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Rubis & Saphir - The Origins de Feather17



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» Auteur : Feather17 - Voir le profil
» Créé le 22/11/2016 à 13:18
» Dernière mise à jour le 31/08/2020 à 19:19

» Mots-clés :   Action   Aventure   Drame   Hoenn   Présence de personnages du jeu vidéo

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047. 4x01 - La jeune femme aux cheveux roux
Précédemment : Sofian veut devenir un champion d’arène et part en voyage dans Hoenn en compagnie de Flora, dont le rêve est de devenir une célèbre coordinatrice pokémon, et Timmy, un jeune garçon à la santé fragile qui doit rejoindre Vergazon. Durant leur voyage, la Team Magma s’impose afin de recruter Sofian par le biais de sa sœur, membre de l’organisation criminelle. Plus tard, Flora participe à son premier concours de coordination qui se déroule très mal pour elle alors qu’elle fait la rencontre d’Annick, qui a grandi dans le même village que Timmy, avec qui elle se lie très vite d’amitié. Alors que Miaouss quitte la Team Rocket, Jessie et James passent une alliance avec la Team Magma afin d’obtenir de l’aide dans le vol de Galifeu. Mais la Team Magma prend les devants et leur impose de voler Galifeu pour eux en menaçant d’éliminer Miaouss. Durant le concours d’Autéquia, Jessie et James retrouvent Miaouss qui, de retour dans le trio après avoir vécu une aventure avec une Miaouss sauvage, prend les choses en main et élabore un plan pour doubler la Team Magma. Annick, Jessie — sous sa couverture d’Isobella — et Flora se qualifient à la seconde phase de la compétition pendant laquelle la Team Rocket passe enfin à l’action en même temps. James piège Sofian et l’amène tout droit à la Team Magma, Jessie et des sbires de la Team Magma attaquent le public du concours et Flora à qui ils volent ses pokémons, et Miaouss est démasqué par Timmy à qui il révèle son plan avant d’être immobilisé par Annick, venue à la rescousse. Alors que Flora poursuit Jessie pour récupérer ses pokémons, Sofian affronte sa sœur, Sarah, et ses sbires qui arrivent à lui arracher Galifeu à la suite d’un combat exténuant, et Timmy s’envole avec la Team Magma pour sauver Galifeu.

Autéquia


Pokémon #201c
En entrant dans le local ténébreux, il découvrit d’emblée les quelques visages des policiers baignés de la douce lumière du soleil levant. Il referma calmement la porte derrière lui, s’enfermant dans la pénombre d’une ambiance tendue qui ne lui plaisait guère. Le jeune homme aux yeux bleu électrique posa son regard sur chacun des policiers qui lui faisaient face et, tour à tour, tous tressaillirent, comme s’ils étaient passés aux rayons X. Enfin, une silhouette se démarqua dans le groupe d’officiers : la jeune femme s’était levée et, d’un geste, l’invita à les rejoindre avec méfiance ; après tout, du haut de sa vingtaine d’année, il n’avait pas l’autorité de ce que son regard semblait imposer !
Après avoir pris soin de replacer correctement son imper gris et recoiffé sa mèche brune sous un chapeau marron rapiécé, il s’installa sur la seule chaise du bureau et croisa les jambes, comme impatient d’entendre un récit passionnant.
— Flora Seko, dit enfin l’agent Jenny en posant brusquement la photo d’une adolescente que le jeune homme prit le soin d’étudier du regard. Fille du Professeur Seko. On ne dénombre pas moins de onze plaintes déposées au cours de ces deux derniers mois : dont trois envers la Team Aqua et une envers la Team Magma.
Un léger mouvement de sourcil, quasi invisible, trahit l’intérêt qui venait de naître chez le jeune homme aux yeux bleu électrique, mais l’agent Jenny poursuivit son récit sans y prêter attention.
— Elle se trouvait sur scène dans le but de son match de demi-finale lorsque l’attentat a eu lieu. On l’a retrouvée trente-deux minutes plus tard à l’orée de la forêt de la Route 113 en compagnie de cette personne.
L’agent Jenny déposé une nouvelle photo, celle d’une jeune femme aux cheveux roux cette fois-ci.
— Isobella Mentirosa, coordinatrice également, adversaire de Flora Seko lors du combat interrompu. D’elle, nous n’avons aucune information. D’après Elizabeth Mitchell, une des juges et victimes de l’attaque, elle se serait enfuie dans les coulisses pendant les combats qui se sont déroulés dans les gradins contre la Team Magma.
Sans se soucier du nouveau plissement d’yeux du jeune homme, l’agent Jenny déposa une troisième image, celle d’un adolescent :
— Sofian Match, fils du champion Norman Match, apprenti dresseur pokémon financé par le Professeur Seko, aussi porteur de nombreuses plaintes contre les groupes terroristes. Il a disparu ce matin avant que l’agent Jenny n’ait eu le temps de l’interroger. D’après certains témoins, il aurait quitté la salle de spectacle quelques secondes avant l’attaque de la Team Magma, et on a retrouvé des traces de son ADN sur un champ de bataille au centre de la Grand Place d’Autéquia. Les analyses de sang indiquent que le combat se serait déroulé une vingtaine de minutes après l’attentat.
Avant même que l’agent Jenny ne poursuive son discours, les yeux du jeune homme avaient déjà transpercé la nouvelle photo qu’elle s’apprêtait à sortir de son dossier.
— Annick Furler, coordinatrice qui a été épargnée de l’attentat car elle ne se trouvait pas sur les lieux de l’attaque. Elle a cependant avoué avoir été sur les lieux du combat où on a retrouvé le sang de Monsieur Match. Depuis la déposition qu’elle a donnée ce matin à l’hôpital, elle reste introuvable. En enfin, Timmy Bronam — elle déposa une dernière image à côté des autres, que le jeune homme s’empressa de scanner de ses yeux perçants. Aucun des enfants n’a mentionné son nom dans leurs dépositions, aucune des victimes ou des témoins ne l’a mentionné, mais nous savons de source sûre que c’est lui qui a sonné à la police pour prévenir de l’attentat. Nous savons qu’il était dans le public grâce à la liste des achats de billets qu’on a fait imprimer, et nous avons pu l’identifier grâce aux caméras de surveillance du dôme de concours. Nous savons aussi qu’il s’est retrouvé en régie un peu avant l’attaque grâce à des cheveux qu’on aurait retrouvés de lui. Le plus étonnant, ce sont les poils de chats que nous avons aussi retrouvés dans la régie, les mêmes poils de chat qu’on a retrouvé dans la clairière où se trouvaient Mesdemoiselles Seko et Mentirosa. Mais nous avons perdu la trace de Timmy dans le chaos qui a suivi la fuite des neufs sbires de la Team Magma du dôme de concours.
L’agent Jenny marqua une pause qui donna au jeune homme la possibilité d’analyser plus attentivement les visages représentés sur les cinq photos qu’on avait déposées sur le bureau en chêne devant lui. Les trois adolescents, Sofian, Flora et Timmy, l’intéressèrent plus particulièrement étant donné le temps durant lequel il s’y consacra, et l’agent Jenny précisa :
— Si les noms de ces trois adolescents vous disent quelque chose, c’est qu’ils ont été à la une de pas mal de journaux et magazines il y a de cela quasi deux mois, suite à une disparition en mer qui reste mystérieuse encore aujourd’hui. Il semblerait qu’ils aient un don pour s’attirer des ennuis. Nous avons fait appel à vous car la situation est grave et délicate, et surtout incompréhensible. Pourquoi la Team Magma a-t-elle commis un attentat, elle qui n’était plus passée à l’acte ces dernières années ? Comment s’est-elle retrouvée enfermée dans son propre piège ? Y a-t-il eu des complices ?
Le jeune homme aux yeux bleus resta silencieux, le regard poursuivant sa contemplation des cinq photos.
— Ces cinq individus ont été classés en tant que suspects dans l’enquête car les dépositions de tous les témoins semblent ne pas coïncider avec les leurs, car leurs blessures sont louches, et leurs histoires ne tiennent pas la route. De plus, trois d’entre eux ont disparu et la plus âgée ne semble pas exister.
Le jeune homme plissa des yeux. Il bougea enfin : il fouilla dans ses poches, en sortit des gants de voyage dans lesquels il glissa ses mains avec précautions, feuilleta méticuleusement les pages du dossier qu’on lui proposa et tomba sur la liste des participants au concours et de leurs résultats. D’après le rapport, le dernier participant, un certain Roberto, avait été disqualifié pour abandon. Il tiqua à nouveau de l’œil, avant de sourire. Il referma délicatement le dossier et s’adressa enfin aux policiers :
— La Team Magma a bénéficié de trois complices pour perpétrer leur attaque, expliqua-t-il, de sa voix étonnamment virile pour son jeune âge, comme s’il avait lu les réponses aux énigmes dans le dossier. Mais ces trois complices se sont retournés contre eux au moment fatidique en les piégeant au cœur du bâtiment. Isobella Mentirosa est un nom d’emprunt pour masquer sa véritable identité. Elle se trouvait sur scène et s’est enfuie avec la Team Magma dans les coulisses. Roberto, le coordinateur fantôme, a dû être celui qui a attiré Monsieur Match hors de la salle de spectacle juste à temps avant qu’elle ne se referme sur la Team Magma, pour ensuite l’attaquer sur la Grand Place. Les deux camps en avaient après lui, mais ce sont les trois complices qui ont réussi à mettre la main sur lui. Quant au jeune Bronam, il a dû se douter que quelque chose ne tournait pas rond et s’est rendu en régie à la recherche de réponses, où il s’est retrouvé nez-à-nez avec le troisième complice : un Miaouss.
— Un… Miaouss ? s’étonna l’agent Jenny sous les chuchotements perplexes de ses sous-fifres.
— Vous seriez étonné de la velléité des Miaouss lorsqu’il s’agit d’empocher une bonne ration d’or, s’amusa le détective. Monsieur Bronam s’est confronté au Miaouss, Isobella a récupéré le Miaouss alors que Monsieur Bronam s’est enfui du dôme et a appelé la police pour prévenir de l’attentat, pendant que Mademoiselle Seko poursuivait Isobella et toutes deux ont été retrouvées dans les bois alors que Monsieur Bronam disparaissait, peut-être emporté par les sbires de la Team Magma qui ont réussi à s’enfuir.
Une nouvelle vague de chuchotements déferla dans la salle.
— Affaire classée, annonça le jeune homme en ajustant son chapeau sur sa mèche brune.

