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Chroniques des Donjons Mystère, Tome I : Timeout de Sanaito



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Informations

» Auteur : Sanaito - Voir le profil
» Créé le 02/09/2015 à 06:47
» Dernière mise à jour le 02/09/2015 à 06:47

» Mots-clés :   Aventure   Drame   Présence de personnages du jeu vidéo   Suspense

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[S2] Chapitre XLIX : Faible
_______Tu sais, ce n'est pas en le fixant avec des yeux de merlan frit qu'il va se réveiller plus vite, hein, pense à te reposer, murmura la voix rauque de Cresselia.

_______... Ta gueule ? suggéra ironiquement sa sœur de type, qui ne détourna pas le regard de la couche de Damon.


_____La nymphe lunaire poussa un petit soupir, n'ayant pas vraiment l'énergie de s'énerver ni l'envie de réveiller les gens au milieu de la nuit. Déjà que sa sale habitude de se foutre de tout le monde en toute circonstance avait eu du mal à revenir cette fois, il ne fallait pas non plus trop tirer sur la corde. Elle n'était pas au top, ça, c'est clair. Elle avait des souvenirs flous de son combat contre Artikodin. Ça lui revenait peu à peu, comme si sa mémoire était également en convalescence. Ce dont elle se rappelait dans l'immédiat ne l'aidait pas à comprendre comment elle avait pu perdre.

_____Ça avait pourtant bien commencé, le combat s'était engagé en sa faveur malgré les conditions climatiques monstrueuses imposées par l'oiseau polaire. La lutte aérienne était acharnée, ponctuée d'attaques Psy et Glace, d'esquives millimétrées, de coups en traître et de mouvements magistraux. L'air semblait saturer de puissance lors de cette bataille de légende.

_____Et elle avait ouvert les yeux ici. Diminuée. Enveloppée dans des couvertures qui lui donnaient l'impression d'être un Blindalys. Une bouillotte coincée entre les épaisseurs. Elle avait des bandages presque partout et l'odeur qui s'en dégageait lui montait à la tête. Tête d'ailleurs douloureuse, surtout quand elle a voulu la redresser pour voir autre chose qu'un plafond de cristal – elle avait compris ensuite qu'en réalité elle était au cœur d'un glacier.

_____Gardevoir avait remarqué son réveil et patiemment, tout en lui prodiguant de nouveaux soins, elle lui avait expliqué la situation ; d'après les témoignages d'Évoli, Raichu et Porygon-Z – ces deux derniers ayant repris conscience bien plus tôt, à peine le lendemain de leur retour –, elle était déjà hors d'état de se battre à leur arrivée, piégée par une attaque Glaciation. Ensuite ils ont eux-mêmes dû affronter le terrible seigneur de l'Île Blizzard, mais ont essuyé une défaite cuisante. Pour la suite, tout le monde avait été ramené ici par une mystérieuse humaine capable de se téléporter. L'oiselle était grièvement blessée et en état d'hypothermie. Elle était restée dans le coma pendant trois jours.

_____Au total, presque une semaine s'était écoulée depuis leur sauvetage par cette étrange personne. Il ne restait plus qu'un membre du groupe dont la santé demeurait trop faible pour qu'il soit capable de reprendre conscience. Pourtant son corps récupérait, lentement mais indéniablement. Mais comme le craignait la doctoresse, psychiquement, il était instable, comme bloqué dans un sommeil agité, épuisant. Elle ne faisait pas ce commentaire à voix haute bien sûr, mais elle avait l'impression que sa propre capacité spéciale se retournait contre lui et lui faisait subir d'horribles cauchemars. Et ses connaissances médicales étaient impuissantes à ce sujet.


_______Tu ne peux rien faire pour le soulager je présume... chuchota-t-elle à l'intention de l'espionne.

_______Franchement, vu ma faiblesse, tu crois que j'ai envie de faire l'effort de protéger quiconque de ses mauvais rêves ? De toute façon même si je m'arrachais toutes les plumes pour lui, ça ne fonctionnerait pas. Réfléchis... répondit-elle en grognant.


_____« Je vois... Un Cresselia voulant protéger un Darkrai de ses démons intérieurs, c'est comme vouloir éclairer un trou noir, je présume... » songea la Pokémon médecin.


_____Elle observait toujours le jeune homme qui n'avait pas bougé d'un cil, respirant lentement. Son organisme répondait favorablement aux différents traitements naturels et la transfusion sanguine improvisée s'était bien passée, mais en revanche son aura était torturée, en permanence. Blanche et noire. Et il n'y avait rien à faire.


