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Dresseuse malgré elle de Mizore



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» Auteur : Mizore - Voir le profil
» Créé le 08/06/2017 à 16:42
» Dernière mise à jour le 08/06/2017 à 16:48

» Mots-clés :   Aventure   Kanto

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La Fuite
Chapitre 1 : La Fuite


Shigeko venait d'avoir seize ans. Elle était plutôt petite, fluette, avait les cheveux châtains, les yeux gris et un nez pointu. D'après sa mère, elle ressemblait à une petite souris qui n'osait pas sortir de son trou. Et elle avait sans doute raison, songeait Shigeko, elle qui n'avait jamais eu beaucoup d'ambition et n'aimait pas mettre le nez en dehors de sa chambre. À vrai dire, si elle était actuellement assise dans ce bus qui roulait en direction du Bourg Palette, c'était uniquement pour fuir le destin que ses parents avaient choisi pour elle. Elle venait juste de terminer son lycée, très tôt car elle avait sauté deux classes, mais n'avait pas la moindre envie de faire de longues études, encore moins dans un domaine qui ne l'intéressait absolument pas.

Ce qu'elle aimait, dans la vie, c'était lire des romans, jouer aux jeux vidéos, en particulier les jeux d'aventure, et regarder des séries télés. Si sa mère la laissait faire ce qu'elle voulait tant qu'elle ramenait de bonnes notes, son père n'approuvaient pas ses passe-temps qu'il jugeait futiles et déconnectés de la réalité. Un avis que partageait volontiers Shigeko, mais elle n'aimait tout simplement rien d’autre, dans la vie. L'école l'ennuyait, le peu d'amis qu'elle avait ne venaient pas la voir en dehors des cours, et elle était si maladroite que les activités physiques prenaient l'allure de dangers mortels dès qu'elle s'y essayait. Elle aimait bien les pokémons, et pouvait passer des heures à regarder des émissions télévisées centrées sur le sujet, ou bien lire des romans qui parlaient d’eux, mais n'avait jamais envisagé de partir en voyage initiatique avec l'un deux, et encore moins de devenir dresseuse. Elle aimait l'aventure en roman ou en film, mais préférait largement la vivre depuis le petit confort de sa chambre. Si elle avait eu le choix, elle serait partie de chez ses parents vers l'âge de vingt ans, serait devenue écrivain et aurait pris un petit caninos comme pokémon de compagnie. Et tout se serait arrêté là. Fin de l'histoire.

Mais les choses ne se passent pas toujours comme on l'espère. Remuant sur son siège, le derrière engourdie par les longues heures de route, elle repensa à la dernière fois qu'elle avait vu ses parents.

Elle était allongée sur son lit aux draps colorés en train de bouquiner, dans sa chambre décorée des posters des personnages de ses séries préférées, lorsque sa mère entra après avoir frappé deux petits coups discrets. Petite mais élancée, boucles blondes savamment travaillées, des yeux gris au regard acéré dont elle n'avait hérité que de la couleur, sa mère avait tout de l'allure d'une chirurgienne renommée.

- Shigeko, ma chérie, dit-elle en s'asseyant au pied du lit.

Shigeko se redressa, refermant son livre d'un air circonspect. Sa mère ne venait jamais la voir dans sa chambre, elle était toujours trop occupée à travailler à l’hôpital et trop fatiguée lorsqu'elle rentrait à la maison pour discuter avec elle.

- Ton père et moi sommes très fiers de ta mention au baccalauréat, continua-t-elle. Nous t'avons inscrite dans une très bonne école d'avocat, à Céladopole. C'est un peu loin d'ici, mais l'établissement dispose d'un internat dont la réputation est excellente.

- Mais… commença Shigeko, prise au dépourvu. Je n'ai pas la moindre envie de devenir avocate.

Sa mère balaya son argument d'un revers de main, levant les yeux au ciel comme devant le caprice d'une enfant.

- Il est grand temps que tu commences à te soucier de ton avenir. Même si tu ne termines pas cette école, y étudier t'ouvrira beaucoup de perspectives. C'est important que tu ne reste pas à rien faire à la maison.

