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Cosmos de Feather17



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» Auteur : Feather17 - Voir le profil
» Créé le 02/07/2017 à 22:05
» Dernière mise à jour le 28/11/2021 à 16:16

» Mots-clés :   Action   Aventure   Fantastique   Hoenn   Médiéval

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6: L'amie Liberté
La hutte dans laquelle on a amené Aron est vraiment différente de celle dans laquelle il a grandi, sur son Île de Nede qui lui manqe déjà. Son grand-père a eu raison de le dissuader de vivre avec les autres êtres humains : ils sont tellement différents de lui. En regardant tout autour de lui, le cœur d’Aron se remplit de cette nostalgie qu’il a déjà connue lorsqu’il était petit et qu’il s’était perdu pour la première fois dans la jungle de son île, incapable de retrouver le chemin vers sa hutte.

Aron est assis sur une planche de bois inconfortable qui a été fixée au mur de pierre qui se trouve derrière lui. En effet, les murs de la hutte dans laquelle il se trouve sont faits de pierres si épaisses et si brutes qu’il n’a aucun doute sur leur solidité. De plus, la hutte a été creusée dans la terre, si bien qu’il a dû descendre une bonne panoplie de marches d’un long escalier étroit pour y entrer. Ce doit être la raison qui explique l’absence de lumière dans la hutte. Il comprend d’ailleurs pourquoi il y règne un froid morbide et une odeur de moisi pestilentiel ; jamais il n’a eu l’idée de s’installer sous terre, lui. Sans aucun doute, ces êtres humains doivent être beaucoup moins développés intellectuellement que lui.

Un détail qui n’a pas manqué d’étonner l’enfant sauvage dès son arrivée dans la hutte attire à nouveau son attention. C’est comme si la hutte a été séparée en plusieurs compartiments par de hautes barres de fer qui entourent ainsi son espace de vie. À première vue, Aron s’est amusé de ce choix loufoque pour la décoration d’intérieur, bien qu’il ait reconnu une certaine utilité dans les cas où plusieurs personnes veulent coucher ensemble sous la hutte. En effet, ces séparations ont l’avantage de pouvoir délimiter sans erreur un espace privé pour chacune des personnes qui cohabitent. Car, de fait, Aron n’est pas seul.

Tout au long de la hutte, qui est étonnamment dressée de manière étroite mais très longue, plusieurs compartiments se succèdent, invitant quelques inconnus à loger dans les compartiments délimités par les barres de fer. Loin de lui, un vieil homme dort, immobile, sur le sol froid et dur de la hutte. Il semble si profondément endormi que rien ne pourrait le réveiller, pas même l’arrivée d’Aron qui a été plutôt bruyante. Tout au bout de la hutte, à sa droite, se trouve un autre homme, très mince, assis contre le mur du fond, les yeux dans le vague, enveloppé d’un drap gris usé et poussiéreux, tacheté de ce qui ressemble à des gouttes rouges d’un fruit étonnamment juteux.

Enfin, juste à sa droite se trouve Mehdi, attaché au mur par des cordes grises et dures, qui font un bruit de ferrailles lorsqu’on les secoue. Aron n’a pas compris pourquoi on ne l’a pas invité à vivre dans la même section que son ami malgré avoir assuré qu’il a l’habitude de partager sa couche avec lui. Seulement voilà, les soldats n’ont pas voulu l’écouter et l’ont poussé dans un autre compartiment, séparé de son ami par cette clôture métallique et rouillée.

Non, décidément, ces êtres humains ne savent pas recevoir, et Aron regrette d’avoir quitté son Île de Nede si chaleureuse et accueillante.

Aron s’ennuie sur son banc en bois. De plus, son ventre tonitrue bruyamment à force de crier famine. Il ne sait pas combien de temps a passé, mais il est sûr que, si lui-même a aussi faim, ses amis les téras doivent commencer à manquer de nourriture. Cependant, Nora lui a dit de lui faire confiance et d’attendre sagement pendant qu’elle règle la situation avec le Seigneur Bartolomé. Aron n’a pas tout compris à l’échange qui a eu lieu un peu avant qu’on l’emmène dans cette hutte, mais s’il a bien saisi une chose, c’est que plus jamais il ne doit trahir la mémoire de son grand-père et faire confiance à un être humain, même si c’est une fille. D’ailleurs, il a bien fait de protéger son grand-père dans le drap qui recouvre ses parties génitales. Son instinct lui dit qu’il ne faut pas que d’autres êtres humains aient connaissance de cet objet.

