Les chasseurs de l'ombre de Malak

Lilura commença en utilisant la mini-mitrailleuse intégrée dans le corps de Beebear. Acheros se contenta de se protéger le visage avec son bras, et les balles rebondirent sur le reste de son corps. Sans doute devait-il porter une armure intégrale. Il fonça vers Lilura, tout en gardant son bras devant. Sa course semblait inarrêtable, mais Lilura ne bougea pas. Dès qu'il fut à porté, elle activa un autre mécanisme de son ours en peluche. L'un de ses bras jaillit comme une missile, avec une propulsion si puissante qu'elle repoussa Acheros jusqu'au mur de gravats. Puis elle activa son lance-grenade pour en jeter une sur l'assassin avant qu'il ne se relève.

Lilura arrivait à se souvenir des mécanismes d'enclenchements sur la peluche sans trop de difficulté. Elle adorait cette arme multifonction, qui en plus se trouvait être son plus ancien ami, même si c'était une peluche. Pour se donner plus de style, il lui faudrait trouver des noms pour chacune de ces attaques. Il fallait qu'elle y réfléchisse. Mais pour le moment, elle avait d'autre chose à penser. Comme Acheros furieux qui chargeait vers elle, sa petite partie de visage visible en sang à cause de l'explosion. Lilura prit appui sur le mur de derrière pour sauter au dessus de lui et le bombarder à nouveau de tirs de mitraillettes vers le haut. Encore une fois, aucune balle ne toucha de point sensible, et quand Lilura retomba sur ses pieds, Acheros lança sur elle une chaîne de métal tout droit sortie de son gantelet géant.

Lilura avait le choix. Rester enchaînée, ou lâcher Beebear pour se dégager. La réponse était toute trouvée. Elle resta enchaînée, bien sûr. Mais elle parvint à activer le lance-flamme caché en Beebear et le diriger vers Acheros. L'assassin ne bougea pas, sa silhouette sombre et géante envahit par les flammes. Quand Lilura cessa, le manteau d'Acheros avait disparu sous l'action du feu, révélant l'armure métallique intégrale et sinistre qui recouvrait l'ensemble de son corps. La moitié de son visage à découvert, elle, était gravement brûlée, avec des cloques horribles, mais Acheros semblait n'en avoir rien à faire.

- C'est pas vrai... T'es une machine ou quoi ?! L'apostropha la jeune fille.

- Pour Orohydrus... Pour la retrouver... Tuer... traître... Oui... Non...

- Il est vraiment pas clean dans sa tête celui-là, pas vrai Beebear ?

L'ours en peluche ne répondit pas. Avec un cri guttural, Acheros repassa à l'attaque, en tirant sur la chaîne et en entraînant Lilura vers lui. Celle-ci ne résista pas ; de toute façon, ça n'aurait servi à rien. Au contraire, elle fonça d'elle-même vers son ennemi, de telle sorte qu'il y ait plus de leste sur la chaîne. Acheros ne s'attendait pas visiblement à ça, et pensant que Lilura allait sortir une autre arme de sa peluche, il leva ses bras blindés à la fois pour se défendre et attaquer.

Lilura sortit bien une arme de Beebear, mais elle ne l'utilisa pas sur Acheros. C'était un grappin qui s'accrocha à l'autre extrémité du couloir et qui entraîna Lilura avec lui. Il fallait qu'elle se déplace. Le terrain l'avantageait, et un gros balourd comme Acheros aurait du mal à l'attraper et s'épuiserait pour ça. Mais s'esquiver ne lui ferait pas gagner ce combat. Elle devait trouver comment toucher ce type. Elle empoigna le petit poignard qu'elle conservait toujours, et attendit qu'Acheros se lance à sa poursuite pour activer le second grappin de Beebear, celui qui partait dans le sens inverse. Elle arriva donc à toute vitesse vers un Acheros qui lui aussi allait vers elle, sans se douter de rien. Quand il la vit arriver, il interrompit sa course, mais trop tard. Lilura, grâce à son élan et sa force, venait de lui planter le couteau dans le vendre. Bon, la lame n'était pas bien grande, mais au moins avait-elle réussi à le blesser un minimum.