- En fait, je pensais devenir écrivain, souffla Shigeko du bout des lèvres, osant pour la première fois évoquer cette idée en public.

Sa mère la regarda avec des yeux ronds, stupéfaite, avant d'éclater d'un rire cristallin.

- Mais écrire des livres est un loisir, ma chérie, s'exclama-t-elle. Ce n'est pas un véritable métier. Je n'ai rien contre le fait que tu aimes les romans, mais il ne faut pas que cela t'empêche de t'accomplir.

Shigeko se sentit se fendre de l'intérieur. C'était exactement le genre de réaction qu'elle avait redouté. Mais elle avait anticipé cette situation, et sa réponse était prête et bien rodée.

- Je n'irai pas dans cette école, déclara-t-elle d'un ton aussi décidé qu'elle en était capable.

- Ah non ? Fit sa mère en haussant les sourcils. Ton père et moi allons donc te nourrir et t'héberger gracieusement jusqu'à ce que tu te décides à choisir un métier ?

Il s'agissait bien entendu d'une question rhétorique. Avec ses parents, tout tournait toujours autour de l'argent. Shigeko se leva et alla fouiller dans un tiroir de son bureau. Elle en sorti un prospectus aux coins un peu cornés qu'elle tendit à sa mère. Celle-ci prit le papier, une expression méfiante se peignant sur son visage. Ses sourcils se froncèrent lorsqu'elle compris de quoi il s'agissait.

- Un voyage initiatique ? Toi ?

Shigeko haussa les épaules. Sur le prospectus, les trois pokémons emblématiques de la région de Kanto vantaient les mérites de partir à l'aventure. « Je suis idéal pour les débutants ! » s'exclamait le carapuce. « Je suis calme et puissant ! » se défendait le bulbizarre. « Avec moi, nous relèverons tous les défis ! » disait le salamèche.

- C'est ce qu'il y a de mieux à faire pour devenir écrivain, plaida-t-elle. Si je veux avoir quelque chose à raconter, il vaut mieux que je découvre un peu le monde.
Elle venait d'inventer ce mensonge, mais elle s'était ménagé depuis longtemps une porte de sortie au cas où ses parents aient prévu un traquenard de ce genre. Elle s'était inscrite en cachette au programme du professeur Chen dès qu'elle avait obtenu son bac, et avait acheté des tickets de bus à durée indéterminée avec son argent de poche. Et puis, ce qu'elle venait de dire n'était pas tout à fait faux, quant on y réfléchissait : voyager à travers le monde lui permettrait d'enrichir ses écrits.

- C'est absolument hors de question, répliqua tranquillement sa mère en rejetant ses mèches blondes en arrière. Tu n'es pas faite pour vadrouiller par monts et par vaux, ta place est dans un bureau de renom. Tu es très intelligente, il est impensable que tu te gâches en menant une vie décousue et fantasque.

- Mais… tenta Shigeko.

- Cette discussion est terminée, coupa-t-elle. Être dresseur de pokémon, c'est le lot des mauvais élèves. Toi, tu es notre fille unique et tu feras ce que l'on te demande de faire.

Sur ces dures paroles, elle se leva, chiffonna le prospectus en une boule de papier serrée qu'elle jeta dans la corbeille, et quitta la pièce. Dans le silence devenu pesant de sa chambre, Shigeko avait le cœur qui battait à tout rompre. Fébrile, elle se changea pour enfiler un short en toile beige avec de grandes poches latérales, un T-shirt noir à manches longues, une veste en jean et des chaussures de sport. Dans son sac-à-dos vert kaki, elle entassa son attestation d'inscription au programme du professeur Chen, ses tickets de bus, quelques sous-vêtements de rechange, ainsi que tout ce qui restait de son argent de poche. Après réflexion, elle y fourra également le roman qu'elle n'avait pas terminé de lire, un carnet de note, un stylo-bille et le prospectus récupéré dans la corbeille, encore roulé en boule.

