Pikachu
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Bleuet fané de M@xime1086



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» Auteur : M@xime1086 - Voir le profil
» Créé le 13/04/2017 à 10:47
» Dernière mise à jour le 13/04/2017 à 10:47

» Mots-clés :   Drame   Kanto   Présence de personnages de l'animé   Romance   Slice of life

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48.— FAIRE UN CHOIX & COMBATTRE LE MAL
Trois hommes les avaient transporté jusqu'à un entrepôt désaffecté, au milieu de la campagne azurienne. Ils furent attachés à des chaises, dans le noir, déposés dans des salles vides, séparées par d'épaisses cloisons. Quand il reprit connaissance, Gary voulut se libérer des liens qui le maintenaient prisonnier. Ceux-ci étaient plus noués que de raison. Il perdit patience, appela d'abord avec retenue puis plus fort Violette, pour qu'elle vienne le délivrer.

Cette dernière se manifesta enfin, une lampe torche à la main. Elle le tint au courant pendant qu'elle se chargeait de le libérer. La première partie du plan s'était déroulée correctement. Tout le monde serait au courant, Ondine la première, de leur disparition. Pour lequel manifesterait-elle le plus d'intérêt et d'inquiétude ?

Il fallut s'organiser pour que Gary puisse rester dans l'entrepôt quelques jours. Violette vint lui apporter des denrées en même temps qu'elle commençait à répandre la nouvelle de leur disparition comme une traînée de poudre. Une première nuit passa. Pour plus de sécurité, les yeux de Sacha avaient été bandé. Gary ne voulait pas être reconnu pendant qu'il s'occuperait de lui. Entendre Sacha le supplier de lui rendre sa liberté lui fit plus d'une fois regretter de devoir se charger de nourrir le captif. Violette se trouvait chargée de la mission la moins dégradante.

C'était un rituel qui devint vite humiliant pour les deux hommes. Sacha devait demander à aller faire ses besoins dehors, retenu par la poigne de son ravisseur. Gary supportait de moins en moins ce jeu dont il avait été l'initiateur. Il ne pouvait plus reculer et devait aller jusqu'au bout.

Pikachu était ligoté à un pilier, des pastilles de caoutchouc collées sur les joues, évitant ainsi à Gary de recevoir une décharge électrique lorsqu'il devait nourrir le rongeur. Pikachu l'avait reconnu, stupéfait par ce qui se passait. Il tentait de prévenir son dresseur par des cris mais les pièces étaient insonorisées.
Cela n'empêcha pas Sacha de poser la question à son ravisseur.

« Vous ne faites pas de mal à Pikachu ? Je vous en prie, je préfère que vous me tuiez plutôt que de vous vous en preniez à lui ! »

Malgré la fatigue et la peur qui lui comprimaient l'estomac, Sacha arrivait à montrer une fermeté que peu d'hommes auraient eu. Des larmes mouillèrent le bandeau qui recouvrait ses yeux.
Gary ne pouvait pas répondre. Que pouvait-il répliquer à ce dresseur qui se trouvait là, devant lui, suppliant qu'on épargne son ami ? Il voulut se mettre à la place de celui qu'il retenait sur cette chaise mais un malaise l'empêcha de s'imaginer à cette place. Tout deux auraient eu la même réaction, c'était certain. Un dresseur qui aimait ses Pokémon ne pouvait pas rester de marbre en sachant qu'on pouvait torturer un de ses compagnons à quelques mètres de lui, impuissant, n'ayant que l'unique solution de supplier le bourreau.

Lorsqu'il ne s'occupait pas de ses otages, Gary s'écroulait sur un matelas et buvait. C'était le seul moyen qu'il avait d'oublier ce qu'il était devenu. Il haïssait ce qu'il était en train de faire. Il ne voulait plus subir. Les remords l'empêchait d'espérer qu'Ondine le choisisse. Allongé sur ce matelas miteux avec deux prisonniers dont il avait la charge, buvant verres sur verres, il réalisa ce qu'Erika lui avait prédit.

