Rubis & Saphir - The Origins de Feather17

Précédemment : Sofian veut devenir un champion d’arène et part en voyage dans Hoenn en compagnie de Flora, dont le rêve est de devenir une célèbre coordinatrice pokémon, et Timmy, un jeune garçon à la santé fragile qui doit rejoindre Vergazon. Ils croisent la route de Jessie, James et Miaouss, trois dangereux membres de la Team Rocket en mission secrète à Hoenn. Dans le Bois Clémenti, ils aident un employé de l’Entreprise Devon à récupérer une valise importante pour la création du Pokénav, dérobée par la Team Aqua. Ayant échoué, la Team Aqua arrive tout de même à voler les plans des fonds marins de Hoenn des mains de Monsieur Marco avant d’emprisonner Sofian dans leur sous-marin à la dérive et de faire exploser le bateau de pêche de Monsieur Marco, entraînant ainsi sa mort. Une fois sortis d’affaire, Sofian défie Bastien, le champion du Village Myokara contre lequel il essuie une défaite écrasante. Dans la forêt Myokara pour un entraînement intensif en vue de l’obtention du badge Poing, les trois adolescents rencontrent Dan, Charles et Hélène, trois étudiants de l’Ecole Pokémon Fondamentale de Mérouville, en excursion à Myokara. Sofian défie Hélène dans un match dans le but de savoir s’il est prêt à prendre sa revanche contre Bastien.

Île Myokara Ouest


– Regardez-moi le nombre de tentes établies dans cette plaine !
– De quoi nous repérer rapidement. Allez, allons-nous-en avant qu’un d’entre eux nous voit…
– James, ta couardise te perdra… soupira le chat.
– C’est pas de la couardise que de vouloir éviter de finir en prison ! Et encore, ce ne serait que la meilleure partie de l’histoire. Dois-je vous rappeler ce qu’on pourrait subir comme punition de la part du Boss ?
– C’est justement pour ça que nous sommes là ! s’énerva Jessie, épuisée de devoir à nouveau lui réexpliquer son projet. Pour mener notre mission à bien, il faut qu’on quitte cette île où tout le monde nous recherche. Or, toutes les sorties officielles de l’île sont surveillées en permanence. Donc, il faut prendre la voie des airs. Pour ce faire, nous avons besoin de notre bonne vieille montgolfière. Miaouss, tu peux nous rappeler dans quel état elle se trouve ?
– Euh… Pire que bancale ?
– Mais encore ?! s’emporta Jessie, prête à lui fourrer son poing dans le museau.
– Presque achevée ! rectifia Miaouss à toute vitesse.
– Exactement. Et que manque-t-il pour terminer la reconstruction de la montgolfière ?
James et Miaouss échangèrent un regard vide.
– Purée les gars, vous le faites exprès ?? Le ballon ! D’où les tentes pour le tissu !
James comprit enfin où voulait en venir son acolyte et jeta un regard de l’autre côté du lac qui s’étendait sur la gigantesque plaine dans laquelle il venait d’arriver. Au loin s’élevait une centaine de tentes noires entourées par quelques chapiteaux blancs disposés aux quatre coins de l’espace occupé.
– Mais Jessie, qui dit tentes, dit occupants, s’inquiéta James. Comment on va faire pour voler les tentes alors qu’elles sont occupées ?
– Réfléchis un peu ! Une tente, c’est fait pour y dormir, pas pour y rester toute la journée. Il faut qu’on en vole pendant la journée, avant qu’ils aillent se coucher.
– Et on entre juste comme ça dans leur campement, sans se faire remarquer, on dit bonjour à deux trois personnes et on enlève quelques tentes en espérant que personne ne nous remarque ? demanda le chat d’une voix sceptique.
Jessie réfléchit.
– Je propose qu’on s’approche discrètement et qu’on trouve de loin l’endroit le moins peuplé du campement. Ensuite, on peut toujours attaquer.
– Et on approche comment ? Le lac est entouré de tentes…
– Par le seul endroit où il n’y a pas de tentes, justement.
Jessie fit un signe de tête sur sa droite et, James et Miaouss suivirent son regard vers le lac.
Installés très dangereusement sur le dos du Seviper de Jessie, le petit groupe avançait lentement sur le lac à la vitesse de nage du serpent qui éprouvait des difficultés à rester à la surface.
– Arrête de bouger, James, je sens que je vais glisser ! se plaignit Miaouss.
– Parce que tu crois que je suis bien mis, moi ??
– Les gars, vous voulez bien arrêter de…
– JESSIE !!
En essayant d’obliger ses acolytes de bouger, Jessie s’était violemment retournée pour leur faire face et avait glissé sur le dos luisant de son Seviper. Jessie chuta dans le lac avec fracas et se sentit lourdement couler vers le fond, qu’elle toucha beaucoup trop rapidement à son goût. À le sentir à l’aide de ses paumes, le sol était glacial et métallique. Elle ouvrit les yeux dans l’eau, retira difficilement ses longs cheveux roux de son visage et retint difficilement une exclamation de surprise en découvrant l’engin sur lequel elle avait atterri.


Poussifeu et Balignon se défièrent du regard, tous les deux épuisés par le début du match qui les avait opposés. Malgré le désavantage de type que rencontrait le pokémon de type plante d’Hélène, ses talents de dresseuse remontaient le niveau et son attaque « vol-vie » avait eu de sacrés effets sur le niveau d’énergie de Poussifeu. Quant à Sofian, il réfléchissait à l’échec de la technique qu’il avait mise au point afin de surprendre Bastien : attaquer par derrière diminuait les chances d’esquives du pokémon, mais il n’avait pas tenu compte du dresseur adverse qui pouvait guider son pokémon. Il fallait donc trouver une astuce afin de leurrer le pokémon ainsi que son maître. Ou alors… Mais oui, c’était tellement simple ! Il suffisait de faire en sorte que le pokémon reçût tout de même l’attaque, peu importait par quel côté il l’eût esquivé !
– Hélène, je te défie d’esquiver ma prochaine attaque ! lança un Sofian décidé.
– Je connais la technique que tu essaies de réaliser, on l’a mise au point ensemble, rappela son adversaire, excitée par le match qui l’opposait au fils du champion d’arène qui l’avait récemment écrasée. Balignon, prépare-toi à recevoir mes ordres !
– Poussifeu, « pic-pic » !
Poussifeu courut le bec en avant vers la Balignon qui ne bougeait toujours pas.
– Saute dans les airs, et envoie « flammèche » tout autour de lui !! s’écria Sofian alors que Poussifeu n’était qu’à quelques centimètres de son adversaire.
– « Vampigraine » ! ordonna Hélène au même instant.
Poussifeu bondit à la verticale juste au-dessus de Balignon dont le bulbe sur le crâne envoya fuser une petite graine qui s’accrocha au ventre du poussin au moment où celui-ci lançait ses boules de feu tout autour du pokémon plante. Balignon sauta dans les airs afin d’esquiver les boules de feu tandis que Poussifeu tombait au sol, ligoté par des lianes qui lui volèrent son énergie.
– Arrêtez tout ! s’exclama une voix derrière eux.
Le petit groupe d’adolescents fit volte-face et virent un homme musclé doté d’une épaisse chevelure sur le crâne, courir à toute vitesse vers eux. Bastien, le champion d’arène du Village Myokara, affichait un air effondré et paniqué.
– Où est Roxanne ? demanda-t-il, terrorisé.
– Bastien ? reconnurent Sofian, Flora et Timmy. Qu’est-ce que tu fais ici ?
– Il y a un problème monsieur ? demanda poliment Dan.
– Un problème ? Bien pire que ça !! Où est Roxanne ??
– Bastien, qu’est-ce qu’il se passe ? s’inquiéta Flora qui se leva d’un bond du pied de l’arbre contre lequel elle était adossée, sentant que quelque chose ne tournait pas rond.
– Il se passe que la Team Aqua est sur le point de débarquer !


