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Stalhblume de Clafoutis



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Informations

» Auteur : Clafoutis - Voir le profil
» Créé le 24/06/2016 à 06:37
» Dernière mise à jour le 16/07/2016 à 13:49

» Mots-clés :   Absence d'humains   Action   Aventure   Humour   Région inventée

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Partie 4 : Le tour du propriétaire.
Cassis

 Et bien voilà, je savais que je pouvais lui faire confiance. Quelques heures après être parti, Affienns revenait déjà avec toute une ribambelle de représentants de l'alliance des villages du sud !

Au début, ils étaient plutôt méfiants, voire excessivement. C'était impossible de leur faire sortir plus de trois mot, ils analysaient chaque grain de sable, et une armada de Pokémon Vol nous survolait constamment au cas où je les menais droit à un piège.

Heureusement, une fois que le leader du groupe – un sévère Ursaring répondant au nom de Braun – se rendit compte que Wildnis était effectivement mon allié, son expression se dérida enfin et les négociations avaient enfin pu commencer.
Malheureusement, Patch avait interdit à Wildnis de faire trop d'efforts, même intellectuels, par conséquent, je ne pouvais pas compter sur lui pour mener les discussions. Et pour couronner le tout, Affienns avait avancé un « problème de rhumatisme » pour me faire faux bond...

— Tout d'abord, tonna Braun, il me faudrait un rapport complet sur la situation réelle de Wearl.

Je ricanai intérieurement. J'étais seule pour le coup, le retour de karma ? Peut-être. Mais le karma, je savais comment le contrer. Je me souvins soudainement que Wildnis avait non seulement un fils, mais également une femme, Aglaé, qui devait certainement en savoir bien plus sur Wearl que moi.

Je ne l'avais pas encore vraiment vue ; pour une raison qui m'échappait, elle préférait rester dans sa chambre, je ne pensais même pas qu'elle avait déjà rendu visite à Wildnis. Cependant, lorsque je lui avait proposé de me faire un tour du village, elle avait tout de suite accepté avec un grand sourire.

Wearl était un grand village, ça, je ne le savais que trop bien. Un grand château, deux zones rurales, et des plantations entre le dit-château et les dites-zones. Absolument rien à voir avec Herz ou Lugeni.

Aglaé nous mena en premier lieu vers la zone rurale ouest ; malgré que nous étions en plein jour, la zone n'avait de rurale que son nom. Les villageois étaient encore pour la plupart en train de récupérer leur traumatisme au château, même si certains vagabondaient déjà à l'extérieur.

— Ici, il y avait énormément de commerce auparavant, expliqua la Libegon, principalement venant de l'extérieur. C'est un peu triste à voir maintenant vu que tout est fermé, mais vous êtes sur un véritable carrefour culturel ! Beaucoup d'étrangers vivent ici, des marchands d'autres régions qui viennent vendre des produits de leur terre d'origine. On peut trouver littéralement de tout ici, textiles, meubles, bijoux, nourritures, cosmétiques, œuvres d'art...
— Oui, je me souviens avoir moi-même passé beaucoup de temps ici, avoua Braun. C'est même dans une petite boutique du coin que j'ai trouvé ce magnifique verni que je me passe chaque matin sur les griffes !

Ce Ursaring mettait du verni ? Maintenant que je regardais de plus près, il était vrai que ses griffes avait un étrange éclat rose bonbon. Ok, son image de leader autoritaire venait d'en prendre un sacré coup.

— N'est-ce pas ? rayonna Aglaé. On ne soupçonne pas le nombre de trésors fabuleux que l'on peut trouver ici ! Cependant, il faudra du temps pour que les marchands reprennent leur contact extérieur et encore plus pour que touriste reviennent.
— Dès mon retour, je ferais passer le mot à travers tous les villages, acquiesça l'Ursaring. Il faut absolument que ce quartier reprenne son éclat au plus vite, je n'ai presque plus de verni en réserve !
— …, restai-je silencieuse.

Cela commençait à devenir étrange comme discussion, pour me changer les idées, je m'efforçais de détourner le regard ; sauf qu'en se faisant, je remarquais une forme particulière.

— … Morflam ?

Non, je ne me trompais pas, c'était bien notre Roussil nationale qui était là, à se morfondre au beau milieu du chemin.