Sauf que bien sûr, en retour, Acheros lui décocha un coup au visage qui manqua lui faire perdre connaissance. En dépit de la terrible douleur et du choc qui l'avait sonné, elle se dépêcha de rouler sur le coté avant qu'Acheros, qui avait sauté, ne l'écrase sous son poids. Elle n'avait toujours pas lâché son Beebear, et tira à même le sol le second bras-missile de sa peluche. Acheros fut touché au menton et envoyé au sol. Tout en se relevant avec difficulté alors que la tête lui tournait, Lilura espéra lui avoir brisé la nuque ou un truc comme ça, mais Acheros finit par se relever lui aussi.

Lilura était embêtée. Beebear était vidé. Plus de balles de mitrailleuses. Plus de carburant pour le lance-flamme. Plus de grenade, et enfin plus de bras. Il lui restait certes son canon à antimatière autorechargeur qui avait la puissance d'une attaque Ultralaser, mais utiliser ça dans ce couloir exigu, c'était courir le risque de se faire atomiser par le choc de l'explosion ou ensevelir. Et Lilura n'était même pas certaine que ça vienne à bout d'Acheros, avec sa lourde armure et son incroyable vigueur.

Mais tant pis. Elle devait tenter le tout pour le tout. Elle n'avait rien d'autre, et ne pouvait pas fuir. Quant au combat au corps à corps, il n'aurait servi à rien, si ce n'était à se briser les os des mains sur l'armure de l'assassin. Lilura activa donc l'arme ultime de Beebear, dont le canon lui sorti par la bouche. Acheros s'arrêta net, ayant sans doute senti qu'il y avait danger. Un rictus diabolique se peignit sur le visage de Lilura.

- Essaies de résister à ça, mon grand.

Puis le nom de son attaque lui vint, aussi spontané que ridicule.

- SUPER BEEBEAR ATTACK GIGA WHITE ZERO CANON MARK VII !

Le laser envahit tout le couloir et propulsa Acheros jusqu'au bout avant d'exploser. De l'autre coté, Lilura aussi avait fait un joli vol plané, repoussée en arrière par la violence du tir. Quand elle heurta les débris derrière elle, elle eut l'impression que son dos fut broyé, comme quand Dazen l'avait envoyé voler d'un bout à l'autre de la base il y a quelques années. Heureusement, bien que fragilisé, le plafond ne s'écroula pas. Lilura resta un moment immobile pour faire le point sur son corps. Elle sentait tous ses membres ; ils étaient très douloureux. Bon signe. Elle ne toussait pas de sang. Autre bon signe. Par contre ses côtes souffraient le martyr, et elle ne pouvait empêcher ses bras de trembler.

Après cette terrible explosion, il régnait un calme très lourd dans ce couloir. Par contre, Lilura entendit derrière elle, en provenance de la grande salle, un rugissement bestial inhumain qui lui donna la chair de poule. Lilura espérait se tromper, mais elle avait une idée de ce que c'était. Et si c'était le cas, les autres avait besoin d'elle. Mais elle ne pouvait pas partir sans avoir vérifié la mort de son adversaire. Une des premières leçons dans le métier d'assassin que lui avait inculpé le chef Dazen.

Comme elle s'y attendait, Acheros était encore entier. Il ne s'était pas transformé en atomes ou en bloc de chairs carbonisés comme tout le monde l'aurait fait face à cette attaque. En revanche, son armure était détruite, et une grande partie de son corps brûlé au premier degrés. Bien que Lilura entendait sa respiration et ses gémissements, elle savait qu'il ne survivrait pas longtemps. Entre temps, il souffrirait comme personne. Lilura songea d'abord à le laisser agoniser dans la douleur, mais elle revint bien vite sur cette idée. C'était digne d'un malade comme Kenda ça. Le chef Dazen lui avait toujours dit de ne jamais jouer avec ses cibles, et de les tuer proprement.