– Bastien !
Un Pokénav dans la main gauche, une pokéball dans l’autre, Roxanne les rejoignit à toute vitesse, tout aussi alertée que son collègue.
– La Team Aqua ? répéta Charles, perdu.
– Ceux qui sont à la base de l’attentat de Mérouville ? se souvint Hélène.
– Qu’est-ce que la Team Aqua ferait ici ?? questionna Timmy, dont la respiration commençait à se saccader en comprenant que les problèmes allaient à nouveau reprendre.
– Pas le temps d’expliquer ! dit Roxanne en prononçant les mots à toute allure. J’ai prévenu les profs de replier le campement à vitesse grand V ! Vous trois — elle s’adressa à ses étudiants —, allez prévenir tous vos camarades de défaire les tentes et de rejoindre le point de ralliement le plus vite possible ! Je veux que le campement disparaisse dans un temps record ! Allez !
Hélène, Charles et Dan ne se le firent pas répéter une seconde fois. Balignon disparut dans sa pokéball aussi vite que les trois étudiants disparurent entre les tentes du campement de l’Ecole Pokémon Fondamentale de Mérouville.
– On peut savoir ce qu’il se passe ? intervint Sofian qui constatait que la moitié du campement avait déjà été replié.
– Oui, explique-moi ce que vient faire cette mafia sur mon île, demanda Bastien.
– Très bien, mais suivez-moi, nous n’avons pas une minute à perdre, accepta Roxanne, avant de se lancer dans une longue explication en les amenant au chapiteau principal du campement. À la suite de l’attentat sur la place principale de Mérouville du premier septembre, quand la Team Aqua a attaqué Monsieur Marco pour lui dérober son Picko, une enquête très sérieuse a été ouverte. L’agent Jenny a voulu interroger Monsieur Marco sur les raisons qui auraient poussé les criminels à s’en prendre à lui, mais Monsieur Marco ne se trouvait pas à son domicile. S’inquiétant pour le vieux marin, l’agent Jenny est entrée de force chez lui et a trouvé sa maison sens dessus-dessous. De plus, son bateau de pêche ne se trouvait pas au port. Elle en a donc conclu que la Team Aqua était venue lui rendre visite pour avoir les documents de base qui ont servi à la construction du Pokénav, étant donné qu’ils avaient déjà essayé de voler une valise contenant le même genre de documents pour l’Entreprise Devon. Elle a tout de suite pensé que Monsieur Marco avait été enlevé.
« C’est durant la nuit qui a suivi qu’elle a reçu un coup de téléphone qui lui indiquait qu’une explosion avait retentit au large de Mérouville. Sentant que l’affaire était liée et qu’elle devenait très compliquée, voire dangereuse, elle m’a de suite appelée en renfort. C’est ainsi que nous nous sommes rendus accompagnés de ses troupes sur les lieux du crime, au beau milieu de l’océan. Nous avons ainsi retrouvé le bateau de Monsieur Marco dispersé en milliers de débris sur un périmètre d’un kilomètre. Pas de doute, la Team Aqua était derrière tout cela.
« Pour essayer de comprendre ce qu’il se tramait, l’agent Jenny est allée interroger Monsieur Rochard, un très bon ami de Monsieur Marco et, surtout, la dernière personne à l’avoir vu. Mais ce n’était pas suffisant pour tirer l’affaire au clair. Son assistant — dont le nom m’échappe aujourd’hui — lui a alors indiqué l’avoir vu assis en terrasse à vous parler, justement à vous trois.
Sofian se souvint parfaitement de la discussion que ses amis et lui avaient eue avec Monsieur Marco à cette fameuse terrasse. Cette nuit-là, ils échouaient tous en mer et Monsieur Marco décédait.
– Lorsque l’agent Jenny m’a raconté cela, continua Roxanne, et connaissant votre caractère, j’ai tout de suite compris que vous aviez joué un rôle dans l’affaire en voulant aider Monsieur Marco à retrouver son Picko, d’où la présence du bateau de pêche de Monsieur Marco dans l’océan. Nous avons tout de suite craint le pire. Je ne sais pas comment, mais les médias ont eu vent de cette histoire et tous les journaux de la ville ont annoncé votre disparition en un temps record.
« Bref, comme je gardais toujours espoir que vous n’étiez pas lié à l’histoire, j’ai téléphoné à Bastien le lendemain et il m’a assuré ne vous avoir jamais rencontrés. Deux jours pour faire la traversée entre Mérouville et Myokara, c’était beaucoup trop. C’est justement à cet instant que les analyses des carcasses du bateau de pêche recueillies ont parlé : des traces de sang de Monsieur Marco et des cheveux de Flora ont été retrouvés. Et là, les médias se sont affolés et ont divulgué votre mort partout.
« Trois jours plus tard, Bastien me passe un coup de téléphone pour m’annoncer votre arrivée à Myokara, secoués mais bel et bien vivants. Malheureusement, Monsieur Marco et son Picko étaient… Bref, cous connaissez le reste de l’histoire.
Sofian avait du mal à se représenter cet autre côté de ses aventures en mer du début du mois. Autant il les avait vécues difficilement, autant il n’avait jamais imaginé que d’autres personnes avaient aussi été bouleversées par les circonstances.
– Tout ça ne nous dit pas ce que fait la Team Aqua à Myokara, rappela Bastien alors qu’ils entraient dans le dernier chapiteau debout.
– Vendredi passé, la Team Aqua a à nouveau attaqué l’Entreprise Devon, reprit Roxanne. On ne sait toujours pas quel était leur but, mais apparemment, ils en avaient toujours après des plans non utilisés pour créer le Pokénav. Mais cette fois-ci, ils étaient beaucoup moins bien préparés face aux policiers qui veillaient au grain. Ce qui fait qu’ils sont très vite repartis la queue entre les jambes en arrivant à nouveau à filer entre les doigts de l’agent Jenny. Mais en partant, allez savoir comment, ils ont eu vent de la mission que Monsieur Rochard vous avait confiée et le colis que vous devez apporter au Capitaine Poupe les a intéressé.
« C’est la raison pour laquelle ils ont été aperçu un jour plus tard dans les périmètres de votre naufrage. On pense qu’ils ont cherché leur sous-marin échoué à la recherche du corps de Sofian afin de trouver ce fameux colis. Ce que nous ne comprenons pas, c’est en quoi ce colis aurait tant de valeur aux eux de la Team Aqua ?
Timmy sortit de son sac à dos le petit carton que leur avait confié le patron de l’Entreprise Devon à remettre à un capitaine habitant Poivressel, et qui pouvait tenir dans la paume de sa main, et le montra à Roxanne et Bastien.
– Il est tellement petit… je ne comprends pas…
– Il nous aurait donc retrouvé ? demanda Flora, inquiète.
– Je crains que oui, répondit Roxanne d’un air grave. Ce midi, l’agent Jenny du Village Myokara a sonné à sa collègue de Mérouville en lui annonçant qu’une activité suspecte avait attiré son attention sur la côte du Village Myokara, et il se serait agi de la Team Aqua. L’agent Jenny m’a donc sonnée car elle pensait justement qu’ils avaient retrouvé votre trace et qu’il fallait absolument que je les intercepte. Elle prépare ses troupes et nous rejoint au plus vite, donc en attendant, je me suis dit qu’un peu d’aide de ta part, Bastien, ne nous ferait pas de mal. Comme je savais que tu t’entraînais dans les parages, j’ai fait appel à ton aide.
– La Team Aqua en a donc après nous… résuma Flora, troublée.
– …encore une fois ! précisa Timmy, épuisé.
– Très bien, mettons au point une stratégie de défense ! lança Sofian, décidé.