_______Inutile de te ronger les sangs. Il en a vu d'autres, il s'en sortira. C'est entre lui et lui... marmonna l'asgo.


_____Gardevoir décela un fort double-sens dans les paroles de sa compagne, mais préféra se taire. Elle n'était pas d'humeur à jouer les détectives au risque de découvrir des choses déplaisantes. Son moral était suffisamment miné à son goût.



_____Damon était plus que dans un simple cauchemar ou dans un rêve lucide. Il était littéralement entré dans une autre facette de son inconscient. Une facette qui matérialisait autour de lui une grande étendue vide, sombre, avec un simple canapé de cuir blanc au milieu. Enfin, il ne saurait dire s'il est vraiment au milieu, car rien ne délimitait l'espace. Pas de murs, pas de plafond, pas d'horizon. Et sous ses pieds, bien qu'il ait l'impression d'être debout sur un sol, il n'y avait encore une fois que le néant.


_______Tu serais mort sans moi.


_____Assis sur le canapé comme s'il avait toujours été là, son Ombre le fixait d'un œil saphir empli de dégoût. Quand la première personnalité voulut prendre la parole – et loin de lui l'intention de le remercier –, elle s'aperçut qu'elle était tétanisée au point de ne plus pouvoir entrouvrir les lèvres ou même cligner des yeux.


_______Tu es inutile, reprit son double sans détourner son regard méprisant de son corps pétrifié.


_____Pouvait-on seulement appeler ça un corps alors qu'il était dans son inconscient ? Même s'il ne s'agissait qu'une représentation illusoire de son enveloppe charnelle, les sensations paraissaient plus que réelles. Il avait même l'impression que ses yeux s'asséchaient à cause de l'immobilité de ses paupières.


_______Saisis-tu à quel point à n'importe quel moment, je peux décider de prendre le dessus ?


_____Nonchalante, l'Ombre se lève, dédaigneuse.


_______Comprends-tu pourquoi il m'est si facile de te dévorer à petit feu ?


_____D'un pas volontairement lent, tel un prédateur jouant avec sa proie, son démon intérieur s'approche, chacun de ses pas ponctuant ses paroles de plus en plus mesurées, adoucies, tandis qu'un petit sourire étirait ses lèvres.


_______Te rends-tu compte que je vais bientôt t'écraser… te balayer … t'éradiquer… te pulvériser ?…


_____Ils sont l'un face à l'autre, avec la même posture droite et fière – même si l'un des deux y est contraint –, dans un jeu du miroir presque parfait, si l'on excepte leurs yeux aux différentes teintes, et leurs expressions radicalement opposées. Sa part obscure s'exprimait à présent si bas qu'il fallait tendre l'oreille pour comprendre :


_______Je vais réduire à néant la moindre parcelle de ton existence, et tu sais pourquoi ?…


_____Et alors que son captif aux les lèvres scellées se contentait de le fusiller du regard tout le long de sa tirade, il reçut soudainement le genou de son doppelgänger dans l'estomac et se plia en deux. Toujours incapable de se défendre, il s'affaissa et son agresseur s'acharna sur son corps inanimé, le piétinant allègrement tout en répétant en boucle, déchaîné :


_______Tu es faible, tu es FAIBLE, TU ES FAIBLE TU ES FAIBLE TU ES FAIBLE FAIBLE FAIBLE FAIBLE FAIBLE FAIBLE ET PUTAIN DE FAIBLE !


_____Il le retourna d'un coup de pied sur le dos et l'écrasa contre son torse avant de se pencher sur lui, reposant ses coudes sur sa cuisse.


_______Enfin bon… Ce n'est pas pour ce petit instant défouloir que je t'ai forcé à venir ici.


_____Il s'écarta pour le laisser respirer, lui laissant même le droit de retrouver l'usage de son corps. Cependant le Damon aux yeux clairs, fortement marqué par les coups qui bleuissaient sa peau marmoréenne sous sa chemise, la lèvre inférieure coupée et boursouflée, une paupière tombante, peina à esquisser le moindre geste.


_______Tu te rappelles que faisant partie de toi, j'ai non seulement accès à tous tes sens, ce qui me permet de te faire souffrir de blessures en pensée, mais aussi à toute ta mémoire, tous tes secrets, toutes tes peurs ? reprit son clone. Tu te rappelles que je peux manipuler tout cela à loisir ?… Oui, comment aurais-tu pu oublier ça ? Alors que je te torture tes nuits avec Joëlle, la douce Joëlle QUI EST MORTE ABATTUE COMME UNE CHIENNE CAR TU ES FAIBLE ! Ah, pardon, ça m'a échappé.