Avant de passer la porte de sa chambre, elle s'observa dans le miroir en pied, et trouva qu'elle ne ressemblait en rien à une future dresseuse de pokémons. Elle rassembla ses cheveux longs en une queue de cheval assez haute, pour se donner un air plus sportif, mais cela n'eut pas beaucoup d'effet. Finalement, elle haussa les épaules, prit son courage à deux mains et passa la porte.

Dans le salon, ses parents étaient au beau milieu d'une discussion animée à son sujet. Son père, un homme aux cheveux châtains et a l'air sévère, tourna vers elle un regard emprunt d'irritation.

- Eh bien, Shigeko, dit-il en s'efforçant visiblement de conserver son calme. Qu'est-ce que c'est que ces histoires de livres et de pokémons ? Et que fais-tu dans cet accoutrement ?

Elle déglutit face à l'imposante stature de ce père qui la terrifiait tant. Mais elle s'était promis de ne pas reculer. Elle s'inclina respectueusement avant de débiter son laïus appris par cœur :

- Je pars pour le Bourg Palette, papa. Je me suis inscrite au programme de voyage initiatique du professeur Chen, parce que je sais que je ne peux pas me permettre de rester à votre charge en attendant de publier mon premier roman. Aussi je vous prie de bien vouloir accepter mon départ.

Ses parents eurent l'obligeance de rester bouche bée pendant quelques secondes, ce qui lui laissa le temps de se diriger vers la sortie à petits pas pressés. Son père se reprit bien vite et la rappela à l'ordre de sa voix la plus sévère.

- Ton attitude est parfaitement irresponsable, Shigeko, tonna-t-il. Les jeunes gens qui prennent la route sont financés par leurs parents, et restent donc à la charge de leur famille jusqu'à ce qu'ils puissent vivre de leur métier de dresseur. Où iras-tu donc, sans le moindre sou en poche ? Dormiras-tu sous les ponts, comme une sauvageonne ?

Face à la porte, Shigeko n'eut pas le courage de se retourner pour répondre à son père. Elle savait que si elle croisait son regard, toute sa détermination s'envolerait. Elle savait que le chemin sur lequel elle s'engageait serait difficile. Mais elle en avait plus qu'assez, de rester prisonnière du bon vouloir de ses parents, choyée comme un oiseau en cage, incapable de prendre des décisions par elle-même.

- Les Centres pokémons accueillent gratuitement les dresseurs supervisés par le professeur Chen, dit-elle en regardant ses chaussures. Vous n'avez donc pas à vous inquiéter pour ma santé.

- Si tu passes cette porte, déclara son père d'une voix dangereusement calme. Je déclarerai ta fugue à la gendarmerie.

Elle eut le souffle coupé à l'idée d'être poursuivie par la police. Elle n'avait pas encore pensé à cette possibilité et senti la panique menacer de la submerger. Elle fit donc la première chose qui lui vint à l'esprit. Elle s'enfuit en courant.

Le bus qui reliait Carmin-sur-Mer au Bourg Palette roulait depuis deux jours entiers, et elle n'avait mangé que le sandwich acheté la veille dans un relais routier. Mais elle devait se forcer à économiser son maigre pécule tant qu'elle le pouvait, sinon elle n'irait pas loin. Dès qu'elle obtiendrait son pokédex, elle pourrait manger et dormir dans les Centres pokémons. En attendant, elle devait tenir sur ses réserves.

Elle se réveilla d'une sieste inconfortable lorsque le bus freina brusquement, lui faisant se cogner la tête contre la vitre.

- Terminus ! Annonça le chauffeur. Bourg Palette, tout le monde descends !

Les muscles endoloris par un long trajet, Shigeko descendit et se retrouva dans un village pittoresque mais bien connu puisqu'il passait régulièrement à la télévision, célèbre grâce au Laboratoire du professeur. Elle n'aurait d'ailleurs pas besoin de demander son chemin : toutes les pancartes indiquaient dans quelle direction se trouvait le centre de recherche.