– Madame la directrice ! appela Hélène en entrant dans le chapiteau en compagnie de Dan et de Charles. Le campement est quasiment replié, il ne reste que ce chapiteau à défaire, et les enseignants sont allés cacher tout le monde à l’abri.
– Nous avons décidé de rester vous aider, annonça Charles. Ma cousine m’a déjà parlé de la Team Aqua et, de ce que j’ai pu comprendre, c’est une bande de criminels très dangereux.
– On ne sera pas de trop à huit ! termina Dan.
– Très bien, il vaut mieux être plus que trop peu, accepta Roxanne.
– Comment on procède ? demanda Bastien.
– Cela ne sert à rien de nous cacher, la Team Aqua sait que Sofian, Flora et Timmy sont dans les environs, expliqua la championne. Autant attendre qu’ils nous retrouvent et se préparer au combat.
– Mais d’où arriveront-ils ? Il n’y a pas qu’un seul chemin pour arriver sur cette plaine.
Roxanne se creusa les méninges à la recherche d’une idée.
– Dispersons-nous, proposa Sofian. On est huit, on n’a qu’à faire quatre groupe de deux et ainsi on pourra être prêt à tout, partout.
Les deux champions approuvèrent l’idée.

Il ne leur fallut pas plus de dix minutes pour convenir d’une stratégie. Maintenant que la plaine avait été désertée par l’Ecole Pokémon, Timmy constatait à quel point l’endroit était gigantesque et comprit qu’ils avaient bien fait de s’éparpiller afin de couvrir le plus de territoire possible. Étant les moins doués en matière de combats pokémons, Timmy et Dan s’étaient proposés pour replier en vitesse le dernier chapiteau de cours, en espérant terminer leur mission avant l’arrivée de la Team Aqua. S’ils se faisaient attaquer, la rescousse ne tarderait pas à se montrer car, bien qu’ils furent au centre précis de la plaine, au bord du lac, leurs amis surveillaient les alentours à équidistance les uns des autres, bien qu’il y avait peu de chances que la Team Aqua apparaissent subitement au centre de la plaine sans passer inaperçu. De plus, le groupe qu’il formait avec Dan était le plus proche de tous les autres groupes, ainsi ils fourniraient une aide précieuse en cas d’attaque, en attendant que les autres plus doués en combats ne viennent aider. Non, de toute évidence, ils n’avaient aucun soucis à se faire.

*
– Mais qu’est-ce qu’ils fabriquent ?
– Pourquoi le campement a disparu, c’est une blague ?
– Remarque, il reste encore une tente…
La Team Rocket, confortablement cachée derrière de gros rochers qui bordaient l’autre rive du lac, observait de loin les agissements du petit groupe sans très bien comprendre la suite des évènements.
– On dirait qu’ils se préparent à recevoir une visite inattendue, remarqua James en observant les quatre groupes dispersés dans la plaine.
– Ça n’arrange pas nos affaires ! se plaignit Miaouss. La seule tente qu’on puisse voler se trouve en plein milieu de la plaine, et les deux gosses sont justement en train de la replier !
– Le tout est d’attendre que leurs ennemis arrivent, réfléchit Jessie. On attend que les combats fassent diversions, et une fois qu’ils sont occupés à se défendre et qu’ils s’éloignent de la tente, on la vole le plus discrètement possible.
– En espérant qu’ils ne terminent pas de la replier avant… pria James.
– …et qu’ils s’en éloignent, termina Miaouss.

*
Flora tendit le cou et observa chaque recoin du ciel estival dégagé. Pas un nuage, la vue était parfaite en cas d’attaque aérienne. Charles et elle s’étaient postés au niveau du puits qui se trouvait assez loin du lac, de manière à avoir toute la plaine face à eux, et scrutaient attentivement chaque centimètre du ciel orangé de l’après-midi, sentant l’angoisse monter à mesure que le temps avançait.

*
Sofian et Hélène, quant à eux, s’étaient dirigés de l’autre côté du lac, près de quelques rochers discrets, afin d’accueillir leurs ennemis qui pourraient faire leur apparition à la lisière de la forêt. Ils firent sortir leurs pokémons mais Sofian garda Poussifeu en réserve car le match qu’il avait disputé contre Balignon l’avait énormément épuisé. Malheureusement, Hélène ne possédait que son petit Balignon et ce-dernier montrait lui aussi des marques de fatigue intense. Les regards de Sofian et Hélène se croisèrent et ils se soutinrent d’un geste décidé de la tête, parés à toute attaque.

*
Enfin, Roxanne et Bastien attendaient fermement devant l’entrée officielle à la plaine, un petit sentier de terre séchée qui partait dans la forêt. Roxanne avait choisi ce point stratégique au cas où les renforts des troupes de l’agent Jenny arriveraient avant leurs ennemis, afin de les accueillir et de les mettre au diapason. Elle pria de tout cœur pour qu’ils fussent plus rapides, d’autant plus qu’elle n’avait aucune idée du nombre d’ennemis qui seraient à la recherche des trois adolescents. Logiquement, s’ils avaient préférés rester discrets jusqu’à présent, ils ne seraient pas trop nombreux. En tout cas, c’est ce qu’elle espérait.

