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Pokemonis T.1 : La Pokeball perdue de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 29/10/2014 à 09:00
» Dernière mise à jour le 12/10/2016 à 18:07

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Action   Aventure   Présence de Pokémon inventés   Région inventée

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Chapitre 8 : Une Paxen à la maison
Tranchodon


- Mon colonel, nous arriverons à Ferduval dans une dizaine de minutes.

J'acquiesçai à mon second, le commandant Pandarbare. Je lui avais dit que cette visite à Ferduval n'avait rien d'officielle, mais il avait néanmoins tenu à m'accompagner. Pandarbare, avec son air patibulaire et son éternelle brindille d'herbe entre les lèvres, était un second loyal. Un peu trop étouffant parfois. Il se souciait énormément de ma sécurité, ce qui était touchant, car j'étais bien plus à même de me défendre moi-même que lui.

Car j'étais Tranchodon. Le colonel Tranchodon. Le seul et l'unique, car j'étais chromatique. Ceux de ma race avaient d'ordinaire les écailles jaunes. Pas moi. Je les avais d'un gris sombre. J'étais différent. J'étais unique. De part ma naissance, je m'étais déjà élevé au dessus des autres. Et la couleur de mon corps n'était pas mon seul atout. J'étais fort. Terriblement fort et sauvage, en plus d'être bien plus intelligent que la plupart des Pokemon. C'était pour cela que j'étais le colonel le plus important de l'Armée Impériale. J'étais le second du Général Légionair, le commandant suprême.

Après des mois passés à traquer ces rebelles Paxen, je me rendais aujourd'hui, à bord d'un vaisseau de l'Empire, dans une cité relativement isolée de la périphérie impériale, Ferduval. Elle n'était pas riche, et n'avait aucune importance particulière, mais il était bien que de temps en temps, les Pokemon qui habitaient dans ce genre de trous paumés reçoivent la visite d'un émissaire impérial, pour leur rappeler qui dirigeait leurs vies. Les Pokemon de la périphérie avaient tendance à oublier l'allégeance qu'ils devaient à Sa Majesté l'Empereur. J'étais là pour le leur rappeler.

Le choix de la cité n'était pas un pur hasard cependant. Une de mes connaissances habitait là-bas. Un civil. Je n'avais que peu de contact parmi les Pokemon du civil, mais ils pouvaient servir à l'occasion, donc je m'efforçais de les entretenir. Ce Pokemon se nommait Frelali. Je le connaissais depuis mon enfance. Son père et le mien étaient camarades dans l'Armée Impériale. Et puis, nous avions la même idéologie concernant les humains : un esclavage pur et dur. Enfin, moi, j'étais plus pour l'éradication, mais hélas, beaucoup de Pokemon ne savaient pas vivre sans les humains, comme Frelali. Les imbéciles...

Frelali m'avait invité à séjourner chez lui. Si j'appréciais cette crapule, je savais qu'il essaierai de m'avoir au piston pour telle ou telle chose. Ça ne me dérangeait pas, dans la mesure où je lui demandais parfois des services, moi aussi. Mais il ne faudrait pas que Frelali s'habitue trop à recevoir mon attention. Je le respectais en tant que Pokemon, mais je restais supérieur. Il n'y en avait qu'un seul que je considérais comme mon supérieur, c'était le Général Légionair. Et Sa Majesté l'Empereur, bien sûr, quoi que je n'ai jamais eu l'honneur de la rencontrer.

Mais ça allait sûrement changer quand je lui livrerai les Paxen sur un plateau. Nous étions proches de découvrir leur base secrète, et alors, ça en serait fini de ces hérétiques qui ont osé assassiner le Seigneur Protecteur Xanthos. Tous cette racaille d'humains qui ont eu l'arrogance de vouloir s'élever au dessus de leur condition, et surtout, ces traîtres de Pokemon qui les soutenaient. Vouloir se battre pour les humains contre Sa Majesté l'Empereur... Cela me dépassait. C'était la pire trahison qui soit. Ces Pokemon traitres à leur race subiront la mort la plus douloureuse que j'aurai pu inventer.

Si j'avais été le Seigneur Protecteur Xanthos, j'aurai totalement annihilé la race humaine, la faisant disparaître pour toujours. Nous puissants Pokemon, nous n'avons pas besoin d'eux, pas même comme esclaves. Nous sommes aptes à nous débrouiller seuls. Je considérais que prendre un esclave humain était une marque de faiblesse. Jamais je n'en ai pris un, et jamais je n'en prendrai. L'odeur des humains m'était insupportable. Ce sont des vermines, des nuisibles qu'il convevnait d'éradiquer !