La porte s’ouvrit à la volée sous les coups violents que lui donnèrent deux Machopeur et les policiers entrèrent en trombe dans la chambre d’hôpital. D’un rapide coup d’œil, sans attendre le feu vert de ses collègues, le jeune homme aux yeux bleus remarqua que les occupants avaient déjà pris la fuite. Il s’approcha calmement de la fenêtre alors que l’agent Jenny lui indiquait qu’elle n’avait rien à signaler après inspection. Quelques étages plus bas, s’enfuyant au pas de courses dans les rues d’Autéquia, deux jeunes femmes disparaissaient entre les petites maisons chaleureuses du patelin.
— Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? demanda un policier alors que la jeune femme aux cheveux roux s’était évanouie dans la nature.
Le détective plaça son chapeau rapiécé sur son crâne, boutonna son imper, et répondit en étirant un petit sourire excité :
— Le temps est venu de se lancer à notre tour dans la partie d’échec.

Pokémon #201h
Route 113

La mâchoire verrouillée, la gorge nouée, le crâne brûlant, les poings serrés sur un bonnet souillé par la poussière, rien ne semblait pouvoir l’arrêter sur sa route. Le chemin dans les bois, duquel il avait été si heureux d’avoir enfin émergé après tant de jours d’errance, s’enfonçait de plus en plus dans la grisaille de la cendre qui en parsemait le sol. Cela faisait des heures qu’il avançait sans relâche entre les arbres glauques et peu accueillants de la Route 113, dans le silence morne de ses pensées qui ne cessaient de lui remémorer l’instant où il les avait perdus, ses deux meilleurs amis. Malgré toutes les souffrances cuisantes que lui imposaient ces souvenirs, ils étaient les seuls à l’aider à ignorer la douleur de ses pieds éreintés par la longueur de la marche. Sans trop savoir où il allait, Sofian avançait vers l’inconnu en suivant le simple chemin aérien qu’il avait déterminé en voyant l’hélicoptère s’évanouir dans l’obscurité le soir précédent, vers le sud, vers les montagnes.
Un craquement retentit derrière lui, et Sofian se pétrifia sur place instantanément. C’était le premier bruit qu’il entendait depuis qu’il avait quitté Autéquia, la première résonnance inattendue dans ce bois complètement vide. Sur ses gardes, il attendit, l’oreille tendue. Mais plus rien ne perturba le silence accablant du bois qu’il traversait. Il reprit alors sa route, toujours plus déterminé.
Un nouveau craquement survint au loin, puis des pas, précipités, rapides, des pas de courses, comme si une énorme araignée courait vers lui. Prêt à en découdre, Sofian arracha une pokéball de sa poche et s’apprêta à affronter un ennemi. De nulle part surgit un puissant jet d’eau ; il plongea sur le côté afin de l’éviter et lança sa pokéball dans les airs. Le petit pokémon vert se matérialisa sur une souche d’arbre alors qu’un nouveau jet d’eau fusait vers lui. Le pokémon bondit de quelques mètres et s’horrifia en découvrant sur le jet d’eau une minuscule araignée qui glissait avec rapidité le long du courant de l’attaque aquatique.
— Balignon, attention !
Le pokémon poussa un cri, un éclair rouge foudroya le ciel et le jet d’eau s’évanouit sur un Sofian déboussolé. Une pokéball tomba au sol et émit un bref son sourd.
— Et de six ! s’exclama une voix féminine.