Elle le retourna sur le dos pour l'achever d'un coup de couteau en pleine gorge. Mais avant d'abattre sa lame, elle s'arrêta un instant sur ce visage tuméfié. Il était méconnaissable. Mais pas assez pour Lilura. En dépit des brûlures et du changement, elle le reconnut, et eut l'impression que son monde s'écroulait une fois de plus. Elle tomba à genoux.

- P-Papa ?


***


Les Shadow Hunters s'étaient regroupés, au moment où la piscine de sang déborda et aspergea tout le monde, tandis que quelque chose d'énorme en sortait. Ce fut d'abord une tête violette, puis deux, puis trois, jusqu'à huit. Puis un corps rampant, terminé par une queue. Huit tête, huit paires de crocs rouges suintant de poison, une armure semblable à celle des samouraï d'antan... Orohydrus, le Vengeur de la Mort, le Dieu Tueur, venait de ressusciter.

Il devait faire dans les dix mètres, et chacune de ses têtes bougeaient de façon autonome. Sans doute devait-il avoir huit cerveaux également. Dazen avait eu l'occasion de faire des recherches sur ce Pokemon antique et connu que d'un petit nombre de gens. Il était mentionné à l'origine dans les légendes des pays de l'Est, durant leur époque médiévale, où les histoires et contes sur les fameux ninja étaient monnaie courante. Orohydrus faisait parti d'un trio de Pokemon légendaires qui étaient les divinités de ce peuple de l'ombre, vénérant les arts martiaux et au code d'honneur très strict. Tandis que les deux autres incarnaient le coté positif des religions locales, Orohydrus était la représentation du mal sous sa forme la plus pure.

Son mythe a évolué, voyageait de région en région dans le monde, jusqu'à devenir le dieu des assassins. Bien que les faits officiels doutaient de son existence, plusieurs histoires voulaient qu'il soit responsable du quasi-génocide de l'an 1238 sur près de la moitié du globe. À l'époque, et durant près d'une année, les humains s'étaient mis à tuer d'autre humains sans raison, et les Pokemon se dévoraient entre eux. Orohydrus, qui inspirait le meurtre partout où il passait, aurait été le responsable. Les légendes attribuent sa défaite à l'intervention des deux autres Pokemon mythiques provenant des légendes ninjas.

Quoi qu'il en soit, bien que mort, le nom d'Orohydrus avait continué à inspirer des générations d'assassin, jusqu'à qu'une secte soit montée en son nom. Dazen ignorait comment Yisho avait deviné la façon de ressusciter son dieu, mais il était là désormais, devant lui. Le Dieu Serpent à huit têtes, qui s'abreuvait du sang de ses victimes.

- Ciel, voici un Pokemon qui n'est pas très beau... commenta Od.

Comme si Orohydrus avait saisi l'insulte, deux de ses têtes se tournèrent vers l'adolescent. Une cracha un jet de venin, et l'autre chargea en faisant claquer ses crocs. Une attaque Bomb-Beurk et Mâchouille. De toute évidence, le type d'Orohydrus devait être Poison/Ténèbres. Od évita l'attaque poison en sautant juste sur la tête qui menaçait de le dévorer. Il déploya son nunchaku à son maximum pour l'enrouler autour du long coup. Puis, en ressautant par terre, il changea la composition de la chaîne de son arme, qui se mit à pénétrer la peau du Pokemon en fumant. Quand Od toucha le sol des pieds, une des têtes avaient été arraché.

- Hop. Une de moins. Ah la la, comme je suis beau...

Mais la tête découpée perdit de sa substance et sembla se décomposer en sang. Après qu'elle ait entièrement disparue, une nouvelle tête sur le cou décapité d'Orohydrus.

- Euh...

- Ce Pokemon est immortel, leur expliqua Dazen à tous. Tant qu'il lui reste une tête, il peut régénérer n'importe quelle partie de son corps. Selon la légende, le seul moyen de le tuer, c'est de...

- ...lui couper les huit têtes en même temps, compléta Trefens en esquivant une attaque Vibrobscur qui se dégagea du corps entier d'Orohydrus.