_____Loin d'être désolé, il s'amusa de l'expression horrifiée qu'arborait l'autre lui en peinant à bouger, n'ayant pour le moment pas réussi à faire mieux que de rouler sur le ventre pour se redresser sur les coudes.


_______Mais c'est vrai n'est-ce pas ? Et en plus elle ne goûte même pas au repos éternel, asservie je ne sais comment par cet Évoli… Aaaah, je m'égare encore ! Revenons au sujet principal…


_____Sans pitié pour la peine qu'éprouvait la personnalité d'origine à se remettre de son passage à tabac, il l'aplatit une fois de plus contre le "sol" d'un coup de talon entre ses omoplates.


_______Je voudrais que tu te souviennes à qui tu as affaire. Je voudrais que tu abandonnes cette attitude insolente à mon égard. Tu ne te rends pas compte à quel point je suis gentil avec toi. À quel point je suis patient. Mais on dirait que cette méthode ne fonctionne pas avec toi. Tu as encore failli rompre le contrat malgré mes menaces. Tu as failli nous tuer. Tu as failli ME tuer.


_____Sa langue passa brièvement sur le coin de sa lippe supérieure.


_______Je vais devoir te punir…



_____Emmitouflée dans sa petite couverture de la taille d'une serviette de table, Rosélia voyait suffisamment clair grâce aux reflets de la lumière lunaire sur le glacier pour zigzaguer silencieusement entre les Porygon simple, 2 et Z, sans les heurter. Elle rejoignit Gardevoir qui, malgré sa fatigue, ne réussissait pas à trouver le repos – Cresselia quant à elle, dormait d'un sommeil de plomb.

_____Elle lui accorda un regard ainsi qu'un petit sourire signifiant sans doute "ça va ?" ou quelque chose s'en rapprochant. Ce à quoi la plante répondit par un soupir avant de murmurer :


_______Dis-moi, Gardevoir, honnêtement… Penses-tu que j'ai ma place parmi vous ? Je veux dire… même quand j'ai soigné Damon et Cresselia dans le Mont Corne, c'était en grande partie de ma faute s'ils avaient été empoisonnés… Et là… À part vous causer du souci, je n'ai servi à rien. Le pire…


_____Elle serre les poings et poursuit d'une voix à moitié brisée par des sanglots contenus :


_______Le pire c'est que quand bien même j'aurais été capable de me battre dans le froid, franchement, qu'aurais-je pu faire si tout le reste de l'équipe s'est fait massacrer, alors qu'il y avait deux agents du gouvernement, dont une Légendaire ? Qu'aurais-je pu faire, moi ? Fuir, comme Évoli ? Mais lui, c'est dans sa nature profonde de s'échapper s'il est trop faible, c'est inscrit dans ses gênes… Si je faisais de même, de ma part, ce ne serait que de la lâcheté ! Mais à quoi bon si je suis inutile ? Si je suis faible ? À quoi bon se battre si c'est pour finir dans cet état ?


_____Elle désigne du menton le lit de l'humain et enfin achève son monologue, quelques perles d'eau salée roulant sur ses joues malgré elle :


_______Comment trouver le courage de se battre si c'est perdu d'avance ?


_____Elle ne résista pas quand elle fut soulevée dans les bras de la Pokémon Étreinte qui justement la serra doucement contre elle.


_______Eh, qu'est-ce que tu me fais là ?… chuchota-t-elle. Je peux comprendre les raisons pour lesquelles tu te poses toutes ces questions d'un coup, mais il y a réponse une évidente, tu sais…


_____La créature psychique passa délicatement un doigt sous ses yeux pour recueillir ses larmes et ajouta simplement :


_______Le courage de se battre, on l'obtient en ne perdant pas de vue ce pourquoi on se bat. Et si ton but te tient réellement à cœur, tu prendras le risque de perdre pour l'atteindre.

_______Et comment puis-je savoir pourquoi je me bats ? murmura la rose, ses prunelles toujours embués.

_______Ah ça… Ne t'en fais pas, tu trouveras.


_____La nymphe ne put retenir un bâillement et elle dodelina de la tête un petit moment, paupières closes, avant d'avoir un sursaut. L'adolescente contre elle retrouva un peu son humeur, et marmonna :


_______Ça ne sert à rien de lutter, tu te fais du mal. Je surveille Damon à ta place si tu veux. Moi, je ne suis plus fatiguée à cause de la pleine lune qui éclaire la grotte par un jeu de prismes.


