Rubis & Saphir - The Origins de Feather17

Précédemment : Sofian veut devenir un champion d’arène et part en voyage dans Hoenn en compagnie de Flora, dont le rêve est de devenir une célèbre coordinatrice pokémon, et Timmy, un jeune garçon à la santé fragile qui doit rejoindre Vergazon. Durant leur voyage, la Team Magma s’impose afin de recruter Sofian par le biais de sa sœur Sarah, membre de l’organisation criminelle. Le groupe rencontre Annick, une coordinatrice qui a grandi dans le même village que Timmy, avec qui Flora se lie très vite d’amitié, mais avec qui Sofian ne s’entend pas très bien. Alors que Miaouss quitte la Team Rocket pour vivre une brève aventure amoureuse, Jessie et James passent une alliance avec la Team Magma afin d’obtenir de l’aide dans le vol de Galifeu. Mais la Team Magma prend les devants et leur impose de voler Galifeu pour eux en menaçant d’éliminer Miaouss. Durant le concours d’Autéquia, Miaouss retrouve ses acolytes et élabore un plan pour doubler la Team Magma. La Team Rocket passe à l’action durant la demi-finale de la compétition : James piège Sofian et l’amène tout droit à la Team Magma, Jessie et des sbires de la Team Magma attaquent le public du concours et Flora à qui ils volent ses pokémons, et Miaouss est démasqué par Timmy à qui il révèle son plan avant d’être immobilisé par Annick, venue à la rescousse. Alors que Flora poursuit Jessie pour récupérer ses pokémons, Sofian affronte sa sœur, Sarah, et ses sbires qui arrivent à lui arracher Galifeu à la suite d’un combat exténuant, et Timmy s’envole avec la Team Magma pour sauver Galifeu. Abandonnée par la Team Magma de manière violente, Jessie passe un pacte avec Flora pour l’aider à sauver Sofian, parti avec Annick récupérer son Galifeu des mains de la Team Magma. Mais tandis qu’un détective spécial s’approprie l’affaire, Annick est capturée par la Team Magma et Sofian arrive à pénétrer dans leur repère. Malgré ses efforts, il est très vite arrêté et emprisonné avec Timmy alors que John, un administrateur puissant du groupe de malfrats, emmène Annick pour l’exécuter.

Repère de la Team Magma


SHLAK !
— Dis-moi ce que tu sais !
SHLAK ! SHLAK !
— Dis-moi ce que tu sais de nous !
SHLAK ! SHLAK ! SHLAK !
— Dis-moi ce que tu as entendu !
BAM !
Le coup retentit dans l’espace confiné de la salle lugubre tel un coup de fouet. Hors d’haleine, plus aucun son ne sortit de sa gorge serrée, malgré son irrésistible envie de hurler de douleur. Après toutes ces heures de brutalité — où étaient-ce des minutes ? la douleur l’empêchait de se situer dans le temps —, son corps commençait à lâcher. Ses jambes défaillirent et il se sentit pendre dans le vide, à peine maintenu vigoureusement par ses bras attachés à de lourdes chaînes accrochées au mur de pierre derrière lui.
— Tu refuses toujours de parler ? Tu vas voir ce qui arrive à ceux qui se permettent d’espionner la Team Magma ! Limagma, montre-lui de quel bois on se chauffe !
Une douleur cuisante lui transperça le crâne à mesure que le jet de flamme lui rongeait le bras, et Timmy retrouva sa voix avec laquelle il poussa un hurlement à peine audible.
— Je vais te faire payer ce que tu m’as fait, tu entends ? Crache-le morceau et dis-moi ce que tu sais de nous !
BAM !
Un nouveau coup de poing au visage, probablement une nouvelle dent de cassée. Il n’en savait rien, il n’allait bientôt plus ressentir la moindre douleur à cette partie du corps. C’était comme si le tout petit homme, qui était capable de la plus grande force de torture, l’avait compris ; le sbire fit glisser lentement sa ceinture hors des lanières de son pantalon, et la fit claquer dans ses mains.
TCHAK !
Sa tête cogna le mur derrière lui et il perdit l’ouïe un dixième de seconde. Lorsqu’il reprit douloureusement ses esprits, une nouvelle voix avait pris le relais.
— …t’en fais pas, j’ai assez de hargne que pour le faire avouer des crimes qu’il n’a même pas commis, disait la nouvelle personne.
Une main lui saisit le menton et lui releva la tête endolorie. Deux doigts lui écrasèrent un œil, soulevant sa paupière pour le forcer à regarder son nouveau bourreau dans les yeux. Si les hémorragies cérébrales qu’il devait avoir ne lui brouillaient pas ses sens, Timmy reconnut John, un des hommes les plus hauts gradés de l’organisation de malfrats.
— Je tiens à te prévenir que je suis d’assez mauvaise humeur, lui indiqua-t-il calmement, un large sourire aux lèvres. Alors, tu as intérêt à parler rapidement, parce que tu vas t’en prendre plein la figure avant même d’avoir capitulé, je peux te l’assurer.
Son poing se leva, fendit l’air, Timmy ferma l’œil,…
— ASSEZ !
Sa tête retomba sans recevoir de nouveau choc. Il ouvrit le seul œil qui lui répondait toujours et vit son reflet dans une flaque d’un liquide rouge à ses pieds. Son visage, bouffi par les coups, ensanglanté, ne ressemblait plus à celui d’un enfant qui, quelques heures seulement auparavant, profitait agréablement d’un spectacle de coordination pokémon.
Des bruits de pas s’approchèrent. C’était comme si l’air s’était givré autour de lui, comme si la présence du troisième intervenant avait pétrifié les deux autres. Avec un peu de chance, Timmy ne mourrait pas ce soir.
— Je vous ai dit de le garder en vie car nous avions besoin de lui, dit la troisième voix sur un ton calme olympien.
Les quelques membres éveillés de Timmy frissonnèrent de terreur. L’horreur du passage à tabac qu’il venait de subir n’était rien comparée à ce que lui inspirait cette voix calme et menaçante.
— Mettez-le dans la Sondeuse.
On le souleva ; il se débattit. On le plaqua sur une planche métallique horizontale ; il tapa des pieds. On le ficela ; il hurla. On actionna une machine très bruyante, assourdissante ; il sentit une douleur psychique si puissante qu’il perdit connaissance sur le champ.

Presque instinctivement, une de ses paupières se releva sous les cris bourdonnant de quelqu’un, quelque part, là, autour de lui.
— …artir…évite…
Quelque chose explosa derrière lui.

Lorsqu’il rouvrit l’œil, ce fut le plafond qu’il vit en premier. Quelque chose lui arrachait le mollet, un monstre, non, un chien, on le trainait au sol.