Après un bonne demi-heure de marche, qui lui fit se dégourdir agréablement les jambes, elle arriva enfin devant l'imposante bâtisse. Sur la porte, un panneau gribouillé à la main disait : « Réception des inscrits au programme de voyage initiatique à partir de quinze heures, le lundi, mardi, jeudi et vendredi ». Shigeko regarda sa montre. On était mardi, et il était treize heures.

Prenant son mal en patience, elle posa son sac-à-dos à côté de la porte, s'assit en tailleur et sortit son vieux prospectus tout froissé. Elle se surprit à se demander avec impatience à quel pokémon elle choisirait. Évidemment, le choix des jeunes dresseurs n'était pas limité aux bulbizarres, carapuces et salamèches, il s'agissait seulement des représentants officiels du programme de Kanto. Mais ils étaient les plus connus et les plus convoités, bien qu'il n'y en ai pas beaucoup de disponibles. Or, Shigeko était arrivée la dernière semaine de la période allouée à la distribution de pokémons, il était donc très peu probable que l'un de ces trois pokémons n'aient pas déjà été choisi. Mais ça ne lui importait pas vraiment. Tant qu'à devenir dresseuse, autant le faire bien, se disait-elle. Elle espérait un pokémon gentil, attentif, et suffisamment dégourdi pendant les combats. Qu'il soit ou non à la mode lui était égal.

Son regard s'attarda sur les lignes parfaites des pokémons du prospectus, ne pouvant s'empêcher de s'imaginer aux côté d'un carapuce ou d'un bulbizarre. Les salamèches étaient réputés pour être plus difficiles à dresser, et elle n'avait pas suffisamment confiance en elle pour gérer un pokémon caractériel.

Le temps passa lentement, son estomac vide lui rappelant régulièrement qu'elle n'avait pas mangé depuis plus d'un jour. Elle se promit que la première chose qu'elle ferait, une fois son pokédex en poche, serait d'aller manger un véritable festin au Centre pokémon du Bourg Palette. Vers quatorze heure trente, deux jeunes garçons la rejoignirent. Quelques minutes plus tard, une fille et un autre garçon arrivèrent à leur tour. En les observant, Shigeko prit conscience qu'ils étaient tous beaucoup plus jeune qu'elle. Sur le site internet du Laboratoire, il était précisé que l'âge maximum pour s'inscrire au programme était de dix-huit ans. Mais elle n'avait pas imaginé une seule seconde que la moyenne des participants était beaucoup plus basse, car les match de la Ligue qu'elle avait vu à la télévision montraient des participants quasiment adultes. Le chemin pour devenir un dresseur accompli était-il donc si long ?

Beaucoup plus nerveuse qu'à son arrivée, elle se leva lorsqu'il fut presque quinze heures. Heureusement, comme elle était naturellement petite, sa taille ne dépassait pas vraiment celle des autres inscrits. Ils parlaient entre eux avec enthousiasme du pokémon qu'ils allaient choisir et, à part pour un seul d'entre eux, ils voulaient tous un carapuce, un bulbizarre ou un salamèche. Elle se sentait particulièrement décalée, au milieu de ces enfants idéalistes, et se surprit à comprendre un peu mieux la position de ses parents quant à ce genre de voyage. Envoyer des enfants inconscients vadrouiller sur les routes, même protégés par les dispositifs du gouvernements et encadrés par les Centres pokémons, pouvait se révéler très dangereux.

Un homme aux cheveux grisonnants vint ouvrir la porte vitrée à quinze heures cinq. Il leur sourit d'un air affable et les invita à entrer. Il ne s'agissait pas du professeur Chen mais de l'un de ses assistants. Il les fit entrer dans une pièce ou s'étalait chaises et bureaux, exactement comme dans une salle de classe. Shigeko ne put s'empêcher de retenir une grimace.

- Bien, fit l'homme en se plaçant face à eux. Avant de commencer, je me présente : je m’appelle Kosuke Momojiro, c'est moi qui m'occuperai de vous aider à organiser votre départ. Avant toute chose, je vais récupérer vos attestations d'inscription.