Sofian se releva d’un bond, rejoint par son Balignon apeuré, et une adolescente fit son apparition en venant récupérer sa pokéball. La jeune fille aux cheveux marrons coupés courts posa ses yeux verts pétillants sur Sofian, avant de lui afficher une grimace de reproche.
— Enfin je te rattrape ! C’est que tu marches vite, dis !
— Annick ?
— Ben bien sûr que c’est moi, qui veux-tu que ce soit d’autre ?
— Qu’est-ce que tu fais ici ?
— Techniquement, j’ai perdu ta trace il y a plus d’une heure et j’ai poursuivis cet Arakdo qui me semblait plutôt utile pour essayer de te retrouver, répondit simplement la jeune fille.
— Tu ferais mieux de retourner à Autéquia, répliqua ardemment Sofian.
Il tourna les talons et reprit son chemin.
— Une minute ! appela Annick en le poursuivant. Je ne me suis pas tapée une demi-journée de marche pour que tu me tournes le dos ainsi.
— Tu n’avais qu’à pas me suivre.
— Je suis là pour Flora !
Annick lui prit le bras et l’obligea à s’immobiliser. En entendant le nom de son amie, Sofian ne put s’empêcher de s’arrêter un instant.
— Elle se fait un sang d’encre pour toi, lui avoua Annick. Je lui ai promis que j’allais veiller sur…
— Je n’ai pas besoin d’une baby-sitter pour sauver mon Galifeu, répondit sèchement Sofian en se libérant de son emprise.
Sofian reprit son chemin, étonné et ravi de constater qu’Annick était restée sur place, déconfite. Mais son pied se posa sur quelque chose de visqueux et sa semelle se colla au sol, l’empêchant d’avancer. Derrière lui, l’araignée bleue qui venait d’être capturée se blottissait confortablement dans les bras de sa nouvelle maîtresse.
— Plutôt pratique, non ? dit-elle, amusée.
Sofian la fusilla du regard.
— Écoute, reprit Annick plus sérieusement, toi et moi, on n’est pas de très bons potes. Ce n’est pas qu’on ne s’aime pas, mais c’est pas la grande joie non plus. T’es pas un mauvais bougre, c’est juste qu’on n’a pas des affinités et qu’on ne partage rien qui pourrait nous rapprocher.
Sofian leva les sourcils, lui montrant son accord pour ses propos, mais Annick ne se laissa pas perturber et continua :
— Mais il y a trois raisons qui m’ont poussées à t’accompagner : secourir Timmy, te protéger pour Flora car je suis une dresseuse plus aguerrie que toi, et enfin t’aider à sauver ton pokémon des mains de la Team Magma. Tu n’es pas un mec avec qui je vais être très proche étant donné que tu considères les combats pokémons en tant que jeu et non en tant que nécessité alors que moi, je préfère la beauté et l’art dans les prestations des pokémons. Mais j’ai remarqué depuis qu’on se connait que tu tenais beaucoup à tes pokémons. Tu t’en occupes très bien, et tu as tissé avec eux un lien d’amour indéfectible que je ne peux ignorer. En tant que dresseuse, je ne peux pas accepter que quiconque puisse séparer un dresseur de son pokémon, ou plutôt deux si grands amis.
Sofian arriva enfin à extirper son pied de la sécrétion d’Arakdo, tandis qu’Annick s’était rapprochée de lui pendant son discours.
— Je suis là pour t’aider parce que j’y tiens vraiment.
Sofian se mordit la langue et soupira.
— Tu as raison, avoua-t-il. Je ne t’aime pas vraiment. Mais tu es la meilleure amie de Flora, et tu lui as fait une promesse. Et puis, je sais que Timmy et toi vous êtes plutôt proches, donc je comprends ton envie de le sauver lui aussi. Tant que tu ne nous fais pas repérer, tu peux être utile.
— Charmant… marmonna Annick.
— Tu veux m’aider ? Pas de problème. Mais on a perdu trop de temps.
Sofian reprit sa marche le long du sentier sinueux des bois.
— Tu te diriges dans la mauvaise direction, indiqua Annick qui n’avait pas bougé.
Elle pointa du doigt vers l’ouest tandis que Sofian se dirigeait vers le sud.
— J’ai vu l’hélicoptère s’en aller dans cette direction, dit-il avec conviction.
— Tu es sûr ? J’aurais plutôt dit qu’il se dirigeait vers l’est… Je ne vois pas pourquoi il irait vers le Mont Ch…
— C’est mon pokémon, c’est moi qui décide ! s’emporta Sofian en haussant le ton.
— D’accord, accepta simplement Annick.
Sofian fronça des sourcils, étonné par la rapidité de sa réponse.
— Tu as le droit de diriger la marche, tu as tout à fait raison. Si c’était ma Rosélia qui avait été volée, c’est moi qui déciderais. Je te suis !
Sofian acquiesça silencieusement, la température de sa fièvre ayant atteint un pic de douleur inédit depuis qu’il avait quitté Autéquia, et reprit enfin sa marche, talonné de près par une Annick silencieuse.