— …Annick…pardonne-moi…
Il rouvrit l’œil. Il était plongé dans le noir. Le premier sens qu’il retrouva fut l’odorat tellement la moisissure s’était emprise de la salle dans laquelle il se trouvait. S’il pouvait sentir, c’est qu’il n’était pas mort ! Le toucher lui revint, et violemment : chaque partie de son corps lui procurait une douleur intenable, comme si on avait planté dans chacun de ses pores des centaines de poignards.
— Pardon ! s’excusa quelqu’un en retirant sa main de son visage. J’essaie de désinfecter tes plaies…
— S… Sofian ? demanda Timmy d’une voix rauque qu’il ne reconnut pas.
L’autre soupira.
— Oui, c’est moi, affirma-t-il tristement. Je suis content que tu aies repris connaissance, je commençais à être sérieusement inquiet.
— Où… Où sommes… ?
— Dans les geôles du repère de la Team Magma.
Timmy déglutit ; il regretta très vite ce geste qui lui arracha une larme de douleur.
— A… Annick…
Sofian resta muet.
— Qu’est-ce… qu’il… s’est passé… ?
— Je suis venu pour te sauver, avoua Sofian. Je ne pouvais pas te laisser avec eux alors que tu voulais récupérer Galifeu. Tout ça, c’est ma faute…
Et Sofian lui raconta alors comment il avait pris le chemin de la montagne à la recherche des troupes ennemies, comment Annick l’avait rejoint avant de se faire capturer, comment il s’était infiltré dans le repère, comment il avait été à nouveau trahi par la Team Rocket et comment il avait échoué à lui sauver la vie.
— Et maintenant, ils vont l’exécuter… termina Sofian à demi-voix, secoué par un sanglot de regret. Tout est ma faute….
Timmy chercha de sa main son ami et trouva son visage irrigué par les larmes. Il lui tapota lentement l’épaule.
— Mais à toi… qu’est-ce qu’ils t’ont fait ? demanda enfin Sofian, après un moment de silence morbide.
— Des choses… que je ne les… pensais… pas capables, murmura Timmy, à bout de souffle. Je ne regrette… pas un seul… instant m’être jeté… sur leur hélicoptère… pour aider Galifeu,… mais j’aurais dû… être beaucoup plus… intelligent…
« Ma première erreur… a été de croire… que je pourrais… tenir plus de vingt… secondes… suspendu dans… les airs… à leur hélicoptère…


— Mission réussie, Team Magma !
Sofian se laissa tomber au sol…
— Pour un continent plus large, Team Magma !
L’hélicoptère se referma…
L’hélicoptère démarra…
Il était impossible de se laisser faire, contre-nature d’échouer…
Il sauta d’un bond, d’un très long et haut bon, et s’agrippa à un pied de l’hélicoptère qui prit son envol…
— TIMMYYYYYYY !!!

Mais il était trop tard. L’hélicoptère avait disparu dans la couche épaisse de nuages de cendres, et Autéquia avait disparu à des centaines de mètres sous ses pieds. À peine avait-il pris son envol que le jeune garçon regretta amèrement sa décision, aussi courageuse et héroïque qu’elle fût. Agrippé à la barre métallique qui servait de pied à l’hélicoptère rouge, les bras tendus, le corps attiré par le vide, la moindre bourrasque le menaçait de chute mortelle,… C’était comme s’il était étouffé par ses propres côtes, comme si ses poumons allaient se déchirer d’eux-mêmes. Pourvu qu’ils ne voyagent pas longtemps, pourvu qu’ils arrivent bientôt. Les fourmis lui grimpèrent dans les bras, remontant vers ses mains bientôt insensibles à la douleur tellement le froid automnal de l’altitude lui brûlait la peau. Rassemblant le reste de force qu’il lui restait au terme d’une soirée mouvementée, il arriva tant bien que mal à se hisser après quelques minutes d’effort sur la barre métallique et à se place à califourchon, de sorte à pouvoir reposer ses bras.
Timmy grelottait. Assourdi par le vacarme tonitruant des hélices de l’engin fouettant inlassablement le vent glacial, figé par le froid mordant de l’altitude, du givre s’étant emparé de ses longues mèches blondes, terrorisé par la hauteur vertigineuse depuis ces nuages gris, Timmy regarda avidement le lever du soleil qui allait lui promettre un peu de chaleur dans les heures à venir. Car, vraisemblablement, il était parti pour un voyage d’une durée longue et épuisante.
Alors qu’il avait fini par accepter qu’il ne retrouverait pas la terre ferme de sitôt, et qu’il allait bientôt abandonner toute lutte contre le froid, l’hélicoptère sortit de son nuage de cendre et se retrouva au flanc d’une montagne imposante derrière laquelle le soleil matinal tentait une timide apparition. Au loin, quelques centaines de mètres plus bas, le sol se rapprochait lentement de l’hélicoptère, et il distingua enfin l’endroit où ils se rendaient. Cachés au creux d’une vallée se trouvaient plusieurs hélicoptères à l’arrêt, tous réunis devant le flanc de la montagne. Soulagé, Timmy soupira ; il allait enfin pouvoir reposer son corps meurtri par la fatigue.
C’est alors qu’un sursaut de panique faillit le faire basculer par-dessus bord : c’est qu’il allait être très vite repéré ! Il fallait qu’il saute avant que l’hélicoptère ne se pose, assez loin pour n’attirer l’attention de personne. Mais il ne pouvait pas encore sauter, l’appareil étant trop haut.
Timmy attendit, l’hélicoptère se rapprochait toujours plus dangereusement de la vallée, les silhouettes de plusieurs hommes se dessinaient avec plus de détail autour des engins posés au sol, bientôt l’appareil allait arrêter son avancée et descendre à la verticale, mais il était toujours trop haut. Encore un peu, quelques mètres, quelques secondes,… Maintenant !
Timmy se laissa glisser hors de la barre métallique et chuta de quelques mètres dans les rares buissons alentours. Le bruit de sa chute fut couvert par le brouhaha des hélices de l’hélicoptère qui entamait sa descente. Timmy était passé inaperçu. Il soupira et lâcha un rictus de satisfaction incontrôlable.
Des voix se levèrent dans la vallée et Timmy resta allongé dans les buissons : non pas pour rester le plus discret possible — bien que ce fût judicieux — mais plutôt parce que ses muscles engourdis et son dos endolori par la chute refusaient de lui répondre pour l’instant. Le jeune garçon se contenta simplement de tendre l’oreille afin de distinguer les paroles derrière le vacarme des hélices.
— …sûr que ça venait de cet endroit, près des buissons, cria un homme très loin.
Le cœur de Timmy bondit dans sa poitrine et, comme un réflexe de survie, ses jambes l’écoutèrent à nouveau. Il roula sur lui-même, plongea sa main dans une poche, et fit apparaître Arcko hors de sa pokéball.
— Vite, utilise « force cachée » sur ce buisson ! le pressa-t-il.
Le petit monstre vert s’exécuta et, quelques rapides coups de queue et de griffes plus tard, Timmy plongea dans le minuscule boyau secret qu’il venait de construire dans la terre. Il replaça des branches du buisson devant l’entrée de sa base secrète improvisée juste à temps alors que des bottines noires faisaient leur apparition à l’endroit où il était resté couché deux secondes plus tôt.
Enfin, le silence retomba dans la vallée : l’hélicoptère s’était enfin posé. Les pieds du sbire venu contrôler l’endroit disparurent et Timmy soupira à nouveau. Il était enfin en sécurité.
Se laissant quelques instants de repos, Timmy tourna sur lui-même et écarta les branchages qui bloquaient sa vue. Au loin, au bout d’une vallée rocailleuse interminable, l’hélicoptère rouge qu’il avait investi s’était posé derrière le cercle formé par d’autres engins volants et des ombres se précipitaient ci-et-là pour organiser leur arrivée. Un tout petit homme ouvrit la porte de l’hélicoptère depuis l’extérieur et plusieurs personnes en descendirent les uns après les autres, à peine éclairés par les phares des engins restés allumés. Timmy en reconnut deux d’entre eux : James, ce traître de malfrat faisant partie de la Team Rocket qui avait tout arrangé pour que le vol du Galifeu de Sofian fonctionnât, et John, un des membres de la Team Magma les plus hauts gradés. John sembla s’adresser au petit sbire qui leur avait ouvert la porte et tous jetaient des coups d’œil impatients dans tous les sens alors que la conversation avait été engagée. Frustré d’avoir atterri trop loin que pour entendre leurs paroles, Timmy eut une idée.
Tarsal apparut à son tour dans la cachette étroite et il le prit dans ses bras.
— Tarsal, je ne sais pas si tu en es capable, mais ça vaut vraiment le coup d’essayer, chuchota-t-il à son pokémon. Je vais te demander d’utiliser tes pouvoirs psychiques pour me rendre un petit service. Je sais que tu as une ouïe beaucoup plus développée que la mienne, et que par conséquent, tu es capable d’entendre ce qui se raconte. Utilise tes pouvoirs pour te connecter à ma psyché afin que je puisse entendre depuis tes propres oreilles.
Tarsal lui lança un regard étonné.
— On peut essayer, non ?
Le pokémon se concentra. Il ferma les yeux et l’antenne sur son crâne s’illumina, mais rien ne se produisit. Soudain, une chouette hulula aussi bruyamment que si elle s’était trouvée à un millimètre de son oreille, et Timmy distingua le Hoothoot responsable à des centaines de mètres au sud.
— Parfait ! Ça marche ! Maintenant, essaie de te concentrer sur ce que ces gens se disent !
Et ainsi, le son des voix des sbires de la Team Magma parvint à l’oreille de Timmy aussi clairement que s’il avait fait partie du clan.
— Génial ! Bravo, Tarsal !