Shigeko fit passer la sienne, évitant de regarder la signature falsifiée qu'elle avait apposé à la place de sa mère, à l'emplacement de l'autorisation parentale. Elle avait apprit à imiter sa signature lorsqu'elle était entrée au collège, pour s'éviter le tracas de lui faire signer ses quelques notes moyennes en mathématiques. Monsieur Momojiro rassembla les attestions en silence, vérifiant les signatures sur chacune d'entre elles. Il fronça les sourcils en s'arrêtant sur l'une d'elles, et Shigeko se crispa, persuadée que sa fausse signature avait été découverte.

- Hum, fit l'assistant. Monsieur Koichi, votre attestation ne porte pas la signature de votre tuteur légal.

Le plus jeune garçon de l'assemblée rougit jusqu'aux oreilles et remua sur sa chaise, visiblement mal à l'aise.

- C'est que… bafouilla-t-il. Mon père a du oublier… Je pourrais peut-être lui faire signer après ?

Monsieur Momojiro regarda le garçon d'un air désolé.

- Malheureusement, nous comprenons votre enthousiasme et soyez certain que nous en sommes très flatté. Mais nous ne pouvons pas nous permettre de prendre en charge quelqu'un dont nous n'avons pas l'autorisation parentale.

Au grand soulagement de Shigeko, qui ne supportait pas de voir quelqu'un de triste ou de bouleversé, le garçon n'insista pas et quitta la pièce à grandes enjambée, la tête basse.

- Hum, reprit l'assistant. Ce genre d'incident arrive chaque année, ne vous inquiétez pas. Nous avons donc deux jeunes garçons et deux jeunes filles.

Il parut remarquer à cet instant l'âge avancé de Shigeko, car l'un de ses sourcils tiqua lorsque son regard passa sur elle. Elle se tassa un peu plus sur sa chaise, espérant se faire oublier. L'heure suivante fut consacrée à la prévention routière, à l'attitude à adopter lorsqu'on voyageait sur les routes, à l'explication de la lecture d’un plan, et à toute sortes d'autres choses dont Shigeko n'avait eu aucune idée jusqu'à présent. Elle prit soigneusement ces informations en note.

Enfin, il fut l'heure d'aller voir les pokémons disponibles. Elle en avait le cœur qui battait à tout rompre. Et si elle se trompait dans son choix ? Et s'ils ne s'entendaient pas, elle et son futur compagnon ? Et si… ? Et si… ? Ils arrivèrent devant le bureau du professeur Chen, où les attendaient les pokémons.
- Afin que vous puissiez choisir calmement, vous entrerez dans ce bureau un à la fois, précisa Monsieur Momojiro. Honneur aux plus âgés, mademoiselle Shigeko, je vous en prie.

Ne s'attendant pas à devoir choisir en première, elle entra avec hésitation. Le professeur Chen était assis derrière son bureau et releva la tête lorsqu'elle referma la porte derrière elle. Il lui sourit.

- Ah ! Voilà notre premier candidat de la journée, et c'est une candidate !

Il se leva de sa chaise et fit craquer ses lombaires d'un air douloureux.

- Vivement que cette dernière semaine se termine, tout ça n'est plus de mon âge. Comment t'appelles-tu ?

- Shigeko, monsieur, répondit-elle poliment.

- Eh bien, Shigeko, allons dans le vivarium pour rencontrer nos petits amis, si tu veux bien.

Il l'emmena dans une pièce adjacente, dans laquelle un environnement naturel avait été reconstitué. Le professeur frappa dans ses mains et un petit attroupement de pokémons se rassembla sagement autour d'eux.

- Hum, j'ai bien peur qu'il ne te reste plus beaucoup de choix, Shigeko. C'est malheureusement le lot des candidats de la dernière semaine.