— Un problème ? le lui demandai-je.
— Un problème ?! répondit-elle en se retournant brutalement. Et comment que j'ai un problème ! Regarde ! Toutes ces échoppes de nourritures ! Fermés ! Fermés ! Fermés !! Qu'y a t-il de plus misérable que cela ?! Tu ne peux pas imaginer mon désarroi ; à chaque fois que je vois une enseigne de restaurant, j'ai mon cœur qui bat à la chamade, le doux fumet de la satiété qui empreinte mon cœur, mon âme qui se berce d'illusions ! Et pourtant, chaque fois, c'est la même chose ; je me rapproche, folle d'espérance, rien que pour constater, Ô cruel destin, des portes impitoyablement scellées ! Et ça ne pouvait pas plus mal tomber, parce que le garde-manger de ma chambre est complètement vide ! Vide ! Vide ! Vide !! C'est étrange, n'est-ce pas ? Ce n'est pas normal, n'est-ce pas ?! Un garde-manger ! Ce qui garde à manger ! S'il n'y a pas de manger dedans, il n'a aucune raison d'exister ! Et le pire du pire du pire du pire, c'est que là, tout de suite, maintenant, j'ai terriblement besoin de me remplir la panse ! Déjà que je stresse à mort à cause du zombi qui continue de me pister dès qu'elle a un temps de libre, mais en plus, y a ce fichu Talos qui en rajoute ! Je lui en ficherais moi, des missions supers importantes et moralement douteuses pour la Guilde ! A cause de lui, je suis en plein dilemme apocalypti-galactico-boulimique ! Je ne sais pas quoi faire, et quand je ne sais pas quoi faire, je dois manger, car c'est la seule chose que je sache faire ! Je n'en peux plus ! Ce ne sont pas des larmes que tu vois couler sur mes joues, mais mon cœur qui fond par petites gouttes !

Braun, Aglaé, et moi restèrent totalement sidérés par cet incroyable déferlement de sentiments sans queue ni tête et étrangement pathétiquement touchant.

— Tu... devrais voir Patch..., réussis-je néanmoins à souffler.

Cependant, Morflam était loin d'être disposée à entendre le son de ma voix. Soudainement, elle bondit nerveusement, me fixant droit dans les yeux, comme si elle venait de se rendre compte de ma présence.

— HIIII ! C-Cassis ?!
— … oui, c'est bien moi, plissai-je des yeux.
— Q-Qu... P-Pourqu... Waaaah ! J'en ai trop diiiiiis !!

Et elle s'enfuit si vite qu'elle disparut instantanément dans un épais nuage de poussière. Franchement, je pensais la connaître depuis le temps, mais elle parvenait toujours à me prendre au dépourvu celle-là...

— Excusez-là, tentai-je de m'expliquer à l'Ursaring perplexe qui m'accompagnait. C'est l'une des nôtres elle... supporte assez mal la faim !
— J-J'ignorais que votre problème de nourriture avait atteint une ampleur telle qu'elle rendît vos coéquipiers fous, hésita t-il. Je comprends mieux votre urgence désormais, comptez sur nous pour vous fournir en nourriture, quitte à réduire drastiquement nos propres réserves ! Nous ne pouvons pas laisser Wearl devenir un village d'aliénés !
— ...hahaha...

Il semblerait néanmoins que l'intervention de Morflam avait réussi à émouvoir notre Ursaring, et dans le bon sens. Qu'est-ce que je disais, cette Roussil était totalement imprévisible !


***

Aglaé nous mena ensuite vers les plantations de baies, avant même de dire le moindre mot, elle se précipita vers un plant visiblement mourant et le caressa avec la plus grande délicatesse.

— L'une de nos fiertés, finit t-elle par soupirer d'une triste voix. Des baies Nutpea.
— Baies Nutpea ? répétai-je. Jamais entendu parler.
— C'est que vous ne devez pas fréquenter les hauts lieux gastronomiques, me chambra Braun. C'est une baie extrêmement rare qui ne pousse que dans des endroits très spécifiques et..
— D'ailleurs, nous surprit une voix derrière nous. Saviez-vous que les Baies Nutpea était bien plus abondantes par le passé ?