— Eh bien, eh bien ! Il était temps que vous arriviez.
Un homme venait de faire son apparition dans la vallée depuis l’entrée d’une minuscule grotte, derrière les hélicoptères stationnés, mais Timmy ne parvint pas à distinguer son visage caché par l’ombre de l’aube. Cependant, rien qu’au ton calme de sa voix lisse et glaciale, ainsi qu’au silence instantané qui s’ensuivit, il comprit qu’il avait affaire au grand patron de la Team Magma.
— Monsieur Magma ! s’exclama John en accourant vers lui et en lui faisant un salut militaire. La mission est un véritable succès. Nous vous amenons le pokémon comme prévu. Pardonnez-nous notre retard, mais nous avons eu un contretemps avec le dresseur qui ne s’est pas laissé faire aussi facilement que nous l’avions pensé. Mais dans l’ensemble, tout s’est passé de manière parfaite et sans encombres.
— Ah bon ? demanda Monsieur Magma d’une voix faussement surprise. Et où sont donc passé les neuf membres de l’équipe censée être de retour avant vous ?
— Euh…
John se racla la gorge et, au vu de sa position d’inconfort, Timmy constata avec délice qu’il allait être dans une mauvaise position face à son patron.
— Ça t’apprendra à nous attaquer, ricana Timmy.
— Ils ont… pris du retard, Monsieur Magma, avoua John inconfortablement. Nous avons dû… les abandonner en arrière pour arriver à temps au rendez-vous que vous nous aviez fixé.
— N’étaient-ils pas sous ta responsabilité, John ? demanda à nouveau Monsieur Magma, comme s’il ne connaissait pas déjà la réponse.
— Ils faisaient partie de l’équipe Charlie dirigée par Klein, Monsieur Magma.
— Et vas-y que je remets la faute sur les autres, commenta Timmy pour lui-même. Décidément, John, tu es vraiment un bon à rien…
— Sauf votre respect, Patron[/i], intervint le tout petit sbire qui tremblait de tous ses membres — de peur ou de rage, ou des deux certainement —, je crois que, si je me souviens bien, j’étais en effet responsable de l’équipe Charlie, mais John était aussi responsable des trois équipes en tant qu’Administrateur, Patron ! Et…
Monsieur Magma leva une main et le petit sbire s’interrompit.
— John, peux-tu me rappeler à qui j’ai confié la tâche d’organiser l’ensemble de l’opération ? demanda-t-il en faussant son oubli.
— On n’a plus de mensonge à inventer, John ? se réjouit Timmy en se frottant les mains.
— À… à moi, Monsieur Magma, admit John.
— Donc, les responsabilités de ce cuisant échec te reviennent, John, rétorqua froidement son patron. Heureusement pour toi, mon plus fidèle serviteur m’a contacté il y a une dizaine de minutes pour m’annoncer qu’en revenant de sa mission spéciale, il est passé par Autéquia et a découvert que tous les terroristes avaient fui du dôme en se faisant passer pour des otages. En somme, les neufs membres de mon organisation que tu[/i] as abandonnés sont en ce moment en chemin vers le repère. Il est évident que s’ils se font prendre, tu en seras le seul et entier responsable. En attendant, ton échec me déçoit beaucoup John, toi qui ne m’as jamais fait défaut.[/i]
— Échec et mat, John ! s’amusa Timmy en observant l’Administrateur enragé se tasser sur lui-même, comme s’il cherchait à disparaître sous terre.
— Et où se trouve donc ce cher pokémon que tout le monde convoite et pour lequel nous avons tous failli terminer en prison ? demanda Monsieur Magma.
Une nouvelle silhouette s’extirpa hors de l’hélicoptère et Timmy reconnut cette fois-ci une femme à la longue chevelure rousse, tenant dans ses bras un gros singe évanoui. Timmy serra les poings en voyant le visage de Sarah, la sœur de son meilleur ami qui lui avait arraché son pokémon des mains par la force.
— Quel splendide pokémon !s’exclama Monsieur Magma, véritablement épaté par Galifeu.
Il se déplaça vers Sarah en tendant les bras et passa dans le rayon de la lumière des phares qui éclairaient la vallée, permettant enfin à Timmy de percevoir son visage. Timmy frissonna : du haut de sa longue silhouette mince, ses cheveux roux et terreux qui tombaient au niveau de ses épaules, sa peau anormalement blanche, son visage taillé par des rides qui ressemblaient terriblement à des cicatrices, et la lueur démoniaque dans ses yeux anormalement rouges donnèrent à Timmy la sensation que tout affrontement contre cet homme serait une signature directe vers une mort certaine.
— Je dois reconnaître qu’il doit y avoir un certain talent dans la famille Match en ce qui concerne l’entraînement des pokémons, avoua Monsieur Magma en caressant le pelage de Galifeu dans les bras de Sarah. Un champion d’arène, une sbire brillante, et ce Galifeu avec lequel nous allons enfin pouvoir réaliser de grandes choses, et peut-être même sauver Hoenn de la menace qui l’incombe.
Les mains de Monsieur Magma entrèrent en contact avec celle de Sarah qui tenait Galifeu et Timmy jura qu’il l’avait vue tressaillir. L’homme claqua des doigts et deux sbires vinrent chercher Galifeu pour disparaître avec lui dans la grotte. Sarah se frotta l’avant-bras, comme dans un réflexe de protection.
— Ce fut une réussite, Sarah. Félicitations, ma beauté !
— Oho ? s’étonna Timmy.
Son patron s’était rapproché d’elle et venait de lui caresser la joue tendrement. Sarah eut un léger frisson, à peine perceptible, mais son sourire convainquant dissipa tout doute dans le chef de Monsieur Magma. Timmy plissa les yeux, intrigué par cette scène.
— Rentrons discuter de l’augmentation dont nous avions parlé en cas de réussite.
— Augmentation ?!
John s’était réveillé de sa torpeur.
— Chacun de mes sbires qui réalise de bonnes missions se voit naturellement récompensé, John. Il me semble qu’à une époque, tu en jouissais toi-même avec une certaine satisfaction.
John resta bouche bée ; Monsieur Magma ne s’était même pas donné la peine de se tourner vers lui et maintenait envers Sarah son regard attendri qu’elle soutint.
— Je suis même étonné que ce cher petit Sofian nous ait laissé son pokémon aussi facilement. J’imagine que tu n’y es pas allée de main morte avec lui, ma jolie ?
— J’ai fait ce que j’avais à faire de la meilleure des façons, répondit Sarah sur un ton glacial, sans laisser transparaître aucun sentiment dans sa voix, tout en se frottant toujours l’avant-bras. Mais quelque chose me dit que nous le reverrons très vite.
Quelqu’un se racla la gorge. Monsieur Magma tourna légèrement la tête et remarqua enfin James qui avait l’air de ne pas se trouver au bon endroit, dans son costume gris si différent de ceux de la Team Magma.
— Oh oui, j’oubliais ! Monsieur de Châteaubriant ! Oui, je connais votre nom de famille. Sachez que je m’informe toujours sur les personnes avec lesquelles j’établis un contrat. Je vois que notre alliance a fini par se concrétiser de manière positive.
Il lui tendit la main que James serra volontiers.
— Mais, me trompé-je, ou vous étiez bel et bien accompagné de votre acolyte, Mademoiselle Miller ?
— Euh… Oui, mais bon… euh…
— Où est-elle donc ?
— Quelque chose me dit qu’il sait exactement où elle est, cette autre traîtresse, marmonna Timmy.
Ce fut Klein qui prit la parole :
— Elle était avec nous en direction des hélicoptères B quand une des gamins nous a attaqués. On a dû la laisser en arrière pour empêcher la gamine de nous suivre. J’ai ici la pokéball de son Seviper qu’elle nous a confié dans la précipitation.
James tendit la main pour récupérer le pokémon de son amie, mais Monsieur Magma la saisit avant lui d’un geste rapide et agile.
— Encore un échec, marmonna-t-il. Ce qui est inquiétant, c’est qu’elle détient des informations importantes sur notre organisation et qu’elle n’a pas été aperçue dans le groupe de sbires qui revient à pied de la mission. Ce qui signifie qu’elle s’est soit enfuie, soit faite arrêter par la police, auquel cas il est fort probable qu’elle se retourne contre nous.
— Je ne pense pas qu’elle le ferait ! assura rapidement James, mal-à-l’aise. Jessie va toujours au bout des missions qui lui sont confiées.
— N’ayez crainte, James, je vais m’assurer personnellement que toute cette histoire trouve une conclusion satisfaisante.
Monsieur Magma fourra la pokéball de Seviper dans sa poche.
— Et… Vous comptez faire quoi avec Galifeu ? osa James. Parce qu’au départ, vous nous proposiez de l’aide pour voler ce Galifeu qui serait à nous.
Monsieur Magma afficha un large sourire, un de ceux qui faisaient frissonner Timmy.
— Accompagnez donc James dans nos dortoirs, faites-lui faire un petit tour du repère et amenez-le dans mon bureau dans une demi-heure.
— Monsieur Magma, j’ai peur de ne pas bien comprendre, intervint à nouveau John. James va intégrer notre groupe ?
— Ce n’était pas à toi que je m’adressais John, mais à Klein. Et tu n’as pas besoin de comprendre.
— Vous savez de quoi est capable la Team Rocket de Kanto ? C’est la Team la plus dangereuse de tout…
— FAUX ! s’exclama Monsieur Magma de sa voix dominante, quasi divine. Nous sommes les plus dangereux. James, vous allez en effet intégrer la Team Magma en récompense de votre mission réussie. Ainsi, je respecte donc ma part de contrat en vous gardant auprès de ce Galifeu qui vous fascinait tant.
— Ah ! Tel est pris qui croyait prendre ! s’exclama Timmy, amusé en voyant les visages déconfits de John et de James.
— Sarah, ma jolie, allons discuter de cette promotion.
Et Timmy se jeta en arrière contre le sol frais de la vallée, coupant ainsi la connexion mentale établie avec Tarsal alors que tous les membres de la Team Magma, sauf deux gardes, disparaissaient dans leur repère en laissant les hélicoptères stationnés devant l’entrée.
— Eh bien, les amis, je ne sais pas dans quelle histoire on vient de s’embarquer, mais j’ai bien l’impression qu’on va avoir du mal à en ressortir sans séquelles, soupira Timmy en se frottant les yeux.