- Mais nous ne sommes que cinq... dit Ujianie.

- Sept les gars. Vous nous avez oublié, gné ?

Les deux ex-Fratex, Two-Goldguns et Kenda, venaient d'arriver, apparemment amochés par leur combat mais prêts à en découdre.

- Maintenant qu'on a trahi le Cercle Rouge, on ne peut plus revenir en arrière, gné. C'est soit buter ce foutu dieu de mes deux, soit se faire bouffer par lui.

- N'empêche, quel Pokemon fabuleux, renchérit Kenda. Il peut faire repousser ses têtes ! Ah, il doit être le rêve de tout tortionnaire qui se respecte... Car c'est marrant de couper les têtes, mais après ce qui est chiant, c'est qu'on doit changer de gars...

Dazen lança un regard interrogatif en direction de Trefens. Celui-ci haussa les épaules.

- Ils sont de notre coté, apparemment. Ils nous ont aidé contre les autres Fratex, et Lilura semblent les connaître.

- On ne fait pas ça gratos les gens, gné, dit Two-Goldguns en chargeant ses pistolets. On veut un nouveau job ayant un rapport avec nos compétences.

- Un boulot où tuer et faire souffrir est la règle d'or, précisa Kenda.

- On pourra sans doute s'arranger, dit Dazen. Votre aide est la bienvenue.

Orohydrus n'avait apparemment pas l'amabilité de les laisser discuter tranquillement. Il attaqua dans plusieurs directions à la fois, détruisant les murs et les colonnes ou les faisant fondre sous son venin acide. Les Shadow Hunters se dispersèrent rapidement, certain, comme Trefens, se payant le luxe de contre attaquer. À la fin de l'assaut, Orohydrus avait perdu deux têtes, qui bien sûr repoussèrent rapidement.

- On a beau être sept, il y a huit têtes, leur rappela Ujianie en se tenant au sommet d'une colonne.

- Pas de souci, renchérit Dazen. Je peux facilement me charger de deux têtes à la fois. Comptez tous une minute dans votre tête. À la seconde où le temps est écoulé, tout le monde devra trancher sa tête. C'est clair ?

Personne ne répondit, car ce n'était pas nécessaire. Ils étaient des assassins expérimentés et puissants. Même face à leur soi-disant dieu, ils n'avaient aucune peur. Aucun doute. Ils se regroupèrent et regardèrent leur ennemi de face. Ils le répudiaient. Car s'ils étaient des assassins, ils étaient libres. Libres de tuer ou de ne pas tuer. Libre de choisir leur cible. Libre de leur code d'honneur, souvent différents d'un à l'autre. Et Orohydrus prétendait leur enlever cette liberté. Il voulait d'un monde de meurtre désorganisés et sans raison. Et eux, ils ne tueraient pas pour lui. Ils tueraient dans l'ombre, ils chasseraient dans les ténèbres. Car ils étaient les Shadow Hunters.

- C'est parti, les gars, fit Dazen.

Les sept assassins se dispersèrent aussitôt, chacun ayant choisi leur tête. Ils utilisèrent tout l'espace de la salle pour sauter et courir en esquivant les attaques spéciales d'Orohydrus, afin de cerner ses mouvements. Oui, le fait qu'il ait huit têtes couvrant une large zone grâce était un avantage, mais devenait aussi un inconvénient quand il s'agissait de suivre tout le monde à la fois. Plus d'une fois, une tête en cogna une autre ou s'emmêla avec un autre cou.

Ses attaques étaient facile à esquiver pour eux, mais son poison acide ne disparaissait pas une fois tiré, et commençait à envahir toute la salle. Les Shadow Hunters risquaient un peu de plus que glisser si jamais ils s'avisaient d'y marcher dessus, et leur marge de manœuvre se réduisait peu à peu. Mais la minute écoulée. Trefens prépara son katana. Couper une de ces têtes fut tellement facile pour lui qu'il pouvait le faire tout en regardant comment les autres s'y prenaient. Od utilisa la même manière que pour la dernière, en enroulant son nunchaku autour et en faisant surchauffer le métal de la chaîne pour qu'il passe au travers de la chair.