Je frissonnai. Ce timbre de voix ridiculement scolaire, c'était indubitablement...

— Artichtote ?!
— En fait, expliqua t-elle en m'ignorant, les Nutpea n'ont absolument aucun goût ; ni sucré, ni épicé, ni sec, ni amère, ni acide. Nos ancêtres pensaient donc plus ou moins légitimement qu'elles étaient totalement inutiles, voire toxiques, et les arrachaient sans ménagements en les remplaçant par des plants de baies plus traditionnels. L'histoire est assez cocasse, car c'est lors d'une tentative d'assassinat que la Nutpea connut son heure de gloire, tout remonte à presque 60 ans, où le Maire d'une ville prestigieuse était tombé gravement malade ; il avait bien sûr une foule de médecins qu'il payait grassement pour l'aider à survivre, mais aucun ne parvenait à stabiliser son état sur le long terme. Cependant, le frère de ce Maire en question attendait avec impatience que la mort ne vînt le chercher ; je ne vous faisais pas un dessin, il voulait prendre la place de Maire sans trop se mouiller. Le vil traître ajouta donc aux médicaments de son frère une huile de Nutpea ; je rappelle qu'à l'époque, il y avait une solide croyance que la Nutpea était toxique. Toutefois, loin de mourir, le Maire reprit miraculeusement ses forces et devint plus fort que jamais ! Ce fut à ce moment-là que les pharamineuses propriétés énergétiques de la Nutpea furent reconnues. Le comble dans l'histoire, c'est que le frère du Maire avoua avoir rajouté l'huile salvatrice dans les médicaments et fut érigé en héros pour service rendu... du moins, pendant une semaine, car très exactement sept jours plus tard, il tenta à nouveau de tuer le Maire, de façon plus traditionnel cette fois, sans plus de succès. Comme quoi, y a des gens qui ont de la chance mais en veulent toujours plus !

D'abord Morflam et maintenant Artichtote qui nous faisait un cours d'histoire improvisé ? Et qu'est-ce qu'elle faisait là au juste ?

— J-J'ignorais que cette baie avait une telle histoire, balbutia Braun.
— Plein de gens l'ignore ! continua Artichtote. Aujourd'hui, elle est surtout très connue dans les grands milieux pour son huile, sa farine et son beurre de très haute qualité, qui ne manquent pas de redonner un bon coup de peps à n'importe quel plat ! C'est tout de même dommage de se dire que si la Nutpea avait été appréciée à sa juste valeur dès le début, elle n'aurait pas connu une telle politique de chasse aux sorcières ! La nature nous donne tout et nous la détruisons, c'est triste. Bon, sinon, c'est tout pour moi. A la base j'étais à la poursuite de Meloet mais quand j'ai entendu parler de la Nutpea, je n'ai pas pu m'empêcher venir vous raconter son incroyable histoire ! A plus tard !

Et notre bonne vieille érudite poursuivit sa route comme si de rien n'était. Donc, si je comprenais bien, on avait eu droit à ce flot de parole uniquement parce qu'elle n'avait pas pu retenir une de ses impulsions ? J'aimais bien Artichtote, vraiment, mais des fois, elle abusait.

— Et dire que ces merveilles sont en train de pourrir sous nos yeux ! s'écria brutalement Braun.

Attendez, c'était moi où il pleurait, là ?

— Non, non, non et non ! Je ne peux pas laisser passer une telle insulte envers la nature restée impunie ! Je vais dépêcher tous nos agriculteurs les plus compétents sur le coup et remettre ce champ à neuf, quitte à vider les nôtres ! Ces baies qui ont traversées l'histoire, ces baies incomprises et martyrisées, et pourtant qui nous ne veulent encore que du bien malgré tout !

Alors là, je ne comprenais plus vraiment ce qu'il se passait, mais j'avais l'intuition qu'étrangement, tout allait pour le mieux ; autant ne pas trop faire de vagues dans ce cas.

— Vous ferez vraiment cela ? s'émerveilla Aglaé. Merci mille fois ! C'est en vendant ses baies Nutpea que Wearl fait sa fortune, sans elles, nous sommes condamnés...
— Ne vous en faites pas madame, l'assura l'Ursaring, vous avez ma parole d'ours ! Je le jure sur mon verni à griffe !