Après avoir rampé difficilement dans le long couloir qu’Arcko avait creusé dans la terre, Timmy sortit discrètement sa tête hors du boyau pour vérifier que la voie était libre. Grâce à ses calculs et à la technique parfaite de son pokémon, il venait de déboucher au centre du cercle formé par les hélicoptères de la Team Magma, ce qui lui assurait de ne pas être vu par les deux gardes qui patrouillaient devant l’entrée. Il allait être temps de passer à la seconde phase du plan.
C’est alors que quelque chose attira le regard de Timmy : dans l’un des hélicoptères stationnés, une petite masse sombre avait été abandonnée. Le corps d’un pokémon inerte jonchait le sol, mais pas n’importe quel pokémon car Timmy l’avait reconnu.
Timmy grimpa discrètement dans l’hélicoptère, ferma délicatement la porte sans un bruit et se tourna vers le Miaouss évanoui. Sans prendre ses précautions, il gifla plusieurs fois le pokémon qui se réveilla d’un bond de panique.
— Non mais ça va pas bien la tête ?! s’exclama le Miaouss parlant.
Timmy lui plaqua la main contre la bouche pour le faire taire et jeta un coup d’œil à travers la vitre pour s’assurer qu’ils n’avaient pas été entendus. Miaouss profita qu’il avait la tête tournée pour le mordre à la main et échapper à son emprise.
— Le gosse ! reconnut Miaouss.
— Shhht !
Le chat regarda autour de lui, comme perdu dans la suite des évènements.
— Où est-ce que tu m’as emmené ?!
— Je ne t’ai emmené nulle part ! chuchota Timmy. C’est plutôt vous qui m’avez entraîné dans toute cette histoire.
— Attends une seconde… On ne serait pas… ?
Miaouss se pencha à une des fenêtres et observa les lieux.
— La Team Magma… marmonna-t-il.
— Ouais, vous avez réussi votre coup, lança Timmy, énervé. Maintenant, on est vraiment dans une grosse galère alors tu vas devoir m’aider pour…
— A L’AIDE !! hurla Miaouss en tapant contre la vitre.
Timmy bondit sur lui et le plaqua au sol, mais Miaouss rusa de son agilité pour s’extirper à nouveau hors de ses mains et courir vers la porte.
— JE SUIS LA, AVEC UN DES MORVEUX !!
— Tais-toi, bon sang !
Miaouss ouvrit la porte mais Arcko, qui était resté dehors pour monter la garde à son tour, le plaqua au sol de l’hélicoptère. Contre le pokémon de type plante, Miaouss n’osa rien faire.
— Maintenant, tu vas m’écouter, chuchota Timmy en refermant la porte derrière Tarsal qui les avait rejoints. Mes pokémons et moi, on est plus nombreux que toi alors tu vas te taire et écouter ce qu’on a à te dire.
Miaouss plissa les yeux d’un air menaçant.
— À cause de votre plan minable et de votre association débile avec la Team Magma, on est tous en danger, et pas que mes amis et moi, annonça Timmy. Ta pote, Jessie, est restée en arrière apparemment. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, tu en sais probablement plus que moi. En revanche, je peux t’assurer que si le grand manitou Magma met la main sur ta pote, il va s’en débarrasser fissa, elle et son Seviper dont il a la possession en ce moment. Alors voilà le deal : tu m’aides à entrer dans le repère et à retrouver Galifeu, sinon je te dénonce en disant que tu complotes avec tes acolytes pour renverser la Team Magma sous ordre de ton chef depuis Kanto ! T’en dis quoi ?
Arcko libéra la bouche de Miaouss qui cracha sauvagement.
— Et j’ai quoi en échange ? demanda-t-il après un certain temps.
— Laisse-moi réfléchir… La vie sauve ? Dois-je te rappeler ce que j’ai fait pour ton petit couple, au prix de ma santé ? J’ai cru que tu étais quelqu’un de bien et que cette Miaouss avait le pouvoir de te changer, mais j’ai dû me tromper. En attendant, je t’ai aidé en te tendant la main. À toi de faire pareil, à présent ! Tu as une dette envers moi !
Miaouss plissa les yeux en analysant mentalement sa proposition.
— Deal, accepta-t-il.
— Tu me plantes un couteau dans le dos, et je dénonce l’endroit où se trouve Jessie, menaça Timmy.
— Deal, répéta Miaouss en lui tendant sa patte.
Après avoir analysé le regard méfiant de Miaouss, Timmy la serra.