La chaleur du Mont Chimnée s’ajouta bientôt à la fatigue résultant des heures de marche sur un chemin escarpé au sein d’un bois inhospitalier, et les deux adolescents peinaient à garder le rythme dans leur avancée. Le soleil avait amorcé sa lente descente vers l’horizon et avait à présent disparu derrière les montagnes imposantes qui s’érigeaient devant eux. Enfin, alors que la fièvre ardente qui s’était appropriée le crâne de Sofian l’empêchait de penser distinctement, Annick lui prit à nouveau le bras et l’empêcha de poursuivre.
— Qu… ?
Elle lui fit rapidement signe de se taire et de tendre l’oreille. Quelque part devant eux, plusieurs voix, à peine audibles, conversaient calmement. Annick prit les devant et, discrètement, sans un bruit, se faufila derrière les arbres en restant bien cachée par les nombreux tas de feuilles mortes. Sofian l’imita et il découvrit enfin d’où provenaient les voix. Le long d’un ruisseau, trois silhouettes encapuchonnées dans un uniforme rouge se soulageaient la vessie en ricanant.
— En tout cas, ça fait du bien d’avoir fini d’escalader cette montagne, fit remarquer la personne du milieu en fermant sa braguette.
— Dans combien de temps on arrive, d’après toi ?
— Si j’en crois la taille du ruisseau, je dirais qu’on n’est pas bien loin de l’entrée nord du repère, calcula l’homme de gauche en regardant vers la droite, en amont du ruisseau.
Sofian et Annick échangèrent un regard soutenu en comprenant qu’ils venaient de recevoir une information capitale quant à l’endroit où se situait le repère de la Team Magma.
— On ferait mieux de se dépêcher si on ne veut pas perdre le reste du groupe, dit le troisième.
— J’ai entendu dire qu’il y aurait du changement avec la capture du Galifeu.
Sofian serra les doigts autour du poignet d’Annick qui lui fit signe de se calmer.
— C’est clair que les choses vont enfin bouger !
— Cette enflure de John va moins la ramener maintenant que Sarah va être pr…
Le sbire s’interrompit et se tourna brusquement vers le buisson derrière lequel les deux adolescents s’étaient cachés. Sofian plaqua ses mains contre sa bouche, terrifié par le grognement incontrôlable qu’il avait lâché en entendant le nom de sa traitresse de sœur. Le cœur battant, la fièvre disparut instantanément à mesure que l’adrénaline irriguait son cerveau, Sofian attendit sous le regard réprobateur d’Annick.
— On ferait mieux de retourner auprès du groupe et de reprendre la route.
Ils entendirent les bruits de pas des trois sbires quitter les lieux et disparaître dans les bois. Après s’être assuré que la voix était libre, Sofian se releva lentement et soupira.
— C’était moins une ! le gronda Annick en préférant chuchoter.
— Désolé. Mais au moins, on sait qu’on est dans la bonne direction ! Il suffit de remonter le ruisseau et on aura trouvé leur repère !
— Sauf si on vous trouve avant.
Sofian sursauta et fit volte-face pour se retrouver nez-à-nez avec un sbire de la Team Magma, caché sous sa capuche.

Pokémon #201e
On les tira de force, on les souleva, on les poussa,… Sofian fut jeté au sol à côté d’Annick, tel un malpropre, et se retrouva entouré de neufs hommes menaçants, tous cachés sous une capuche et vêtus du même uniforme arborant le symbole de la Team Magma.
— Noms ! Prénoms ! ordonna l’homme à la carrure la plus musclée.
Sofian resta muet et chercha une faille dans leur organisation, un minuscule trou de souris par lequel s’enfuir, ne serait-ce qu’un entrejambe assez large pour le laisser passer.
— J’ai dit : noms ! prénoms ! répéta l’homme en secouant vigoureusement Annick.
— A… Anne ! Sinclair !
— Norman James ! mentit à son tour Sofian en n’arrivant pas à penser à d’autres noms que ceux qu’il connaissait.
— Vous vous moquez de moi ?! s’énerva l’agresseur.
— Eh ! s’exclama un sbire derrière. Le petit me dit quelque chose !
— Il ressemble pas un peu à Sarah ? lança un deuxième.
— Mais carrément ! approuva un autre.
— Les gars ! Je crois qu’on vient de mettre la main sur le dresseur du Galifeu ! comprit un sbire sur la droite.
— Arrête de dire des conneries ! Il ne serait pas assez bête pour venir rechercher son pokémon seul !
— Quoi qu’il en soit, c’est le Patron qui va être content de notre cadeau de retour !
Sofian profita de l’ambiance festive générale au sein de ses ennemis pour ramper à toute vitesse vers une ouverture qui venait d’apparaître dans le groupe et se leva en un bond une fois hors du cercle de ses assaillants. Mais un violent coup de poing le fit tomber au sol et, sonné, il mit quelque temps à remarquer l’arrivée d’un dixième homme.
— Vous feriez mieux d’être plus attentifs au lieu de glousser comme des gamines en pensant à la récompense, dit-il d’une voix virile à l’encontre de ses collègues.
Il ramena Sofian au centre du groupe et le jeta aux côtés d’Annick qui lança un regard effrayé à la bosse qui s’était formée sur son crâne. Les neufs autres sbires se turent d’un coup, découvrant eux aussi le nouvel arrivant. Le plus massif d’entre eux s’approcha de lui d’un pas autoritaire.
— T’es qui toi ? demanda-t-il sur un ton imposant.
— Je suppose que tu es le chef de troupe ? interrogea le nouveau sbire.
Sofian remarqua qu’il était le seul à ne pas porter de capuche sur le crâne, de sorte que ses yeux perçants pouvaient traverser les visages des autres sbires, comme s’il lisait dans chacune de leurs pensées.
— En effet ! Et toi, t’es qui ?
Le dixième sbire pouffa de rire discrètement.
— Tu dois être un petit nouveau qui s’éclate d’avoir été promu récemment, pas vrai ?
L’homme massif afficha une grimace désagréable et sembla se raidir, comme s’il perdait confiance en lui.
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ? grogna-t-il dangereusement.
Avec la rapidité d’un coup de feu, le poing du nouvel arrivant s’écrasa sur le visage du sbire massif qui tomba à la renverse dans un cri de douleur.
— Parce que si tu avais été plus ancien dans la Team, tu saurais que tu n’as pas à t’adresser à moi de cette manière, répondit l’homme en se frottant le poing plein de sang.
Il leva les yeux du corps inerte du sbire qui s’était évanoui sous le choc, et examina les huit autres un à un avant de lever les yeux au ciel devant leurs visages terrorisés.
— Ne me dites pas que vous êtes tous des bleus ?
Aucun d’entre eux ne répondit. Sofian et Annick échangèrent un regard perplexe face à la tournure des évènements.
— Je m’absente six mois, et je retrouve une Team complètement désorganisée. Pas bouger ! ajouta-t-il en se tournant vers Annick qui avait changé de position.
Sofian fronça les sourcils et Annick lui répondit d’un clin d’œil une fois que le sbire les avait à nouveau quittés du regard.
— Relevez-le !
Un sbire accourut auprès de Sofian et le força à se mettre sur pieds.
— Mais c’est une belle pioche que vous avez ramenée. Je comprends votre enthousiasme à présent. Attendez, ne me dites rien. Vous n’avez aucune idée de la valeur qu’ils ont aux yeux du Patron ?
Les sbires restèrent silencieux, tétanisés par la silhouette toujours inerte de leur chef précédent.
— Ahlala… Messieurs, je vous présente Mademoiselle Annick Furler et Monsieur Sofian Match.
— Match ? s’étonna le sbire qui tenait Sofian. Match comme…
— Comme Sarah Match, exactement ! Match, comme le dresseur du Galifeu.
L’homme sans capuche se tourna vers Sofian et le toisa du regard.
— C’est gentil de ta part de venir te jeter dans nos bras.
Ses lèvres s’élargirent un en sourire narquois et il fit un bref signe de tête en ajoutant :
— Allez, on les emmène au repère !
On leur arracha leurs sacs à dos de leurs épaules et on tira par la force leurs pokéballs hors de leurs poches, avant de les pousser dans le dos pour les forcer à suivre le groupe de sbires le long du ruisseau à contre-courant. Se relevant difficilement, le sbire à la carrure de molosse ferma la marche, aidé de deux de ses collègues pour rester debout, et tuant du regard son nouveau supérieur.
« Tout n’est pas perdu », pensa Sofian. Certes, il venait d’être capturé par ses ennemis, mais ceux-ci allaient l’entraîner au sein de leur repère où se trouvait aussi son pokémon, et c’était pour lui la meilleure position pour retrouver son pokémon. Il allait cependant lui falloir affronter les malfrats, et probablement leur grand patron, s’il voulait avoir une chance de survivre. Mais cela, il avait le temps d’y songer et d’établir une stratégie.
Quelque chose troubla le fil de ses pensées. En marchant dans le silence vers l’obscurité de la nuit, Sofian remarqua que le courant du ruisseau qu’ils longeaient depuis quelques dizaines de minutes déjà et qui se rétrécissait à mesure qu’ils approchaient de sa source, était étrangement perturbé par une toute petite onde qui les suivait discrètement. Il jeta un coup d’œil à Annick pour s’assurer qu’il n’était pas le seul à l’avoir remarqué, mais la jeune fille semblait curieusement paisible. Quelque chose ne tournait pas rond. Il se contorsionna subtilement de sorte d’avoir un accès visuel sur l’arrière du groupe, et distingua enfin la cause de ce trouble dans le ruisseau : glissant allègrement sur la surface du cours d’eau, l’Arakdo d’Annick les suivait à la trace. Se tournant à nouveau vers Annick, Sofian comprit par son clin d’œil qu’elle leur avait assuré une porte de sortie depuis très longtemps et qu’il lui fallait attendre son feu vert.
Ils arrivèrent bientôt dans un environnement plus rocailleux, grimpant difficilement une nouvelle pente qui allait les mener vers, ce dont il était certain par l’aspect rugueux de la roche, le repère de la Team Magma.
— MAINTENANT !! hurla Annick sans crier gare.
Omettant toute seconde de réflexion, Sofian bourra dans le tas déstabilisé de la Team Magma, frappa de son poing le ventre du premier sbire qui lui tomba dessus, poussa violemment un deuxième dans le ruisseau, arracha son sac à dos et ses pokéballs des mains d’un troisième, appela son Écrapince qui contra les attaques d’un Limagma, et courut de toutes les forces qu’il lui restait dans ses jambes vers une destination inconnue, pourvu qu’il se retrouvât loin d’eux.
Il ne s’arrêta qu’une fois exténué et que son corps ne lui permit plus de tenir debout. Reprenant son souffle au creux d’une vallée rocailleuse, il se rendit enfin compte de son état. Sa fièvre était revenue, ses membres tremblaient de douleur, et ses yeux se battaient pour se fermer et permettre à son corps de dormir après plus de trente heures sans sommeil. Mais il devait tenir bon. Il se releva, et se tourna vers Annick. Mais Annick n’était pas là.
Il était seul, au milieu d’une montagne inconnue.