Un cri d’effroi retentit près du lac et Sofian fit violemment volte-face : de loin, le jeune dresseur aperçut une silhouette s’effondrer au sol tandis que trois adultes de dos émergeaient de nulle part face, au pied du lac… Au pied du lac…
– UN SOUS-MARIN !! s’écria Sofian, horrifié.
Se maudissant pour avoir omis ce léger détail, celui que la Team Aqua préférait naviguer sous l’océan, Sofian démarra en trombe vers leurs assaillants, suivis de très près par Hélène et leurs pokémons, mais le chemin était long car il lui fallait contourner tout le lac.
– Tenez bon ! cria Bastien en quittant son poste à toute allure.
Roxanne et Bastien arrivèrent en premier face à leurs trois ennemis.
– Racaillou, « jet pierre » !
– Makuhita, « cogne » !
En un éclair, les deux pokémons des champions apparurent à l’endroit de l’attaque surprise de la Team Aqua, mais ceux-ci étaient bien préparés : deux Nosferapti sortirent de nulle part et paralysèrent leurs adversaires à l’aide de leurs ultrasons avant de les envoyer au tapis grâce à leurs attaques aériennes.
– Il faut les aider ! s’écria Charles qui venait de se rendre compte de ce qu’il se passait de l’autre côté de la plaine.
Mais Flora le retint par le bras et l’empêcha de quitter son poste.
– Qu’est-ce que tu fous ??
– N’y allons pas tant qu’on n’a pas été repéré !
– C’est une blague ? Tu te dégonfles ?
– Mais pas du tout, réfléchis ! Qui te dit qu’ils ne sont que trois. Et puis, s’il n’y a personne d’autre, à cinq contre trois, ils ne peuvent mal de prendre l’avantage. Et dans le cas où nos amis se retrouvent en difficulté et que la Team Aqua croit avoir gagné, on débarque, ils sont déroutés et on arrive à les vaincre grâce à la surprise !
Charles dû s’avouer que son plan était ingénieux. Ainsi, ils avaient une carte joker en main au cas où les choses tournaient mal. Il jeta enfin un regard sur la scène de combat et sentit une sueur froide couler dans son dos.
Sofian et Hélène étaient enfin arrivés. Jouissant de sa rapidité grâce à ses ailes, Nirondelle était arrivée en premier en survolant le lac mais fut arrêtée à mi-chemin par un gros poisson mi-orange, mi-bleu, qui émergea de l’eau et la frappa à l’aide de ses nageoires apparemment tranchantes. Nirondelle tomba directement à l’eau et fut rappelée dans sa pokéball par Sofian tandis que le Balignon d’Hélène fut vaincu aussi rapidement par une attaque « pistolet à eau » du même pokémon.
Ainsi, ils se firent enfin tous face : derrière le corps inerte de Dan étalé au sol se tenaient debout les trois individus de la Team Aqua à qui Sofian et ses amis avaient déjà eu à faire, tous vêtus du même uniforme de marin et coiffés d’un foulard bleu ; le plus petit d’entre eux serrant Timmy très fort contre lui, son comparse grand et élancé rappelant les deux Nosferapti vers lui tandis que Roxanne et Bastien protégeaient leurs pokémons déjà affaiblis, et le chef à l’allure d’athlète à sa gauche ordonnant à son pokémon poisson de montrer ses crocs afin de tenir à distance l’Écrapince de Sofian qui n’avait pas osé attaquer suite à la défaite rapide de ses camarades.


– Qui sont ces gens ? s’étonna James en n’arrivant pas à les reconnaître.
– On dirait qu’ils se connaissent avec les gosses, fit remarquer Miaouss.
– Et il fallait que l’attaque ait lieu juste à côté de la tente qu’il nous faut, râla Jessie. Qu’ils règlent leurs affaires, mais qu’ils laissent les nôtres tranquilles !
– J’espère qu’ils n’abimeront pas le tissu, sinon on peut dire adieu à notre montgolfière, soupira le chat.
– Ça ne risque pas, ils sont en train de taper la causette, regardez, indiqua James en leur montrant le petit groupe.