— Rien à signaler ?
— Négatif, chef !
— Pas de trace de la police ou des gosses ?
— Négatif, chef !
— Personne à l’horizon ?
— Négatif, chef !
— Bien, n’oubliez pas : qui que ce soit qui approche, être humain ou pokémon, assurez-vous que ce soit la dernière image qu’il voit de nous.
Les deux gardes lui firent un salut militaire et il tourna les talons. Mais quelque chose retint son attention. Il fit à nouveau volte-face et sortit dans la vallée baignée d’un soleil radieux, mais sous une brise très fraîche d’un temps automnal. Les hélicoptères étaient toujours postés devant l’entrée.
— L’un de vous à un talkie ? demanda-t-il. Cette enflure de John a oublié de faire enlever ces hélicos.
Mais personne ne lui répondit. Klein se tourna vers ses gardes, mais ils avaient disparu, laissant l’entrée du repère accessible.
— Gardes ? appela-t-il, inquiet.
Aucune réponse. Quelque chose d’anormale se tramait. Et si c’était l’œuvre du garçon qui venait récupérer son Galifeu ? C’était impossible qu’il les ait retrouvés, mais si même le Patron s’en inquiétait, alors la menace était présente.
Klein sortit une pokéball de sa poche et s’apprêta à faire appel à son pokémon. Mais le faire sortir maintenant provoquerait trop de brouhaha susceptible d’alerter celui qui tentait de pénétrer dans le repère. Il attendit quelques instants, scrutant l’horizon, calmement, impassible.
Quelque chose craqua à sa gauche et il se tourna brusquement. Il faisait face à un Miaouss sauvage. Klein attendit, mais le Miaouss ne bougea pas et se contenta de le fixer du regard. C’est alors qu’un Arcko sortit depuis les hélicoptères et se jeta sur le Miaouss. Le félin riposta de ses griffes avant de s’enfuir, poursuivi par le pokémon plante revanchard. Klein resta pétrifié sur place.
— Chef, je sais que vous avez beaucoup de choses à faire, mais on m’a dit de… Chef ?
— Viens ici.
Le sbire qui venait du repère s’approcha de lui, intrigué.
— Mes gardes ont disparu, et je suis sûr que c’est un piège de la part du gamin qui vient rechercher son Galifeu. Il a essayé de faire diversion avec son Miaouss et son Arcko pour m’attirer loin de l’entrée du repère qui serait laissé sans surveillance. Ces deux pokémons ont feinté une attaque l’un contre l’autre pour que je les poursuive, probablement pour m’amener à mes gardes qu’ils ont eu de cette manière et pour m’avoir à mon tour. Reste ici, surveille l’entrée, appelle du renfort et attends que je revienne. Je pense que je sais où il se cache.
Klein laissa son sbire à l’entrée du repère et se dirigea lentement vers le cercle formé par les hélicoptères. Sans un bruit, il jeta un coup d’œil à travers la vitre du premier : vide. Il fit de même avec le deuxième : tout aussi vide. Cependant, la porte du dernier hélicoptère était légèrement entrouverte, comme si quelqu’un si était refugié sans fermer la porte de peur de faire du bruit et d’attirer l’attention.
Brandissant sa pokéball devant lui, prêt à dégainer son pokémon en cas d’attaque, Klein ouvrit lentement la porte et se hissa dans l’engin sans un bruit. Il avança dans la pénombre de l’appareil. C’est alors qu’il l’aperçut : sur le panneau de bord, un Tarsal le fixait de ses yeux.
— Je te tiens, mon ami !