Je commençai sérieusement à avoir mal à la tête. Ce mec avait vraiment un problème avec son verni...


***

Et pour finir, Aglaé nous présenta rapidement la zone rurale est. Elle ressemblait beaucoup à la zone ouest, si ce n'était qu'elle possédait beaucoup moins de boutiques. D'après les explications notre guide, c'était dans cette zone qu'habitait les Wearlois purs et durs, alors que les étrangers préféraient se rassembler dans la zone ouest.

Cette visite aurait normalement dû être très courte, sauf qu'une certaine personne en décida autrement. Une personne qui courait joyeusement en chantant, les yeux fermés, qui vînt se heurter contre Braun.

— Oups ! s'excusa rapidement l'Ursaring. Est-ce que ça...

Je plaquais violemment une main sur mon front. Il ne manquait plus que ça.

— Alalah, j'ai la tête qui touuurne, chantonna une voix fluette.
— M-Mademoiselle ! paniqua Braun. V-Votre tête, elle... est tombée, et elle tourne vraiment ! Q-Qu'ai-je fais ?!
— Ce n'est rien, me dépêchais-je d'intervenir. C'est normal !
— C-C'est normal ? sursauta l'Ursaring. Vous dites que c'est normal qu'une tête se détache de son corps pour faire la toupie ?!

Mmmh, moui, dit comme cela, ça ne semblait pas si normal que ça en fin de compte. Vite, trouver une excuse...

— C'est... ah voilà ! C'est à cause d'Eurasc. Vous savez, la créature qui avait vaincu Wildnis. Cette fille, Meloet, l'a affronté de toutes ses forces et en a gardé les terribles séquelles que voici... son corps a été totalement disloqué dans le combat et ce n'est que par miracle qu'elle est toujours en vie aujourd'hui !
— D-Disloqué ?!
— Oui, malheureusement. Vous voyez ses bandelettes sur son corps ? Ce sont les seules choses qui l'empêchent de tomber en morceau.
— Alalah, pencha innocemment Meloet de la tête. Mais non, ce n'est pas ça, je suis un zomb...

Oups, sans faire exprès, ma mâchoire heurta malencontreusement son crâne comme dans un ballon, l'empêchant malheureusement de terminer sa phrase !

— Je voooole... ! perdura sa voix jusqu'à disparaître dans les nuages.
— Ne l'écoutez pas, continuai-je sans sourciller. Suite à l'incident, elle n'est plus tout à fait elle-même, comme vous pouvez le voir... elle n'a plus toute sa tête !
— L-Le combat a vraiment dû être âpre, se crispa Braun, si l'une de vos coéquipières a dû jusqu'à sacrifier son corps ! Ce Eurasc doit vraiment être un monstre pour avoir infligé un tel châtiment à cette pauvre créature !
— O-Oui, c'était un monstre terrible... !
— L’état de vos blessés doit être tout aussi misérable que celui de cette pauvre Meloet, et vous dites n'avoir qu'une seul médecin ? C'est décidé ! Je vous garantis l'envoi de nos docteurs personnels, immédiatement !
— ...hahaha...

Encore une fois, tout allait pour le mieux. Et puis, je ne mentais pas, Eurasc était véritablement un monstre et je savais aussi que Patch était un peu débordé avec les centaines de patients qu'il avait sous les pattes, la moindre aide serait primordiale.

— … euh, signala cependant Braun en fixant le corps sans tête de Meloet. On peut vraiment la laisser comme ça ?
— Pas de soucie, sa tête fait juste sa petite balade quotidienne dans le ciel, elle va revenir... sûrement ! … euh... et si on retournait au château ?!


***

Pendant le chemin du retour Braun ne dissimulait pas ses émotions, particulièrement intenses.

— J-Je n'arrive pas à y croire, une Roussil rendue folle par la faim, des baies qui risquent de disparaître de la surface du monde, et une de vos amis dont le corps se détache ! Au nom de toute l'amitié que j'ai envers Wearl et Wildnis, je ne peux rester les pattes croisés. Je comprends parfaitement la situation désastreuse dans laquelle vous vous trouvez, et je le répète, les villages du sud vous accordera tout leur soutien. Wearl brillera à nouveau, je le jure sur mon verni à griffe !

