinctive et colérique. Mais après ces dernières années, j’avais un rapport particulier avec le combat Pokémon. Je me refusai l’idée même d’échouer de nouveau, et surtout je n’acceptai pas qu’on me sous-estime. On s’était beaucoup trop moqué de moi après tout ce que j’avais traversé. Alors forcément, voir ce type piquer mon orgueil me fit tomber dans son piège grossier. Oui, j’étais loin de mon meilleur niveau, tu peux te moquer.

- Je n’ai pas besoin de ça pour te vaincre. Persian, attaque de nouveau avec Tranche et montre lui ta puissance, hurlai-je avec colère et fierté.

- Pfff…Escroco, Vantardise. dit-il, sans attendre.

Je clignai des yeux tandis que je pouvais désormais admirer mon propre Pokémon se gonfler de fierté sous les provocations de l’Escroco. Puis, il se mit à charger d’une façon bizarre avant de se frapper lui-même. Mais quel imbécile. Et je ne disais pas ça pour mon Pokémon. Enfin si, en partie, mais pas que. Aussi pour moi, évidemment. J’étais condamné à voir mon Pokémon se vaincre tout seul désormais.

- Et ben voilà. Comme ça, ton Persian a le boulard, comme toi. Vous vous ressemblez encore plus. Cool non ? demanda-t-il.

Voyant que je ne répondais pas, car essayant de contenir ma colère et fusillant mon Persian incompétent du regard, il lâcha un énième soupire.

- C’est trop long…allez, Mâchouille-le et plante-le, qu’on rentre se coucher.

Je vis alors son Escroco saisir mon Persian à la gorge avec sa mâchoire à ma propre surprise. Et tandis que j’écarquillai les yeux, je le vis le soulever à la seule force de sa mâchoire, puis le retourner afin de le planter, tête la première, dans le sable, le reste de son corps retombant lourdement au sol.
Quelle force physique, d’où sortait-il ça ? Mon Persian ne réagissait plus tandis que Danh commençait déjà à rappeler son Escroco dans sa Poké Ball. Mais je n’avais pas perdu, non ! Il était hors de question que je perde. Je ne pouvais plus perdre.

- Qu’est-ce que tu fais ? Ce n’est pas fini, il me reste encore des Pokémon !

- J’ai jamais dis qu’on utiliserait plusieurs Pokémon…et puis entre nous, tu me fais pitié.

- Je ne te permets pas de m’insulter ! Répondis-je avec agacement.

Moi, faire pitié ? Et puis quoi encore ? C’était vraiment le mot de trop ce coup-ci. J’avais ma fierté. Et je n’allais pas me laisser marcher sur les pieds. J’étais tellement agacé que je n’avais même pas remarqué que je venais de me mettre à le tutoyer de façon totalement vulgaire. Même moi il m’arrivait de perdre mes manières. Alors que je m’approchai de lui, je le vis venir à mon Persian et lui donner à manger une baie pour le remettre sur pieds.

- Tu ferais mieux de te calmer, ou ça risque de mal finir, ajouta-t-il en me regardant du coin de l’œil.

- Ah oui, vas-y, demande-moi si je sais pour qui ça va mal fini… rétorquai-je en brandissant une Poké Ball, saisissant la menace à peine voilée.

- Pour moi, dit-il dans le plus grand des calmes.

Je clignai des yeux à sa réponse, ne sachant pas comment réagir. Je ne m’attendais pas du tout à cette réponse la. Il avait dit ça d’une façon si naturelle et si nonchalante, alors qu’il m’avait sèchement battu, que j’avais du mal à croire qu’il disait reconnaitre une future défaite, en cas de conflit. T'arrive-t-il parfois de savoir que tu as été mouché et de refuser de l’admettre ? Et bien c’était typiquement un de ces moments la.

- Tu vois ? C’est ça le problème, ton orgueil passe avant tout, même ton Persian. Tu ne vaux rien. Je suis sur que même toi, tu ne sais pas ce que tu vaux. Ni ce que tu veux d’ailleurs.

Je n’osai pas répondre. Non, pour être exact, je ne su pas quoi répondre. Il avait toujours un je ne sais quoi d’agaçant en lui et il semblait bien cerner mon problème. Mieux que moi en fait. Car au fond j’ignorai quel était mon problème exact. Voilà maintenant des années que je vagabondai sans but précis autre que tenter de me reconstruire.

- Je ne pense pas que le Tour des Îles t’aidera, entre nous. Mais tu peux toujours demander son avis au vieux Pectorius, dit-il tout en caressant mon Persian.

D’abord, c’était mon Persian, et j’étais le seul autorisé à le caresser. Ensuite qu’est-ce qui lui prenait d’un coup de m’aider, alors que j’avais perdu ? Je rappelai mon Persian dans sa Poké Ball, puis la rangeai dans ma mallette avant de la refermer. Je tenta de le regarder sans trop de colère. Si c’était possible.

- Et c’est qui ce Pectorius ? Je le trouve où ?

- Le Doyen de l’Île. Tu le trouveras au village de Lili’i. Par là, m'indiqua-t-il.

D’un simplement hochement de tête en guise à la fois de remerciements et d’au revoir, je me mis en route pour ce village, déterminé à trouver ce Pectorius et enfin démarrer ce pour quoi j’étais venu ici. Mais, il m’interpella avant que je ne sois parti.

- Dis-moi un truc avant que tu partes. Comment tu t’appelles ?

- … Mon nom ? Mon nom c’est… R. simplement, répondis-je.

- Ah, t’es perdu à ce point là ? s’étonna-t-il.

Je me contentai de l’ignorer, puis repris ma marche en avant, bien décidé à m’éloigner de cette plage et de ce vieux blasé qui me mettait vraiment mal à l’aise.


Ainsi s’achève cette première partie de mon récit. Je t’enverrai le reste prochainement. Je reste curieux de savoir ce que tu en auras pensé avant de la jeter à la poubelle.

A très bientôt,
Ton père.