Pokémon #201r
Il les avait retrouvés à la tombée de la nuit. Caché derrière le décor montagneux du nord du Mont Chimnée, Sofian observait les onze silhouettes qui avançaient lentement et silencieusement vers un pan de montagne plus ardu. Une fille tituba au sein du groupe, et un homme la tira violemment, l’obligeant à se trainer au sol pour continuer la route malgré ses cris de pitié. Sofian se mordit le poing afin de résister à aller à la rescousse de son amie, celle qui s’était sacrifiée pour l’aider à s’enfuir. Mais il devait les laisser le mener au repère, il devait les laisser emprisonner Annick pour trouver l’entrée de leur repère.
Enfin, le groupe s’arrêta à l’entrée d’une minuscule grotte gardée par deux gardes.
— Halte ! ordonna l’un d’eux. Déclinez vos identités !
Un silence suivit l’ordre.
— Oh, c’était sérieux ? s’amusa le chef de troupe. Ça ne se voit pas ? On est de la Team Magma, imbéciles !
— On ne t’a jamais vu, toi ! se méfia le second garde.
Une vague de murmures fit frissonner le groupe.
— Et si tu étais un imposteur, finalement ? lança le sbire costaud qui s’était remis de ses émotions.
— Assez !
Une nouvelle voix, beaucoup plus grave, beaucoup plus imposante, quasi divine, avait fait trembler la vallée. Tout le monde se tut. Seule la silhouette d’Annick bougea, probablement terrifiée par la personne qui venait de sortir de la grotte et que Sofian ne pouvait distinguer dans l’obscurité. Le chef du groupe approcha le nouvel arrivant.
— Ah, Holmes ! lança ce dernier. Mon plus fidèle Administrateur. As-tu fait bon voyage ?
— Plutôt éreintant, Patron, répondit le sbire.
Le reste du groupe sembla pétrifié et resta silencieux devant l’échange des deux hommes.
— Il va falloir que tu me racontes tout ce que tu as appris là-bas, poursuivit leur patron. Tu arrives à point nommé.
— J’ai fait au plus vite, Patron. J’ai néanmoins une mauvaise nouvelle à vous annoncer.
Il attendit, mais son patron ne répondit pas. L’administrateur poursuivit :
— J’ai croisé ce groupe désorganisé sur mon chemin de retour de mission, et ils avaient fait une pioche intéressante : cette jeune fille et le fils Match. Malheureusement, ils ont manqué de surveillance et le fils Match a réussi à s’enfuir. Il se peut qu’il nous ait suivi pour récupérer son Galifeu.
— Ne t’en fais pas, Holmes, nous attendons tous son arrivée avec impatience. Mes hommes patrouillent justement à sa recherche tout autour du repère, il n’est donc plus qu’une question de…
Sofian bondit de terreur. Si ce que leur patron disait était vrai, il fallait qu’il s’éloigne le plus vite possible, sinon il allait tomber dans leur piège.
Il lança un dernier regard à la silhouette d’Annick, qu’on poussa violemment vers l’entrée de la grotte, et tous les sbires disparurent dans le repère, laissant les deux gardes surveiller l’entrée.
Il lui fallait un plan, et un très bon s’il voulait sauver son Galifeu et ses deux amis, Timmy et Annick, tous deux prisonniers par sa faute.