Enfin, après ce qui semble être une éternité, quelque chose grince au sommet de la tour d’escaliers. Les bruits de pas qui en émanent lui indiquent que plusieurs personnes se dirigent vers la hutte souterraine. Un soldat, habillé à l’identique de ceux qui se trouvaient derrière le Seigneur Bartolomé plus tôt dans la nuit, apparaît derrière les cloisons de fer. Il est accompagné d’un autre être humain qu’Aron n’arrive pas à distinguer dans la pénombre de la hutte.

Le soldat arrive à sa hauteur, séparé d’Aron par les barres de fer, et lui ordonne quelque chose dans une langue que l’enfant sauvage ne connaît pas, mais qui ressemble si fort à la sienne. Néanmoins, le geste qu’il lui fait est clair, et Aron reste poliment assis sur la planche de bois. Le soldat insère une clé dans un verrou, et ouvre la cloison qui le sépare du garçon, avant de jeter au sol une gamelle remplie d’objets étranges, et une autre remplie d’eau qui se déverse au sol sous le choc. Enfin, le soldat referme la cloison, crie quelque chose sur l’inconnu qui l’accompagne, et repart seul en direction des escaliers.

— Eh, attendez ! lui crie après Aron. Quand est-ce que je pourrai sortir, moi ? Je commence à avoir mal au dos, assis sur cette planche ! Où est Nora ?

Le soldat ne daigne pas se retourner et quitte les lieux en disparaissant dans la tour d’escaliers. Aron soupire de tristesse. Il se lève difficilement, les muscles endoloris, et se dirige à quatre pattes vers les gamelles qu’on lui a apportées. Il boit rapidement le peu d’eau qu’il reste dans l’une, et observe lentement les choses mystérieuses qui se trouvent dans l’autre.

Au toucher, les objets sont durs en surface, et mous à l’intérieur. Il se souvient que la dernière chose qu’il a vu et qui avait cette texture était un téra aquatique spongieux. Aron renifle attentivement la chose grise qui se trouve devant lui : aucune odeur. Serait-ce de la nourriture ? Si tel est le cas, ces êtres humains ne doivent pas avoir de très bons goûts culinaires. Pourquoi ne lui a-t-on pas apporté du poisson ? D’ailleurs, pourquoi doit-il manger seul alors que Nora doit être quelque part, elle aussi affamée.

Aron léchouille un des morceaux de nourriture qu’on lui a donnés. Aucun goût. Il mordille précautionneusement la croûte dure qui entoure l’espace spongieux, et recrache directement la nourriture infecte. On dirait du blé compressé et mélangé à quelque chose qui rend le tout détestable. À cet instant précis, il regrette amèrement d’avoir suivi ses hôtes dans cette hutte inhospitalière et avec une nourriture peu appétissante.

Aron se dirige vers Mehdi et lui passe la nourriture à travers les barreaux. Mehdi essaie d’avancer, mais il est retenu par les chaînes qu’on lui a fixées aux membres. Si seulement ces êtres humains n’avaient pas des coutumes aussi étranges, son ami Mehdi aurait pu manger un peu, lui qui est capable de gober n’importe quelle nourriture qui ne sied pas au palais redoutable d’Aron.

Aron remarque alors que l’inconnu qui a accompagné le soldat est toujours là, mais occupé plus loin dans la hutte.

— Eh ! appelle-t-il.

Mais l’être humain ne répond pas. Cependant, Aron a constaté qu’il l’a entendu car il a cessé de bouger.

— Eh oh ! continue Aron.

Décidément, l’être humain refuse de se retourner.

— J’ai faim ! annonce Aron. Et ce que vous m’avez donné n’est pas très bon. En plus, mon ami ne peut pas le manger à cause des liens qui sont attachés à ses bras. Vous pourriez le libérer ?

L’être humain ne répond toujours pas, mais il s’est retourné.

— Vous comprenez ce que je dis ?

L’être humain acquiesce fébrilement, mais reste toujours sur place.

— Bah alors, pourquoi vous ne réagissez pas ?
— Je… Je ne peux pas vous parler…

Aron est stupéfait ! Non seulement son interlocuteur parle sa langue, ce qui est plutôt rare dans ce village, mais en plus, sa voix est aussi aigue que la sienne, peut-être même plus. Même celle de Nora n’égale pas la tonalité de la voix de l’inconnu.

L’être humain s’est rapproché avec méfiance de la séparation métallique qui protège Aron. De plus près, et éclairé par la torche qui brûle sur le mur d’en face, Aron distingue enfin les traits de l’inconnu. Il s’agit d’une personne aussi petite que lui et qui, à son grand étonnement, porte les mêmes vêtements que lui à un détail près : le seul bout de tissu qui compose sa tenue, sali par le temps et la poussière, recouvre son torse et son entre-jambe. Ses cheveux sont aussi longs que ceux d’Aron, aussi entremêlés, aussi noirs, et sa peau est aussi matte que la sienne. Seuls leurs yeux diffèrent : là où ceux d’Aron sont noirs, ceux de l’être humain qui se trouve devant lui sont d’un vert brillant dans la pénombre.