« Une vive impression de douleur, de colère, de rancœur. Ces mauvaises énergies prennent de plus en plus de place. Il faut que tu sois capable de les repousser. Sinon elles t'amèneront à commettre le pire. Je l'ai vu. Tout ce que je peux te dire c'est de combattre le mal qui germe en toi. »

Il n'avait pas réussit. Le mal avait étendu son emprise en lui si bien qu'il se sentait aussi captif que l'était Sacha. Le "pire" dont avait parlé Erika, était-ce cet enlèvement ou bien y'avait-il quelque chose d'encore plus grave qui l'attendait ? Qu'est-ce qui serait pire que ce qu'il avait déjà fait ? Perdre la femme pour laquelle il avait commis ce délit. Il se consolait maigrement dans l'attente de voir revenir Violette avec une réponse favorable à ses plans. Ondine n'avait pas conscience de l'extrémité dans laquelle il s'était retrouvé. Au courant de ce qui se passait, elle ne lui aurait pas pardonné comme lui commençait à le faire d'avoir été trompé.

Elle lui manquait. Il n'était plus rien sans elle. Il faisait n'importe quoi sous l'emprise de l'alcool et du mal qui le bouffaient. Il se cherchait des excuses, des circonstances atténuantes à son acte. Il avait fait tout ça par amour, pour connaître le secret que renfermait le cœur de sa femme. Il n'imaginait pas une autre issue possible. Si Sacha devenait l'élu, que ferait-il ?

L'attente devint aussi pénible pour les victimes que pour le bourreau. Tous attendaient la conclusion de cette affaire qui n'avait que trop duré. C'était bien la première fois que Gary attendait la visite de Violette avec autant d'impatience.

• • • • • • • • • •
Séréna appelait toutes les trois heures la championne d'Azuria pour avoir des nouvelles. N'en pouvant plus, l'artiste se rendit aux côtés de la seule femme qui vivait avec elle le drame. Au centre des angoisses exprimées à voix basses, des soupirs manifestant la fatigue, la peur qu'on n'osait décrire, les deux amies se serraient les coudes.

Ondine, après le départ de son mari, reçu cette nouvelle comme un second coup de massue porter à elle et à leur enfant. Les larmes coulaient toutes seules en pleine conversation. Elle n'osait rien déplacer ni rien toucher qui puisse lui rappeler l'absence de son conjoint. Tout ici respirait la vie gâtée par force de jalousie, de doutes trop longtemps contenus.

Elles récoltaient des informations que la police avait déjà, ne supportant plus de rester enfermées entre ces quatre murs. Plus le temps passait et plus Ondine redoutait que le rendez-vous ai mal tourné. La colère de Gary aurait pu l'amener à... C'était au dessus de ses forces d'imaginer les deux hommes en venir aux mains. Gary aurait eu l'avantage physique couplé à l'envie de faire mordre la poussière à son rival.

Séréna, dans les moments de doutes terribles lui assurait que Sacha savait se défendre et que Pikachu l'avait accompagné.

« Alors pourquoi lui aussi n'est-il pas revenu ? »

Le pressentiment qu'elle sentait naître l'avait transformé. Ces dernières épreuves n'avaient pas éprouvé que son moral : son corps en était affecté. Ses cheveux qu'elle ne coupait plus depuis l'annonce de sa grossesse s'étaient assombris. La rousseur naguère éclatante n'était plus qu'un châtain roussâtre. Des cernes ainsi qu'une constante pâleur avait prit possession de ses jolis traits à présent fanés.

Elle avait maigri à tel point qu'à chaque coup d’œil, on grimaçait devant sa frêle ossature. C'est durant ces quelques jours d'angoisse intense, qu'Otarlette quitta le Centre Pokémon. Il partait d'un lieu funeste pour revenir dans une famille dévastée. Le Pokémon gardait espoir malgré la crainte qui dominait entre ces quatre murs où ils avaient vécus heureux un temps.

Violette s'appliquait à jouer celle qui n'était au courant de rien. Elle comptait tromper Gary. Il buvait chacune de ses paroles et l'attendait sûrement là-bas, dans son antre, comme un messie. Comme elle savait si bien le faire, elle déformerait la réalité et lui apprendrait ce qu'il ne désirait pas entendre : qu'Ondine avait choisit Sacha.