Il devait vraiment y tenir à son verni à griffe celui-là. Bah, tant qu'il nous aidait, il ne devrait pas avoir trop de problème ; normalement. Finalement, mes appréhensions étaient infondés, tout s'était très bien passé.

Alors que le château s'approchait de plus en plus, je remarquais qu'Aglaé ralentissait le pas, semblant soucieuse.

— Aglaé ? me retournai-je.
— … excusez-moi, j'ai à faire quelque part, continuez sans moi !


____________________

Aglaé

 Je m'éloignai doucement, et une fois que Stalhblume et Braun furent assez loin, je me mis à courir. Aaah, je ne remercierais jamais assez Stalhblume de m'avoir donnée l'opportunité de sortir du château ! J'aurais pu le faire bien avant, cependant, je n'arrivais pas me décider à sauter le pas seule.

Depuis une semaine, je passais mon temps à faire les cent pas dans ma chambre, mal à l'aise. Bien sûr, j'étais extrêmement heureuse d'être enfin libérée d'Eurasc, surtout car mon fils pouvait enfin retrouver une vie normale et ça, c'était la plus merveilleuse chose qu'il pouvait arriver.

Gaïan n'était qu'un enfant innocent, il n'aurait jamais dû connaître une vie derrière les barreaux. Il avait même déjà vu des Pokémon mourir sous ses yeux, j'ai tout fait pour édulcorer la réalité, allant même jusqu'à faire passer la mort pour un simple et doux sommeil, mais je voyais bien que mon fis n'était pas dupe.

Désormais, tout était fini. Eurasc était parti, Wildnis était revenu, vainqueur et Wearl renaissait petit à petit de ces cendres. Bien que Stalhblume avait prit les rênes du village, elle semblait nous respecter, en plus d'être une ancienne élève de Königeld, l'ancien maître d'arme de mon mari. Bref, rien de quoi s'inquiéter.

Sauf que j'avais honte. Pendant ma période de captivité, j'ai pu goûter à une chose dont je n'avais plus eu accès depuis bien longtemps : la liberté. Ironique, n'est-ce pas ? J'étais dans une prison, mais j'étais libre. Mais à bien y réfléchir, qu'est-ce que cela changeait, que je fus ou non derrière les barreaux ? J'ai toujours été en prison, depuis ma naissance.

Une inébranlable tradition régissait Wearl depuis sa création ; le village doit être gouverné par un Libégon. Or, notre espèce, que l'on appelait l'esprit du désert, était très rare. Si rare qu'il était souvent difficile pour que le Maire ne trouvât une femme.

Voilà où je voulais en venir. Avant même que Wildnis ne succédât à son père, j'étais déjà promise à lui. Je n'avais pas le choix ; je devais être la reine du désert. J'avais dû quitter ma famille pour vivre au château et m'entraîner à ma future vie d'épouse. Je n'avais plus aucun droit, que des devoirs. Passer du temps à la bibliothèque pour apprendre l'histoire du village et de la famille de Wildnis, maîtriser l'art gastronomique, incorporer les gestes « nobles »...

Et soudain, pendant cette vie réglée comme du papier à musique, il arriva. Eurasc. Je me souviendrais toujours de ce jour, ce jour où Wearl, ce village qui m'avait tout pris, brûla. Wildnis avait été défait et chassé, les plus hautes pontes du château n'avaient pas pu supporter cette humiliation et s'étaient enfuies. Il ne restait plus rien de Wearl.

Jamais je n'avais ressenti une satisfaction aussi intense. Et en même temps, ma honte me consommait. Comment pouvais-je être contente de voir mon village natale brûler ? Alors que des Pokémon mourraient ? Alors que mon fils vivait l'enfer ? Je savais que je ne devais pas, cependant, c'était plus fort que moi ; j'avais beau me retenir, mon sourire ne voulait disparaître.

Et désormais que Wildnis avait repris conscience, j'avais peur ; peur de retrouver ma fichue vie de prisonnière. Bien sûr, je savais qu'il m'aimait sincèrement, je le voyais bien dans son attitude, dans ses yeux. Mais justement, dans ces yeux, dans ces yeux si tendres et si doux, je ne pouvais m'empêcher de voir un reflet. Mon reflet. Le reflet d'une épouse servile et sans volonté...