Mais je n'étais pas le Seigneur Xanthos. Il avait décidé d'asservir les humains au lieu de les éliminer totalement. C'était ainsi. Je n'avais pas à remettre en cause sa décision. Mais je ne perdais jamais une occasion de maltraiter ou de tuer des humains quand je le pouvais. Rien que pour les éventrer avec mes griffes, j'achèterai un à un tous les esclaves que je pourrais !
Le vaisseau impérial commença sa descente vers la cité. Les pilotes, deux Capidextre, utilisant aussi bien leurs deux queues que leurs deux mains, le firent se poser dans la petite cour devant l'hôtel de ville. Je regardai par la fenêtre. Par Arceus, quelle ville pourrie ! Les Pokemon qui y vivaient étaient-ils vraiment des Pokemon civilisés de l'Empire, ou bien ces Pokemon sauvages à moitié écervelés qui continuaient à vivre dans grottes et forêts sans la moindre technologie ?

On m'avait réuni un petit comité d'accueil. Si petit que j'aurai pu prendre ça pour une insulte si je n'étais pas au courant de l'aspect très rustique de cette soi-disant cité. Le commandant Pandarbare descendit avant moi, sans doute pour s'assurer qu'il n'y avait aucun danger. Chose inutile, mais je le laissai faire. Tout était bon pour indiquer à ces pouilleux combien j'étais un Pokemon important. Il y avait deux rangés de soldats qui se mirent au garde à vous dès que je posai le pied par terre. Je repérai Frelali devant, en compagnie d'un Pokemon grand et fin, avec une allure reptilienne et d'énormes yeux écarquillés. Sans nul doute le maire. Ils vinrent à ma rencontre, et le maire s'inclina obséquieusement devant moi.

- Cher colonel Tranchodon, vous honorez notre modeste cité de votre visite. Je suis le maire de Ferduval, Cresuptil. J'aurai le grand plaisir d'être votre hôte tout au long de votre séjour.

Il me fallu que quelque secondes seulement pour mépriser ce Pokemon. Sa voix sifflante et dégoulinante me l'indiquait comme étant un lèche-botte. Sa façon de faire tourner ses petites mains entre elle indiquait qu'il était cupide. Ses yeux fuyants indiquaient sa lâcheté. Et enfin, il sentait l'humain, une odeur que je détestais par-dessus tout. Typiquement le genre de Pokemon qui me révulsait : un faible dépendant des humains ne songeant qu'à sa richesse personnelle.

- Votre voyage jusqu'à la capitale Axendria a du être long, poursuivit Cresuptil. Veuillez accepter ces quelques rafraichissements.

Il claqua des doigts, et un humain émergea de derrière lui avec une coupe à la main. Je plissai les yeux. Ce misérable osait m'accueillir avec un de ces vermines d'esclaves ?! Au lieu de prendre la coupe que me tendit le jeune humain, j'ouvris grand ma gueule et la refermai sur sa tête. D'un coup sec, je l'arrachai au reste de son corps. Je ne laissa pas retomber le cadavre sans tête. Je le tint devant moi pour boire tout le sang qui sortait tel un geyser du cou tranché. Si je n'aimais pas les humains ni leur odeur, j'aimais bien le goût de leur sang. Mon geste laissa l'assemblée sans voix.

- Un gouteux rafraichissement, acquiesçai-je en laissant retomber la carcasse humaine. Je vous remercie de votre hospitalité touchante, monsieur le maire.

Cresuptil semblait être trop effaré pour parler. Frelali prit le relai.

- C'est bon de vous revoir, mon vieil ami. Mais il serai bon, durant votre séjour ici, de ne pas trop abuser des... rafraichissements mis à votre disposition. L'approvisionnement risque d'être... couteux.

Je haussai les épaules. Je me souciais nullement de ce qu'il advenait des humains. Malgré ça, d'ordinaire, je respectais le droit de propriété, et je ne tuais pas un esclave sans raison. Toutefois, Cresuptil m'avait insulté en m'envoyant cet humain. Se pensait-il si important qu'il était indigne de lui de me donner lui-même ses fameux rafraichissements ? Au moins maintenant, il sait comment je fonctionne. Je laissai ce crétin de Cresuptil derrière tandis que je partai devant avec Frelali et mon second, Pandarbare.