— Vous l’avez trouvé, chef ?
Le petit sbire revint de sa patrouille entre les hélicoptères en replaçant ses lunettes de soleil sur son nez et haussa les épaules.
— Ce n’était qu’un Tarsal qui m’a filé entre les doigts, dit-il. On s’attend tellement à être retrouvé que finalement, on voit la menace partout. Vous me ferez le plaisir de dégager ces hélicoptères de là.
— Mais chef, ce n’est pas à moi de le faire ! C’est à l’équipe de… bah, vous savez… de Monsieur l’Administrateur John.
Klein soupira.
— Sans vouloir vous presser, chef, il faut vraiment que je vous amène à la salle B23.
— Parfait, je te suis.
Le sbire entra dans la grotte et Klein, après un dernier regard vers la vallée déserte, pénétra dans le repère à la suite de son sbire.
Après avoir passé un large hall d’entrée faiblement illuminé de lumières artificielles, Klein suivit son sbire dans un labyrinthe de couloirs tous quasiment identiques et passa devant plusieurs portes en bois derrière lesquels devaient se trouver des bureaux, des dortoirs, des salles d’entraînements,…
Ils arrivèrent enfin dans un couloir dont le centre était plus intensément baigné de lumière qui provenait d’une large baie vitrée donnant sur une salle tout à fait différente des autres. Derrière la vitre, on pouvait apercevoir une salle dont les murs avaient été entièrement recouverts de plaques métalliques. Au centre de la pièce se trouvait une très large machine qui faisait penser aux appareils de radiologie d’un hôpital, à ceci près qu’un énorme cercueil de verre trônait sur la machine, devant un panneau de contrôle. Dans ce cercueil de verre, il reconnut Galifeu.
— Chef ?
Klein se tourna vers le sbire qui l’attendait à l’autre bout du couloir.
— Chef, on vous attend dans la salle B23, je dois vraiment…
— Cela attendra ! s’énerva Klein. J’aimerais voir ce qu’ils vont faire à ce pokémon.
— Vous êtes sûr que… commença le sbire, inquiet.
Mais Klein s’était retourné vers la vitre et le sbire abandonna.
Derrière la baie vitrée, Klein reconnut Monsieur Magma et Sarah, tous deux se tenant à distance du cercueil de verre. Monsieur Magma donna un ordre et le sbire derrière le panneau de contrôle actionna quelques leviers. C’est alors que des flammes apparurent dans le cercueil de verre, entourant le corps du Galifeu qui hurla à la mort. Les flammes disparurent et Galifeu retomba dans le coma. Le sbire derrière l’ordinateur hocha de la tête de manière négative et Monsieur Magma donna un nouvel ordre.
Plusieurs sbires sortirent de l’ombre et ouvrirent le cercueil de verre avant de saisir le corps inerte du Galifeu qu’ils entraînèrent vers le fond de la pièce où se trouvait une espèce de balance plutôt classique. L’instant suivant, le Galifeu était entouré de rayons électriques provenant de la nouvelle machine et, réveillé brutalement de son coma, le pokémon ouvrit la gueule et lança ses boules de feu dans toutes les directions. Un sbire se jeta devant Monsieur Magma pour le protéger des attaques et un autre attaqua violemment Galifeu dans le dos sous les ordres de Sarah. Le pokémon tomba au sol, à nouveau inconscient.
Klein vit sur le visage de Monsieur Magma que sa fureur était grande, et malgré l’épaisseur de la vitre, les cris des uns et des autres résonnèrent dans tout le couloir.
— Espèce d’idiote ! s’enragea Monsieur Magma. Nous étions sur le point de savoir si…
— …s’il allait avoir votre peau ou pas ! rétorqua violemment Sarah sans ménagement. Et je préférais vous protéger plutôt que de risquer qu’il s’enfuie ou qu’il détruise le repère, et nous tue au passage !
Monsieur Magma avait l’air de s’être calmé sous les mots sensés de Sarah.
Il en avait assez vu. Il fallait qu’il parte.
— Klein !
Il sursauta, fit volte-face et tomba nez-à-nez avec un sbire de deux têtes plus grand que lui.
— John m’a dit de te faire passer le message qu’il semblerait qu’un des trois benêts de la Team Rocket aurait été ramené avec nous via l’hélicoptère B, mais qu’il est introuvable. Soit il s’est enfui dans la nature, soit il est entré dans la base par effraction. Il s’agit d’un Miaouss très intelligent mais blessé. S’ils le trouvent, il faut l’amener directement à John sans passer par Monsieur Magma.
— Je ne pense pas que… Monsieur Magma serait d’accord de ne pas être tenu au courant, répondit-il en pesant ses mots.
Le sbire ôta ses lunettes et plissa des yeux, le regard plein de reproches. Il s’approcha lentement de Klein, assez prêt pour qu’il puisse lire son nom sur son badge : « Gerald ».
— Et je ne pense pas que notre Administrateur John apprécierait ton manque d’obéissance.
Et le sbire s’en alla, laissant Klein mettre le plus de distance entre lui et la salle d’expérimentation.
Arrivé dans un coin sombre du repère, Miaouss s’extirpa hors du bonnet qui recouvrait le visage de Timmy.


— Bravo, à cause de toi, on a failli se faire prendre ! lui en voulut Miaouss.
— C’est pas ma faute si je ne comprends rien à leur hiérarchie, se défendit Timmy en chuchotant, je pensais qu’on avait pris l’identité d’un de leurs chefs ! Et puis, tu pourrais me remercier, je viens de te sauver la peau !
— Je ne me souviens pas que tu m’aies remercié quand je t’ai aidé à te faire passer pour quelqu’un que tu n’es pas, rétorqua Miaouss en observant discrètement tous les couloirs autour d’eux.
Timmy soupira.
— On est dans la même galère, toi et moi. Il ne s’agit plus que d’une question de temps avant qu’ils ne se rendent compte que je ne suis pas Klein et qu’ils retrouvent son corps dans le boyau. Il faut qu’on agisse, et vite !
— On a un avantage : on est un chef, donc on a du pouvoir, et ça, c’est une bonne position, résuma Miaouss.
— Mais l’inconvénient, c’est que quelqu’un nous attend dans la fameuse salle « B23 » et que je suis censé être à ta recherche, poursuivit Timmy.
— Bien vu, donc ce deuxième inconvénient est annulé par notre position, fit remarquer Miaouss.
— Exactement ! En plus, on sait où se trouve Galifeu ! Le problème étant qu’il est entouré de Sarah et du patron en personne…
— Il faut donc qu’on trouve une excuse pour faire partir le patron, Sarah et leurs sbires.
— Il faut donc une très très bonne excuse…
— …quelque chose de très grave pour que le patron s’en occupe au lieu de s’occuper du Galifeu qu’il voulait tellement.
— Je crois que j’ai une idée ! s’exclama Timmy.
Miaouss l’écouta attentivement.
— Mais ça va demander une certaine rapidité, et toute ton agilité de Miaouss.
— Je te préviens, le pacte ne consistait qu’à te faire entrer dans la base, rappela Miaouss. Mais je vais quand même t’aider parce que ce Galifeu appartient à la Team Rocket.
Timmy lui fit une grimace.
— Notre ennemi commun, c’est la Team Magma, on discutera de notre différend plus tard.
— Je suis bien d’accord.
Et ils se serrèrent à nouveau la main et la patte.
— Tu n’as jamais songé à être membre de la Team Rocket ? proposa Miaouss. Tu es vraiment doué quand il s’agit de comploter.
— Je vais prendre ça comme un compliment…