Pokémon #201c
Ce devait être la nuit la plus pesante de l’année. Avec le coup qu’ils venaient de réaliser, la capture d’un pokémon désiré par le Patron depuis tant de jours, et les projets révolutionnaires qui allaient faire de son groupe l’association la plus puissante de Hoenn, sa mission n’en était que plus importante : garder les alentours du repère pour éviter à tout étranger ou rôdeur de venir saboter leurs plans.
Alors qu’il entamait un énième aller-retour de patrouille dans la vallée, son Limagma prêt à toute attaque, son attention fut attirée par un bruit suspect. Après avoir scruté la nuit ténébreuse, et s’être par ailleurs aperçu que ce n’était qu’un Nirondelle sauvage qui avait du mal à trouver sommeil, il reprit sa marche vigilante. Soudain, un coup de vent violent lui ôta sa capuche, son Limagma fut propulsé contre le pan de montagne qu’il gardait et il poussa un bref cri de surprise étouffé par les plumes du Nirondelle avant de s’effondrer à son tour.

— Qu’est-ce que c’était ?
— Ça provenait de la zone ouest !
— Je vais jeter un coup d’œil !
Un des deux gardes brandit une pokéball et courut dans la direction du tumulte qui avait brisé le silence de la nuit. À quelques dizaines de mètres de l’entrée du repère, un des patrouilleurs gisait au sol à côté de son Limagma évanoui.
— Ça doit être le gosse, marmonna le sbire en sentant une pointe de panique irriguer son cerveau.
Se préparant à envoyer son pokémon à la rescousse pour trouver où se cachait le gamin duquel il protégeait l’accès au repère, il prit une grande inspiration pour crier à son collègue qu’un danger approchait et…
D’un coup d’aile violent, Nirondelle frappa le sbire en pleine poitrine. Muet, ce dernier s’écroula près de son condisciple.

Le garde, à présent seul devant l’entrée, fit volte-face en entendant provenir de l’est cette fois un craquement inhabituel. Serrant sa pokéball dans ses mains, il appela de sa voix tremblante son camarade.
— Tu as vu quelque chose ?
Mais aucune réponse. Si leur organisation suivait son cours, le reste des patrouilleurs devaient s’être déjà multiplié autour de la zone attaquée par le gamin. D’ici quelques minutes, on allait lui apporter le perturbateur et tout allait rentrer dans l’ordre.
Le temps passa, mais la situation ne changea pas. Il était toujours seul devant l’entrée, sans nouvelle ni de son condisciple, ni du reste des patrouilleurs. Il était bloqué devant cette entrée sans aucune information, malgré ses tentatives répétées d’appel dans son talkie-walkie.
— J’attends une minute, et je préviens le Patron, se dit-il pour se rassurer dans la nuit.
C’est alors que quelque chose craqua à nouveau à l’est et il brandit sa pokéball pour se défendre. Roulant au sol, plusieurs sbires de la Team Magma sans vie et ligotés les uns aux autres s’arrêtèrent à ses pieds. Tremblant de peur, il brandit son talkie-walkie.
— Chef, je crois qu’on a un probl…
Quelque chose de très lourd lui tomba sur le dos et il s’écrasa au sol, tête la première, avant de perdre connaissance.
— Ça, c’est pour la façon dont vous avez traité mon amie ! annonça Sofian en observant le résultat de son attaque. Et ça — il donna un violent coup de son pied dans les parties intimes du garde qu’il venait d’assommer — c’est pour avoir osé voler mon Galifeu !
Tous les sbires qui surveillaient l’entrée du repère gisaient inconscients au sol grâce à l’union de ses pokémons. Il félicita Nirondelle, Ecrapince et Balignon pour avoir réussi à faire diversion et à ligoter les sbires, et les firent rentrer dans leurs pokéballs avant de ramasser le talkie-walkie et d’annoncer en pressant le bouton :
— Demande d’aide avortée, ce n’était qu’un Rattata sauvage.
Il jeta le talkie-walkie le plus loin possible et, sans un regard envers ses ennemis, pénétra dans le repère de la Team Magma.

Repère Magma
Arriver à rentrer dans la grotte n’avait pas été une mince affaire, mais s’y retrouver dans leur repère relevait du génie. Après avoir traversé un hall d’entrée vide, probablement dû à l’heure tardive, il s’était retrouvé dans un véritable labyrinthe de couloirs rocailleux se ressemblant tous les uns aux autres, à ceci près que lorsqu’un prenait un virage à droite, l’autre était continuellement droit. C’est en arrivant dans un dixième couloir similaire au premier que Sofian se rendit compte de son erreur : à force d’avoir réfléchi à un plan d’entrée, il avait oublié d’inclure un plan pour s’en sortir une fois à l’intérieur du repère. Heureusement pour lui, il n’avait encore croisé que quelques sbires desquels il s’était caché grâce aux nombreux placards dissimulés dans tous les couloirs derrière des portes en bois incrustées dans la roche. Ce qui lui paraissait le plus étrange, c’est qu’il n’y avait relativement personne dans ce repère. Se demandant où tous les sbires avaient bien pu passer, il se jeta au dernier instant derrière un mur pour éviter d’être aperçu par un pokémon qui vagabondait dans le couloir qu’il venait d’emprunter, mais le Miaouss ne l’avait pas vu.
Sofian soupira. Profitant de sa pause, il prit un moment pour réfléchir à la suite de son plan. Mais comment retrouver son pokémon et ses amis dans un bâtiment dont il ne connaissait rien ?
Des bruits de pas retentirent depuis le début du couloir, et il se serra davantage dans son coin discret. D’après le nombre de pas, il devait s’agir de deux personnes.
— …sont sous ma responsabilité, et je ne vois pas pourquoi je devrais te faire un compte-rendu, dit une voix grave avec toute la haine qu’elle pouvait contenir.
Les deux personnes s’étaient arrêtées si près du coin derrière lequel Sofian se cachait qu’on aurait dit que l’homme qui venait de prendre la parole lui avait susurré à son oreille.
— Autant briser la glace avant que ça n’explose par soi-même, rétorqua une voix féminine que Sofian reconnut directement.
Sarah, sa sœur qui lui avait arraché son Galifeu des mains, n’était qu’à quelques pas de lui. Il dû se fourrer le poing dans la bouche pour éviter de bondir hors de sa planque et de l’attaquer.
— J’ai l’impression que tu as une dent envers moi pour une raison que j’ignore, poursuivit-elle.
L’homme pouffa d’un rire sarcastique.
— Je suppose que tu dois être heureusement, maintenant que Monsieur Magma t’a prouvé qu’il te donnerait tout l’or du monde rien qu’à tes claquements de doigts, cracha l’homme, comme s’il avait retenu ses mots trop longtemps.
— Je ne vois pas de quoi tu parles, répondit froidement Sarah. Et tu ferais mieux de surveiller ton langage, le Patron n’apprécierait pas que tu le traites de la sorte. Tu ne voudrais pas retomber au poste de simple sbire, John.
— Oh, je vois ! Madame a pris la grosse tête maintenant ! Madame se sent supérieure ! Je vais te dire une chose : ce n’est pas parce que tout le monde te considères à présent comme la Première Dame Magma que je vais te lécher le cul comme le reste de la bande. J’en ai rien à faire que Monsieur Magma te protège en bavant sur toi comme sur un morceau de viande, je me fiche de toutes les faveurs que tu obtiens en passant sous le bureau.
Un claquement retentit ; Sarah avait dû gifler son condisciple.
— J’étais là bien avant toi, reprit John d’une voix terriblement calme, et je compte bien remettre la hiérarchie en ordre.
— Va plutôt remettre la salle de repos en ordre, ordonna Sarah avec ironie, tes hommes qui sont « sous ta responsabilité », pour te citer, en ont fait une porcherie !
John ne se priva pas de l’insulter avant de rebrousser chemin dans le couloir, laissant Sarah seule à quelques centimètres de son frère caché. Celui-ci, choqué par la haine partagée entre ses deux ennemis qu’il avait toujours considéré comme alliés, et perturbé par le sentiment d’ennui qu’il avait ressenti face à l’insulte à l’encontre de sa sœur, entendit Sarah soupirer et se racler la gorge, comme si elle avait été véritablement blessée. S’il ne l’avait pas autant détestée, Sofian aurait laissé la peine qu’il ressentait pour elle en cet instant prendre le dessus sur sa haine.
Quelques secondes plus tard, les pas de Sarah s’évanouirent dans le couloir.