- Comment se déroule la vie dans ce trou paumé loin de tout ? Demandai-je à Frelali. Je me demande comment tu fais pour vivre dans un tel lieu, alors que tu aurai pu avoir un poste au placé à la capitale...

- Trop d'obligations à Axendria, répondit Frelali. Trop de pression, et pas assez de reconnaissance. Alors qu'ici, la vie est un peu pittoresque, je le reconnais, mais je suis considéré comme le Pokemon le plus important de la cité.

- Je préfère être l'égal de Pokemon supérieurs que le supérieur de Pokemon inférieurs, fis-je avec philosophie.

Frelali me fit signe de le suivre jusqu'à l'hôtel de ville, comme si elle lui appartenait. Cresuptil nous suivait, derrière, à une distance de sécurité de moi-même. Je le dévisageai un instant, puis demandais à Frelali :

- Pourquoi ne pas t'être présenté comme maire, depuis tout ce temps ? Pourquoi avoir laissé un tel... Pokemon diriger cette cité ?

Frelali produisit un son abject ressemblant à un rire, et murmura pour ma seule personne :

- Cresuptil ne dirige rien du tout. Il est simplement préoccupé par ses petites affaires de gros sous concernant la vente d'esclave. C'est moi et quelque autres qui contrôlons Ferduval. Et l'avantage de ceci, c'est que c'est Cresuptil qui prend quand quelque chose tourne mal, jamais nous. C'est un crétin, mais un crétin utile.

- Vous dites, mon cher Frelali ? S'enquit Cresuptil qui n'avait rien entendu.

- Je faisais remarquer au colonel combien notre cité est bien gérée grâce à vos bons offices, mon cher monsieur le maire, répondit aimablement Frelali.

- Oh, oui en effet, acquiesça Cresuptil en se gonflant d'importance. Je serai ravi que le colonel vienne lui-même constater du bon fonctionnement de Ferduval, en accord avec toutes les lois de notre glorieux Empereur.

Comme il commençait à s'approcher un peu trop près de moi, mon fidèle commandant Pandarbare le fit reculer violement.

- Nul ne s'approche trop près du colonel, gronda-t-il.

Je retins un sourire. Cresuptil ne représenterai jamais un quelconque danger pour moi, mais Pandarbare avait bien vu que ce Pokemon me répugnait. À lui aussi sans doute. Pandarbare ne respectait que la force et le devoir. Deux choses qui semblaient faire énormément défaut à Cresuptil.

- B-bien sûr, balbutia le maire. Je n-ne voulais pas o-offenser le...

- Quelles nouvelles en provenance de l'armée, colonel ? Me demanda Frelali en coupant les balbutiements pathétiques de Cresuptil. Ce conflit contre les Paxen ?

- Ils frappent et retournent se cacher, la queue entre les jambes, dit-je. Des lâches, tous autant qu'ils sont. Ils ont pris une certaine assurance depuis leur victoire contre le Seigneur Protecteur Xanthos, il y a deux ans. Leurs raids et leurs actes terroristes ont augmenté. Mais je sais qu'ils sont peu nombreux. J'ai déniché plusieurs de leurs planques et fait parler nombre d'entre eux. Leur base secrète ne restera pas éternellement cachée. Leurs jours sont comptés.

- C'est bon à savoir.

- Et toi, Frelali ? Quoi de neuf ? Tu ne t'es toujours pas déniché une compagne ?

Frelali fit bouger ses mandibules rapidement, comme quand il souriait.

- En fait, ça ne saurait tarder, mon ami. Je comptais justement vous inviter à dîner chez ma future fiancée, ce soir...


***

Ludmila


Victoire !

Enfin, j'avais réussi. Jamais, de toute ma vie, je ne me suis sentie aussi victorieuse, pas même lorsque j'ai vaincu Xanthos, le tyran qui régnait depuis cinq cent ans sur l'Empire Pokemonis. Je suis enfin parvenue, après deux heures de combat acharné, à remettre le rideau du salon en place après l'avoir lavé. Une tâche qui, selon un Kerel désespéré, aurait du me prendre dix minutes à peine, mais qu'il aille au diable, je ne m'étais jamais sentie aussi heureuse !