*
– Je dois avouer que j’ai beaucoup de respect pour toi, petit, dit Charlie, le chef de bande, en brisant le silence tendu qui s’était abattu entre les deux groupes. Réussir à échapper à la noyade alors que nous avions nous-mêmes failli couler avec notre sous-marin, c’est impressionnant.
– Il faut croire que je suis plus intelligent que vous ! piqua Sofian, réfléchissant à toute allure à un moyen de sortir de ce pétrin.
– Je constate qu’au moins un d’entre vous n’a pas survécu à l’explosion de notre grenade, se félicita Charlie afin de répondre à l’attaque verbale de l’adolescent. C’est dommage que ce soit la jeune fille qui ait trinqué, elle était jolie…
Sofian serra des dents en voyant les souvenirs douloureux de cette affreuse nuit en mer remonter à la surface. « Mais où est donc passée Flora, justement ? », se demanda-t-il.
– Vous avez terminé vos sarcasmes de politesse, on peut passer aux choses sérieuses ? intervint Roxanne de mauvaise humeur.
– Une petite seconde Roxy, ne soyons pas pressés, nous avons tout notre temps, répondit Stephen alors que son Noferapti se posait sur son épaule droite.
– Vous voyez bien que Charlie discute avec le morveux, ajouta Rosh en serrant plus fort son emprise sur un Timmy qui semblait étouffer à tout moment sous les muscles de son preneur d’otage.
– Personne ne vous a donné l’autorisation de venir sur mon île, rugit Bastien en ignorant les deux sous-fifres, et encore moins de vous en prendre à des innocents !
– Bon, comme vous avez absolument envie d’écourter vos vies au plus vite, voilà ce que nous allons faire, reprit Charlie en affichant une grimace dangereuse sur son visage musclé. Nous savons que vous êtes en possession d’un paquet à amener à un capitaine de Poivressel. Le problème étant que ce paquet nous intéresse aussi. Donc, je vais vous laisser un choix, car la Team Aqua n’aime pas verser le sang sans raison : vous pouvez gentiment nous remettre ce paquet sans exercer une quelconque défense, dans ce cas nous repartirons simplement vaquer à nos occupations ; vous pouvez aussi vous rebeller et nous affronter, mais il faut que je vous prévienne que nous avons ordre d’éliminer toute forme de résistance. Sincèrement, nous n’avons pas envie d’attaquer des enfants innocents et des champions d’arène que nous admirons réellement. C’est ainsi que nous vous conseillons de choisir la manière douce. À vous de faire le choix : saurez-vous ne pas répéter l’erreur que vous avez commise il y a deux semaines et éviter ainsi la malheureuse mort de votre vieillard d’ami, ce vieux Marco ?
– Je vous interdis d’insulter Monsieur Marco et de profaner sa mémoire ! s’emporta Timmy dans un souffle en essayant de se dégager des bras de Rosh. Sofian, tu sais quoi f…
Mais le Nosferapti de Rosh lui asséna un coup de crâne qui le sonna un instant le jeune garçon.
– Timmy ! s’exclama Hélène, horrifiée par la violence de leurs opposants. Sofian, écoute-les et donne-leur ce qu’ils veulent. Ce n’est qu’un objet, et ils sont prêts à tout ! Regarde ce qu’ils ont fait à Dan.
– Sage commentaire, approuva Charlie en jetant un regard condescendant à l’adolescent évanoui au sol.
– Après tout ce que vous nous avez fait subir comme torture physique et psychologique, tout ce qu’on a vécu pour survivre à votre attentat en mer, et tout ce qu’il nous a fallu pour nous en remettre, il est hors de question qu’on baisse les bras aujourd’hui ! annonça Sofian d’une voix menaçante.
– Mais enfin… essaya de convaincre Hélène, terrorisée.
– Hélène, si tu as peur, éloigne-toi en prenant Dan avec toi et laisse-nous combattre, nous avons des comptes à régler avec eux.
– Compte sur moi pour t’aider ! appuya Bastien.
– Nous sommes à égalité en termes de nombres, et avec l’agent Jenny qui arrive, nous auront un avantage sur eux, alors c’est parti ! accepta Roxanne.
– Vengeons la mort de Monsieur Marco ! s’écria Timmy, tel un chef de bande prêt à terrasser une armée ennemie.
– Mauvais choix… marmonna Charlie, déçu.
Et d’un coup, une demi-douzaine de pokémons fit son apparition dans le no-man’s land entre les deux groupes. Le Nosferapti de Stephen s’envola vers Roxanne qui se protégea en faisant apparaître son énorme Tarinor, le Makuhita de Bastien prit sa revanche contre le pokémon vampire de Rosh, tandis que Sofian envoya son Écrapince plonger à la poursuite du Carvanha de Charlie dans un combat aquatique.
Hélène profita du ramdam provoqué par les nombreuses attaques pour tirer le corps de Dan loin du raffut et se protéger derrière le chapiteau à moitié replié. Makuhita poussa un cri de douleur au moment où Écrapince se faisait projeter sur la rive et Hélène serra la mâchoire de peur. Si les combats continuaient sur cette lancée, elle ne donnait pas cher de son groupe. Mais où étaient donc ces renforts ? Et Flora et Charles qui avaient disparu… Elle chercha du regard de tous côtés et remarqua alors deux silhouettes à moitié cachés par le puits au loin. Elle reconnut le foulard bleu foncé de Flora et voulut l’appeler à l’aide mais Charles lui fit signe de se taire. Hélène comprit alors qu’ils manigançaient quelque chose car aussitôt s’était-elle tue, les deux coordinateurs en herbe avaient jetés quelque chose dans le puits.
– Tarinor, « jet-pierres » !
– Nosferapti, désarme-le avec tes « ultrasons » ! ordonna Stephen.
Une multitude de petits rochers apparurent entre les bras sculptés de Tarinor qu’il tendait vers le haut alors que Nosferapti pointait ses oreilles en sa direction. Roxanne étant un être humain, elle ne fut pas capable d’entendre les ultrasons de la chauve-souris dirigés sur son pokémon, mais celui-ci semblait réellement souffrir. À tel point que son attaque « jet-pierres » dévia et lui retomba dessus. Tarinor s’effondra sous une pile de rochers, incapable de se relever.
– Tarinor !! s’écria Roxanne, affolée par l’état lamentable de son pokémon, vaincu par un simple Nosferapti.
À sa droite se jouait un combat un peu moins serré. En deux coups de poing de Makuhita, le Nosferapti de Rosh alla s’écraser contre un arbre avec fracas. Bastien pensa qu’il allait pouvoir aider Sofian dans son combat, mais c’était sans compter le Nosferapti de Stephen qui revint à la charge avec plus de hargne que son ancien adversaire, laissant ainsi leur chef Charlie s’occuper de Sofian seulement.
Le combat aquatique qui se déroulait dans le lac était des plus déchaînés. La capacité « peau dure » de Carvanha donnait du fil à retordre au pauvre petit crabe dont les dégâts physiques étaient multipliés par deux à chaque coup porté contre son corps.
– Écrapince, « force-poigne » !
Le petit crabe sauta hors de l’eau, la pince en avant, afin de retomber brutalement contre le poisson. Mais sous les ordres de Charlie, Carvanha immergea dans l’eau et Écrapince fouetta une petite vague.
– « Frénésie » ! rugit Charlie.
Écrapince fut projeté à quelques mètres au-dessus de la surface du lac par une attaque sous-marine de Carvanha, qui comptait bien ne pas laisser son adversaire en reste. Retombant sous la surface de l’eau, Écrapince reçut une multitude de coups de crâne qui le projeta contre une surface en métal immergée dans le lac.
– Vous feriez mieux d’abandonner cette lutte vaine ! conseilla Charlie. Vous savez de quoi nous sommes capables ! Donnez-nous simplement ce paquet ! Vous voyez bien que vous n’êtes plus assez nombreux pour nous battre !
– Hors de question ! s’emporta Timmy.
Il frappa violemment les parties génitales de Rosh à l’aide de son coude et put enfin se libérer de son emprise.
– Tarsal, vient nous aider !
Le petit pokémon psy fit son apparition aux côté de Makuhita afin de l’aider à combattre les deux Nosferapti. Les attaques physiques de Makuhita combinées aux attaques psychiques de Tarsal eurent raisons des deux chauves-souris qui s’écrasèrent aux pieds de leurs maîtres respectifs.
– Génial ! se réjouit Sofian. Écrapince, à nous de jouer ! Montrons-leur, nous aussi, de quoi nous sommes capables ! Écrapince, plonge !
Le crabe orange évita les crocs de son adversaire et disparut sous le lac. « Mettre l’adversaire dans une position de difficulté afin qu’il ne puisse pas éviter l’attaque de quelque façon que ce soit, même avec l’aide de son maître pour le conseiller », se répétait Sofian depuis le début du match.
– Et maintenant, « force-poigne » par en-dessous ! ordonna-t-il.
Complètement immergé dans l’eau, Écrapince pouvait attaquer de n’importe quel endroit, ni Carvanha, ni même Charlie, savait de quel côté il allait attaquer. Écrapince sortit alors de l’eau dans le dos de Carvanha et lui asséna un coup de pince violent. Le poisson fut projeté hors du lac et retomba sur le sol de la plaine, mal en point.
– Vous disiez, Team Aqua ? nargua Sofian qui avait gagné son match.
– Yeah !! s’exclama Timmy en se tournant vers son ami qui avait vaincu le dernier membre de la Team Aqua.
Charlie serra les points, fulminant de colère.
– Rosh ! Stephen ! Montrons-leur la puissance de la Team Aqua ! hurla-t-il, enragé. Attrapez le gamin !
Les deux sbires se déplacèrent à une vitesse telle que Timmy n’eut pas le temps de comprendre ce qu’il se passait ; trois secondes plus tard, il était plongé de force sous la surface du lac, maintenu immergé par Stephen et Rosh.
– Je ne sais pas combien de temps votre ami peut retenir sa respiration, mais j’espère pour vous qu’il la tiendra pendant votre temps de réflexion qui vous amènera à nous donner ce paquet ! menaça Charlie en jetant son pokémon dans l’eau du lac afin de le préparer à combattre à nouveau. C’est quitte ou double : le paquet ou la vie de votre pote !
Ils étaient pris au piège.