La porte de la salle d’expérimentation s’ouvrit et Klein y pénétra. Toutes les voix se turent immédiatement. Depuis Monsieur Magma qui discutait avec animosité avec Sarah, jusqu’aux sbires qui tenaient fermement Galifeu debout, tous l’observèrent longuement.
— Je peux savoir qui t’a permis d’entrer dans cette salle, Klein ? s’exclama Sarah, outrée. Je ne pense pas que tu aies le grade nécessaire pour te permettre de…
Monsieur Magma leva la main et Sarah se tut malgré elle. Elle se frotta l’avant-bras en le fusillant du regard.
— Parle, ordonna le patron de sa voix calme et dangereuse.
— Ch… Chef… il semblerait qu’un des gosses alliés au maître de ce Galifeu se soit inséré dans la base il y a quelques minutes…
— COMMENT ?! hurla Monsieur Magma en courant vers lui.
— On a retrouvé le corps inconscient de Gerald dans un fossé, dans la vallée, et quelqu’un lui a ôté ses vêtements, ce qui signifie qu’il se ferait passer pour un des nôtres. Il peut être n’importe où dans la base à la recherche de ce pokémon, j’ai pensé que je devais vous prévenir quelles que fusses mes autorisations.
Sarah jeta un coup d’œil inquiet à son patron dont le corps entier tremblait de rage.
— Tu as bien fait, Klein. Tu seras récompensé. Je dois y aller, ma jolie, ajouta-t-il en se tournant vers Sarah. Je compte sur toi pour mettre ce pokémon en lieu sûr.
Et Monsieur Magma quitta la salle d’expérimentation au pas de course.
— Amenez Galifeu dans la salle B23, elle devrait être prête pour l’accueillir à l’heure qu’il est ! ordonna Sarah à ses sbires. Klein, je te laisse t’occuper de l’opération.
Et Sarah quitta la salle à son tour.
Seul avec les trois sbires restant, il était temps de passer à la seconde phase du plan. Miaouss sortit de sa cachette et attaqua le sbire qui s’occupait du panneau de contrôle, avant de sauter agilement sur le deuxième et de lui asséner un coup de griffes. Timmy fonça tête la première sur le troisième qui s’écroula sous le choc de la surprise. Timmy saisit Galifeu dans ses bras et Miaouss courut vers la sortie.
— Et maintenant ?!
— On se réfugie dans un des bureaux, personne n’aura l’idée de nous y chercher !
Et les deux intrus s’enfuirent avec Galifeu.


Le poids de Galifeu sur son dos menaçant de le faire s’écrouler, Timmy poursuivit sa course folle dans les couloirs labyrinthiques du repère de la Team Magma, suivant difficilement Miaouss qui disparaissait de temps à autres dans des carrefours pour s’assurer que la voie était libre. Une alarme assourdissante retentit, ce qui signifiait qu’ils étaient activement recherchés ; ils avaient probablement dû avoir trouvé le corps de Klein dans la vallée et s’était surement rendu compte de la supercherie dont ils avaient été les victimes. Ricanant dans sa barbe, Timmy préféra ne pas penser à ce qu’il lui arriverait s’il était retrouvé avant sa fuite. Mais tout allait bien se passer. S’ils avaient réussi à s’infiltrer sans se faire remarquer et à récupérer Galifeu sans encombre, affrontant même le boss ultime de l’organisation criminelle, ils arriveraient bien à sortir de la base indemne.
C’est alors qu’à l’embranchement suivant, l’alarme résonnant toujours à leurs oreilles, ils tombèrent nez-à-nez sur un John révolté devant une horde de sbires enragés.
— Ils sont ici ! s’écria l’Administrateur.
Timmy fit demi-tour, mais derrière lui arrivait déjà une troupe de sbires menée par Sarah qui s’arrêta dans sa course, médusée, en reconnaissant Timmy.
— Je les ai trouvés en premier, j’aurai leur peau ! hurla John. Arrêtez-les !
Des boules de feu fusèrent de partout depuis les gueules béantes des Limagma ennemis. Timmy se plaqua contre une porte pour éviter une attaque. La porte se rompit et il bascula dans un nouveau couloir, plus étroit, tandis que Miaouss se faisait prendre par le cou par une sbire.
— Alors toi, je compte bien te faire payer ta traîtrise ! s’exclama John.
— Je suis innocent !! Le gosse compte se cacher dans un bureau d’un haut représentant pour ne pas qu’on le trouve ! avoua Miaouss.
— TRAITRE !! s’écria Timmy en reprenant sa course.
Derrière lui, une cinquantaine de sbires le poursuivaient. La porte de l’autre bout n’était plus qu’à une dizaine de mètres. Il ne restait plus que quelques mètres, trois, deux, quelques centimètres avant la poignée.
La porte s’ouvrit à la volée et un petit sbire, le réel Klein, apparut dans l’encadrement, seulement vêtu d’un boxer et de chaussettes hautes.
— Tu vas le payer !
Et Klein lui frappa brutalement la porte contre le crâne. Timmy tomba à la renverse et perdit connaissance alors qu’on lui arrachait Galifeu des mains.