Je savais que mon cas était désespéré en tâches ménagères. Au moins ne m'étais-je pas donnée en spectacle auprès de Cielali et sa famille, car Kerel trouvait toujours un moyen de me faire travailler loin d'eux, ou de repasser après mon travail bordelique avant de le montrer aux Pokemon. En cela, je lui étais reconnaissante, bien qu'il m'était toujours aussi méprisable pour son allégeance envers les Pokemon. Il m'aidait de bonne grâce car il devait penser que j'allais progresser. Mais le pauvre se faisait des chansons. Ce soir, ce serait terminé. Ce soir, Kerel m'amènerait jusqu'à Dame Sol, pour que je puisse enfin accomplir ma mission et quitter cette ville à Pokemon.

J'ai passé la nuit dernière à m'interroger si je devais éliminer Kerel et ses maîtres Pokemon avant de filer. Ma fuite leur mettra forcément la puce à l'oreille, et si jamais ils contactaient les services impériaux en leur donnant ma description et mon nom, l'Empire sera forcément au courant de la venue des Paxen ici, car l'Armée Impériale me connaissait bien. Kerel pourrait même leur parler de Dame Sol et de ma demande de la rencontrer, et alors ça mettrait cette fois la vie de la vieille femme en danger. Pour couvrir mes traces, je devrais les assassiner, Kerel, Cielali et ses parents, et faire passer ça pour un accident.

Mais j'avais décidé de ne pas le faire. La famille de Cielali avait beau être des esclavagistes d'humains, ils semblaient bien les traiter, du moins bien mieux que la plupart des Pokemon. Quant à Kerel, il était humain. Un humain adorateur de Pokemon, certes, mais j'en était venu à la conclusion que ce n'était pas vraiment sa faute. Il avait grandi en apprenant à servir les Pokemon. Pas moi. Il ne méritait pas de mourir. Qu'il continue donc à vivre sa vie de servitude si ça lui chantait.

Dans l'autre pièce, les éclats de voix indiquaient que Cielali se disputait encore avec son père. Ces Pokemon n'avaient décidément aucune gène ! Ils parlaient de leur vie privé à voix haute comme ça... Sans doute parce qu'ils ne se souciaient pas que Kerel et moi les entendent. Remarque, moi, quand je parlais avec quelqu'un d'une affaire personnelle, je ne me souciais pas que les fourmis m'entendent. Ça devait être pareil...

Kerel vint vite me retrouver, comme à chaque fois que ça dégénérait du coté de ses maîtres. S'il restait, disait-il, il ne pourrait s'empêcher de défendre sa maîtresse Cielali, hors il n'avait pas le droit d'intervenir contre Noctali. L'ambiance, depuis deux jours, était super glauque dans cette maison. L'euphorie générale de m'avoir gagné avait laissé place à une espèce de tension dans l'air, comme si un orage s'apprêtait à éclater. Je préférais encore voir ces idiots de Pokemon tout joyeux. Kerel lui aussi tirait une tête, ça faisait peur !

- Encore des soucis de mariage ? Demandai-je ironiquement.

- Un peu plus que ça cette fois... Désolé, mais je ne pourrai pas t'amener au ghetto ce soir.

Je fronçai les sourcils.

- Comment ça ? Tu m'avais promis, espèce de fils de Miasmax ! OK, j'ai galéré un peu dans deux trois trucs à faire, mais je me suis bien tenue, mmgrrr !

Il sursauta comme à chaque fois que je grognais. Il semblait se demander si j'étais vraiment humaine, et pas un Pokemon quelconque qui en aurait prit l'apparence.

- Ça n'a rien à voir avec toi. C'est juste qu'on ne pourra pas sortir ce soir, c'est tout. Monsieur Noctali va organiser un dîner important. Il y aura Frelali, le maire Cresuptil, et un haut dignitaire de l'Armée Impériale en visite dans la cité. Jamais autant de Pokemon importants ne sont venus chez nous, et on devra être à fond, ne commettre aucune erreur. Il en va de la réputation de la maison !

Je le sentis mal, ça. Sûr qu'avec trois Pokemon de plus, Kerel ne pourrait pas s'en tirer seul pour le service, mais il était rare que j'arrive à tenir plus d'une assiette à la fois, ou que je ne fasse pas brûler quelque chose.

- Pourquoi diable ce crét... euh, le maire Cresuptil viendrait dîner ici ?