Pokémon #201h
Il en avait appris un peu plus sur la Team Magma, mais il n’avait pas bien avancé dans ses recherches. Courant toujours aussi vite dans les nombreux couloirs labyrinthiques du repère, Sofian jetait de temps à autre un œil derrière une porte en bois en s’assurant au préalable que la salle qu’elle cachait était vide, à la recherche de son Galifeu ou de ses amis. Mais en vain ; ils étaient introuvables.
Fermant délicatement une nouvelle porte, il rebroussa chemin vers un couloir qu’il n’avait pas encore visité et son cœur tomba à la renverse dans sa poitrine en se retrouvant nez-à-nez avec un sbire de la Team Magma !
— Le gosse ! s’exclama le sbire, aussi terrifié que Sofian.
Intrigué par la terreur du sbire, Sofian l’observa davantage plutôt que de laisser sa propre peur l’envahir. Soudain, il le reconnut.
— JAMES ! s’écria-t-il malgré lui.
Avant qu’il ne brandisse son talkie-walkie et ne donne l’alerte, Sofian lui plaqua la main contre la bouche, ouvrit à la volée la porte du placard qu’il venait de visiter et le força à y entrer avant de s’y enfermer avec lui. Des bruits de pas retentirent dans le couloir et Sofian pressa son autre main sur la gorge de son ennemi pour l’empêcher de prévenir de sa position.
— Il a réussi à pénétrer dans le repère ! annonça un sbire derrière la porte. Il ne doit pas être loin !
Et les pas s’évanouirent.
James se libéra de l’emprise de Sofian avec force ; la capuche de son uniforme de la Team Magma glissa de sa tête et Sofian ne put s’empêcher de rester bouche bée.
— Alors comme ça, vous êtes dans la Team Magma maintenant ? chuchota-t-il férocement, le souvenir cuisant de sa dernière rencontre avec James lui brûlant l’estomac. C’était ça, le deal avec la Team Magma ? Voler mon Galifeu pour en faire partie ? Où est-il ?!
— Je… je ne sais pas ! se défendit ce dernier en brandissant son talkie-walkie.
— Menteur ! s’énerva Sofian en lui arrachant l’objet des mains et en l’écrasant au sol. Conclure un marché avec la Team Magma ? Bande d’abrutis ! Vous ne savez pas dans quoi vous vous êtes lancés !
Sofian brandit ses trois pokéballs dans sa main et menaça James qui se recroquevilla contre le mur du fond du placard très étroit.
— Je n’ai peut-être plus mon Galifeu pour l’instant, mais j’ai toujours mes trois excellents pokémons et vous n’avez que votre piètre Cacnéa pour vous défendre ! Vous allez m’aider à retrouver mon pokémon, ou je vous jure que je vous arrache les dents une par une jusqu’à ce que mort s’ensuive !
— Tu crois que je vais me laisser f…
Sofian le poussa violemment contre le mur en lui plaquant ses pokéballs au visage et James poussa un petit couinement de terreur.
— D… D’accord, accepta-t-il en avalant difficilement sa salive.

Sofian sortit discrètement du placard en s’assurant que le couloir était vide et tira James derrière lui.
— Si vous essayez de me manipuler à nouveau, murmura Sofian en le fusillant du regard, je n’hésiterai pas à provoquer un éboulement dans la grotte, quitte à me tuer moi aussi. Je n’ai plus rien à perdre, finalement.
James acquiesça, terrorisé.
— Amenez-moi à l’endroit où ils séquestrent mon Galifeu, ordonna Sofian en le suivant dans le couloir du repère. Et après, vous m’amènerez à Annick et Timmy.
— Annick et Timmy ? s’étonna James, réellement intrigué par l’information que venait de lui donner Sofian. Ils sont ici ?
Sofian plissa les yeux, méfiants, mais d’après l’expression du visage de James, il avait l’air de ne véritablement pas être au courant de la capture de ses deux amis.
— Un instant !
Sofian arrêta la marche.
— Ce couloir… On se dirige vers la sortie.
— La salle où est enfermé Galifeu se trouve… commença James.
Mais c’était trop tard, des bruits de pas retentirent depuis le fond du couloir où se trouvait le hall d’entrée. James se libéra de l’emprise de Sofian qui lui lança un regard profondément meurtrier.
— Vous n’êtes qu’un bon à rien.
En un millième de seconde, des flashs retentirent dans le couloir et le Cacnéa de James apparut face aux trois pokémons de Sofian qui n’en firent qu’une bouchée. Cacnéa fut jeté au sol par les attaques combinées de Balignon, Nirondelle et Écrapince, et il roula aux pieds de son maître.
— C’est trop tard pour toi, sale gosse ! s’exclama James.
— On le tient ! crièrent des voix derrière lui.
Une armée de sbires arrivèrent au pas de course depuis le hall d’entrée, chacun dégainant une pokéball, prêt à abattre Sofian à tout instant. L’adrénaline irrigua chaque partie de son corps, et Sofian trouva la force de décoller ses pieds du sol malgré la terreur et courut dans la direction opposée avec ses pokémons. Mais au bout du couloir, les contours d’un homme se dessinèrent dans l’ombre. L’échange d’un seul regard avec celui qui venait de faire son apparition, un homme grand et mince, lui fit comprendre qu’il se trouvait finalement face à la personne la plus haut-placée du groupe de malfrats, celui qu’ils appelaient tous « Patron » et dont tous semblaient en avoir peur.
Son visage était raide et agressif ; ses cheveux roux, terreux, lui tombaient jusqu’au niveau de ses épaules ; des rides s’étaient creusées dans une peau anormalement blanche ; son regard froid, distant, terrifiant, le toisa et Sofian se paralysa de terreur en plongeant son regard dans les yeux rouges et menaçant du patron de la Team Magma. Ce dernier était calme et souriant, mais Sofian n’avait jamais rien vu de plus dangereux que cet homme serein.
Il n’avait aucune chance de sortir vivant de cet affrontement, aucune.
— Nirondelle, Balignon, Écrapince, hurla-t-il alors, jouant le tout pour le tout, ATTAQUEZ LES MURS !!
Fonçant tête la première, les trois pokémons explosèrent le mur qui se trouvait sur leur gauche et un violent tremblement de terre fit chuter tout le monde au sol alors que la poussière s’élevait dans le couloir. Le sol se fissura tandis que le plafond lâcha. Sofian roula de l’autre côté du mur au moment où le couloir s’effondra sur lui-même derrière lui.