Aron est si surpris par la ressemble qu’il recule de quelques pas sur le sol humide et froid de la hutte.

— Mais… tu es comme moi ! fait remarquer Aron.
— Ah bon ? Toi aussi, tu es un esclave ?

L’être humain montre un chiffon qu’il tient dans sa main, et un seau d’eau qui se trouve derrière lui.

— Précisément ! Je suis arrivé en esclave dans le village avec une fille pour qu’elle retrouve un objet perdu, mais on a été interrompu par le Seigneur Bartolomé, explique Aron.
— Le Seigneur Bartolomé !

À ces mots, l’inconnu recule à son tour de quelques pas, comme apeuré par une menace invisible.

— Si tu veux mon avis, je ne vais pas être très copain avec lui, avoue Aron. Il a demandé à ce qu’on m’amène dans cette hutte mais il ne m’a même pas donné à manger quelque chose de comestible.
— De quelle hutte tu parles ?
— Bah, de celle-ci !

Aron lui fait un signe de la main qui englobe les alentours. L’inconnu fronce les sourcils.

— Tu parles des cachots ?
— Qu’est-ce que c’est, des cachots ?
— Bah, ceci !

L’inconnu lui montre exactement la même chose.

— C’est là qu’on emmène les prisonniers qui attendent soit d’être tués, soit d’être libérés, soit de devenir esclaves, explique l’inconnu.
— Mais j’ai déjà fait une esclave, moi, c’était plus tôt dans la journée.

Aron se souvient même très bien de l’atterrissage brutal à dos du diplodocus.

— Moi aussi, je suis passée par là, explique l’inconnu qui a pris confiance et s’est rapproché des barreaux. On m’a jetée ici avec mes parents, puis ils sont venus les chercher et je ne les ai plus jamais revus. Après, on est venu me sortir d’ici, et j’ai dû travailler pour eux.
— Travailler ?
— Oui, je fais des tâches ménagères douloureuses pour ne pas qu’ils se fatiguent, car ce sont mes maîtres. Moi, on ne me fait que nettoyer. Mais je sais que d’autres esclaves s’occupent des champs, ou de la confection des vêtements, ou de plein d’autres choses.

Aron plisse des yeux. En réalité, il ne comprend pas grand-chose à ce que lui explique l’inconnu.

— Cool ! Mais tu es aussi un être humain, non ?
— Non, je suis une esclave.
— Ça veut dire que tu n’es ni un garçon, ni une fille ? Wah, c’est plus compliqué que ce que je ne pensais…
— Mais si, je suis une fille. Mais une esclave.
— Les filles, ça peut être esclave ?
— N’importe qui peut l’être, explique la fille. Il suffit qu’un Seigneur ait conquis les terres où tu habitais, et tu deviens son esclave.
— Ça veut dire quoi, « conquis » ?
— Ça veut dire qu’on vient chez toi, et qu’on dit que c’est plus chez toi. C’est ce qui s’est passé pour moi et ma famille. On habitait sur une autre île, et le Seigneur Bartolomé et ses soldats sont venus conquérir nos terres. Du coup, ils nous ont amenés ici pour qu’on travaille pour eux. Et depuis, je ne suis plus jamais retournée chez moi.
— Ça fait longtemps que tu habites ici, alors ?
— C’était il y a un an.
— Et tu t’appelles comment ?
— Je m’appelle Qispi : ça veut dire « Liberté » chez moi. Mais ici on s’appelle tous Pongo. Et toi ?
— Aron. Mais ça veut rien dire de particulier.
— Tu veux être mon ami ?

Aron n’a pas compris, mais on dirait que la jeune fille attend une réponse positive, ce à quoi il répond :

— Si ça peut te faire plaisir !
— Génial ! Et toi, comment est-ce que tu es devenu leur esclave ?
— Bah, je ne sais pas trop ! Tout ça, c’est parce que Nora voulait absolument venir chercher un objet à elle ici, alors qu’on était censé se rendre à Portoasis.
— C’est qui, Nora ?
— Une fille, mais elle n’est pas comme toi. Elle est plus grande, et plus blanche. Et elle parle plein de langues. Et elle est à la recherche des Talismans de Cosmos.
— LES TALISMANS DE COSMOS ?!