- D'après toi ? Maugréa Kerel. C'est à cause de toi. En te gagnant, ma maîtresse est devenue le Pokemon le plus prisé de la cité. Frelali a accepté l'offre de monsieur Noctali d'épouser maîtresse Cielali. Pour bien montrer son importance, il amène ici ses amis, à savoir le maire et ce haut gradé de l'armée.

- Quel genre de haut gradé ?

- Un colonel. Il est assez célèbre, j'ai entendu dire. Parce qu'il est chromatique, et surtout parce qu'il déteste les humains. Alors par pitié, ne commets aucune erreur !

Je déglutis difficilement. La description de Kerel me semblait assez familière...

- Ce colonel... Ce ne serait pas le colonel Tranchodon, le bras droit du commandant en chef Légionair ?

- Oui, c'est lui. Tu vois donc ce que je veux dire ?

Oui, moi je voyais. Mais Kerel ne voyait absolument pas. Tranchodon était très connu chez les Paxen. Il avait traqué et éliminé beaucoup des nôtres. C'était un boucher. Il n'y avait rien qu'il aimait de plus que d'ouvrir le corps d'un humain et de dévorer ses entrailles. Et surtout, il me connaissait. On s'était déjà rencontré, et j'ai eu de la chance d'en réchapper avec seulement une énorme entaille sur la cuisse gauche.

- Kerel... commençai-je.

J'étais bloquée. Si je me montrais face à Tranchodon, il me reconnaîtrait à la première seconde. Si Cresuptil lui avait parlé de moi, j'étais déjà fichue. Mais non, ça m'étonnerait. Ce vicieux de maire n'irait pas clamer à voix hautes ses petites affaires illégales de trafics d'esclaves à l'Empire. À moins que Tranchodon ne soit déjà au courant, et qu'il ne soit venu exprès ? Mais alors, pourquoi un dîner ? Était-ce un piège ?

- Quoi ? S'impatienta le jeune homme.

Je ne savais plus quoi faire. Jamais je n'aurai imaginé pouvoir rencontrer dans cette cité paumée un Pokemon comme Tranchodon. Si je m'enfuyais avant le repas, ce sera l'aveu de ma culpabilité, et Tranchodon se lancera à mes trousses. Si Tranchodon n'était pas au courant de ma présence ici, le mieux à faire était de passer ce repas en restant cachée. Mais comment faire comprendre ça à Kerel, et surtout à Cielali ? Ce Frelali, s'il espérait m'acquérir en épousant Cielali, espérerait sans nul doute me voir lors du diner.

- Tu vas bien ? S'inquiéta Kerel. Tu es toute blanche ? Si tu commences déjà à stresser, tu vas faire n'importe quoi ce soir. Va te reposer et prépare-toi, je m'occupe du reste.

Je n'avais pas le choix. Je ne pouvais plus que compter sur Kerel. J'allais devoir lui dire. Il ne pourrait pas me trahir. S'il le faisait, Tranchodon ne montrerai aucune pitié envers ceux qui ont accueilli une ennemie de l'Empire, même intentionnellement.

- Kerel, il y a une chose que je dois te dire.

Et je lui dit.


***

Kerel


Je crus d'abord à une blague de fort mauvais goût. Je ne savais jamais à quoi m'attendre avec cette fille. Mais cette terreur dans ses yeux, et la pâleur de son visage me convainquirent qu'elle était sincère. Deux phrases. Deux petites phrases qui chamboulèrent tout mon univers : « En fait, je suis une rebelle Paxen. Tranchodon me connait, et s'il me voit ici... ».

Elle n'avait même pas besoin de terminer sa phrase, car j'imaginais sans mal ce qui pourrait se passer. J'aurai pu douter des propos insensés de Ludmila, mais au fond de moi, je sentais que c'était vrai. Il y avait toujours eu quelque chose de bizarre chez cette fille. Elle était trop indisciplinée, trop inapte aux tâches ménagères, et le récit de son passé était parfois trop obscur. Qu'elle soit un de ces fameux Paxen qui se soulevaient contre l'Empire expliquait pas mal de chose. Mais pas, par tous les diables, ce qu'elle faisait ici !

- Pourquoi... Pourquoi es-tu là ? Demandai-je, la voix rauque.

- Je suis en mission. Je devais m'infiltrer pour rencontrer Dame Sol, et sortir avec elle. Mais j'ai été obligé de me laisser capturer à l'entrée de la cité, et j'ai joué le rôle d'une esclave perdue jusque là.