Ujianie utilisa deux poignards et sa vitesse folle pour carrément se creuser un chemin dans la gorge, puis en étirant ses bras, elle trancha tout autour. Kenda fit un truc similaire, mais avec un seul couteau, énorme et à la lame ondulée, qui tranchait la chair comme si c'était du beure réchauffé. Furen se servit de sa simple force brute, en comprimant le cou à son maximum avant de l'arracher avec ses mains. Two-Goldguns mitrailla la base du cou avec ses pistolets, chaque impacts tout à coté du dernier, à une vitesse folle et avec une précision irréelle. Mais le plus impressionnant fut bien évidement le chef. Il donna un coup de pied sur l'une des têtes. Ce simple geste suffit à faire voler la face reptilienne avec une force démesurée, et cette dernière alla percuter la seconde, qui à son tour fut arrachée sous l'impact. Effrayant. Toutes les têtes coupées, les Shadow Hunters se regroupèrent, observant le monstre qui bougeait sporadiquement et à l'aveuglette.

- Eh bien, c'était facile, gné, commenta Two-Goldguns.

- Piètre dieu, dit Kenda. En quoi aurait-il mérité mon adoration ?

Mais le corps d'Orohydrus ne cessa pas de bouger. Ses huit cous tranchés se rejoignirent en un seul, d'où sorti une dernière tête, bien plus longue, énorme et effrayante que les précédentes. Et ce n'était pas tout. Des bras lui sortirent du corps, et le sang de la piscine fut aspirée entre ses mains jusqu'à prendre une forme. Celle de deux épées rouges aux lames recourbés. Orohydrus ouvrit grand la gueule, et une voix sifflante et sourde résonna à travers l'immense salle.

- Missssérables ! Il vous est impossssssible de m'arrêter. Je ne vous laisssssserai pas gâcher mon retour en ce monde que je m'apprête à déchirer ! Je sssssssuis Orohydrus ! Je répands a mort plus vite que perssssssone.

Dazen le regarda calmement, en tirant sur son cigare.

- Pas plus vite que nous. Nous sommes les Shadow Hunters. Toi, tu es une relique du passé. Le monopole du meurtre ne t'appartient plus. Tes adorateurs sont finis. Et nous ferons en sorte que ton nom soit à jamais oublié.

- Je sssssssuis immortel ! Perssssssonne ne va m'oublier !

- Immortel tu dis ? Dans ce cas, on va te hacher en des morceaux si petits que tu ne pourras plus rien faire.


***


Lilura était restée figée devant le visage délabré de son père. Pourquoi ? Comment cela se faisait-il ? Tomas Noes... était un pauvre fermier d'un village paumé ! Comment aurait-il pu être le plus terrible assassin du Cercle Rouge ?! Ça n'avait aucun sens !

- Lilura... gémit le mourant.

Cette dernière sursauta. Ce n'était plus la grosse voix d'Acheros, mais bien celle, douce, que Lilura entendait encore parfois dans ses rêves.

- C'était bien toi... toi... Oh Arceus, qu'ai-je fait ?!

- Vous... Etes-vous bien mon père ?

- Je t'ai tant cherché... Et maintenant, j'ai l'impression de me réveiller d'un cauchemar sans fin. Je... te voyais devant moi, j'entendais ta voix, mais... je ne pouvais rien faire ! J'ai vendu mon âme au démon ! Pourquoi ? Arceus de miséricorde...

Lilura n'eut aucun mal à remonter les événements. En souhaitant la retrouver, son père était allé jusqu'à demander de l'aide au Cercle Rouge, qui disposait de moyens que n'avait pas la police. Mais Dazen lui avait raconté ce qui arrivait à ceux qui souhaitait de l'aide d'Orohydrus. En échange, ils donnaient leurs âmes, et devenaient les pantins de la volonté d'Orohydrus.

- Je sens que son emprise s'estompe, continua faiblement Tomas. Elle disparaît. Lui aussi, il disparaît de ma tête... Et je peux te revoir... Est-ce un cadeau du Créateur ? Pourtant, je ne le mérite pas.