La jeune fille sursaute à cause de son propre cri. Elle se plaque les mains contre la bouche et jette un coup d’œil furtif à la cage d’escalier. Personne ne l’a entendue.

— Vous avez des Talismans ? demande-t-elle en chuchotant.
— Elle non, mais moi oui. J’en ai un, pourquoi ?
— Chez moi, la sage du village nous a raconté plein d’histoires sur les Talismans. Il paraît qu’ils peuvent sauver les populations esclaves comme moi et renverser les maîtres !
— Ah bon ? Nora m’a dit qu’ils pouvaient donner beaucoup de nourriture. Mais en même temps, le mien contrôle l’eau, donc ils peuvent peut-être renverser plein d’autres choses.
— Je peux le voir ?

Aron hésite. Il se souvient de la promesse qu’il a faite à son grand-père et qu’il a réitérée un peu plus tôt. D’un autre côté, la fille lui ressemble tellement qu’elle a gagné sa confiance.

— Tu ne le dis à personne ? s’assure Aron.
— Je le jure devant Kyogre !
— J’ai pas compris, mais d’accord !

Aron fourre sa main dans son caleçon et en retire la plaque bleue qui luit d’une faible lueur magique. Il la tend à Qispi sans la lâcher des mains et celle-ci écarquille les yeux, comme transcendée par un bonheur infini.

— Tu veux voir comment ça fonctionne ? propose Aron qui s’amuse de l’enthousiasme de la jeune fille.
— Oh oui ! J’aimerais bien !
— Le souci, c’est qu’il n’y a pas d’eau ici… marmonne Aron.

Qispi court chercher son seau d’eau et le place devant Aron, derrière les barreaux qui les séparent. Aron sourit.

L’enfant sauvage s’éclaircit la voix. Il se concentre en tenant fermement la plaque métallique dans sa paume, et une mélodie qui fait froid dans le dos s’échappe de ses cordes vocales. Soudain, la petite fille pousse un cri d’admiration. L’eau trouble contenue dans le seau se met à se mouvoir, poussée par une force invisible, jusqu’à frémir. Aron descend dans les tonalités graves et une colonne d’eau jaillit hors du seau, touche le plafond et se répand au sol.
Qispi applaudit, mais Aron n’est pas content de sa prestation.
— Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais normalement, l’eau aurait dû bouillir plus que cela, se plaint-il.
— Tu peux faire bouillir l’eau ?
— Bien sûr ! J’ai l’impression que le Talisman fonctionne mal ici. Ou alors c’est parce que j’ai faim… Tu n’aurais pas du poisson, du rougeot, ou même des fruits ?

L’esclave se raidit. Elle se souvient enfin de sa position, et de sa mission.

— Je… Je ne peux pas…
— Pourquoi ?
— Parce que je suis une esclave. Je ne peux pas te parler, normalement.
— Tes parents ne veulent pas que tu me parles ?
— Mes parents ? Je t’ai dit que je ne les avais plus revus depuis un an…

La jeune fille semble attristée.

— Je ne voulais pas te faire de la peine, se précipite Aron. Je ne comprends simplement pas pourquoi tu n’as pas le droit de me parler.
— Parce qu’au sinon, le Seigneur Bartolomé va me trancher la gorge !

Aron reste perplexe. Décidément, ce Seigneur Bartolomé n’était pas prêt de devenir son ami.

— Il commence à m’énerver, ce Bartolomé ! avoue-t-il, sentant la colère monter dans son cou. D’abord il m’empêche de rester avec Nora, puis, il me donne des trucs dégueulasses à manger, et maintenant il veut te tuer si tu parles à d’autres personnes !
— C’est mon maître, je lui appartiens, répond simplement Qispi.
— Eh ben moi, je ne suis pas d’accord ! Je ne lui appartiens pas, à ce que je sache !
— Tu n’as pas dit que tu étais esclave ?
— Oui, mais avec Nora ! C’est pas avec lui que je voyage. Il est temps d’aller lui dire deux mots, à ce Bartolomé !
— Comment tu vas faire ?

Aron se tourne vers Mehdi et lui fait un signe de tête que son meilleur ami comprend directement. Le téra ferme les yeux et se concentre. Tout à coup, il pousse un cri de rage et ses muscles se décuplent sur ses bras, ce qui brise les chaînes qui le retiennent au mur. Mehdi avance alors vers les barreaux, les saisit dans ses mains rugueuses, et les tords aussi facilement que si cela n’avait été de jeunes pousses d’arbre. Il libère à son tour Aron qui sort de sa cellule.

— On va allez lui dire deux mots, tu viens avec moi ?

La jeune fille le fixe avec des yeux écarquillés. Elle tremble de tout son corps.