Shigeko balaya le troupe du regard et ne put s'empêcher de regretter, au fond d'elle, l'absence d'un carapuce ou d'un bulbizarre. Les seuls pokémons disponibles était deux rattatas, un sabelette, un roucool, un stari, un abra, et un salamèche pâlichon à l'air fatigué. Les rattatas étaient rapides au combat mais ne progressaient quasiment pas, même elle qui n'y connaissait pas grand-chose le savait. Elle les exclut donc en premier. Pour les autres, elle ne s'y connaissait pas suffisamment pour pouvoir se décider rapidement. Voyant son hésitation, le professeur lui donna quelques conseils :

- Les roucools sont idéals pour les débutants, et ils peuvent devenir de puissants roucarnages. C'est un très bon choix. Les stari, quant à eux, font partie des plus puissants pokémons de type Eau. Ils évoluent en staross. Les abras sont des pokémon de type Psy, et même s'ils ne peuvent pas évoluer en alakazam sans être échangés avec un autre dresseur, ils peuvent évoluer en kadabra et sont un atout de taille dans une équipe équilibrée. Les sabelettes et les rattatas sont facile à dresser, tu es sûre de ne pas avoir de difficulté avec eux. Évidemment, il y a aussi salamèche, qui n'est plus à présenter.

À cause d'un événement traumatisant de son enfance, Shigeko était terrorisée par les pokémons de type Psy, il était donc absolument hors de question qu'elle choisisse l'abra. Entendre le professeur placer le sabelette au même niveau que les rattatas lui fit également écarter cette option. Quant au stari, son absence de visage la mettait bien trop mal à l'aise. Il restait donc le roucool et le salamèche à la couleur défraîchie. L'idée de devoir dresser un pokémon au caractère aussi difficile que celui des salamèches ne l'enchantait guère, aussi s'intéressa-t-elle de plus près au roucool. Elle tendit la main vers le petit pokémon ailé, mais ne récolta qu'un coup d’œil méfiant.

- Haha, ce roucool a un sacré caractère, je dois dire, s'amusa le professeur. Le dernier candidat qui a essayé de l'approcher a récolté quelques coups de bec dont il se souviendra ! Il est finalement parti avec un mystherbe plus docile, si je me souviens bien.

Le roucool agita les ailes d'un air impatient et poussa un pépiement irrité. Découragée, Shigeko se tourna vers le salamèche en se demandant si elle risquait de se faire carboniser sur place si sa tête ne revenait pas au pokémon de type Feu. Quand celui-ci vit le regard de la jeune fille se poser sur lui, il s'approcha et la renifla d'un air curieux. Shigeko tendit la main avec appréhension, mais le pokémon se contenta de la pousser légèrement du museau.

- On dirait que salamèche t'aime bien, s'extasia le professeur. C'est une femelle, et ce spécimen est plus sociable que la moyenne de ses congénères.

- Mais pourquoi est-ce qu'elle n'a pas été choisie avant ? Demanda Shigeko en caressant prudemment la tête du pokémon. Elle a pourtant l'air gentille.

- Je pense que c'est à cause de sa couleur, répondit-il en se grattant le menton. Les salamèches sont d'un orange soutenu, d'habitude. Le jaune qu'elle arbore fait sa particularité et sa rareté, mais elle ne semble pas convenir aux amateurs d'émotions fortes, qui sont ceux qui ont tendance a choisir les salamèches. D'autant plus que celle-ci a particulièrement bon caractère, ce qui n'est pas commun pour un salamèche.

La petite salamèche était en effet plus jaunâtre qu'orangée. C'était comme si ses écailles étaient délavées, pâlies par une maladie quelconque, lui donnant l'air fatigué. Pour Shigeko, elle faisait penser à la douce lueur d'une chandelle plutôt qu'à celle d'un feu ardent. Son regard était doux, et sa façon de se mouvoir emprunte de délicatesse.

- Je pense que je vais t'appeler Gracieuse, murmura Shigeko à sa nouvelle compagne.

La flamme de sa queue parût brûler avec plus d'intensité, et elle choisit de prendre ça comme un signe d'acquiescement.

oOo

À suivre