Hélène retint son souffle avec horreur. Rien ne s’était passé comme prévu : Dan était toujours évanoui, seuls les pokémons de Bastien, de Timmy et de Sofian résistaient toujours, mais sacrément affaiblis, face à une Team Aqua qui paraissait imbattable et qui venait de jouer leur dernière carte : Timmy ne pouvait retenir sa respiration sous l’eau pendant plus d’une minute, et il allait falloir capituler très vite. Mais Sofian paraissait déterminé à ne pas se laisser faire.
– Sofian, ne fais pas l’imbécile ! s’exclama Roxanne.
– On s’est bien défendu, mais nous n’avons plus le choix ! argumenta Bastien. Ne risquons pas nos vies pour un simple colis !
Sofian serra les poings, déchiré par la vue de son meilleur ami luttant pour garder sa respiration tout en essayant de sortir la tête de l’eau, et la volonté d’enfin gagner un duel contre leurs ennemis. Mais le temps filait et les mouvements de Timmy se faisaient de moins en moins puissants. Sofian dû se rendre à l’évidence, il fallait céder. Il fourra sa main dans le sac à dos de Timmy et en sortit le petit paquet emballé, destiné au Capitaine Poupe, mais qu’il allait malgré lui offrir à la Team Aqua.
C’est alors que Timmy cessa de bouger. Alors qu’il tendait le bras vers Charlie afin de lui transmettre le paquet, son cœur chuta dans sa poitrine. Timmy ne bougeait plus. Autour de lui, Rosh et Stephen semblaient même blafard, choqué par ce qu’ils voyaient dans le lac. Non, c’était impossible… Timmy ne pouvait pas…
La surface de l’eau commença à frémir. Tout d’un coup, sans crier gare, les deux sbires furent projetés en arrière par la force de deux jets d’eau et retombèrent lourdement au sol de la plaine dans des cris de douleurs. Timmy se releva difficilement, toussotant bruyamment en ayant du mal à reprendre sa respiration. Derrière lui émergèrent deux Gobou exactement identiques.
– Qu’est-ce que… ??
Charlie regardait autour de lui afin de comprendre d’où provenaient les nouveaux pokémons. Sofian échangea un regard perplexe avec Roxanne et Bastien, tous aussi perdus que lui.
– Mais d’où sortent ces Gobou ?? hurla Charlie de rage.
– Gobou, « pistolet à eau » sur Carvanha ! ordonna une voix derrière eux.
– Métamorph, fais de même !
Tous firent volte-face pour voir arriver deux autres adolescents depuis un lointain puits : voilà donc la raison pour laquelle Flora et Charles étaient restés en retrait !
Les deux Gobou similaires envoyèrent à l’unisson leur attaque aquatique vers le poisson qui réagit agilement malgré la fatigue de ses précédents combats, qu’il ne semblait même plus éprouver. D’un coup de queue, Carvanha envoya une après l’autre les attaques « pistolet à eau » contre Tarsal et Écrapince qui s’écroulèrent, pris par surprise.
– Vous êtes donc plus fourbes que nous… grommela Charlie dans sa barbe, au bord de la crise de nerf. Carvanha, fais-leur comprendre qu’ils n’ont aucune chance contre nous, peu importe leur nombre !
D’un coup de mâchoire, Carvanha eut la peau d’un des Gobou, tandis que le second succomba à une charge puissante. Chutant aux pieds de leur maître, le Gobou de Flora s’écroula sous la douleur alors que le second se métamorphosait en une espèce de vieux chewing-gum rose. Carvanha retomba à son tour au pied de son maître, sur la plaine, éreinté.

*
– Moi qui ai l’habitude d’être un assez fin observateur, je n’arrive pas à comprendre… avoua James en se laissant retomber contre le rocher, maintenant que les regards s’étaient tournés vers l’endroit de leur cachette.
– Toi, observateur ? Laisse-moi rire ! railla Jessie. Tu ne serais même pas fichu de repérer un Wailord dans une horde de Remoraid !
– Ah parce que toi, tu as compris ce qu’il vient de se passer peut-être ?
– Ben bien sûr ! C’est très simple : la fille et le mioche étaient cachés et… leurs pokémons sont apparus… dans l’eau… mais ils étaient quand même loin du lac et ils ne s’en sont pas approchés… Attends, je réfléchis…
James leva les yeux au ciel, épuisé par la mauvaise foi de son acolyte.
– Mais c’est le puits, enfin ! intervint Miaouss en leur montrant le paysage. L’eau qui se trouve dans le puits provient tout simplement du lac qui se trouve juste à côté. Les gosses ont donc envoyés leurs pokémons dans le puits, les pokémons ont nagé jusque l’endroit où se déroulait le combat et ni vu ni connu, je t’embrouille !
James et Jessie mirent un certain temps pour digérer le plan ingénieux des enfants qu’ils détestaient tant.
– Je crois que ces gosses vont nous poser beaucoup de soucis si on ne met pas de la distance entre eux et nous…