_____À sa proposition, les lèvres de la doctoresse s'étirèrent et elle souffla avant de se laisser glisser dans une torpeur bénéfique :


_______Oui, je suis sûre que tu trouveras…



_______Gardevoir, réveille-toi ! Il a repris connaissance ! s'exclama Raichu en lui secouant l'épaule.

_______Mmmh… Mmh ? J'ai fait un de ces rêves moi encore… grogna la concernée.

_______Eh oh ! Tu as entendu ce que j'ai dit ?

_______… Il est réveillé ? Évidemment, ça arrive quand je dors ! Rha !

_______Mais je dois te prévenir, il… attends j'ai pas fini de t'expliquer, attends !


_____Mais elle s'était déjà redressée et s'avançait vers la couchette au sol où Damon était toujours allongé, immobile. Or cette fois ses yeux étaient bels et bien ouverts, rivés sur le plafond. Sa respiration était étonnamment rapide, elle pouvait en juger simplement en regardant le rythme auquel son torse se soulève. Rosélia était près de lui mais quand elle vit arriver la Pokémon Psy, elle adressa un regard de reproche à la souris – lequel répondit par une grimace de dépit – et baragouina à l'intention de la demoiselle :


_______Euh, tu sais, il vaudrait peut-être mieux le laisser un moment, je ne dis pas ça en mal mais, enfin…

_______Qu'est-ce que tu racontes ? s'étonna son interlocutrice. Il vient à peine de sortir de son coma, je ne pense pas qu'être seul…

_______Écoute-la…


_____Coupée dans sa phrase, le médecin observa avec incompréhension le jeune homme qui avait parlé.


_______Qu'est-ce qui t'arrive ? lui demanda-t-elle. S'il y a quelque chose c'est mon devoir de…

_______Ne t'approche pas… Tous autant que vous êtes, n'approchez pas… gémit-il en levant lentement son bras valide qu'il plia au-dessus de son nez pour cacher ses yeux.

_______Mais enfin…

_______N'APPROCHE PAS !


_____Elle demeura interdite quelques secondes, sous les regards désolés des deux explorateurs adolescents, et ceux curieux des Porygon. Depuis son lit de paille, Cresselia observa en silence la réaction de sa sœur de Type, laquelle tourna des talons précipitamment et se dirigea vers l'extérieur.


_____« … Et dire que je devrais être contente que ça tourne comme ça, ou au moins m'en foutre… »


_____Toujours enveloppé d'une couverture, elle mobilisa les quelques forces qu'elle avait récupéré pour voleter dans la même direction. Quand elle arriva dehors, bien que le soleil perçait au travers des nuages, le froid était bien présent. Elle vint se placer aux côtés de Gardevoir, qui était assise dans la neige fraîche tombée toute la nuit pour cesser au petit matin.


_______Tu auras l'air bien maligne si tu venais à chopper la crève, doc', soupira-t-elle.

_______T'occupe… Rentre au chaud avant de me faire une rechute, l'emplumée… grinça l'intéressée.

_______… Il a perdu la bataille. Mais il s'en remettra. Laisse-lui juste du temps. Il s'en remet toujours.

_______Pourquoi tu me dis ça ?… Et quelle bataille ?… Arrêtez de vous exprimer en cachant la moitié de ce que vous voulez dire, c'est chiant à la fin ! "Ne t'approche pas", "laisse-lui du temps", vous avez quoi, vous deux, à toujours donner des ordres sans fournir d'explications tangibles ? Ça marche peut-être avec certains, mais pas avec moi, au bout d'un moment j'en ai assez d'être prise pour une conne !

_______… Ce serait tellement plus simple si tu t'en contentais, enfin, si tu tiens tant que ça à ce que je mette les choses au point avec toi… Dans mon cas, de toute façon il fallait bien que je t'en parle tôt ou tard, même si "tard" aurait été préférable. Sache juste que si je t'en apprends davantage, cela pourrait fortement lui déplaire. Tu veux toujours savoir ?


_____La femme-médecin prit une grande bouffée d'air glacial et arrêta sa décision :


_______… Plus encore maintenant que je sais que c'est suffisamment grave pour qu'il ne veuille pas m'en faire part.

_______Très bien, consentit la nymphe lunaire. Tâche juste de ne pas trop changer de regard sur nous. Je sais que pour ma part… ça m'énerverait encore plus. Et le concernant… cela pourrait être pire.