Pokémon #201e
Oubliant la fatigue qui lui rongeait le crâne, mettant de côté la douleur de tous ses membres, Sofian courrait à toute vitesse dans les couloirs terrifiants du repère. Des cris, des hurlements, des ordres,… jamais il n’avait entendu autant de personnes hurler en même temps dans toutes les directions. Ses pokémons autour de lui détruisaient chacune des portes devant lesquelles ils passaient, cherchant à toute hâte un allié, n’importe qui !
Tout à coup, Nirondelle poussa un piaillement terrifiant. Sofian fit volte-face. Ils se trouvaient devant une gigantesque salle aux murs rocailleux, au centre de laquelle seule une table en métal trônait, comme une chambre de torture qui aurait été creusée à même la roche. Contre le mur du fond, écroulé au sol, inconscient, à peine retenu par les bras et les jambes à des chaines métalliques et rouillées, le visage bouffi, les yeux noirs et gonflés, le nez en sang, les joues rouges, les lèvres explosées : Timmy.
— TIMMY ! hurla Sofian d’une voix déchirante.
Trouvant le courage nécessaire pour ne pas défaillir à la vue horrifiante de son ami épuisé par la torture, Sofian entra dans la salle et se jeta sur son ami. Il lui secoua le visage pour le faire reprendre conscience, il ouvrit ses paupières pour chercher un signe de vie, mais le corps de Timmy resta inerte.
— Il faut partir, et vite ! s’exclama Sofian à l’attention de ses pokémons.
Écrapince donna un coup de ses pinces aux chaînes qui retenaient Timmy, et celles-ci cédèrent alors que les pas précipités de la Team Magma s’approchaient dangereusement.
Sofian prit Timmy dans ses bras, comme il l’avait fait avec Galifeu, comme il l’avait toujours fait avec tous ses amis qui étaient tombés pour lui. Mais le poids de Timmy eut raison de son dos et Sofian tomba au sol.
Poussant un hurlement de rage, s’abreuvant de l’énergie de toute la haine qu’il ressentait envers la Team Magma, Sofian arriva à passer outre ses quarante-huit heures sans sommeil, et se releva de plus belle, Timmy dans ses bras.
Il reprit une course difficile dans les couloirs, n’avançant plus bientôt qu’au pas de loup, tandis que la Team Magma l’avait retrouvé, se rapprochait, l’attaquait, l’empêchait d’avancer, le faisait chuter au sol, lui lacérait le dos, lui écrasait les mains pour l’empêcher de se relever.
— Enfin le filet se resserre sur toi, dit John en souriant largement. Cela faisait longtemps que je rêvais d’avoir la peau d’un Match !
Son Grahyèna fit son apparition devant Sofian, étalé au sol, Timmy sur lui, sans énergie, incapable de lever la tête pour faire face à ses ennemis.
— Je ne sais pas pourquoi on s’obstine à vous garder vivants, vu le nombre de soucis que vous nous créez, poursuivit John alors que le calme avait repris dans les rangs de la Team Magma. En tant qu’Administrateur le plus ancien de la Team, j’ordonne votre exécution immédiate ! Il est temps de faire vos adieux, les enfants.
Tout était fini.
— Grahyèna, achève-le.
Le souffle de Grahyena dans son cou. L’haleine putride de la mort.
— STOP !! hurla une femme.
Le cri salvateur.
— Ne les touche pas ! ordonna-t-elle.
— Je n’ai pas d’ordre à recevoir de toi !
— SUR ORDRE DE MONSIEUR MAGMA ! cria-t-elle de plus belle.
John jura à nouveau.
— Le Patron a précisé qu’il les voulait tous les deux vivants !
— Très bien, Sarah. C’est tout ce que « le Patron a précisé » ?
— Emmène-les dans les cellules, ordonna Sarah.
— Très bien, Sarah, répéta John, la voix tremblante. Si c’est tout ce que le Patron a précisé, alors j’imagine qu’on peut éliminer la fille qui les accompagnait en représailles.
Le cœur de Sofian se serra dans sa poitrine. Il leva douloureusement la tête et croisa enfin le regard de marbre de sa sœur. Face à un John enragé, elle ne cilla pas d’un cil, comme prise au piège d’une argumentation qui lui avait échappé. La jeune femme aux cheveux roux attrapa le regard de son frère, et Sofian se laissa retomber au sol, détruit. On le souleva, on le tira, on lui arracha son sac à dos et ses pokéballs, on le bringuebala sans ménagement,…
Derrière une vitre, dans un couloir, la tête à l’envers, le corps maintenu par un sbire, Sofian trouva enfin ce qu’il recherchait activement : Galifeu, inconscient, gisait dans une salle lugubre. Là, tout de suite, il ne pouvait lui venir en aide, lui-même étant capturé, mais à présent, il savait où son pokémon se trouvait et il allait tout faire pour le sauver.
Et on le jeta dans une salle ténébreuse, puant la moisissure.
— Sofian ? TIMMY !
Sofian ouvrit un œil douloureux. Annick était assise au sol, les yeux en larmes.
— Profite de cette seconde magique où tu peux encore voir tes deux amis, ma jolie, dit John en l’arrachant du sol et en la tirant avec lui hors des geôles.
Annick poussa un cri et essaya de se défendre.
— Pardonne-moi, Annick… marmonna Sofian avec le peu de force qu’il lui restait. Pardonne-moi…
À bout de souffle, vidé de toute énergie, Sofian ne put qu’assister, impuissant, à son emprisonnement en compagnie de Timmy, et de Timmy seulement, car John venait d’en extraire une Annick destinée à l’exécution.

Pokémon #201r
À suivre dans : « Doubles jeux »