*
– Il semble qu’il ne vous reste plus beaucoup de pokémons pour vous défendre ! ricana Charlie.
– Et vous n’avez plus aucun moyen de pression contre nous ! répliqua Sofian.
La journée touchait à sa fin ; le soleil allait bientôt disparaître à l’horizon. Flora avait tiré Timmy vers elle et, en compagnie de Charles, s’était retirée à l’écart, à l’endroit où se trouvaient Hélène et le corps de Dan, afin d’essayer de calmer son jeune ami en proie à une de ses crises de panique habituelles.
Il ne restait en effet plus que Makuhita face à un Carvanha épuisé. Sofian pensa envoyer Poussifeu à l’aide mais il craignait que son désavantage de type et son précédent combat contre Balignon ne lui soit fatal trop vite, sans qu’il ait pu aider. Le faire souffrir pour peu de résultat était impensable. Mais en même temps, il fallait abattre toutes les cartes qu’ils avaient en leur possession.
Bastien fit un pas en avant et empêcha Sofian de bouger d’un simple signe de la main.
– Il est temps pour moi de montrer ce qu’est la véritable puissance d’un champion d’arène, annonça Bastien d’une voix calme en retirant consciencieusement sa chemise qu’il plia avec délicatesse avant de la donner à Roxanne.
Les rayons du soleil couchant se reflétèrent sur les muscles saillants des pectoraux et de la rangée d’abdominaux bien formés de Bastien. Devant lui, Makuhita se posta en position d’attaque en rentrant son gros ventre de sumo. Charlie déglutit en découvrant la carrure de son dernier adversaire, mais ses sbires le rejoignirent après s’être remis de leur chute et il reprit confiance en lui.
– De quel droit osez-vous vous inviter sur les îles Myokara sans y être les bienvenus ? questionna Bastien d’une voix trop calme, à tel point que Sofian se sentit lui-même menacé. De quel droit osez-vous les mettre à feu et à sang ? Il est temps pour moi de défendre mon île et de protéger mes habitants, que vous avez déjà fait beaucoup souffrir ! Makhuita, « cogne » !
Le petit pokémon aux airs chinois frappa de son poing avec brutalité son poisson d’adversaire qui s’envola dans le lac. Carvanha réapparut à la surface, nageant à nouveau avec énergie, comme revigoré.
– L’eau l’aiderait donc à reprendre des forces… remarqua Bastien.
– Je constate que tu as enfin compris mon stratagème, grogna Charlie, un petit sourire en coin.
– Ça ne m’empêchera pas de te vaincre, répliqua le champion avec assurance. Makuhita, faisons un peu de sport !
Bastien arracha une planche de bois du chapiteau qui se trouvait près d’eux — le chapiteau s’écroula enfin — et la lança sur la rive du lac, aux pieds de Makuhita qui bondit dessus.
– Surfe vers Carvanha et attaque « cyclone » ! ordonna Bastien.
Makuhita avança avec agilité sur le lac en tenant en équilibre sur sa planche de surf improvisée et s’arrêta à quelques centimètres du poisson, avant de positionner ses bras devant lui. Une étrange bourrasque de vent apparut de nulle part entre Makuhita et Carvanha et fit s’envoler ce-dernier vers la terre ferme. Privée de son eau, Carvanha s’écroula de fatigue.
– Incroyable… murmura Sofian pour lui-même.
– Sofian va avoir beaucoup de mal à le battre, commenta Flora, dont les yeux s’étaient à nouveau illuminés d’admiration pour le beau champion.
– Nous ne sommes pas en reste ! Carvanha, « pistolet à eau » !
Le jet d’eau que le pokémon de Charlie envoya frappa brutalement le torse de Makuhita qui perdit l’équilibre et tomba à l’eau, son poids l’entraînement vers le fond.
– Makuhita ! s’écrièrent en chœur le groupe d’amis.
La Team Aqua éclata de rire. Cependant, une étrange lumière s’empara des profondeurs du lac et fit scintiller les gouttelettes d’eau d’une magnifique couleur blanche éclatante.
– Qu’est-ce qu’il se passe ? s’emporta Charlie, hors de lui face à ce nouveau changement de situation.
– Je rêve ou… ? s’exclama Roxanne.
– Makuhita évolue ! s’écria Timmy en reconnaissant le phénomène.


Lorsque la lumière éclatante s’évanouit, les vagues se soulevèrent afin de laisser découvrir… une gigantesque pièce de métal de forme cylindrique. Il fallut quelques secondes à Sofian pour reconnaître la forme d’un sous-marin volant, munit de deux mains de chaque côté.
– Attendez, qu’est-ce que c’est que ça ?? s’exclama Hélène, aussi perdue que le reste du groupe.
Sous la pression des deux mains, le sous-marin fut écrasé dans le sens de sa largeur, ne ressemblant plus qu’à une cannette de soda usagée géante, et s’envola dans les cieux avant de s’écraser derrière le puits dans un fracas horrifiant. Le pokémon qui venait de détruire un sous-marin complet en un mouvement de muscle apparut, ses énormes jambes dans les vagues, son corps de sumo de plus de deux mètres de haut et ses yeux plissés en un regard dangereux menaçant quiconque se trouvait sur son chemin.
– Hariyama ! s’exclama Bastien, fier de son pokémon.
– Mais quelle brute sanguinaire ! commenta Flora.
– Tu dis ça comme si tu étais émerveillée ! fit remarquer Hélène.
– Je suis émerveillée par Bastien !
– Ça, c’est du champion d’arène ! félicita Roxanne, qui paraissait un peu jalouse d’un tel pokémon.
Sofian déglutit en constatant que l’équipe de Bastien aussi avait bien évoluée depuis leur dernière rencontre. Et dire qu’il allait lui falloir combattre un pokémon qui terrassait rien qu’à la vue trois des plus dangereux malfrats de la région. Impressionnés, et surtout terrifiés, par la stature de Hariyama, Charlie, Rosh et Stephen s’étaient retrouvés entourés par leurs adversaires. Au loin, des aboiements indiquèrent l’arrivée de l’agent Jenny, de son Caninos, et de ses troupes.
– Battons en retraite ! ordonna Charlie, le visage défiguré par la haine.
– « Grincements » ! s’écrièrent en chœur Rosh et Charlie.
Les Nosferapti qu’ils tenaient dans leurs bras ouvrirent la bouche et le son qui s’en dégagea, tel une centaine de craies crissant sur un tableau d’école, était tellement insupportable pour les oreilles de Sofian qu’il se plaqua les mains dessus et ferma les yeux de douleurs. Lorsque l’attaque grincement des Nosferapti s’atténua, la Team Aqua avait déguerpi et la police les rejoignait.
– Ils se sont enfui vers le sud ! criait l’agent Jenny. Ne les laissez pas filer !
Sofian se laissa tomber au sol, épuisé.