Elle n'eut pas cette peine quand elle vit débarquer sa cadette pour s'entretenir avec Daisy dans la salle de repos des danseuses. Tapie dans l'ombre, ne trahissant sa présence aux yeux de personne, elle écouta les lamentations de la championne avant qu'une phrase qu'elle-même n'aurait pas mieux formulé attira son attention. Cachée derrière la porte, à quelques centimètres de ses sœurs, elle actionna l'enregistreur de son portable.

« Gary est tellement jaloux de Sacha. L'alcool l'a tiré vers le fond et l'a rendu plus colérique, plus violent. Il n'a pas supporté de se retrouver en face de lui.
- Que veux-tu dire ?
- Et si Gary l'avait... tué ? »

Il y eut un long silence puis Daisy posa la bonne question, celle que Violette et Gary attendaient.

« Pour qui t'inquiètes-tu le plus ? Ta description de la situation métamorphose ton mari en monstre sanguinaire. J'en déduis que tu ne t'inquiètes pas autant pour lui que pour Sacha.
- Gary n'est plus le même. Cet homme là n'est pas celui que j'ai épousé. Je suis horrible de le soupçonner d'avoir éliminé Sacha dans un excès de rage. Pourtant c'est le seul scénario possible. Je n'en vois pas d'autres. La police n'envisage pas que cela puisse être un enlèvement. Pourquoi aurait-on kidnappé deux hommes en même temps sans demander de rançon ? C'est insensé. Il faut que je me rende à l'évidence. J'ai poussé Gary à haïr Sacha et à le tuer, annonça-t-elle en étouffant un sanglot. »

Violette arrêta l'enregistrement, ayant obtenu ce qu'elle attendait de sa sœur, sans avoir à mentir. Gary ne se relèverait pas d'entendre sa femme énoncer de pareils faits.

Alors qu'elle regagnait le local abandonné, elle fit le bilan de ce qui avait un long et difficile labeur. Enfin le couple était déchiré. Elle avait réduit à néant cet amour qu'elle haïssait. Elle savoura avant l'heure le dernier coup qu'elle porterait à l'homme qui avait montré maintes et maintes fois résistances. Il avait fini par s'agenouiller sous les balles tirées dans le dos.

Quand Gary vit revenir sa messagère dans la lumière tombante du soir, il montra des signes d'impatience. Pour ménager l'effet de surprise que serait celle de voir cet homme à terre au moment de l'annonce véridique, elle tint sa langue. Cela lui parut une épreuve que de ne pas lui rire au nez. Il lui fallut apprécier la victoire totale en silence, du bout des lèvres.

Elle lui fit écouter l'enregistrement. La voix d'Ondine fut la seule parole révélant un signe de vie dans l'entrepôt. On découvrait la fatigue, on comprenait la résiliation, on entendait la détresse. La conversation de tout à l'heure s'écoula comme un filet d'eau bourbeux. Violette aurait voulu accélérer la sentence pour enfin se délecter du moment final ; Gary, au contraire, voulait arrêter le temps à chaque mot pour bien comprendre.

Le seul espoir qu'il nourrissait venait de s'envoler dans une bourrasque furieuse. La réponse se révélait être à double tranchant : le choix qu'il avait tant redouté d'un côté ; ensuite le soupçon qu'elle puisse le croire coupable de tuer un homme par vulgaire jalousie.
Violette après ça, lui demanda ce qu'il comptait faire. Elle lui fit comprendre que son rôle était terminé dans cette affaire, le show fini, la loge s'était vidée de sa seule spectatrice.

Que devait-il faire ? Un trou béant s'ouvrit devant lui. Il avait envie de prouver à Ondine qu'il n'avait pas tué celui qu'elle avait choisit. Le relâcher était la seule fin possible.

• • • • • • • • • •
Yseult – Je suis malade
La nuit s'annonçait aussi froide que pouvait l'être celle d'un mois de Janvier. Alors qu'il avait bu plus que de coutume, qu'il se retrouvait par terre, sur le matelas, il songea à tuer son rival. Dans le seul but d'empêcher sa femme d'être heureuse avec un autre. La jalousie aiguise à ce point l'amour-propre qu'il en devient de l'égoïsme.