Le bureau creusé dans la roche donnait à la pièce une atmosphère glaciale qui rompait parfaitement avec la chaleur ahurissante qui régnait au sein de la grotte. Derrière le bureau en pierre, une multitude d’écrans affichaient chaque recoin du repère. On pouvait y décerner un sbire marchant tranquillement dans le hall d’entrée, un autre monter la garde à l’entrée, ou encore un troisième nettoyer un dortoir. Dans un autre écran, un jeune garçon avait été jeté au sol. On lui arracha son costume rouge, on l’enchaîna à d’énormes chaînes rouillées, on le ligota et on le passa à tabac.
James détourna les yeux de la scène de torture qui lui souleva le cœur. Il échangea un regard terrifié avec Miaouss qui ne cessait de jeter des coups d’œil dans tous les coins du bureau, à la recherche d’une quelconque sortie de secours. Si la Team Magma comprenait qu’ils avaient essayé de les doubler avec l’enlèvement du Galifeu de Sofian, alors ils pouvaient s’attendre à recevoir le même châtiment que ce jeune garçon était en train de subir par leur faute.
— On doit récupérer Galifeu, coûte que coûte, chuchota Miaouss.
— Tu es fou ? On a encore une chance de leur faire croire qu’on est toujours de leur côté et éviter un passage à tabac ! s’alarma James.
— Shht ! Moins fort ! Il peut débarquer à tout moment !
Miaouss s’approcha de la porte et vérifia en tendant l’oreille qu’il n’y avait personne dans les environs.
— J’ai un plan.
— Tu m’as écouté ? s’énerva James.
— Pour pouvoir récupérer le Galifeu, poursuivit Miaouss en l’ignorant, il faut rester dans les environs de la Team Magma et attendre la faille qui nous permettra de le voler.
— On va surtout se tenir à carreau et fuir dès qu’on aura une minute de liberté ! contredit James.
— Mais pour mon plan, il faut qu’on évolue au sein de la Team Magma sans être leurs ennemis.
— Attends, quoi ?! Tu veux que…
— On va se faire embaucher par la Team Magma !
— Mais… Miaouss… Et Jessie ? Et le Boss ? Tu crois qu’il nous laisserait… ?
Mais la porte s’ouvrit à la volée à cet instant et Monsieur Magma pénétra dans son bureau. Sans un regard à ses invités, il s’installa sur sa chaise tournante et déposa une pokéball devant lui. Enfin, après avoir scruté quelques instants ses écrans dans un silence tendu, il accorda son regard à James et Miaouss.
— Bien, je suppose que vous connaissez les raisons qui vous amènent dans mon bureau, dit-il de sa voix dangereusement calme.
James et Miaouss échangèrent un regard et hésitèrent. Monsieur Magma afficha un léger sourire menaçant.
— Je vous ai réunis dans mon bureau pour discuter de notre contrat, annonça-t-il.
— Ah ! lâcha James, rassuré.
— Vous aviez une tâche et vous avez fait appel à moi, reprit Monsieur Magma. Je vous ai donc accordé mon aide volontiers. En échange, vous deviez à votre tour m’aider dans mon objectif, ce que vous avez parfaitement réussi à faire. Ainsi, je pense que les clauses sont respectées des deux côtés.
— Excusez-moi de vous interrompre, se risqua Miaouss, mais je ne vois pas en quoi vous avez respecté votre partie du contrat. Nous vous avions demandé de l’aide pour voler Galifeu, et c’est vous qui l’avez et pas nous.
— Ah, oui, je vois…
Monsieur Magma afficha un air désolé et son visage se raidit. James déglutit difficilement tandis que le puissant homme ouvrit un tiroir duquel il sortit un petit tas de feuilles.
— J’aimerais vous recruter, annonça-t-il. En faisant partie de la Team Magma, par transitivité, vous aurez vous aussi possession de Galifeu étant donné qu’il est mien.
— Encore une fois, je ne vois pas en quoi Galifeu nous appartiendrait étant donné que vous seriez notre patron, se borna Miaouss sous les regards alarmés de James.
— Très certainement, je conviens que ce petit détail peut être frustrant, répondit Monsieur Magma sur un ton trop doux. Cependant, voyez-vous, j’ai moi-même une petite frustration quant à votre participation au contrat.
Miaouss fronça les sourcils.
— Vous n’étiez pas prévu dans le contrat, révéla Monsieur Magma.
— Qu… ?
— Il me semble pourtant que ce sont les signatures de Monsieur de Châteaubriant et de Mademoiselle Miller que je lis ici, pas la vôtre, indiqua Monsieur Magma en leur montrant le contrat qui les avait liés quelques jours plus tôt.
James resta bouche bée. Ils avaient perdu le combat.
— Vous n’étiez pas là lorsque l’accord a été conclu, et Mademoiselle Miller a échoué sa mission, vous conviendrez donc de ce petit arrangement de ma part dans notre contrat, déclara Monsieur Magma d’un ton sec qui signifiait qu’aucune contradiction n’était envisageable.
— Je… Je peux parler l’humain ! C’est très utile ! se défendit Miaouss pour sauver sa peau.
— Allons, Pokémon, vous n’avez pas besoin de faire votre promotion, puisque je vous annonce que je désire vous recruter à la place de Mademoiselle Miller. Les deux places prévues initialement seront donc remplies. J’aimerais, si vous le voulez bien, m’entretenir avec vous d’un autre sujet.
Et sans attendre d’accord de leur part, Monsieur Magma poursuivit en prenant la pokéball au centre de son bureau :
— Savez-vous ce qu’est ceci ?
— Euh… Une pokéball ? devina James, perplexe.
— Très juste, affirma Monsieur Magma avec un sourire moqueur. La reconnaissez-vous ?
Sur son visage se dessina un sourire amusé, puis une véritable expression de satisfaction délicieuse face à leur inquiétude montante.
— Il s’agit de la pokéball contenant le Seviper appartenant à votre amie, Mademoiselle Miller, indiqua Monsieur Magma en faisant durer le suspense troublant. Il m’est revenu à l’oreille le fait qu’il se peut qu’il y ait eu de fortes probabilités — et pardonnez-moi si je vous offense en mentionnant ces complots infondés — pour que vous ayez essayé de nous doubler dans l’attaque du dôme de concours d’Autéquia.
Il termina sa phrase sur un ton si sec et glacial qu’il paraissait à James qu’il n’y avait, au contraire, aucun doute sur ses suspicions, et les deux amis reculèrent d’un pas de terreur.
— Vous comprenez donc mon intention de vous infliger une punition en guise de première leçon dans notre école.
Il se leva brusquement de sa chaise et les deux acolytes se serrèrent l’un contre l’autre, paralysés par la peur.
— Étant donné que votre amie a été incapable d’être à notre niveau, elle ne peut pas faire partie de mon organisation. Le problème étant qu’elle en connait trop sur nous, beaucoup trop. Et vous m’avez menti, en essayant de me doubler. En guise de représailles, votre amie mérite… l’exécution ! Je suis sûr que sa mort vous fera comprendre que la trahison n’est pas une option à choisir dans notre clan.
Monsieur Magma se tourna vers ses écrans et appuya sur le bouton d’un clavier. L’écran du milieu changea d’image et un bois touffu apparut dans le carré de l’écran. Soudain, deux femmes entrèrent dans le champ de la caméra : une jeune adolescente au bandana bleu, et une jeune femme aux longs cheveux roux.
En reconnaissant Jessie avancer dans les bois et surveillée par la Team Magma, James et Miaouss écarquillèrent les yeux, terrifiés à l’idée de ce que la Team Magma pourrait lui faire subir.
— Si vous voulez lui épargner sa misérable vie de traîtresse, vous allez faire exactement ce que je vous dis, ordonna leur nouveau patron en les fixant de ses yeux rouges démoniaques, comme pris d’une transe diabolique.
— Tout… tout ce que vous voudrez ! obéirent James et Miaouss en s’inclinant devant l’homme qui venait de les prendre dans son terrible piège.


À suivre dans : « L’aide de la Team Rocket »