La nuit était tombée depuis longtemps déjà. Les six adolescents s’étaient éloignés des champions d’arène, plongés dans une conversation animée avec l’agent Jenny qui prenait des notes, afin de fêter leur victoire. Ils n’avaient peut-être pas réussi à arrêter les membres de la Team Aqua, mais ils avaient tout de même empêché le colis du Capitaine Poupe de tomber dans leurs mains. Mieux encore : ils leur avaient enfin mis une bonne correction qu’ils n’étaient pas près d’oublier. Alors que les adolescents discutaient joyeusement de la carrure du nouveau pokémon de Bastien, Dan ouvrit enfin les yeux.
– Que s’est-il passé ? demanda-t-il, sonné, et la voix rauque. La Team Aqua ! Elle n’est pas venue ?
– C’est une blague ? s’étonna Charles.
– Pendant que tu dormais, j’ai juste failli être assassiné par la Team Aqua, rien de plus, expliqua Timmy en éclatant de rire.
– QUOI ?!
Et les cinq amis lui racontèrent les évènements de l’après-midi.
– Entre la Team Rocket et la Team Aqua en fuite, disait Roxanne en les rejoignant en compagnie de Bastien, il me semble qu’il y a beaucoup de fugitifs à Myokara !
– Crois-moi, je n’ai jamais vu autant d’actions se dérouler sur mon île depuis que j’en suis le champion. Vous devriez venir en hiver, c’est très calme en cette période de fêtes.
– Nous sommes vraiment désolé, Bastien. Mais ne t’en fais pas, une fois qu’on sera parti, tu n’auras plus aucun problème ! assura Timmy.
– Ouais, c’est un peu comme si nous étions un aimant à problèmes, ajouta Flora.
Et le groupe éclata à nouveau de rire, mais d’un rire libérateur, celui qui les aidait à évacuer la pression et la nervosité qu’ils avaient accumulées depuis deux semaines.
– Les enfants, j’ai contacté le reste de vos camarades et professeurs de l’École Pokémon, annonça Roxanne, et ils sont bien au chaud à l’hôtel du centre pokémon du Village Myokara.
– ’Y en qui se font plaisir… marmonna Flora, aigrie.
– Tu peux bien parler, tu n’as quasi rien fait dans ce match ! répliqua Timmy.
– Je te demande pardon ?? s’exclama Flora, outrée. Et te sauver la vie, c’était pas assez ?
– La police est à la recherche de tous les malfrats que vous avez apportés sur l’île, reprit Roxanne en faisant un clin d’œil à Sofian, Flora et Timmy. Nous n’avons plus rien à faire ici, à présent. Hélène, Charles, Dan, il est temps de rentrer à Mérouville.
Les trois étudiants se levèrent difficilement, les membres engourdis.
– Sofian, au plaisir de se revoir, dit Roxanne en lui serrant la main. J’ai constaté que tu t’étais bien amélioré depuis notre match. Si un jour tu repasses par Mérouville, sache que mon arène est toujours ouverte.
– Ne t’inquiète pas, je compte bien venir t’écraser une seconde fois ! promit le jeune dresseur.
Imitant ses amis, Hélène salua Flora et Timmy avant d’arriver à Sofian.
– A la prochaine, Sofian ! lui dit-elle, mal à l’aise. Finalement, on peut dire que j’ai gagné notre combat, donc préviens ton père que je vais bientôt venir prendre ma revanche.
– Si on n’avait pas été interrompu, mon Poussifeu aurait éclaté ton Balignon en un claquement de doigt ! se défendit Sofian.
– Mais oui c’est cela ! répondit Hélène, amusée. Avoue juste que…
– Okay, c’était une égalité ! intervint Flora, harassée.
Hélène et Sofian lui lancèrent un regard noir. Ils hésitèrent un instant, puis finirent par s’enlacer. Longuement.
– Bon, c’est bon, vous n’allez pas mourir demain, vous allez vous revoir ! s’empressa d’ajouter Flora en tirant Sofian vers lui.
Un peu gênée, Hélène hésita un instant, mais elle ne put résister et lui fit la bise, et son sourire s’étira. Sofian ne pipa mot et se contenta de lui sourire.
– Allez, au revoir Hélène ! termina Flora, comme pour clore la séance d’adieu.
Hélène, fit un dernier signe de main au groupe et se retira dans la forêt en compagnie de Charles, Dan et Roxanne, derrière le Métamorph de Charles transformé en Salamèche afin d’éclairer les environs.
– Tu ne serais pas un tantinet jalouse ? demanda Timmy alors qu’Hélène faisait des signes de loin à Sofian.
– Moi ?! N’importe quoi ! se défendit Flora. Hélène et moi sommes très bonnes amies, elle est très gentille, intelligente,…
– Sympa, cette fille, lança Sofian.
– Ah bon ? Elle ne m’inspire pas confiance, personnellement ! se contredit Flora en faisant la grimace.
Timmy leva les yeux au ciel en éclatant de rire intérieurement.
Derrière eux, l’énorme masse de Hariyama disparut dans sa pokéball, laissant un gros vide dans la plaine, et Sofian se souvint alors de la présence du champion du Village Myokara.
– Bastien ! s’exclama-t-il soudainement.
– Sofian ?
Sofian s’approcha de lui, le regard décidé, et se lança :
– Je te défie pour un match revanche !
– Avec plaisir, répondit Bastien avec un sourire.
– Je suis étonnée, avoua Flora à Timmy. Après le spectacle que nous a offert Hariyama, ça relève de l’inconscience de défier un champion aussi parfait que Bastien.
– C’est vrai Sofian, tu es sûr que tu es prêt ? s’inquiéta Timmy.
– Je pourrais m’entraîner intensivement toute l’année, je ne serais jamais assez prêt à vaincre un champion d’arène de la trempe de Bastien. Autant m’en tenir aux techniques que j’ai mises au point et à l’improvisation, ma marque de fabrique. Et puis, si c’était trop facile, où serait le fun ?
– En revanche, il serait préférable d’attendre demain matin, conseilla Bastien.
– On peut toujours se servir du chapiteau de…
Timmy se tourna vers l’endroit où était censé se trouver le chapiteau de l’Ecole Pokémon, détruit par le combat contre la Team Aqua, mais la toile avait disparu.
– Pas de sacs de couchage ? demanda Bastien.
– Ils sont à notre propre campement, de l’autre côté de l’île… se souvint Sofian.
– Bon, et bien, il ne reste qu’une solution : dormir à la belle étoile ! proposa Bastien. Il fait tellement beau !
– C’est une blague ? s’emporta Flora, qui n’était pas habituée à manquer de confort.
Bastien retira à nouveau sa chemise et s’allongea au sol.
– Tout compte fait, l’idée n’est pas si mal ! rectifia la jeune fille et fondant de plaisir.
– Et tu étais jalouse d’Hélène… chuchota Timmy.

Cette nuit-là, alors que tout était calme et paisible, et que seuls les hululements de Hoothoot se faisaient entendre dans la plaine, Sofian avait du mal à trouver le sommeil. Était-ce la fatigue de cette longue journée à lutter contre la Team Aqua ? Ou l’excitation de son futur match avec Bastien ? Ou bien alors, cela était dû à son anxiété qui ne l’avait quitté depuis le jour où Békipan s’en était allé, à la recherche d’un corps à jamais introuvable ? Quelque part dans le ciel, un gros oiseau traversa la plaine et le cœur du jeune garçon se serra dans sa poitrine. Il avait beau avoir enfin vaincu la Team Aqua et les avoir remis à leur place, les souvenirs des conséquences de ce naufrage n’avaient pas pour autant disparus. Finalement, tout ne s’était pas encore réglé.


À suivre dans : « La Grotte Granite »