La main de Tomas Noes chercha celle de sa fille. Lilura prit, tremblante, les doigts décharnés de son père.

- Je suis heureux maintenant... Je suis en paix. Comme tu es devenue belle, ma fille, et forte... Dis-moi... Es-tu heureuse toi ?

Lilura embrassa son père sur le front puis mis le tranchant de sa main au dessus de sa gorge.

- Non papa. Mais je vais le devenir.

Puis elle abaissa le bras d'un coup sec et décidé. Cinq minutes plus tard, les Shadow Hunters dégagèrent le couloir, laissant derrière eux dans la grande salle un véritable carnage. Des morceaux de chairs éparpillées partout, qui pourtant bougeaient encore. Ils trouvèrent Lilura à genoux devant le corps d'Acheros. Bien qu'y étant préparé, la revoir fut un choc pour Dazen. Il était à la fois heureux, et fier.

- Alors gamine, tu as trouvé ce que tu voulais en rejoignant le Cercle Rouge ?

Lilura essuya ses larmes et regarda son père.

- Oui je crois. J'en ai fini maintenant.

- Pas encore. Il faut détruire cet endroit et brûler ce qui reste d'Orohydrus pour le bannir à jamais de ce monde. Tu veux t'en charger ? Un cadeau d'adieux pour ce qu'il a pu te faire ?

Lilura eut un sourire.

- Je croyais qu'un Shadow Hunter devait toujours tuer de façon professionnelle, sans sentiment.

- Tu es sûre d'être un Shadow Hunter ?

- C'est-ce que j'ai trouvé en venant ici. La réponse à cette question. Et c'est oui. Enfin, si vous voulez encore de moi...

Dazen haussa les épaules et montra Two-Goldguns et Kenda du doigt.

- Bah, de toute façon, on allait prendre ces deux là. Un reconverti du Cercle de plus ou de moins, ça change quoi ?


***


Lilura était fin prête. Le chef l'avait enfermé dans cette cuve de verre, avec à l'intérieur cet étrange Pokemon. Il était petit, marron, des yeux verticaux d'un bleu électrique, et des mains à quatre doigts. Un Fanexian. Tel est le nom que Dazen lui avait donné, à lui et aux deux autres qu'il possédait. C'était des Pokemon extraterrestres, qui produisait une enzyme spéciale appelée Fanex. Et c'était grâce à cette enzyme que les Shadow Hunters existaient. Quand elle entrait dans un corps humains, elle en modifiait l'ADN pour augmenter de façon prodigieuse la force et la vitesse.

Enfin, si seulement la personne survivait, ce qui n'était pas donné à tout le monde. La transformation était énormément douloureuse, et pouvait être fatale. Pour réussi, la personne devait posséder une volonté en acier et avoir longtemps préparer son corps à l'acquisition de plus en plus de force. Et même si elle survivait, il fallait après contrôler cette nouvelle force physique, au cours d'un entrainement tout aussi mortel. Mais Lilura était confiante. Elle allait s'en sortir. De même que Two-Goldguns et Kenda qui allaient subir l'épreuve en même temps qu'elle. Si le Cercle Rouge avait eu un seul effet bénéfique, c'était bien l'entraînement et la discipline qu'il leur avait fourni. Lilura allait vaincre son propre corps, puis elle allait domestiquer sa nouvelle puissance.

Après, elle ne pouvait pas dire avec certitude de quoi serait fait sa vie. Elle continuerai à tuer sans doute. Si elle avait échappé à l'emprise d'Orohydrus, elle ne pouvait pas échapper à son moi profond. Mais elle le ferai avec ses nouveaux camarades, son ami Trefens et son chef Dazen, qui valait autant qu'un père. Et puis avec Beebear aussi. Assassin n'était pas un métier facile. On pouvait toujours tomber sur plus fort que soi. Mais Lilura et les autres allaient affronter ces épreuves, ensemble. Ils chasseraient avec les ombres, car tel était leur mode de vie.

Après tout, ils étaient les Shadow Hunters.