- Mais... pourquoi veux-tu absolument voir Sol ? Ce n'est qu'une vieille femme un peu folle qui élève les jeunes du ghetto ! Qu'est-ce que les Paxen peuvent bien lui vouloir ?!

- Idiot... Dame Sol est l'une des nôtres. C'était autrefois une Paxen importante.

Sol, une Paxen ? Voilà que ça devenait carrément surnaturel. Je m'assis pour reprendre mon souffle.

- Kerel, écoute... commença Ludmila.

- Non, toi écoute ! Explosai-je. Tu ne te rends pas compte de ce que tu as fait ? Tu as mis toute notre maison en danger ! Si on te découvre ici, ma maîtresse et sa famille seront considérés comme des traîtres à l'Empire ! Ne pouvais-tu donc pas aller mener ta fichue rébellion ailleurs, et nous laisser tranquille ? Pourquoi à chaque fois impliquez-vous des humains qui n'ont rien demandé dans vos délires ?! POURQUOI ?!

Je me pris la tête entre les mains. Et moi, pourquoi j'avais gagné cette fille, au juste ? Pour apporter la gloire à ma maîtresse ? Et tout ce que je lui aurai apporté, c'était des ennuis jusqu'au cou. Mais je refusais de m'en prendre à moi-même. J'avais Ludmila, la première responsable, devant moi. Et une Paxen, de surcroit ! Ça tombait bien, parce que je détestais les Paxen.

- Tout ça, c'est de ta faute, continuai-je. C'est de ta faute si Crusio est mort. C'est de ta faute si Frelali veut épouser ma maîtresse. C'est de ta faute si on a ce colonel sur le dos. Je devrais... je devrais aller trouver ce Tranchodon et te livrer immédiatement !

Ludmila acquiesça calmement.

- Oui, tu devrais, en bon toutou des Pokemon que tu es. Mais je ne pense pas que tu le feras. Car ta seule récompense pour m'avoir livré sera la mort, et sans doute que ta précieuse famille de Pokemon partagera le même sort.

Bien sûr, elle avait raison. Tranchodon ne nous laissera pas le temps qu'on lui explique comment elle était arrivée là. Il serait même capable de brûler toute la cité. Sa politique militaire était la tolérance zéro envers les Paxen et ceux qui les aidaient.

- Je ne pense pas que Tranchodon soit venu pour moi, poursuivit Ludmila. Il doit encore ignorer que je suis là, et je ne crois pas que Cresuptil ait envie de lui dire. Quant à Frelali, il ne doit pas connaître mon nom. J'ai encore une chance de passer discrète le temps que le colonel ne s'en aille.

- Et comment, je te prie ? Personne ne peut imaginer que tu manqueras ce repas avec de pareils invités. Tout le monde voudra te voir.

- Eh bien invente une foutue excuse ! Tu t'y connais mieux que moi dans les relations maîtres-esclaves. Dis que je suis malade ou...

- Je... je ne peux rien faire... Tu ne comprends pas ? C'est maîtresse Cielali qui est chargée de nous. On ne pourra rien faire sans son aval. Il faut que... oui, que j'aille lui parler. Lui dire la vérité.

Je ne savais pas encore comment j'allais m'y prendre, mais il n'y avait que maîtresse Cielali pour savoir quoi faire dans cette situation. Et en tant que son esclave, j'avais le devoir permanant de toujours lui dire la vérité, surtout si ça la concernait. Je ne savais pas agir de mon plein gré. Il me fallait des ordres. Maîtresse Cielali déciderai de ce qu'il y avait de mieux à faire.

- Tu prends un risque, me dit Ludmila. Cielali pourrait aller nous balancer, sans prendre conscience du danger.

- Maîtresse Cielali comprend ses pairs bien mieux que toi ou moi, ripostai-je avec aigreur. Comme tu lui appartiens, c'est à elle de décider.

- Je ne lui ai jamais appartenu, contra Ludmila avec colère. Je n'ai jamais appartenu à un seul Pokemon de ma vie. Je suis une humaine libre !

- C'est ça. Va dire ça au colonel Tranchodon. En attendant, tu restes ici, et tu ne bouges surtout pas. Je vais parler à maîtresse Cielali. Et si, par la grâce d'Arceus, on s'en sort, tu as intérêt ensuite à partir le plus loin possible de nous avec tes idées absurdes de rébellion, ou alors je te montre pourquoi on me considère désormais comme le meilleur humain d'arène de la cité !