Pourquoi serait-elle heureuse après tout le mal qu'elle lui avait fait ? D'abord l'adultère puis ce fils qu'il n'aurait jamais, qu'ils lui avaient enlevé. Il pleura en songeant à cette privation dont il s'était doucement habitué avec le temps. Il s'était bercé d'illusions qui lui arrachaient maintenant des larmes amères.

Au milieu de la nuit, après avoir fini sa bouteille de whisky, il pénétra dans la pièce où était retenu prisonnier Sacha. Le noir baignait entièrement la pièce si bien que Gary, pour se guider, alluma la lampe torche que lui avait laissé Violette. Il s'approcha tellement près du captif que ce dernier sursauta dans son sommeil. Il grimaça, les narines agressées par la forte odeur d'alcool que dégageait le ravisseur.

Sacha prit peur. Il comprit que quelque chose d'anormal se passait autour de lui. Sa respiration devint haletante, ses lèvres tremblaient en essayant d'aligner des mots.
Gary tourna autour de la chaise tel un prédateur dégustant déjà la proie qu'il allait dévorer. Ces journées passées sans se lever hormis pour sortir faire ses besoins avaient affecté le dresseur captif. Il ne s'était pas lavé depuis sa séquestration. Dans cette pièce uniquement éclairée par un faible halo, il était difficile de savoir qui fut le plus misérable du prisonnier ou du ravisseur.

Après avoir tourné en rond pendant de longues secondes, Gary remarqua un pic échoué sur un tas de barres en fer. Il s'en saisit d'une main assurée, le palpa avant de s'avancer, brandissant l'arme au dessus de Sacha.

Une voix lui souffla les quelques mots qui le firent trembler au plus profond de son être :

[size=4]"Sans cesse à mes côté s'agite le Démon ;
Il nage autour de moi comme un air impalpable ;
Je l'avale et le sens qui brûle mon poumon
Et l'emplit d'un désir éternel et coupable.

[...]

Et jette dans mes yeux pleins de confusion
Des vêtements souillés, des blessures ouvertes,
Et l'appareil sanglant de la Destruction !"[/size]*

Depuis sa captivité, le dresseur avait apprit à reconnaître chacun des sons qui l'entourait. Il entendit un bruit de ferrailles puis son corps fut secoué de frissons. Il s'agita sur la chaise, incapable de contrôler ses tremblements. Il posait des questions qui restaient sans réponses.

« Une vive impression de douleur, de colère, de rancœur. Ces mauvaises énergies prennent de plus en plus de place. Il faut que tu sois capable de les repousser. Sinon elles t'amèneront à commettre le pire. Je l'ai vu. Tout ce que je peux te dire c'est de combattre le mal qui germe en toi. »

Les paroles funestes d'Erika entrèrent dans la pièce silencieuse avant qu'il n'ai pu réussir à achever son geste. Il n'était pas un assassin et n'en deviendrait pas un.
L'arme tomba au sol dans un bruit épouvantable qui fit sursauter les deux hommes. Lorsque le son s'éteignit, que la lampe roula par terre, Gary se trouva avalé par les ténèbres. Il n'entendait que l'halètement de sa poitrine qui se soulevait, comme après avoir couru un marathon. Cette initiative et la détermination qu'il avait puisé au fond de lui venaient de pomper le reste d'énergie qu'il lui restait pour se battre et ne pas sombrer.

Il s'effondra devant Sacha, impuissant face au larcin dont il avait été la victime. On lui avait tout prit, même l'opportunité de se venger. Le halo de la lampe jetait une tâche qui giclait sur le mur comme celle du sang qu'il aurait pu faire couler.

Il serait un faible jusqu'au bout. Mais il pourrait encore se regarder dans une glace. Parce qu'il venait d'échapper à une catastrophe qui l'aurait emporter.
Le visage plongé dans ses mains, il comprit enfin ce qu'était le "pire" et venait de l'éviter.

* ("La Destruction", Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal)